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Pour recommencer à parler d’Amnistie

Publie le lundi 26 février 2007 par Open-Publishing

Extrait de "Vademecum", éd. Quadernid

de Oreste Scalzone, Paolo Persichetti et Paolo Godani

Nous pouvons nous le dire, nous le répéter les uns les autres tour à tour, les copains, copines, présences amies (et aussi plus distantes…) : qui dit « mouvement » dit aussi quelque chose de presque autrement complexe, contradictoire, énigmatique, fugace, incompréhensible au "premier coup d’œil" et irréductible pourtant aux simplifications, aux catégorisations de jugements, à la morgue suffisante.

Cela dit, c’est aussi quelque chose entre autres inouïs et inédits, d’indicible même*, de résistant, d’enthousiasmant et de désespérant, pour qui entend dire le monde comme il va. À qui veut dire… la vie, l’être au monde, le temps, le sens ou aussi seulement… les espèces, « la race humaine », ou que sais-je, "libération" ou "travail"…

1. La préhistoire

Lorsqu’en 1978 ( soit un peu plus de la moitié du temps qu’on estime s’être passé entre Hiroshima et ce soir…), un quatuor d’entre nous, Del Giudice, Frank Piperno, Scalzone, Zagato…(noms tels à tant d’autres qui seraient depuis passés à l’avant-scène du « Cirque médiatisé de masses de l’Inquisition d’Urgence » ouvert au public, après la Nuit inaugurale du 07 Avril 1979 à la Fac’ de Lettres), ce moment donc, de ce « quatuor » d’entre nous qui s’est avancé au grand jour sur la place publique, en donnant de la voix tous azimuts, en une réflexion à haute voix sur le thème de l’AMNiSTiE, est à mon avis un moment qui vaut la peine d’être rappelé, avec ingénuité bienveillante**, d’autant qu’il nous semblait que la difficulté (passez-moi l’euphémisme) serait venue d’ »en haut », de l’adversaire » ou comme on veuille autrement appeler l’ »ennemi » (nous l’avions perçu comme tel, ce qui a été l’objet de larges révisions par ailleurs, et, encore dernièrement, avec ce propos -qu’on n’aurait pas tardé à apercevoir- assorti des bénéfices tirés par « ceux qui seraient avec le temps passés à autre chose » et les « dehors/dedans mélangés ».

Au lieu de cela, ce qui pouvait paraître passer pour une expression évidente, naturelle (ce qui est, bien entendu, comme si=une apparence…), sonne un peu comme « Pain, paix et liberté ! » de naguère en d’autres lieux ; ou, pour en revenir à nous, « Plus de sous et moins de travail ! », « Revenus d’existence- et non de subsistance ! », « Reconnaissance égale pour tous des diversités et du Différent ! », s’est révélée une formulation (« Amnistie ! ») jamais autant mal aimée que d’autres.

Presque frappée d’un sortilège, une inhibition, une auto-censure, avant même de pouvoir être formulée « à fleur de lèvre », murmurée entre nous, scandée en syllabes, ne serait-ce que pour la prendre en compte et en discuter…

2. Une formule mal comprise

Amnistie, Amnistie ! fut une formule mal aimée (je ne me permettrais pas de dire « mal comprise »). Trop « day after »/ post datée, rimant trop avec défaite (et ce qui était incontournable était que la raison pour laquelle cette formule était avancée comme « quelque chose à revendiquer » revenait à ce qu’on reconnaisse qu’il y avait bien eu défaite).

« Revendiquer », « revendication » : ne pas « mendier », et/ou « réclamer » : « revendiquer » dans le sens que ce terme revêt dans le « social », et, en ce cas, déjà plus dans le sens syndical, de demande, conflits, « précuits », prévus, « rabotés » entre des bornes très rigides de « comptabilités », en vue de concertations rigoureusement défensives, de résistance, donc dominées par l’assimilation de cette idée que la vie est « variable dépendant » en rapport à la logique de l’économie, du système, autant que de la Raison d’État ( en tant qu’ils sont moyen et fin, outil et horizon, qui ont raison d’être, « en soi et pour soi »).

3. Pour ne pas parler de défaite

« Défaite » : d’un point de vue « matérialiste critique », évidemment, il n’est pas possible de l’exclure (défaite dans une guerre, une bataille, défaite d’un cycle entier). Que celle-ci ne doive pas, ne doive pas être considérée définitive et totale, bien entendu, est un point important : la Commune est, par certains côtés, quelque chose qui n’est jamais mort, comme le dit la chanson ; qui par-delà parle de futur ; mais que, sur un plan d’immanence, sur le terrain de l’immédiateté et de la factualité effective, celle-ci ait été dispersée, nous semble à nous incontournable, et le non-vouloir/non-pouvoir le reconnaître est fourrier de mortification, effet « mortifère » de vertige « subjectiviste » mortel autant que le Vol d’Icare.

Mais ainsi en allait-il dans les passions, dans le pathos paré en Théorie, Éthique publique, Raison révolutionnaire ! (même si celle-là est la complexité extra/ordinaire, toujours en équilibre entre sublime et démentiel, de ce qui s’appelle « mouvement »***). Revendiquer une amnistie parut implicitement se rendre, tout comme s’être arrêtés**** ; énoncer la défaite était vécu comme y croire, comme anticipation d’une défaite à tel point annoncée, un défaitisme qui aurait été « prévision créatrice », « prophétie s’auto réalisant », « mauvais œil ». À peine un demi pas de côté, et « Amnistie ! » était une mal aimée, dépréciée, désagréable, haïe, contestée, déformée, calomniée d’un point de vue opposé, en symétrie spéculaire d’un invisible miroir/écran. Tout cela n’était ni « noble » ni « démentiel », et au début était un peu infime, avare micro-corporatif. Puis, c’est devenu, en pointillé, et à chaque fois, « aussi gratuit » ; sans « utilité » nécessitation, vraie. Presque au point que « si ce n’est pas exclusif, cela ne nous intéresse pas ».

4. Un soubassement commun

Il y avait, entre l’une et l’autre issue, un soubassement commun : non seulement dans la méthode, dans l’intolérance, dans le caractère catégorique, immédiatement irrité par qui disait d’autres choses****, ne se situe pas sur la même ligne, ne confirme pas des attentes ni ne s’y conforme. Une sorte de discrédit, nourri par ce scandale de ce fait même que ce soit n(importe quoi et n’importe qui d’autre. Ce dénominateur commun, par exemple, chez les continuateurs dans l’auto affirmation de demeurer identiques à eux-mêmes ; ou chez ceux qui absolvaient ce qu’il se disait et est « dans l’instant » en tant que c’est une issue, nous semble-t-il, unilatéral, de quelque façon, par rapport à la dialectique entre éléments, effronteries, « composants » de celle qui avait été un même dénominateur commun de « mentalités » : la super simplification binaire, dichotomique, pour contrepoints absolus allant par paires, tellement spéculaires, symétriques au point de se retrouver chacun au revers de l’autre.*****

5. Les cycles de l’amnistie

Après 3 cycles de 7 à 8 ans
78-87 : l’isolement absolu « amnistie » comme parole de vent », telle qu’ un disque rayé l’incluerait, l’épaisseur du fil d’un rasoir, d’un funambule ou qu’aussi hésitant que cela puisse être.
87-97 : « tournants », convergence, illusions. Trop peu d’audaces pour être réalistiques. Chant du cygne et pierre tombale, la loi de remises de peines en Commissions Parlementaires « Justice ». Puis, de 97 à maintenant, silence assourdissant ; « doute à en parler ». Maintenant, si en successions d’occasions en chaîne, Panella séquence le temps/fait la chose pertinente au bon endroit, au bon moment/ do the right thing. Ai-je le droit de dire à ceux d’entre vous qui « continuez à dire hésiter à en parler », avec une unanimité seulement rompue par de précieuses exceptions dont la vôtre, qu’Amnistie est
une notion sans référence possible****** ?
Ou même si je dis : « mais nous voulons dire oui à une petite remise de peine qui écarte les désespérés ; qui libère des épées de Damoclès et décharge d’hypothèque les 4000 manifestants new global ; ainsi que si je dis que nous voulons commencer à ouvrir la discussion sur un échéancier de « solutions », sur n’importe quelle initiative préliminaire, sur les pré conditions ? Peut-être après de désespérants isolements, puis « des faux départs/faux mouvements », et puis retomber en arrière, cette fois-ci est la première en laquelle « Amnistie ! » est, en quelque sorte, virtuellement adéquate, et non plus mal-aimée par l’ensemble du Mouvement.

6. Hyperréalisme de la raison politique

Peut-être mon « déclic » n’est-il pas utile à qui s’est soudain mis (déjà) en mouvement (tels les Cobas, Papillon, vous…) pourrait-on me rétorquer : évidemment, ce n’était pas un « bloc/kit » total, un tabou tel que celui que révèlent ces silences et les vociférations des « trop absents »*******. C’est précisément pour cette raison qu’il est nécessaire (nous qui réfutons à ce sujet l’aliénation politique, la réduction de la vie au périmètre, limites, et bordures de ce « formatage » du Politique), de raisonner en termes d’ »à la guerre comme à la guerre…
Rasoir d’Ockham********. Bistouri à fleur de l’hyperréalisme de la « raison politique ». Voilà : cela ne nous surprend pas. Ce n’est pas comme une hésitation avant le saut, ou devenir « parcimonieux » à l’improviste « comme qui n’aurait, finalement, que son magot à perdre********* ».

Si on se renferme, en court-circuitant, en se précipitant sur une plateforme, réclamée à corps et à cris, ou un projet de loi (d’amnistie), ou un document, ce serait un « péché/dommage/gâchis ». Si nous ne voulons pas une issue certaine, comme lors des remises de peines de 1997, il faut agir sur certaines pré conditions. Ne serait-ce que pour être réalistes, il faut garder un vol haut et aller au plus profond. Calculer ses angles préliminaires**********. C’est de cela dont je voudrais maintenant vous entretenir, dès ce soir.

7. L’exemple sud-africain

Au cours des journées de vociférations sinistres et obscènes CONTRE LES PRESCRIPTIONS************(de la « phase de lancée » évoquée ci-dessus,) quelqu’un avait fait allusion à la « raisonnable » idée directrice d’une solution politique d’amnistie regardant le contentieux jamais résolu –même si, « résidu toujours plus irrésolu » — des ainsi dites « années de plomb » ( les années de cette qualité qu’avec un regard d’ensemble et la distance nécessaire, pourrait bien être définie comme longue onde de choc d’agitation sociale, terreau de culture en production d’un « état de soulèvement endémique prolongé, subaigu et chronicisé »). Mais en ces intervenants, la « Chose » se concevait liée à l’exigence suggestive, en forme de porte de sortie honorable ( ce à quoi tant de « têtes pensantes » se sont appliquées) jumelle de la « Commission Vérité et Justice » d’Afrique du Sud « de Mandela ». Maintenant – comme d’autres l’avaient pertinemment souligné – articuler les deux choses se révélait inapproprié, et la mise en route de ce type de commission comme pré condition à une amnistie serait résulté détourné et inique/injuste. Dans l’expérience sud-africaine ( mises à part de nombreuses autres différences de traits), c’était en fait des personnages de toutes les parties en cause qui se confrontaient autour de la Table de cette Commission d’enquête : il y avait l’A.N.C. et Winnie Mandela, et les responsables de l’Apartheid, les De Klerk… il y avait les Noirs et il y avait les Afrikaners, les immergés et les sauvés, les oppresseurs et les rebelles, les factions… D’une certaine façon, il me semble qu’on puisse dire de ce procédé qu’il aurait ressemblé au plus ( même si je reste allergique à l’appellation) l’idée de « Grand Repentir » d’Alberto Cossiga…

8. Les corrections de route (les reports de corrections d’angles prélevés au sextant permettent d’établir, entre cap estimé et cap vrai, la route… N.d.T.)

À faire s’entrecroiser les choses, on aboutit à des absurdités*********** dignes de propos de couloirs obscènes tels qu’on a dû les subir, dans la « phase de lancée », d’un Giovanardi ou d’un Montefoschi (cf. : les démentielles indécences sur les « terroristes rouges », en tant que fils à papa roulant en petits spiders » !, riches qui braquaient des pauvres et ont été chouchoutés par les intellos de Gôche !) : il reste à envisager que le « lieu », l’emblème paradigmatique des impunités, de la soustraction à ses propres responsabilités, des « mystères sur lesquels faire passer la lumière », dévierait un coup de poing venant de nous autres mêmes, un coup de poing d »enculés » de fugitifs ! Peut-être devrions expliquer aussi l’Ustica ? Fausto Bertinotti et Massimo Cacciari, avec la politesse qui se doit à une erreur qu’on présume « de malentendu », expliquaient que les deux plans et les temps devraient être séparés : une amnistie, qui est toute autre chose, et puis éventuellement viendrait d’elle-même la « table »… Peut-être – même si , fort probablement — au risque de surprendre et d’attirer au minimum à coup sûr la perplexité, ou de la réprobation aussi et autre forme d’hostilité à l’occurrence y compris mal-pensante ( et médisante, malveillante, malintentionnée) méprisante, de la part de nombre de ceux qui s’impliquent aussi dans ce qui se donne, même au sens large, comme « notre camp », (y compris peut-être une grosse part de ces « silencieux assourdissants », de ces « néanmoins à bien nous regarder et étant donné l’ambiance ») ; en sachant en conséquence de risquer peut-être perclure d’amertume, désenjouer, endolorir certains et certaines, je serais enclin à dire : l’important est de disjoindre.
Si revendiquer dans ces conditions une mesure concrète de « renoncement à la peine » devait être seulement l’occasion offerte à une manière de sordide (en certains cas connus, intentionnels ; autrement comme effectué, comme résultante « systémique ») « jeu de la cruauté », revient à congeler la revendication explicite d’amnistie, et relancer – en prenant au mot qui l’a soulevée – la proposition, le défi, de la « Table » sur le modèle de la Commission d’enquête en Afrique du Sud.

9. Le nom de la Table************

En vue de cette « Table ronde », il est improbable que partir de « l’intitulé » général, qui ne peut être que « politique et crime » - dans l’Histoire, dans la pensée juridique, éthique, critique, politique. « Crime » de Gouvernement, « crime » de la « Raison économique », crime de la « Raison d’État »… « crimes » d’idéologies, de révolutions, de « Justice pénale » - et aussi de justice —, ou de liberté, ou – pourquoi pas ? – d’amour…
Donc : de cet immense « livre », nous autres pourrions-nous constituer un chapitre, non pas en entier, ni non plus la quintessence… Une fois la chose remise sur des jambes, la discussion sur les légitimités, le sens et les non-sens, de la mémoire et de l’oubli, de la peine et du « renoncement à la peine » — ou « oubli judiciaire » —, peut procéder de façon non cavalière et spécieuse, viciée et en définitive impuissante. Et donc, un débat pourrait s’amorcer, aussi contradictoire sur une amnistie, ou amnistie/remise de peine, bien que sur mesure « de genre amnistiable ». Pour l’instant, le propos s’arrête là : à ce défi de voir enfin dressée la « Table ». Non sans anticiper un détail que je reprendrai plus tard : l’offre renouvelée à « y mettre du sien ». Parce que « une amnistie est aussi toujours réciproque » : amnistie du contentieux, des « comptes », « crédits », identité des « victimes », pourcentage de « faute ». Cela n’a rien à voir avec les apaisements des conflits. C’est pourquoi en reviens-je à l’idée directrice – qui est, pour l’énoncer avec Foucault, diverse autant en utopie qu’en velléité – d’un abolitionnisme pénal radical (nous aurons l’occasion de revenir là-dessus).

Traduit de l’Italien par Sedira Boudjemaa, artiste-peintre ;
Nîmes, le Vendredi 22 Février 2007.

Notes du traducteur :

*Cf. : Héraclite (« On ne se baigne jamais deux fois dans la même rivière »), complété par Parménide (« Et pendant ce temps là, il se passe partout ailleurs autre chose, de l’ordre de la chose et du temps ».)

**Combien tu as raison que de nous offrir le regard de l’indulgence enjouée de l’enfance : « Souviens-toi du bonheur simple des jeux d’enfants »

***Le mouvement, en tant que tel, ne « s’appelle pas », mais il se densifie, se disperse, s’éparpille, se concentre ou s’éclate. L’appellation de « mouvement » est déjà une réification du phénomène lui-même, tel qu’en atteste la volonté,
le concentré de pouvoir des appareils à chevaucher, à contrer, à dompter, à « arrêter le mouvement » en captant l’attention de certains éléments, en énonçant le mot, iront s’abîmer sur les récifs des Chimères (cf. : « L’Odyssée » d’Homère)

****cf. : décalage/ intersubjectivité/ correction d’angle, entre cap estimé et cap vrai.

*****cf. « Alice au Pays des Merveilles » est un conte de Vieux Monsieur propre à endormir les petites filles et à les garder dans son giron de Légende à dormir debout. C’est pourtant un vœu de Don, de transmission initiatique que charrie le dispositif « Miroir », dont l’expérience qu’on en fait est vite rattrapée par Bergson qui souhaiterait qu’il épouse « parfaitement » Henri… c’est-à-dire « chiant »… comme une hyper-trophie d’égos de chasse à se mettre en bandoulière ! ou voir encore « Un tramway nommé désir » : le personnage de « Blanche ».

******une sorte de principe de Droit absolu suspendu au-dessus de la Loi. Une méta notion intangible sur la question de l’autonomie du législateur par rapport à l’exécutif
et au législatif à la fois ?

******* « trop absents » : dans le « jargon » familialo-groupusculaire des réfugiés italiens des années 80 à nos jours, cette expression désigne sans les nommer les présences par leurs idées, suggestions, thèses, propositions des camarades reclus, mais qui ne peuvent évidemment réagir « à chaud ». On « compte avec eux », dans un espace à la démesure de leur absence : la démesure est faite de culpabilité, mais aussi de pouvoir de ce que pourrait/devrait/aurait à dire « quelqu’un qui n’est pas là »… Cette ambivalence n’est pas que douloureuse, elle produit aussi une « étrangeté » et de la « distance » d’avec le conditionnement de la normalité : un décalage…, parfois du cran.
******** « rasoir d’Ockham » : un plan/séquence est consacré dans « Le Nom de la Rose »-le film à ce foutu rasoir. Plus simplement et pour ceux qui n’auraient pas vu le film, le coupe-choux de Guillaume d’Ockham est l’objet d’une réflexion sur « La Méthode », bien avant celle de Descartes. Selon l’angle d’inclinaison du tranchant, le côté où l’on se place, et la façon dont on passe le fil, on coupe le poil ou l’on se coupe…
********* « angles préliminaires » et cf.« corrections de route » : il s’agit là de termes organisationnels (tel « Que faire ? » de Lénine) que je rapporte à ceux des « Gens de Mer », précisément parce que les réfugiés se trouvent dans une situation où « rien de ce qu’ils ont vécu » n’a d’écho au dehors, rien de l’énergie qu’ils émettent ne paraît avoir de récepteurs correspondants, et qu’ ils se demandent à chaque pas où ils se trouvent, sans recours possible aux instruments de bord des « Gens de mer » ; les reports de corrections d’angles prélevés au sextant permettent d’établir, entre cap estimé et cap vrai, la route. Sinon, on dérive. Sur Terre, sans boussole on s’écarte et l’on s’épuise en détours… Avant qu’ils n’assimilent comment les différents milieux réagissent (ou non) autour d’eux, s’accumulent des mois et d’autant les fausses routes et les déconvenues…

**********gruzoletto : est le type même de « faux-ami », dont, une première lecture sans dictionnaire, me l’a d’abord fait traduire par le diminutif de « grumo »=caillot, ce qui donnait, dans la construction sybiline de la phrase : « parcimonieux, à l’improviste, comme qui n’aurait que des grumeaux (dans la cervelle, sottointeso, de fromage blanc) à perdre »…
Outre qu’il m’a bien fait rire, j’ai trouvé ce faux-ami conforme à cet interface qui surgit dans l’ombre de la lame du « rasoir d’Ockham »…

*********** « contre les prescriptions » : il s’agit de la démagogie « bien-pensante », dont il faudra bien qu’un jour ou l’autre nous la mettions sur la table même où les social-démocraties mondiales re-jouent et re-produisent interminablement leur parodie de La Cène en notables repus, capables du pire à l’endroit de « ceux qui » se seraient « écartés de leur droit chemin ». S’ils sont en prison, ils avaient qu’à ne pas y aller, et s’ils s’y trouvent, il n’y a aucune raison qu’ils en sortent ! Sous un autre vocable, on appelle les « n’y a qu’à- ‘faut qu’on », les volontaristes, entre autres sociaux-dém. qui se veulent de « braves gens » n’aimant pas que l’on suive d’autres routes qu’eux… et en rajoutent une louche de « Devoirs » par-dessus « les Droits » lorsque leurs notions méritocratiques et leurs carrières amphithéotiques se trouvent quelque peu ébrêchées par les Danses de Saint-Guy des engouements porteurs des derniers technocrates à la mode…

************les marins parlent de « sacs de nœuds » dans lesquels se « prendre les pattes », et les lardus montent des scenarii pour « faire aux pattes »=arrêter en flag’, ou après planque et perquisition…qui deviennent des « sacs de nœuds », dès lors que leur zèle s’étend aux sphères juridique, médiatique, politique…

*************tutt’ è bene che finisce bene : peccato che dopo tanti anni passati a cercare « Il Nuome della Rosa », abbiamo ora che trovare « Il Nuome della Tavola » !