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Le Chemin de crête : Jean-Luc Mélenchon soutient Bellaciao... Merci Jean-Luc

Publie le lundi 2 octobre 2006 par Open-Publishing
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A Cuincy, dans la circonscription de Marc Dolez, près de 200 militants socialistes de différents groupes hier encore hostiles à une motion commune du non au congrès du Mans ont choisi de soutenir la candidature de Laurent Fabius. Du premier rang, je photographie les responsables qui ont enfin fait le bon choix : Marc Dolez pour Forces militantes, Gérad Filoche pour la revue Démocratie et Socialisme, Jacques Généreux le poisson pilote d’Henri Emmanuelli.

de Jean-Luc Mélenchon

Nous devons nous préparer à un moment difficile au parti socialiste. Après le dépôt officiel des candidatures, l’ouverture du débat interne nous enjoint de présenter nos arguments. Nous n’avons certes pas attendu pour le faire.

Mais dorénavant c’est une obligation pour chacun. Si nous n’avions pas de solides raisons, pourquoi soutiendrions-nous celui-ci plutôt que celle-là ? Mais présenter ces arguments est dorénavant un enjeu en soi. Une nouvelle injonction au silence dans les rangs déverse à plein régime ses flots autoritaires. C’est la quatrième vague de ce style.

Pourquoi ? Parce que les semaines de débats sont un vrai enjeu qui peut modifier la donne et percer la bulle d’hypnose hystérisante qui entoure l’actuel Dysneyland de la pré campagne d’investiture socialiste.

Comme les précédentes, cette nouvelle déferlante a pour but essentiel d’émanciper les griots d’avoir à justifier par des arguments rationnels les incroyables déclarations de leur chef de file. Cette stratégie de l’empéchement du débat, c’est la principale constante du blietzkrieg des Royalistes depuis le début.

Dès le premier jour, les partisans de Ségolène Royal ont commencé leur campagne par un ample terrorisme intellectuel de type sexiste. Toute critique prouvait la mysoginie de son auteur. Quoiqu’il dise, il était disqualifié. Un véritable sexisme inversé se mit en place. Quoi que l’on dise, on trouvait toujours l’illuminé de service pour reprendre l’antienne osée par Ségolène Royal elle-même à un journaliste américain qui lui demandait quelle était sa politique étrangère : "est-ce que vous oseriez poser la même question à un homme ?" Puis nous avons eu le pilonnage à propos du "front anti-ségo". Dans cet "angle", comme disent les gens de médias, toute critique exprimerait en réalité le point de vue d’un "front anti-ségo". Un front sans contours, sans visage, catégorie disqualifiante, globalisante où rejeter toute critique et celui qui la portait. Peu importait ce qui était dit. Les aventures du "front anti ségo" fournissait la grille globale de lecture dissolvant la validité tout argument particulier dans une catégorie générale de ce qui s’avérerait n’être qu’un prétexte au compte du "front anti ségo".

L’expression elle-même "anti-ségo", invention des simplificateurs médiatiques (cinq colonnes barrant une page du journal "Le Monde") jamais vraiment désintérréssés, dans sa familiarité, conduisait à donner cette allure de chamaillerie de cour de récréation qui est une autre façon de disqualifier la critique. Cette dénonciation du "front anti-ségo" s’est combinée de longue main avec la mise en scène de la lutte entre les "éléphants et la gazelle". J’ai eu l’occasion de dire que le féminin d’éléphant n’était pas gazelle. Mais on connait le résultat : quiconque contestait la divine s’avérait être en réalité un agent des éléphants, c’est à dire de l’appareil conservateur du parti. C’est sans doute la plus belle réussite de propagande de cette campagne et je veux la saluer. Elle a permis de donner à l’explosion sondagière de Ségolène Royal une allure d’insurrection contre l’appareil du parti. Elle l’a même renforcée. Pourtant, en réalité, au même moment elle redonnait à cet appareil dans sa fraction la plus brutale,une légitimité sans précédent.

Chapeau ! Ainsi sur "France 2", le soir de l’annonce de sa candidature, une petite trompette klaxonnait en voix off pendant que passaient les images de la foule en délire "seule contre tous Ségolène Royal etc etc..." Cela, le jour même où Mauroy et une rangée de faces de pierre de la bureaucratie de la fédération du nord avaient devancé de quelques heures les génuflexions des autres gentils organisateurs de la fédération des Bouches du Rhone. En arrière plan, les bourreurs d’urnes de l’Hérault saluaient de loin. La gazelle, "seule contre tous", ceux qui n’appartiennent pas à cette bande de rénovateurs échevelés, ne peut compter par ailleurs dans l’appareil du parti que sur les cinq premiers numéros de sa hiérarchie en comptant bien sûr que le Premier Secrétaire est neutre comme cela va de soi. Tout ceci est un montage. Réussi. Joie pure dans la bureaucratie du parti qui a survécu au 21 avril grace au congrès de Dijon, survécu au "non" au référendum grace au congrès du Mans sur la ligne "dorénavant c’est comme auparavant". La voici miraculeusement repeinte et légitimée en gazelle pour vendre du Blair à des nigauds qu’on affole avec l’emballage.

C’est le moment de la quatrième vague "d’extermination définitive des bandits mal pensant" comme disait Tchang-Kaï-Chek qui finit pourtant à Taïwan, adresse si vivante dans nos mémoires. Les débats télévisés, les débats en général et en particulier, les critiques, tout est de trop. "Il faudra bien qu’ils expliquent pourquoi ils ne veulent pas de la favorite des sondages". Mais ils l’expliqueront en silence et sinon sous les huées. Je forme le voeu que nous soyons en état de relever ce défi. Tous les journalistes, hommes mais aussi femmes, ne sont pas prêts à contribuer pendant cinq semaines de plus au roman photo manipulateur qui s’est mis en place. Quand à nous, nous défendons l’essentiel. C’est à dire le droit pour un militant politique de prendre ses décisons d’après lui-même, ses valeurs, son expérience, sa mémoire, son esprit critique. Le temps du débat est celui de notre honneur au sens intellectuel le plus élevé.

Nous ne donnerons pas de leçon, nous. Nous ne demanderons à personne de céder à nos arguments pour quelqu’autre raison que pour leur valeur. Nous allons avoir la tache ingrate d’être les empêcheurs d’aduler en rond. Mais il n’y a pas d’autre chemin praticable pour nous. Avant d’avoir à coller des affiches contre la carte scolaire, pour le permis de séjour saisonnier, l’incarcération des jeunes en centres militaires, la mise sous tutelle des allocations familiales, l’intervention de Bill Clinton au Liban, et les bonnes idées qui viennent de droite ou de gauche, il ya quelques semaines pour être encore de la gauche dans laquelle nous sommes nés.

http://www.jean-luc-melenchon.fr/article/blogview/134/1/1/

Le Chemin de crete

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