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Etat de la presse en été (3) : "Le Canard enchaîné" et divers

Publie le vendredi 11 août 2006 par Open-Publishing
10 commentaires

1° La technique du Canard

Le Canard enchaîné en été, lui, contrairement à d’autres organes de presse, ne sèche pas sur pied et ne s’embrase pas non plus les portugaises, il poursuit une trajectoire normale d’honnête pressoir public national, indifférent à l’hygrométrie et aux températures saisonnières. Pouvons-nous voir et comprendre comment ? : C’est d’abord que le Canard a ses procédures, ses idiosyncrasies, qui ne sont pas susceptibles, dirait-on, d’évolution dans la durée ni dans le macaron. Selon nous, le Canard est un journal satirique (c’est ainsi qu’il se définit), mais on irait sans doute trop vite en le disant proprement humoristique : du moins devons-nous en lui distinguer soigneusement forme et contenu.

Sa forme, titres et chutes notamment, pèse le plus souvent des demi-tonnes. Prenons les titres du 2 août 06. :
 sur le conflit libano-israélien : "Une politique de plus en plus raid." "Du temps aux tanks"
 sur les cours du pétrole : "Histoire pompante"
 Social : "Des SDF parisiens victimes d’un coup de karcher" (pas une franche nouveauté !)
 Justice : "Le Parquet glisse sur Bernadette" (pas de quoi s’éclater non plus).

Comparé à cela, les titres ressassés de Libé à la Jean Bruce paraissent intellos et hautement travaillés (Jean Bruce, vous savez ! Moche coup à Moscou, Gachis à Karachi, Banco à Bangkok, ...

L’humour des chutes est à mourir plus encore, on cite même pas. (On notera au passage cependant un excellent dessin de Pétillon sur Chirac à Brégançon.)

On nous répondra, blablabla, que la critique est aisée bien sûr mais que l’harpe est difficile, surtout quand le rythme et la mélodie sont hebdomadaires, parution le mercredi. On n’en disconvient pas, notre but est seulement de prétendre souligner que le rire-sourire, quand il veut bien arriver, se trouve au Canard dans les contenus apportés de l’extérieur. C’est l’événement, l’anecdote ragotée (allo ! allo !), le ridicule des acteurs médias et politiques qui nous le donne, c’est effectivement le satirique. Satire et French touch téléphonique (standard, bidule, cabine) constituent donc les deux secrets de fabrication du Canard enchaîné.

2° L’avenir

La première question à se poser concernant le Canard est donc la suivante : Le Journal a tenu certes très longtemps dans la forme institutionalisée qu’on lui connaît, est-ce toutefois que sans effort de renouvellement frais ça peut encore tellement durer ? On notera que le capital est de 100 000 euros prévu pour 99 ans, et que le journal est dans sa 91e année : ça n’a rien à voir of course, mais ca ne laisse encore que 8 ans au plus, cqfd. On dit ça comme ça, nous, par pure méchanceté.

3° L’efficacité politique

La deuxième question est plus "philosophique" : la critique, la moquerie sociale et politique, l’humour par extension, a-t-elle, ont-ils, une quelconque efficace sur le cours du monde ou sur les régimes où nous vivons. Toujours aux avant-postes sur le front (avec un risque d’ennui quand "Alouette, rien de nouveau !" ), toujours vigilant sur le détail, le Canard enchaîné (même interrogation pour ses confrères de toutes les nationalités) a-t-il une influence ? décisive ? marginale ? illusoire ? sur les choses.

On laisse à chacun de donner ici son sentiment. Sur les "affaires", ces quinze dernières années, le Canard comme d’autres peut-être a, selon nous, probablement pas mal contribué à donner à la France sa véritable image républicaine et démocratique : Eminemment mauvaise !

Dans la pleine lumière de sa fausse-vérité, la machine de la Ve, confite, ne bouge néanmoins pas d’un poil. Au contraire, semblerait-il, elle renforce ses défenses, s’enkystant plus fort en elle-même, avec l’aide apparente, fort commode, de l’Union Européenne.

4° Divers. Les autres nouvelles de la semaine

Pour changer un poil de registre, nous avons d’abord noté pour vous deux nouvelles de première bourre dont l’importance sociétale future ne peut pas vous échapper, nous en avons noté une troisième d’importance non moins sérieuse mais plus marrante .

4.1 La branlette comme forme nouvelle de happening

Cf. Le Canard du 2 et Libé du 5-6 août. La branlette collective, inconnue encore en France, semble entrée dans les moeurs partout ailleurs. Elle se pratique pour diverses bonnes raisons depuis 5 ans à San Francisco et au Québec. Ce dernier week end à Londres une grande "démonstration" caritative devait en être donnée, destinée à lever des fonds pour la lutte anti-SIDA. M’est avis que les manifs chez nous seraient beaucoup moins soporifiques si à notre tour on s’y mettait, et si FO et si la CGT d’abord montraient très fermement l’exemple.

4.2 L’apparition-révélation d’un 4e sexe

Dans le même Libé plus haut précité, et page 21, un article "Asexuels nous sommes heureux" qui dévoile une vraie bombe. Après la juste surrection féminine du 20e siècle qui n’est pas encore pleinement aboutie, après celle des homos (le mariage, l’adoption, etc.), voici l’inattendue mais prometteuse revendication, d’un quatrième sexe : celui de celles et ceux, hommes et femmes, qui se fichent complètement du cul, de la miche, fesse et de la baise en général. Celui de celles et ceux qui en ont marre de se faire potentiellement traiter de chose molle, de peine à jouir ou de frigide, celui de celles et ceux qui veulent regarder la télé en paix, sans bander, sans mouiller, et sans payer de décodeur pour les films porno. Il paraît que ces indifférents-indifférentes épanouis représenteraient plus de 10% de la population. On vous le garantit, ca va faire bientôt un sacré groupe de pression qu’il faudra pas titiller inconsidérément.

4.3 La réthorique d’Umberto

Dans la rubrique enfin "Ecrivains de l’été" (voir en ligne notre précédent post), apparition d’Umberto Eco. De cela on ne se plaint pas : il donne dans Le Monde du 8 août, un article sur la rhétorique et plus précisément sur "la captatio malevolentiae". On vous laisse y aller voir (voir aussi le 9). On ne retiendra dans l’immédiat que 2 zaz d’Umberto.

- Force de conviction du sentiment majoritaire

"Mangez de la merde, des millions de mouches ne peuvent pas se tromper."

- Force de conviction de la presse

"Parfois, on a l’impression que les mass médias découvrent toujours l’eau chaude. Après, cependant, à bien y réfléchir, il faut admettre que "redécouvrir" l’eau chaude est l’une de leurs fonctions fondamentales."

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Les Pensées zaz de l’Ocséna

Ocsena, Organisation contre le système-ENA... (et pour la démocratie avancée)

 http://ocsena.ouvaton.org
 ocsena.org@wanadoo.fr

Messages

  • le canard : c aussi la quotidienneté avec sourires zé zironie ! c aussi Infos du politique ds la coulisse , parfois les seules enoncées ds la presse ecrite ou radios - assez croustillantes , et critiques litteraires gagnantes- toujours d’excellents bouquins y sont presentés - l’ humour ouvre a la "comprenote " :-))))))))))

  • Bonjour,

    Je ne lis plus le canard enchaîné depuis quelques mois, pas drôle, de plus il nous fait, soit-disant enter dans les coulisses de la politique, c’est juste nous faire croire, rien d’intéressant dans le Canard.

    A bientôt

    • Le Canard est incomparable. Nul autre journal ne dénonce comme lui les turpitudes des politiques. Il faut tout de même se souvenir qu’il révéla l’affaire des diamants de Bokassa et que cela coûta sa ré-élection à Giscard. Les enquêtes du Canard sont tellement minutieuses qu’aucun procès en diffamation n’a jamais abouti.

      Chirac doit au Canard pratiquement toutes les casseroles qu’il se traine. Pas mal, non ? Vous connaissez d’autres médias avec un tel palmarès ?

      Vive le Canard !

  • Les limites du Canard :

    1/ Il a soutenu les ragots du torchon Liberachion sur Chavez (qu’il n’oublie jamais de ridiculiser, calomnier ; pareil pour Castro)

    2/ Il a été pro guerre (Irak 92 p.ex.)

    3/ Il est pro-israélien (surtout Lestrohan : lisez sa 1ère page de la semaine dernière et sa page sur Nasralah ; Pagés ; et presque tous les dessinateurs mention spéciale à Cardon, Delambre, Pétillon et évidemment Cabu) sauf Angeli

    4/ Il posséde en Bernard Thomas un canard gâteux et boiteux qui nous fait chier avec sa glaire sur la diarrhée télévisuelle

    A part ça il faut le lire

    • Le Canard pro-guerre d’Irak 91 (et non 92, zi chon mabuse) ?

      J’ai dû louper un épisode alors, parceque je me souviens très bien de son titre dans le numéro qui a suivi le déclanchement de la première tuerie américo-franco-britannique (et autres dont j’ai oublié la liste), à propos du (déjà) délire médiatique de l’époque :

      "HALTE AU BOURRAGE D’ECRAN"

      Ca me parait pas très "pro-guerre" ça, non ? Et ça nous renvoit aussi à aujourd’hui on dirait.

      Ceci-dit, Le Canard soulève souvent le couvercle de la marmite et nous laisse entrevoir la soupe qui y bouillonne mais plutôt dans le genre "les copains et les coquins", c’est à dire , en fait, sans faire vraiment de politique autrement que politicienne. Mais lorsque je le lis, je rigole bien quant-même et le plus souvent jaune.

      Ceci-dit (encore) le meilleur du Canard, c’est "L’album de la comtesse"

      Gérard de Montreuil

    • c’est bien dans le "canard" que nous avons appris qu’un de nos ministres nouveau se payait ou plutôt se faisait payer à nos frais un appartement de quelques centaines de metres carrés en plein Paris... Ce qui l’a obligé à ne pas aménager après avoir fait quelques "menus" travaux à l !ntérieur pour satisfaire sa petite femme...

      Un journal sans pub,à un prix raisonnable...

      moins pro israélien que tous les autres....

  • Certainement..

    Cet hebdo parait toujours depuis n années..

    Je le lis pratiquement toutes les semaines depuis 68, mes 15 ans ..

    Pas de pub.

    Un format inchangé, qui est tout sauf ringard.

    Pas de site internet..

    Relecture impecc , pas de faute, amende pour les plantages.
    Respect des sources.

    Procès assumés.. Souvent gagnés..

    Drôle....jeux de mots.. intelligence..Sentiments....Humanité..

    Ces 8 pages sont l’honneur de la presse..

    Alors svp, réservez vos critiques aux gratuits.. Qui ne paraissent pas en aout..

    Faute de rentrées publicitaires.

    Quand l’actualité exige la mobilisation des journalistes.

    Les vrais..

    coin coin..

    al

  • De Gaulle disait :

    ...les Français se sentiront libres lorsqu’ils pourront à nouveau lire le "Canard enchaîné"

    Ceci étant dit, je trouve, moi-aussi que depuis quelques temps il "baisse" en qualité

    j’ai moins de plaisir à le lire mais je continue de l’acheter, espérant....

    Michèle