Accueil > Ni guerre ni paix !

Ni guerre ni paix !

Publie le lundi 31 mars 2003 par Open-Publishing

Tout semble avoir déjà été dit sur la guerre contre
l’Irak qui vient de débuter, même si, en réalité,
cette guerre dure depuis dix ans et que la phase
présente n’est qu’une intensification de l’effort de
guerre des Etats-Unis et des Etats alignés sur leurs
positions.
Le changement radical vient du ou des mouvements
d’opposition à ce conflit. Car ce qui domine le
mouvement anti-guerre - en Europe, du moins - c’est
bien ce qu’on doit appeler un immense fatras
idéologique et la formation spontanée d’un vague
consensus contre l’ennemi public n°1, Mr G.W. Bush.
On voit ainsi se côtoyé dans un bel élan d’humanité
toutes les tendances politiques, de l’extrême-gauche à
l’extrême-droite, celles-là mêmes qui, il y a peu de
temps encore, usaient d’une rhétorique fratricide pour
sortir du lot et recueillir quelques misérables voix
dans un cirque électoral auquel personne ne croit
plus, et avec raison.
Au premier rang, les organisations de gauche et
d’extrême-gauche, fidèles gestionnaires du capital
depuis une vingtaine d’années, réactivent les vieilles
méthodes de l’anti- impérialisme US et de la
résistance anti-fasciste. Après l’effondrement de leur
idéal capitaliste d’Etat en Russie, elles tentent à
présent de se reconvertir dans le démocratisme et le
citoyennisme, les uns s’attelant à cette tâche dans
les couloirs ministériels, les autres dans la rue, au
contact du « peuple d’en bas ». Ces ridicules
atermoiements les amènent finalement, à soutenir,
implicitement ou explicitement, ce grand
révolutionnaire qu’est Monsieur J. Chirac, d’abord
contre la « bête immonde » du fascisme (l’entre-deux
tours des élections présidentielles), puis, à présent,
en qualité d’ardent pacifiste et défenseur des droits
de l’homme, de la paix et de l’amitié entre les
nations. Tout cela laisse rêveur, notamment lorsqu’on
pense aux multiples expéditions néo-coloniales menées
par la France sous la direction de ce même personnage
depuis vingt ou trente ans, la dernière en date étant
la Côte d’Ivoire…
Du côté de la droite et de l’extrême-droite, cela ne
change pas plus : grandeur de la France dans le monde,
défense des valeurs de l’occident, intérêts supérieurs
de la nation, etc., voilà les vieilles lunes des
représentants usés mais toujours zélés d’un
capitalisme national soumis au sacro-saint intérêt
général. A leur côté, une frange d’intégristes
religieux dont le modèle politique est la théocratie
fondée sur le respect des valeurs saintes de la loi
divine. Rien, là non plus, de bien nouveau sous ce
ciel sombre.
Tout ce beau monde se retrouve ainsi, bon gré mal gré,
à manifester ensemble, à se joindre à cette grande
foire de la contestation nouvelle, pour des motifs
forts différents, il est vrai, mais n’en doutons pas,
entièrement dévoués aux prolétaires du monde entier et
au bien-être général.

Mais pour celui ou celle qui se retrouve à contempler
cette mascarade, qui refuse de se laisser embrigader
par ces pâles idéologies de substitution, qui comprend
spontanément que, pour toutes ces grandes têtes
molles, l’appropriation de la richesse mondiale
demeure la seule raison d’être, pour
celui-ci/celle-là, la brèche par laquelle s’introduire
pour envisager d’autres rapports sociaux est bien
étroite. Le dieu pétrole impose à tous ses cultes - le
maintien de la stabilité politique et de la prospérité
du capital dépend de sa providence - et malheur à
celui qui refusera de plier l’échine !
Après un vingtième siècle fait d’innombrables
mystifications, il reste, pour ce prolétaire, à
contempler le navrant mais logique spectacle de
nations qui s’entredéchirent pour un butin de misère.
Mais de ce brasier ne pourrait-il pas sortir de
nouveaux rapports sociaux, un monde qui ne soit pas
construit sur le travail abrutissant et la discipline
technologique ? A ce qui reste encore une hypothèse
plus ou moins lointaine, la seule condition est que ce
même prolétaire cesse de s’en remettre à un pouvoir
quelconque, partis ou syndicats ; qu’il lutte, par sa
propre organisation, pour ses seuls intérêts réels :
l’abolition du salariat et de son prolongement, la
misère de masse.