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Au Portugal s’ouvre la campagne référendaire sur l’IVG

Publie le jeudi 1er février 2007 par Open-Publishing
4 commentaires

Lisbonne . Pour la deuxième fois en dix ans, les électeurs portugais sont appelés à se prononcer sur la dépénalisation ou non de l’avortement.

Le coup d’envoi de la campagne référendaire sur la dépénalisation de l’IVG au Portugal a été officiellement lancé hier. Mais, partisans et pourfendeurs d’un assouplissement de la législation portugaise sont déjà à l’oeuvre, tandis que l’issue du scrutin se fait chaque jour plus incertaine. Si les intentions de vote en faveur du « oui » sont toujours majoritaires, avec 38 %, le « non » a - cependant gagné du terrain ces dernières semaines. Avec 28 %, l’abstention grimperait également. Dimanche dernier, ils sont descendus dans la rue aux cris de « la vie est belle nous ne pouvons en finir avec elle », présentant sur un même plan l’avortement et la peine de mort. Les principaux ténors du CDS-PP (ultra-droite) ont pris la tête du cortège, qui a réuni près de 10 000 personnes. Cette grand-messe réactionnaire a vu aussi défiler plus d’une vingtaine de militants du Parti nacional renovador (extrême droite).

Bien qu’elle s’en garde officiellement, l’Église, encore très influente au Portugal, y a été de son sermon, le père Tarcissio Fernandes Alves osant même déclarer que « les chrétiens qui voteraient "oui" s’exposent automatiquement à une excommunication ». Des croix, portant la mention « victime de l’avortement » ont même été plantées sur des passages publics.

De leur côté, les partisans de la dépénalisation ont opté pour une campagne placée sous le signe « d’un oui responsable », en usant de l’argument selon lequel la nouvelle loi ne serait pas contraignante, mais permettrait aux femmes d’avoir recours à une IVG légale et surtout respectueuse.

Car, si la loi en matière de droit à l’avortement est extrêmement limitée, sa singularité est surtout d’être répressive à l’encontre des femmes ayant avorté et des praticiens. Ils peuvent respectivement encourir une peine de prison pouvant aller de trois à huit ans. Depuis 1998, date d’un premier référendum où le « non » l’avait emporté, 17 femmes ont été condamnées pour avoir avorté puis ont été par la suite assujetties à des amendes. Pour le camp du « oui », il s’agit donc de légiférer une loi criminalisant la femme. Ses militants mettent également en avant les questions de santé publique et de justice. En limitant le droit à l’IVG, les autorités portugaises ont de fait ouvert les vannes de l’avortement clandestin. La situation est d’ailleurs schizophrénique : alors que l’avortement reste une question taboue dans la société, il est de notoriété publique que l’on peut provoquer un avortement en ayant recours à des comprimés, tel que le Cytotec, en vente libre, par exemple, sur Internet.

Pour le camp du « oui », il s’agit de créer le cadre légal et surtout des conditions décentes de pratiques de l’IVG, afin de mettre un terme aux complications médicales suite à des avortements de fortune. Il rappelle également combien la loi est discriminatoire à l’encontre des femmes socialement pauvres, les autres pouvant opter pour des cliniques privées à l’étranger, particulièrement en Espagne.

Dans son ensemble, la gauche - partis socialiste et communiste ainsi que Bloco de esquerda (extrême gauche) - fait corps pour le « oui ». À plusieurs reprises, le premier ministre socialiste, José Socrates, s’est employé à expliquer que cette loi « modérée, sérieuse et responsable » permettait « d’atteindre un consensus équilibré entre convictions et liberté ». Une posture qui tranche avec celle d’Antonio Guterres, premier ministre socialiste à l’époque du premier référendum, qui avait usé de sa fonction pour prôner le « non ». L’engagement n’évite pas la controverse. « Si le PS est en faveur de la dépénalisation, si le premier ministre porte un sérieux intérêt pour la question, (...) il aurait suffi que l’Assemblée de la république vote cette dépénalisation », a rappelé Francisco Moita Flores, universitaire et élu du PSD (centre droit) qui appelle à l’abstention. Une allusion au fait que le PS, qui détient la majorité absolue au Parlement, aurait pu modifier la loi sans en passer par une consultation référendaire. Et éviter ainsi le risque d’un statu quo méprisant et criminel pour les femmes portugaises.

Cathy Ceïbe
 http://www.humanite.presse.fr/journ...

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Messages

  • Selon la loi référendaire en vigueur, les portugais résidents à l’étranger peuvent participer à toute consultation publique dès lors que le sujet traité « les concerne spécifiquement » !

    Formulation assez alambiquée pour permettre au Tribunal Constitutionnel de considérer que ce sujet ne les concernant pas « spécifiquement » en tant qu’émigrants, le référendum sur l’avortement ne concernera donc que les électeurs recensés au Portugal.

    C’est donc l’immense majorité des Portugais résidents à l’étranger qui est écarté de ce vote si important !

    Peur des « mauvaises influences étrangères » ?

    Le silence de l’ultralibéral Président de la Commission Européenne, ancien premier-ministre de droite, Durão Barroso, devient assourdissant surtout si on le compare à son interventionnisme abusif et militant dès qu’il s’agit de prôner la dérégulation !

    Elle est pas belle la « construction européenne » ?

    Pedro DA NOBREGA

    • Il ne faut jamais oublier que la légalisation de l’avortement qui a toujours existé même en dehors de tout cadre juridique vise d’abord à la prise en charge dans des conditions sanitaires
      correctes les interruptions de grossesse. Je suis sage-femme et j’ai très bien connu la situation en France avant la Loi Veil (Janvier 1975),j’ai vu des femmes mourir de septicémie des suites de manoeuvres abortives délétères. Demandez à tous ceux qui ont connu cette période,ils vous diront les drames et les révoltes qui furent les leur. Avorter n’est jamais une cure de plaisir mais nous devons tout faire pour limiter les dégats.Il faut dire aux jeunes générations ce que furent à cette époque les combats du MLAC et que ce droit conquis de haute lutte reste fragile et peut
      à tout moment être remis en cause.France Furby

  • http://www.elections-presidentielle...

    Cet article montre comment la non remise en question d’un 2e référendum sur l’IVG au Portugal (pour des raisons idéologiques pro-avortement) force l’esprit honnête à se poser la question d’un 2e référendum sur la Constitution Européenne en France.