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La fragmentation de l’ex-Yougoslavie jusqu’au bout ?

Publie le dimanche 21 mai 2006 par Open-Publishing
4 commentaires

Monténégro . Le référendum de ce dimanche pour ou contre l’indépendance représente un enjeu à haut risque tant la population paraît partagée sur le sujet.

Podgorica (Monténégro),

Avec le référendum de dimanche, une nouvelle page du démantèlement de l’ancienne Yougoslavie fédérale va être tournée. Il faudra cependant que 55 % des électeurs monténégrins se prononcent pour l’indépendance pour que la petite République obtienne le droit de se séparer de la Serbie. Cela fait des années que la moitié des Monténégrins rêvent de voir leur pays redevenir indépendant, comme il l’était jusqu’en 1918 et son rattachement au « royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes ». Petite principauté montagnarde, dirigée durant des siècles par un prince évêque issu de la lignée des Petrovic-Njegos, le Monténégro a toujours résisté à la puissance turque, qui dominait le reste des Balkans. La pleine indépendance du pays a été reconnue par le congrès de Berlin, en 1878.

Une identité spécifique

Le souvenir de ce passé survit dans les montagnes du « vieux Monténégro », autour de l’ancienne capitale princière de Cetinje. Cette bourgade de 20 000 habitants, économiquement sinistrée, abrite les anciens bâtiments de dix-huit ambassades étrangères, actives jusqu’en 1915, au moment de la conquête autrichienne du Monténégro. Les habitants ne cultivent pas d’animosité envers la Serbie, mais sont attachés à leur identité spécifique. « Le petit Monténégro doit naturellement conserver de bonnes relations avec son voisin serbe, mais pourquoi les Monténégrins, qui ont une histoire pluricentenaire, ne pourraient-ils pas former de nouveau leur propre État », demande Petar Martinovic, un retraité de l’usine Obod, qui votera sans hésiter pour l’indépendance, même s’il n’a aucune sympathie pour le régime « mafieux et corrompu » du premier ministre Milo Djukanovic.

La situation est bien différente dans le nord du pays. Ici, lors du recensement de 2004, la majorité des habitants orthodoxes se sont déclarés de nationalité serbe et s’opposent à toute perspective de séparation entre le Monténégro et la Serbie. Ce recensement a pris des allures de test politique : les citoyens déclarent librement la nationalité à laquelle ils appartiennent et beaucoup de partisans de l’Union avec la Serbie ont choisi de se déclarer serbes. Du recensement de 1991 à

celui de 2004, les Serbes sont ainsi passés de 10 % à 30 % de la population monténégrine. « Monténégrin ? Cela veut dire le meilleur des Serbes », explique-t-on volontiers dans la région. Le nord du Monténégro est en réalité une région multiculturelle : à côté des Slaves orthodoxes, qui se définissent plus volontiers comme serbes que comme monténégrins, vit une petite communauté albanaise et, surtout, une forte minorité slave musulmane, majoritaire dans des communes comme Rozaje, Bijelo Polje ou Plav. Albanais et musulmans devraient majoritairement voter pour l’indépendance. Les 17 % de musulmans du Monténégro détiennent probablement la clé du référendum. Les dirigeants indépendantistes de Podgorica soulignent que leur projet est celui d’un Monténégro multiethnique où tous les citoyens jouiront de droits égaux. Milo Djukanovic se pose volontiers en protecteur des communautés minoritaires. Le sous-développement chronique qui affecte le nord de la province, et tout particulièrement les communautés minoritaires, pourrait cependant détourner certains électeurs de voter pour l’indépendance.

Fin avril, les autorités officielles de l’islam au Monténégro ont néanmoins appelé tous les musulmans à voter pour l’indépendance. La partie sera de toute façon très serrée. L’Union européenne a, en effet, imposé des conditions très particulières : 55 % des électeurs doivent se prononcer pour l’indépendance pour que celle-ci soit reconnue. Cette règle étrange est présentée comme le résultat d’un compromis, puisque l’opposition voulait au départ que le seuil soit fixé à 50 % des inscrits et pas seulement des exprimés.

Il est donc possible que le Monténégro se retrouve dans une dangereuse « zone grise » au soir du référendum, si 53 % ou 54 % des électeurs se prononçaient pour l’indépendance. D’après les derniers sondages, cette perspective est même la plus probable. Il sera pourtant difficile d’expliquer aux souverainistes que cette majorité est « insuffisante » et que l’indépendance est repoussée. Le médiateur spécial de l’Union européenne, le Slovaque Miroslav Lajcak, répète pourtant que l’Europe n’a pas de scénario « alternatif » pour cette hypothèse. En clair, pour que le Monténégro accède à l’indépendance, c’est 55 % des voix ou rien.

une campagne électorale tendue

Belgrade s’en tient également à cette même position. « Si l’indépendance obtient plus de 55 % des voix, le Monténégro quittera l’Union, mais il n’y aura plus de partage des anciens biens fédéraux, ni de négociations particulières. Il est exclu que les ressortissants monténégrins jouissent d’un statut privilégié en Serbie, par exemple dans les universités ou les hôpitaux. On ne peut pas vouloir le beurre et l’argent du beurre. Le Monténégro et la Serbie devront seulement définir leurs relations de voisinage », explique Radomir Diklic, conseiller de la présidence de l’Union de Serbie-Monténégro. Alors que la campagne électorale est de plus en plus tendue, personne n’écarte, à Belgrade comme à Podgorica, le risque d’affrontements ouverts. Milka Tadic, la directrice de l’hebdomadaire monténégrin Monitor, indépendantiste depuis toujours, ne cache pas son amertume et son inquiétude : « Encore une fois, nous servons de terrain d’expérimentation politique. »

Jean-Arnault Dérens
l’HUMANITE

Messages

  • Le Monténégro est déja une des plaques tournantes de tous les traffics maffieux d’Europe de l’Est. L’avenir du Monténégro indépendant (500 000 habitants) ? Devenir officiellement un paradis fiscal de plus en Europe sous la conduite d’un chef de tripot (Djukanovic) présenté, bien entendu, comme un ardent défenseur de la démocratie par toute l’ Europe ultralibérale dont les privilégiés disposeront d’un espace supplémentaire pour continuer de s’affranchir de toute autre loi que celle du plus fort.

    Valère

  • Ah les joies du nationalisme.... Ah qu’on est bien entre soi, entre Croates épurés de leurs Serbes, entre Serbes épurés de leurs Musulmans, entre Musulmans épurés de leurs Serbes, entre Albanais épurés de leurs Serbes... Ah qu’on est bien entre soi...

  • Prochaine étape : indépendance du Kosovo (qui l’est déja de fait). Rude concurrence en perspective avec le Monténégro pour l’hégémonie maffieuse locale. Une guerre n’est pas exclue.
    Ensuite : les Albanais de Macédoine ont déja manifesté (les armes à la main) quelques vélléités d’indépendance. On ne devrait pas tarder à en entendre à nouveau parler.
    Les Hongrois de Voïvodine n’ont, à ma connaissance, rien demandé. jusqu’à quand ?
    Quant à l’Herzégovine, a-t-elle réellement intérêt à continuer d’être associée à une Bosnie de toute façon vouée à l’explosion ?

    Bon. et les Basques alors ?

    Valère

    • Bon. et les Basques alors ? (...)

      les basques , rien , l’espagne fait partie du camps des gentils , alors que la yougoslavie faisait partie du camps des mechants , souvients toi , ils voulaient meme etre non alignés les yougos , quelle pretention !
      aujourd’hui ils veulent tous faire partie de la belle europe , quand aux serbes , ils creveront , ils n’ont plus d’acces à la mer , ils sont completement enclavé , et contrairement à la resolution de l’ONU , on va leur enlever le Kosovo , qui deviendra independant . Albanie , montenegro et Kosovo , les maffieux ont de beaux jours devant eux , la corruption et la prostitution aussi !
      vive les gentils et mort aux tyrans genocidaires !

      claude de toulouse .