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Les conditions d’un TSS gagnant

Publie le lundi 23 avril 2007 par Open-Publishing
4 commentaires

Le texte qui suit n’a pas d’autre objet que d’esayer de tracer un cadre général d’analyse d’une situation générale. Il n’a pas pour objet de caractériser, d’évaluer, de porter un jugement, une position sur tel ou tel enjeu de la campagne et des forces politiques qui s’y sont confrontées. Il ne cherche pas à expliquer le comment du pourquoi, les raisons du ou des résultats, les responsabilité des uns ou ddes autres.
Ce texte ne recèle qu’un seul présupposé avoué : il ne faut pas que Sarkozy parvienne au pouvoir suprème de la République. Pour le reste il se veut avant tout réaliste et presque "pratique" dans la mesure où il s’appuie sur des logiques, des données parfois presque excessivement "arithmétiques", donc "neutres" et vides de tout contenu..

Les principales leçons de ces élections se résument ainsi :

1. La participation élevée (85 %) des électeurs et les nombreux nouvaux inscrit indiquent que l’élection présidentielle demeure la forme d’expression politique privilégiée. Et à travers les principaux choix qui ont été effectué, les grands partis ont captés l’essentiel des votes (75% pour la somme Sarkozy, Royal, Bayrou).

2. Le score du candidat Sarkozy (31,15 %) sur une ligne très à droite montre l’existence d’un bloc conservateur extrèmement puissant dans l’électorat. Ce n’est pas encore un ras-de-marée mais déjà une grande vague pouvant en constituer un signe avant-coureur.

3. Le FN perd beaucoup en pourcentage (-37,7 %), un peu moins en voix (-20,6 %). Il y a eu de toute évidence transfert important de voix de Le Pen vers Sarkozy, qui apparaît pour cet électorat plus à droite que Chirac.

4. Le score de Ségolène Royal fait à côté pâle figure. Tout en ayant aspiré une partie du vote dit de gauche de la gauche au nom du vote "utile", elle se situe loins derrière (6%). Et ce qu’on appelle ses réserves de voix de ce côté là sont bien maigre (autour de 10%).

5. Le score de Bayrou apparaît comme l’autre nouveauté de ce scutin. Un candidat du "centre-droit" qui s’est autonomisé et distancié de l’UMP et qui a mordu largement sur l’électorat de gauche.

6. Les "petits" candidat-e-s de gauche. Sans entrer ici dans le détail, ils sont globalement en recul par rapport à 2002, que ce soit ceux qui ont participé aux gouvernements de gauche (PC, Verts) que ceux qui s’opposent à cette orientation (la somme LO + LCR), même si la LCR tire un peu son épingle du jeu.

7. Les "petits" candidats de droite (De Villiers, Nihous) n’ont pas d’espace entre la dynamique Sarkozy et le maintien d’un bloc électoral FN encore significatif de 3.8 millions de suffrages. Leurs électeurs se rallieront à Sarkozy sans trop de difficultés.

Globalement on a assisté à un recul du vote de gauche (36,46% au soir du 22 avril contre 42,89% au soir du 21 avril 2002).

De toute évidence, Sarkozy apparaît comme le favori, avec 5,3% d’avance sur Royal.. Assuré des voix des petits candidats de droite (3,4%) et d’une grande partie de celles du FN, il va chercher à récupérer les votes de centre-droit s’étant portés sur Bayrou.

Et c’est sans aucun doute là que ce situe l’enjeu du second tour.

Le second tour.

Les deux finalistes du premier tour vont tenter d’attirer à eux le maximum des votes Bayrou.
La manière dont il le feront les donnera gagnant ou perdant.

Quelle est la composition du vote Bayrou ? Pour le moins composite : des électeurs de gauche et du centre-gauche, des électeurs du centre-droit, des modérés que Sarkozy effrait, des électeurs apolitiques, c’est-à-dire qui ne se réfèrent jamais explicitement à un camp (cela existe), des écologistes à la Lepage ou Hulot, etc…Le sort du second tour dépend essentiellement de la manière dont cet électorat penchera plutôt d’un côté que de l’autre.

Seulement, Royal et Sarkozy ne se situent pas dans la même urgence ou le même niveau d’exigence vis-à-vis du vote Bayrou.
Pour battre Sarkozy il n’est d’autre solution pour Ségolène Royale que d’attirer à elle la plupart du vote Bayrou (au minimum 15 des 18,5%). Sarkozy peut se contenter d’être un petit peu moins gourmand.

Pour le PS, il est peu concevable que les seuls appels aux électeurs suffiront. Les électeurs de Bayrou ont voté pour leur candidat en fonction de ce qu’il disait et de la manière dont il a été perçu comme personnalité politique. Appeler les électeurs à se ralier sur le vote Royal tout en ignorant celui pour qui ils ont apporté leurs suffrages au premier tour a toutes les probabilités de conduire à l’échec.

Une nouvelle alliance

Alors, comment faire ?
La tentative de rallier une très grande majorité du vote Bayrou sur la candidate Royal a une chance d’aboutir, une seule. Mais elle implique une décision lourde de conséquences, une décision d’ordre stratégique : l’ouverture du PS au centre.
Pas en essayant de débaucher telle ou telle personnalité, ni de modifier un discours de campagne pour l’adapter à de nouveaux électeurs. Il s’agit rien de moins que de rechercer d’une nouvelle alliance, que l’on peut qualifier de centre-gauche. Et pour cela, il faut des gestes significatifs, il faut répondre favorablement à la demande exprimée par les électeurs de Bayrou autour d’un libéralisme social, guère éloigné du social-libéralisme du PS et au niveau institutionnel sur les thématiques de transformation de la République : en finir avec son caractère présidentiel et "monarchique", garantir une indépendance maximale de la justice, la proportionnelle au Parlement, etc….

Pour cela Ségolène Royal ne doit surtout pas continuer sa campagne comme si de rien n’était. Elle n’a d’autre choix que de rencontrer François Bayrou. Elle devra le rencontrer et lui proposer quelque chose qu’il puisse accepter (ou ne puisse pas refuser) afin de sceller un accord politique crédible, que ce soit pour le deuxième tour ou les élections législatives.
Dans les plus brefs délais. Et si elle ne le fait pas, sans doute pour de mauvaises raisons tactiques et/ou d’égo, il faudra peut-être le lui dire très fort !

Parce que si elle ne le fait pas, si elle ne travaille pas à une issue de type "centre-gauche", nous aurons Sarkozy au pouvoir, une gauche en ruine, un pays dévasté par la mise en œuvre de la politique d’une droite très à droite, offensive, décidée à appliquer rapidement et brutalement sa politique libérale, policière, inquisitoriale, instaurant le régime du mérite pour tout, des droits sociaux au niveau de salaire, la fin du droit de grève, la remise en cause du droit social, etc…

Même si cette perspective était admise du côté de l’équipe Royal, ce qui n’est pas franchement le cas, il y a loin de la coupe aux lèvres. Cette recomposition du champ politique institutionnel se heurte déjà à des résistances internes dans chacun des deux partis.
Il semble que Bayrou n’y soit pas favorable pour l’instant, espérant un affaiblissement du PS et se posant comme ultime recours et celui qui emportera la mise en 2012. Mais au sein du PS, ils sont nombreux à prendre ce prétexte pour ne rien faire et verrouiller la situation, en faisant le même calcul : mieux vaut perdre face à Sarkozy, conserver l’appareil de PS, virer Royal et consort, et se reconstituer des force en pariant sur un effondrement de l’UDF aux législatives….

Mais on est là en pleine logique boutiquière (y compris les jeux troubles internes à chaque boutique), en pleine concurrence pour le leadership dans une future opposition et non dans des logiques stratégiques, d’orientation, d’alliance, de partenariat avec ce que cela suppose d’accord sur les contenus.
A ce petit jeu, il est un seul qui peut se frotter les mains : Sarkozy.
Vouloir battre Sarkozy, c’est aussi vouloir peser sur ces niveaux politiques là, même si la soupe est indigeste.

L’autre gauche

Quant aux forces politiques (partis, association, mouvements…) se situant à "gauche de gauche", l’état de leur division, de leur confusion stratégique et la simple réalité du rapport de force impliquent 3 choses.
 qu’ils renoncent à la politique du déni, du dépit, du pire : s’abstenir, voter blanc, etc… ou croire que rien n’est arrivé et se croire encore en capacité de poser des conditions.
 pour ceux que cela concerne, qu’ils renconcent, au moins provisoirement, à une quelconque vélléité de participation gouvernementale : quand obtient moins de 2% des voix (et même 4% !), il n’est pas sérieux de croire que l’on peut peser à l’intérieur d’un gouvernement. Il vaut mieux s’en tenir à une politique "protestaire" mais indépendante que de viser un "réalisme" ne conduisant qu’à se faire l’otage volontaire d’un gouvernement et donc son complice, sa caution ("sociale "ou "environnementale"…), dans tous les cas se retrouver dans une situation de devoir renoncer à en combattre les orientations, les décicions politiques et leurs conséquences sociales, environnementales,….
 réflechir à de nouvelles propositions politiques et peut-ête ne pas être obnubilés par les incessantes et systématiques participations électorales tant que les logiques de micro-appareils l’emportront sur le reste : compétition qui n’a aucun sens en dehors des cercles militants, épuisements des forces à recueillir les 500 signatures au lieu d’être sur le terrain… L’électoralisme, c’est aussi une question de fins et de moyens.

Il y a sans doute une espace pour une gauche de gauche, d’autant plus large si le PS se déporte sur le centre !
Mais pour l’occuper, il faut commencer par exister, il faut (re)naitre et chercher à croître sur des bases nouvelles, loins des logiques d’appareils, même devenus groupusculaires, loins des positionnements qui conduisent à une satellisation politique autour des "grands" partis de gouvernement, surtout quand des portes de cabinets ministériels s’entrouvrent ! Cette problématique n’entre pas dans l’objet de cet article.

Deux gauches, deux réponses

Il existe deux gauches dans ce pays, opposées et complémentaires, complémentaires parce qu’opposées : une gauche de gouvernement, social-libérale, qui situe son action dans le champ très précis d’une gestion loyale de la société, et une gauche de terrain, de lutte, de mouvement, qui se définit anti-libérale voire anti-capitaliste, traversée de mille contradictions (sur le productivisme par exemple), qui combat la première dans les mobilisaitons sociales mais la soutient électoralement face à la droite, surtout quand celle-ci se durcit, .se prépare à un affrontement généralisé sur les questions sécuritaires, sociales mais aussi idéologiques (mérite, travail, nation, réussite individuelle,…).

En résumé, pour battre Sarkozy , cette configuration singulière des deux gauches et les rapports de force électoraux qui les caractérisent impliquent une double réponse, une double articulation :
1. Un accord de centre-gauche Royal-Bayrou en vue d’une majorité et d’un gouvernement.
2- Une "gauche de gauche" qui appelle à voter contre Sarkozy (et donc "pour" Royal, "sans réserve et sans illusion" comme on dit !) et garde ainsi son indépendance pour demain, pour mieux combattre ce même gouvernement qu’elle aura contribué à faire élire afin d’éloigner le danger Sarkozy, sa politique, ses méthodes.

Paris
Le 23 avril 2007

Messages

  • Excellent, à diffuser le plus rapidement possible

    Bravo !

  • il est necessaire et vital que toutes les composantes qui sont à gauche du parti socialiste s’unissent !

    pcf,lcr, lo, verts, josé ,et les autres doivent s’unir pour faire exister une alternative réelle à la droite et au bloc social liberal ou democrate sociaux qui se construit.

    unissez vous en un seul parti !

    militants de ces partis agissez et regoupez vous !

    ceux qui ont voté pour vous , vous suiveront !

    un electeur vraiment de gauche

  • Excellent article.
    Je suis un électeur bayrou qui depuis l’âge de voter à toujours voté à droite.
    Je suis révolté par Sarkosy, un chef de gang aux pratiques plus proches de Poutine, Berlusconi, et Bush que de la tradition républicaine.
    La seule façon de battre Sarkosy est de faire une alliance PS-UDF, mais sur des bases claires pour les électeurs UDF :
     Programme commun
     Premier ministre et Gouvernement ( au moins pour les postes clés), avec des hommes respectés pour leur expérience et leur impartialité.
     Proportionnelle. Ceci permettra de renvoyer à Mr Sarkosy comme un boomerang sa dérive droite extrème dans les dents, et de lui faire perdre les 1M d’électeurs qu’il a capté au FN, en les incitant à voter pour Royal. Je sais, c’est cynique (à la mitterand), mais il faut savoir parfois diner avec le diable. Après les législatives, à lui de se débrouiller avec sa créature, et de faire alliance au grand jour si il le souhaite (ce qui est de toute façon son plan, lorsque Le Pen sera parti).
    La république est en danger ! Si nous ne voulons pas de Bush/Poutine/Berlusconi en version française, faites appel aux hommes de bonne volonté et au bon sens.
    Nous ne devons pas tomber sous la chappe de plomb du descendant de Pasqua et des malversations du RPR dans le 92 !