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Comment les intermittents ont ébranlé « Star Academy »...

Publie le mardi 21 octobre 2003 par Open-Publishing

Lundi 20 octobre 2003

Comment les intermittents ont ébranlé « Star Academy » Samedi soir

Malgré la semaine d’action annoncée par les intermittents, TF 1 reconnaît
n’avoir prévu, samedi soir, qu’« un dispositif de sécurité normal pour une
émission en direct ». (SIPA.)

SAMEDI, 21 h 5 : la réalité fait brutalement irruption en pleine télé
réalité, en direct sur TF 1. « Star Academy » a à peine commencé qu’un
groupe surgit derrière le jeune Patxi, s’apprêtant à chanter aux côtés de
Jacques Dutronc, et déploie une banderole : « Eteignez vos télés ! » Près de
6 millions de téléspectateurs stupéfaits assistent à la bousculade : Nikos
Aliagas tendant son micro à un manifestant réticent, une agitation suspecte
sur les côtés, un public hésitant entre huées et applaudissements. Les
intermittents du spectacle ont encore frappé, mais, cette fois, cela tourne
au vinaigre : bagarre, échange de coups, évacuation du plateau. La chaîne
envoie une coupure pub, puis un épisode de « Julie Lescaut ». L’émission ne
reprendra que deux heures plus tard, pour se dérouler « normalement »
jusqu’à 1 h 30 du matin. Retour sur un incident exceptionnel. Que s’est-il
vraiment passé hors antenne ? Selon TF 1, une centaine d’intermittents ont
tenté d’entrer en force dans le studio, notamment du côté du public. Les
agents de sécurité ont voulu les empêcher d’approcher les gradins, d’où les
heurts violents. Une porte vitrée a été brisée, un vigile, une hôtesse et
quatre manifestants blessés. La police a rapidement entouré le bâtiment et
interpellé trois personnes (un quatrième manifestant a été placé en garde à
vue hier matin). Le plateau a été évacué, en attendant le retour au calme.
Une version corroborée par plusieurs témoins. D’après un porte-parole de la
Coordination des intermittents et précaires d’Ile-de-France, « les
manifestants se sont heurtés à un service d’ordre musclé, pris de panique et
débordé, qui a pété les plombs. Les gens étaient en colère et déterminés,
mais il n’y a jamais eu de violence de notre part. Nous n’avons pas pu finir
de dire ce que nous avions à dire. C’est désolant d’en arriver là ». Comment
les intermittents ont-ils pu déjouer les services de sécurité ? Le plateau
de « Star Ac » est l’un des mieux protégés de la Plaine-Saint-Denis : on
doit montrer patte blanche pour y entrer, à savoir des bracelets
correspondant à son statut (public, invités, presse, etc.). TF 1 reconnaît
n’avoir prévu, ce soir-là, malgré la semaine d’action des intermittents,
qu’« un dispositif normal pour une émission en direct ». Ni plus ni moins.
De son côté, France 2 avait doublé le cordon de sécurité autour de son
propre divertissement, « la Chanson n o 1 », en direct des studios de la SFP
à Boulogne. En apprenant ce qui se passait sur TF 1, les portes ont été
fermées à double tour ! D’après la Une, aucun manifestant n’était présent
dans le studio avant le début de l’émission. Ils sont passés en force par
trois entrées à la fois, d’où le débordement des vigiles. Ont-ils bénéficié
de complicités à l’intérieur ? Mystère. Selon un témoin, « le plateau est
facile d’accès car la porte du studio est juste derrière. La bagarre a eu
lieu dans le couloir, l’invasion totale du studio a été évitée ». Comment
l’émission a-t-elle pu reprendre « normalement » ? Très vite, les artistes
et les élèves de la « Star Ac » sont allés s’enfermer dans les loges. Quant
au public, il a été transféré dans une salle prévue à cet effet, qui sert
habituellement à patienter avant les émissions. A ce moment-là, personne ne
savait si le direct allait reprendre. Une partie des spectateurs a préféré
partir, notamment les parents de jeunes enfants. Mais « de 60 à 70 % du
public est resté et a été de nouveau installé sur les gradins dès que le
calme est revenu », précise TF 1. A partir de 23 h 5, l’émission s’est
déroulée exactement comme prévu, malgré quelques problèmes techniques
(micros en panne, larsen), « sans doute dus au stress et à la fatigue »,
selon la chaîne, et non aux intermittents. Avant même de savoir ce qui se
passerait, trois séquences musicales avec Jacques Dutronc avaient été
préenregistrées dans l’après-midi « au cas où », mais une seule, son duo
avec Amina, a été utilisée dans l’émission.
Thierry Dague
Le Parisien , lundi 20 octobre 2003