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Etat de la presse en été (4) : Le cas de Libération

Publie le dimanche 20 août 2006 par Open-Publishing
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1. Libé l’été

On dit dès le titre "le cas", parce qu’avec Libé, avant même de commencer, on a comme qui dirait un problème, une équivoque, un malentendu inexprimé qu’il s’agira in fine de déballer.

D’abord, premièrement, soyons clairs ! : Libé, Libé d’été, cette année, rien à critiquer sur le plan quantitatif. Le journal a tenu son taf des 24 à 28 pages quotidiennes publiées (Comment font-ils ? D’autres en juillet-août ont eu tant de mal qui pouvaient pas y arriver ?). Et sur le plan qualitatif, bof ! rien trop à contester non plus quand on est habitué : Libé a été égal à lui-même, on va voir bientôt comment.

2. Sans July

En tout cas, vous prenez acte que le vidage -assez "ignomineux" (on prend pour l’occasion le mot normalement consacré)- de Serge July n’a en gros strictement rien changé. Ni en mal ni en bien (ou alors c’est tout juste à peine si on veut voir vraiment en bien). Donc le mal de Libé ne venait pas de July. De ses costards toquards façon classe politique. il ne venait pas de ce que, soixante-huitard historique, il avait tourné tout après gros bourge (illusion donnée selon nous par une certaine corpulence) et enterré Sartre très tôt (mais tout le monde a enterré Jean-Paul très tôt. Vous connaissez, vous, une place, une rue, une impasse à Paris baptisée Jean-Paul Sartre ?).

Bien sûr, July, à paraître tel quel dans les meubles actifs-oiseux à l’émission d’Ockrent, à avoir fait voter oui pour Chichi en 2002, à entretenir supposément des amitiés perso avec Sarko, ça positivait pas trop pour un journal et son patron qui furent, on s’en souvient, il y a longtemps gauchos. July dans sa vie n’avait connu qu’un instant un grand regain de sympathie publique probablement très sincère, c’est l’année où il avait eu son accident terrible. Mais bon, ça pouvait pas non plus durer, une bonne convalescence lui avait rendu la santé. Et puis comme Libé le démontre pour d’autres si bien : on ne peut garder, humainement, démocratiquement, un pouvoir autocrate pendant plus de 30 ans sans faillir. Le départ de July lève normalement une hypothèque ; sauf à préjuger que le journal en serait une, une deuxième, à lui-même : levons cette autre et dernière grosse hypothèque.

3. Libé tel qu’en lui-même

Le first malentendu qui régit sans doute notre porte-à-faux à tous, c’est d’avoir inconsciemment projeté sur Libé des intentions à nous qui n’étaient pas à lui. Libération depuis un sacré bail n’a rien à libérer. Il serait temps de lui rendre justice sur ce point correctement, ce n’est plus le boulot d’un journal, de lui comme de tout autre, de diligenter dans le présent une quelconque révolution même allégée (tu vois le progrès par rapport à des connotations anciennes, idéologiques, romantiques, passéistes, égalitaristes, etceu. Et attend pour peaufiner que tous les journalistes aient été formés à Sciences po Paris !). Les journalistes pensent leur temps, pas au-dessus de lui. Ils sont donc de ce temps. En quelques décennies, t’as eu ces grands faits qui ont recadré radicalement et la vue et l’action : Chute du mur, du soviétisme, triomphe irrépressible du string, du web et du portable (Y a que le Monde diplomatique pour se vendre encore marxiste).

Donc Libé a sa vision du monde qui n’a rien de tellement surprenant dans le contexte : il (Libé) a son plan du bien et du mal, son plan des bons et des méchants. Lequel, il faut le reconnaître, est celui, à 99,9 pour cent, de nosostros, les citoyens-lecteurs. Y a rien à dire, à opposer, qu’est-ce tu trouverais toi de neuf à prononcer ? Donc Libé est contre Fidel et Raoul qui s’inscrustent depuis tant, Libé est contre Kim Jong Il et sa Corée. Libé est très méfiant sur l’Iran, circonspect sur le reste, etc. etc.

Libé est écolo aussi, comme on peut forcément l’être quand on est installé bobo dans le 10e. Il est pas totalement pour Hulot certes, mais pas contre. Pas forcément tout pour José mais pas contre. Pas irrémédiablement pour l’ours ou l’esturgeon, mais à l’écoute de la forêt.
A un niveau plus global, Libé n’est pas expressement pour la mondialisation néolibérale (pas obtus à l’argumentation non plus, hein !). Par sa sollicitude rédactionnelle, sans être caritatif, il se situe raisonnablement progressiste : pour les malheureux qu’on expulse, les pas logés, les sans pap. De sa part c’est vachement bien, hein ?

A un niveau plus global (deuxio), Libé est légaliste, républicain, démocratique, il s’oppose fermement à tous les révisionnismes. Pas original-original, mais franchement qui là-dessus lui jetterait la pierre ? L’ayant défini ainsi, Libé, qu’est ce qui nous manque encore ? On en oublie, c’est sûr.

Bon, oui, on oublie la technique (lire l’ensemble des techniques). Elle n’est pas propre à Libé. Elle est habile et pas répréhensible. Libé qui ne manque pas l’actualité importante ou l’événement petit mais insolite a des trucs pour traiter :

 Il a d’abord le "pas de deux", autrement dit la discussion balancée pour les sujets les plus chauffeux. Celle qui fait porter sur les parties la charge de la responsablilité des choses dites. Bien sûr, ça équilibre un peu et le journal au moins s’en tire au mieux. T’as le conflit isaraélo-libanais, tu fais parler les Israéliens d’une part et tu fais parler les Libanais d’autre part. T’as les mains propres, et s’ils s’engueulent entre eux c’est leur affaire à eux.

 Il y a "l’acquis estampillé", l’axiomatique quoi, qui se discute même pas (on a entrevu ça juste plus haut). On écartera l’horrible dans nos exemples pour pas faire simplement l’intéressant, mais bon, ducon, t’es bien contre le dopage sportif, t’es bien contre les violences conjugales, etc. Ah bon tu me rassures ! : Eh bien là, t’es un journal tu te dégonfles pas, tu prends parti dans le bon sens. Personne nulle part (sauf en Afghanistan) ne te le reprochera.

 Attention, si t’as du nez y a des trucs qui restent tout de même délicats. Exemple : L’excellence universitaire (Ils sont en fait tous assez d’accord entre eux quoique ca fleure au nez l’aliène petite manip). Donc t’es pas idiot comme journal, tu trouves toujours un gars compétent à Dauphine qui pourra se mouiller au nom d’une publication, d’un récent doctorat, d’une audition par les poufs du Sénat. On appelle ça, "le faire valoir de diversion".

Des trucs, des gnacs, y en a des piles d’autres, on arrêterait pas d’énumérer si on se laissait aller. Mais pourquoi les reprocher particulièrement à Libé alors que tout le monde écrit avec sa plume selon des tours communs. Tout a dûment été répertorié.

4. Pour trouver une chute, parce que quand même il en faut une

Libé d’après ce qui vient d’être dit est donc un bon journal, particulièrement à la plage l’été.

NB1 On notera qu’il pratique en outre aussi bien le divertissement quand il le veut, que le cuistre culturel dont on n’a pas parlé (oui, parce qu’il faut la jouer toujours un peu pédante dans ce registre, mais on causera de ça une autre fois parce qu’on n’a pas le temps.)

En bref Libé est un journal aux normes, qui pourrait nettement songer à un gratuit comme s’y engage déjà au Monde.

NB2 : On a encore à dire que Libé est beaucoup moins fayot qu’avant dans la page Portrait. Ce qui prouve que la situation française reste passablement confuse).

NB3 : On a encore à dire qu’en plus d’éplucher Libé de juillet-août, on a pris pour référence et pour le sérieux de la démonstration celui du jeudi 17 août. En titres, à sa une : "La Roumanie découvre ses collabos" , "SEB investit en Chine : les syndicats inquiets", "Polémique sur le passé nazi de Günter Grass".

NB4 : Non, on n’a pas pu vous sortir un seul "zaz" de Libé, qui ne sait pas ce que sait. On vous signale toutefois (Cf. Le Libé de référence) qu’un pont métallique a été piqué en Serbie sur le Danube.

Bref, pour revenir à la question principale du malentendu possible avec Libé, je sais pas trop ce que vous pensez exactement de tout ce qui a été exprimé ? Votre sentiment nous intéresserait.

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Messages

  • j’ai jamais aimé libération, July etait un hommes d’affaire qui sentait d’ou venais le vent,mais comme toutes les girouettes il a fini a ce fixer en rouillant et il a été demonté,par un coup de vent,plus fort que lui,dans le monde capitaliste, avoir fumé le cigar de la havane en critiquand ce pays peut etre payant mais il faut évoluer,pas en arretant le cigare,mais en repassant les memes textes pendant 30 ans , ca lasse dans les chaumieres..