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Devant l’échec du dialogue interpalestinien, M. Abbas pourrait recourir à un référendum

Publie le mercredi 7 juin 2006 par Open-Publishing

de Gilles Paris

Le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, devrait se résoudre à recourir à un référendum après l’échec d’un "dialogue national", qui n’a pas permis aux deux principaux mouvements palestiniens, le Fatah (nationaliste), dont est membre M. Abbas, et le Mouvement de la résistance islamique (Hamas), de parvenir à un accord. M. Abbas s’était donné jusqu’au mardi 6 juin pour convaincre le Hamas.

Ces deux mouvements se disputent le pouvoir depuis la victoire des islamistes aux élections législatives du 25 janvier, qui leur a permis de contrôler le gouvernement alors que la majorité de l’administration, notamment les services de sécurité, est restée, dans les faits, sous la mainmise du Fatah. Ces tensions ont débouché sur des affrontements armés sporadiques dans la bande de Gaza, qui ont fait plus de dix morts au cours des dernières semaines.

Le référendum devrait porter sur un programme rédigé par des responsables palestiniens de différentes factions - y compris du Hamas -, emprisonnés en Israël, comme Marouan Barghouti, ancien responsable charismatique du Fatah pour la Cisjordanie. Ce programme en dix-huit points d’inspiration "fatahaouie", rendu public au début du mois de mai, prône notamment la création d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967, soit Gaza et la Cisjordanie avec Jérusalem-Est pour capitale. Ce qui revient à une reconnaissance implicite d’Israël à laquelle se refusent pour l’instant les islamistes.

Lundi, le Hamas s’était dit prêt à de nouvelles négociations, après l’expiration du délai accordé pour parvenir à un programme politique commun. Une perspective refusée par M. Abbas, qui avait durci le ton en assurant que le programme des prisonniers était à prendre ou à laisser.

La veille, selon la presse palestinienne, le chef de l’Autorité palestinienne avait pris par avance contact avec la Commission électorale indépendante à qui devrait revenir l’organisation d’une consultation délicate, puisqu’elle n’a pas été prévue par les textes qui tiennent lieu de Constitution provisoire palestinienne. Dans le même temps, un membre important du Fatah, Mohammed Dahlan, député de Gaza, avait été autorisé par Israël à rencontrer le principal rédacteur du programme des prisonniers, M. Barghouti, dans l’établissement pénitentiaire où il purge cinq peines de prison à vie.

La manoeuvre du chef de l’Autorité palestinienne vise à recouvrer une partie du pouvoir perdu lors des élections législatives. Tout d’abord réticent par rapport au contenu du document des prisonniers, il a été convaincu par ses principaux conseillers de saisir cette opportunité pour sortir de son isolement. Compte tenu du prestige dont jouissent les prisonniers dans la société palestinienne, M. Abbas escompte qu’une majorité significative de Palestiniens approuvera ce programme, qui consacre par ailleurs sa prééminence pour tout ce qui relève d’éventuelles négociations avec Israël.

Une victoire ferait à nouveau du chef de l’Autorité palestinienne, selon ses conseillers, un partenaire crédible aux yeux de la communauté internationale. Cela contrarierait les projets du premier ministre israélien, Ehoud Olmert, de tracer unilatéralement les frontières d’Israël comme il s’y est engagé aux cours des élections législatives du 28 mars.

Pris de court par M. Abbas lorsque ce dernier a levé le voile sur ses intentions, le 25 mai, le Hamas s’est progressivement rangé dans l’opposition à la fois au programme des prisonniers et au référendum, sous la pression de ses responsables en exil, notoirement plus radicaux que ceux "de l’intérieur". Les islamistes comptent désormais utiliser tous les moyens institutionnels dont ils disposent pour s’opposer à l’organisation d’un référendum présenté comme une tentative de "contourner la légitimité du gouvernement". En cas d’échec, il leur faudrait choisir entre une campagne contre le programme ou un boycottage du scrutin, à supposer que la sécurité puisse être assurée.

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