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Ségolène Royal critique vivement la réforme des 35 heures...

Publie le lundi 5 juin 2006 par Open-Publishing
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Ségolène Royal : les "plus fragiles" ont souffert des 35 heures

deIsabelle Mandraud

Le deuxième chapitre du livre "interactif" de Ségolène Royal, rendu public sur son site de campagne Désirs d’avenir, est une nouvelle petite bombe. Consacré aux "désordres de l’emploi et du travail", le texte critique vivement la réforme emblématique du gouvernement de Lionel Jospin, les 35 heures, pour ses conséquences sur les conditions de travail. Après ses déclarations sur la sécurité, la présidente socialiste de la région Poitou-Charentes, candidate à l’in vestiture de son parti pour 2007, aborde un nouveau sujet très sensible pour les socialistes. Elle cible de nouveau les classes populaires, au risque de diviser son camp et n’offre guère de répit à ses concurrents.

"La réduction du temps de travail a été conçue davantage comme un outil de création d’emplois (350000) que comme l’aboutissement d’une réflexion sur les conditions de travail, affirme Mme Royal. Leur contrepartie fut un spectaculaire assouplissement du temps de travail (...) et une flexibilité accrue." La réduction "officielle" de 4 heureshebdomadaires du temps de travail se serait ainsi "bornée, en moyenne, à 2h30 voire 1h30 pour les ouvrières du textile".

MmeRoyal juge les lois Aubry lourdes de conséquences : "La proportion des salariés en horaires flexibles est passée de 10% à 40%, soit plus que les salariés américains." MmeRoyal insiste sur la répartition inégale du gain. "C’est au bas de l’échelle des qualifications et des statuts que la flexibilité a été accentuée, souligne-t-elle. Chez Michelin, les cadres ont bénéficié de jours de congé supplémentaires et les ouvriers sont venus travailler le samedi. (...)

D’où une dégradation de la situation des plus fragiles, notamment pour les femmes ayant des emplois peu qualifiés pour lesquelles la flexibilité s’est traduite par un empiétement accru sur leur vie personnelle et familiale, alors que les femmes cadres y ont trouvé, elles, des jours de respiration bienvenus." Certes, ajoute Mme Royal, "malgré l’intensification du travail et du stress, malgré la difficulté à joindre les deux bouts pour ceux qui s’en sortaient en cumulant les heures supplémentaires, l’appréciation globale des 35 heures par les salariés reste positive". Mais, persiste-t-elle, "en termes de qualité de vie au travail, les résultats des 35 heures sont mitigés".

En ouvrant de la sorte ce dossier, Mme Royal prend le risque de secouer à nouveau le PS. Car le projet du parti pour 2007, dont l’examen par les principaux dirigeants devait s’achever mardi 6 juin, recommande "la généralisation des 35 heures". Et si Martine Aubry, l’ancienne ministre de l’emploi, avait elle-même reconnu des problèmes d’application et une intensification du stress, jamais la critique n’avait été aussi dure.

Le document de 64 pages mis en ligne ne se limite pas à cet aspect. Il dénonce la "sous-estimation du chômage" en France, la précarisation des salariés et les "adeptes en Europe de la flexibilité tous azimuts". Pour Mme Royal, c’est désormais "le noyau central de la société française", sa classe moyenne et ses élites, qui est touché par "le désordre social" et "la menace inédite du déclassement". La candidate socialiste s’en prend au patriotisme économique "de façade" qui "masque en réalité de nouvelles concessions à la nouvelle démocratie actionnariale" et prône "un patriotisme offensif [qui] s’attaquerait, lui, aux vrais sujets : la faiblesse des capitaux propres des entreprises françaises (...) la création de champions européens (...) l’investissement massif dans la recherche et le soutien aux PME innovantes".

Le texte, truffé de références, et qui cite abondamment Claude Bébéar, président du conseil de surveillance d’Axa, contient peu de solutions, en dehors des contreparties sur le maintien de l’emploi exigées des entreprises qui perçoivent des aides publiques. Mme Royal insiste surtout sur la souffrance au travail liée au "nouveau productivisme réactif" et condamne l’approche "punitive" qui ne suffit pas, selon elle, à "comprendre et traiter les causes d’un absentéisme excessif". Elle vante "l’exemple américain" et le rapport de force instauré par le syndicat AFL-CIO, qui a permis, en quelques années, de réduire "les accidents et maladies du travail de plus du tiers dans le secteur privé". Mme Royal, qui fait face, avec ses positions sur la sécurité, aux accusations d’une partie des socialistes sur une "dérive droitière", s’emploie à une critique de gauche sur le travail. Avec les 35 heures, elle confirme surtout sa volonté de cibler l’électorat populaire.

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