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"Caricatures" : La liberté de la presse et ses "hypothétiques" contradictions

Publie le dimanche 12 février 2006 par Open-Publishing
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Nous croisons quotidiennement d’énormes difficultés et des contradictions, qui sont des sortes de grands trous de silence ou de mensonges faits à nous-mêmes et à tous.

L’affaire des "Caricatures" participe de ces dossiers "incertains" et complexes que nous nous proposons d’instruire prudemment, et seulement en partie, à charge comme à décharge.

Voici quelques modestes considérations en vrac soumises à votre éminente réflexion politique.

1° La liberté de la presse, petite histoire, champ, triple "source" : 1ère difficulté

La liberté de la Presse apparaît comme un fondamental de nos "démocratie libérales" elle est à ce titre couchée dans nos Constitutions modernes.

Fruit de luttes rudes ou d’arrangements plus aisés dans le temps lointain, moyen et parfois actuel, on lui donnera au pif deux siècles et demi d’âge dans le principe.

La liberté de la presse se définit d’abord dans les faits, concrètement, par rapport à l’omnipuissance ancienne du Pouvoir politique, de l’Etat, de la censure.

En France, tout spécifiquement, elle prend ses marques également vis a vis de la religion en tant que pouvoir voisin, ou parent du politique, par extension elle s’attaque aussi largement au fondement "métaphysique" de la religion, en ce sens historiquement le tabou religieux se trouve levé en France.

En même temps la liberté individuelle de conscience et de religion est, il va de soi, absolument garantie, elle est un inaliénable privé dont la possibilité d’expression publique est aussi garantie, dans certaines limites, larges, fixées par la loi (voie publique, laïcité, liberté d’association, etc.).

De manière générale et pour se situer dans le présent, la liberté de la presse procède nous semble-t-il de trois libertés

-1.1 la liberté collective d’expression politique (caractéristique théorique des régimes démocratiques libéraux)

-1.2 mais aussi la liberté individuelle de pensée et d’expression reconnues fondamentalement à tout être humain (Droits de l’Homme et du citoyen)

[C’est à chacun de nous de voir ce qui l’emporte pour lui en dignité, en essence, en hiérarchie entre l’une et l’autre (Les droits-de-l’hommistes comme on dit placeront la préséance dans les droits de la personne, les autres dans un intérêt supposé plus général).]

-1.3 Comme si déjà cette première difficulté ou contradiction entre deux libertés ne suffisait pas, il y a une troisième source, ou droit constitutif, ou liberté à laquelle peut prétendre se référer et dont peut prétendre procéder la liberté de la presse : Cette liberté principielle est tout simplement la liberté absolue de recherche et d’expression de ce que nous appellerons l’Universel, c’est à dire qu’elle est la liberté de recherche et d’expression de la Vérité, supposément prouvée, démontrable, montrable, relevant exclusivement de la Raison, du rationnel.

Explicitement écrit ou non explicitement écrit dans nos textes fondamentaux, la quête de cet idéal irradie de façon absolue l’ensemble de nos sociétés modernes.

A quel titre parle-ton donc ? A quel titre parle La presse ? A quel titre peut-elle justifier les "Caricatures", placées ou replacées sur le marché ? La liberté de la presse est-elle, doit-elle être absolument absolue ?

2° La liberté de la presse est-elle, doit-elle être absolument absolue ?

On comprend bien le militantisme des associations de journalistes, notamment reporters : Il est légitime que les journalistes ne se sentent pas une vocation normale à être tués sur le terrain, emprisonnés, etc.. On comprend même que la revendication de la liberté au sens politique, a encore pour eux un grand sens. On comprend que la liberté de la presse est encore largement une conquête à terminer dans le monde.

Pas en France, en Belgique, en Allemagne, au Luxembourg, etc. etc. Gardons la tête, pas de salade et de jeux de manche, cette conquête est chez nous déjà faite.

"Laissez nous faire notre travail", entend-on, tel quel c’est aussi souvent de trop ou mal venu. Il y a des choses que la presse ne peut pas faire. Ecrire, en effet, disserter, polémiquer rencontre des limites posées par la loi, l’éthique commune, la déontologie journalistique : On ne peut diffamer, insulter, voler le courrier, les gens ont des droits fondamentaux.

La liberté traditionnelle et exceptionnelle accordée à la presse pour tout ce qui relève du politique ne doit pas non plus nous instruire en erreur. Moquer sans contrainte (même de mauvais goût), les politiques est une plage de liberté exceptionnelle qui nous est chère, un contrepoint majeur au pouvoir, elle n’est pas pour autant transposable sans modem dans les autres champs d’activité humaine.

La loi a d’ailleurs comme on disait "subvenu" à ces équivoques : Caricaturer certaines minorités notamment aurait conduit divers de nos journaux à perdre de douloureux procès et aurait soulevé un remarquable bordel.

Vous ne pouvez pas être raciste non plus (même si les usages rendent les choses juqu’à présent très coulantes sur les Belges et les Suisses.)

Mais tout en gros déborde largement le domaine de la loi. Il y a plusieurs décennies les mineurs décidaient au manche de pioche et aux poings sur le carreau de la mine endeuillée les limites exactes à apporter à la photographie de presse et à l’exercice de la profession.

Pour abréger posons donc les questions suivantes : A quoi s’est attaquée la presse avec les caricatures ? Est-ce à un pouvoir politique ? Est-ce à une intime conviction religieuse et personnelle ?

Qu’en est-il également de l’usage à faire de l’humour ? L’humour peut se comprendre comme une agression ritualisée pratiqué entre personnes plus ou moins de connivence, en accord de tolérance en tout cas ? La victime non consentante de l’humour n’est pas obligée d’apprécier spontanément et sans contrepartie un rire qui se porte contre elle.

Si la presse en sa liberté hautement proclamée se sent menacée à son tour dans cette affaire l’est-elle au titre de la liberté politique, de la liberté de conscience, de la liberté intellectuelle d’aller au Vrai ? Ne noyons pas trop le poisson, expliquons-nous : même sur l’idée d’une provo ou d’une simple imbécilité naturelle ,

3° La liberté de la presse va-elle contre la liberté des gens ? dernière part à examiner dans le dossier

Un dernier point dans le débat doit aborder enfin ceci : Si le droit à l’info, au débat, à la polémique, à la liberté de la presse nous est aujourd’hui aussi fondamental et viscéral que le droit au pain, il n’en reste pas moins que par un de ces retournements dont l’Histoire est familière, la presse telle qu’elle a fonctionné ces derniers 30 ans nous est apparue souvent comme assez tordue assez contraire à son évangile premier. Le tous pourris s’est appliquée à elle autant qu’aux politiques.

Faut-il reprendre tous les griefs ? Non, la critique a été bouclée, et tous les livres ont été écrits et lus, Constate-t-on un mieux ? Nous ne sommes pas en vérité encore sortis de la défiance.

C’est que la presse, les medias représentent un pouvoir que le citoyen ne contrôle pas et auquel il participe peu. Presse et medias sont avec nous dans le rapport du fort au faible, de l’unitaire au dispersé. Chargés de refléter le monde, le soupçon fort est qu’ils nous le formatent, qu’ils taisent, mentent, agissent à leur gré. Notre seule surrection citoyenne est celle que nous fournit désormais
la e-presse et l’open publishing.

Pour conclure

L’affaire actuelle est l’occasion d’un débat large entre eux et nous, il est probable qu’on est en train de la rater, et que la presse ne se donnera pas et ne nous donnera pas le code de conduite, la déontologie que l’on attend depuis sa naissance.

Il y a ici à examiner non seulement le statut général de la liberté de la presse mais aussi celui spécifique de l’humour de presse.

Ah, voilà que le fil rouge nous annonce qu’afin de démontrer la pureté de ses sentiments dans cette affaire, la presse impliquée fera don des excédents de vente générés par les caricatures à l’association française de "La Chorba d’hiver".

Nous souhaiterions, amis, avoir vos observations.

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Les Pensées zaz de l’Ocséna

Ocsena, Organisation contre le système-ENA (et pour la démocratie avancée)
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