Accueil > Nicolas Sarkozy : "je serai un président servile avec les puissants, (...)

Nicolas Sarkozy : "je serai un président servile avec les puissants, ignoble avec les faibles. J’adore"

Publie le mardi 8 mai 2007 par Open-Publishing
5 commentaires

"Le combat d’une vie"

"JE SERAI un président comme Louis de Funès dans le Grand restaurant : servile avec les puissants, ignoble avec les faibles. J’adore."

C’était à la mi-février dans la piscine d’un hôtel chic de la Réunion.

Son voyage sur l’île touchait à sa fin et Nicolas Sarkozy était d’humeur rigolarde. Une heure plus tôt, il s’était déjà laissé aller à un excès d’enthousiasme en prononçant sur le perron de la mairie de Saint-Paul cette phrase qu’il avait aussitôt regrettée : "Cette élection, pourquoi ne pas le dire ? je commence à ne pas trop mal la sentir." Mais bon, pourquoi ne pas l’avouer ? sa campagne, dont il a en tête depuis si longtemps la moindre des étapes, il la jugeait si bien partie...

Trois mois et demi plus tard, Nicolas Sarkozy peut laisser libre cours à son euphorie. A 52 ans, le voilà à l’Elysée. A quoi pensera-t-il le 16 mai lors de la passation de pouvoir avec Jacques Chirac ? A son père, qui a quitté sa mère adorée, lui et ses deux frères pour aller vivre sa vie et qui l’a tant humilié quand, lors de leur déjeuner hebdomadaire, il le réprimandait pour ses mauvaises notes ? A ses camarades de classe qui se moquaient de sa petite taille ou qui le méprisaient car il venait d’une classe sociale un peu moins aisée ? A tous ses rivaux de droite, d’Alain Juppé à Dominique de Villepin, qui ont toujours pensé que les Français ne voudraient jamais pour les diriger d’un homme si clivant ? A celui dont il prend la place et qu’il a si souvent défié ?

Car il est comme cela Nicolas Sarkozy, la soif de revanche chevillée au coeur, l’ambition revendiquée de devenir quelqu’un, la boulimie assumée de pouvoir. « Ce qu’on vous donne n’a pas la même saveur que ce que vous avez gagné », déclarait-il le 19 mars aux cadres de l’UMP dans le huis clos de la Mutualité. De Neuilly à l’Elysée, lui aura tout pris sans rien demander à personne.

« Je suis indestructible »

La légende sarkozyste est connue. Elle démarre le 29 avril 1983. Un avocat de 28 ans, né d’un père hongrois et d’une mère issue d’une famille juive de Salonique, devient le plus jeune maire d’une commune de plus de 50 000 habitants. Nicolas Sarkozy est élu maire de Neuilly au nez et à la barbe de Charles Pasqua. Il a résisté à toutes les pressions des pontes du RPR, qui pensaient faire plier si facilement ce jeune ambitieux. Six ans plus tôt, lors des municipales de 1977, il était 37 e et dernier sur la liste que présentait son maire Achille Peretti, candidat à un nouveau mandat ! C’est le début d’une conquête du pouvoir méthodique, chaotique, violente, marquée de très hauts et de très bas. 1988 : il est élu à l’Assemblée nationale ; au RPR, il grimpe régulièrement les échelons. 1993 : il est ministre du Budget et porte-parole du gouvernement Balladur. Il devient très vite son principal bras droit.

Cliquer pour agrandir

1995 : il n’est plus rien, à l’issue de la présidentielle, où il a choisi le mauvais camp et trahi Chirac. 1997 : après la dissolution ratée, il est numéro deux du RPR au côté de Philippe Séguin qui en prend les commandes. 1999 : il n’est à nouveau plus rien après le revers qu’il subit aux élections européennes où la liste qu’il conduit n’obtient que 12,82 %. 2002 : il est ministre de l’Intérieur. 2007 : le voilà à l’Elysée... « L’élection présidentielle, c’est le combat d’une vie. Je vais aux extrêmes de la résistance physique, morale, intellectuelle. Je suis indestructible », disait-il toujours devant les cadres de l’UMP à la Mutualité. Cette prise de l’Elysée, c’est peu dire qu’il l’a soigneusement préparée, pensée, organisée. C’est en 1999 que tout commence. Après sa claque aux européennes, Sarkozy se met en retrait. Quitter la politique pour vivre une autre vie comme l’y pousse Cécilia ? Continuer, mais cette fois-ci revenir pour tout rafler ? Le maire de Neuilly choisit la seconde solution.

Pendant plus d’un an, il s’astreint à un devoir de silence. Il réfléchit. Ecrit un livre-référence, « Libre », où il explique ce que doit être une droite assumée. Décide que 2007 sera pour lui. Met tout en place pour cela. Ses maîtres mots ? Le travail, le travail et encore le travail.

« Les héritiers sont faits pour être guillotinés »

En 2002, il rate Matignon, mais devient ministre de l’Intérieur. Il gère la priorité numéro un des Français, la sécurité et entame une véritable campagne de cinq ans. Il élimine un à un ses adversaires, Alain Juppé (« Les héritiers sont faits pour être guillotinés », dit-il à son sujet), Jean-Pierre Raffarin (« On a été à égalité un an »), Michèle Alliot-Marie (« Je n’aime pas beaucoup les gens qui ont le coeur sec »), Dominique de Villepin (« J’ai toujours pensé que la politique était un métier »). Le 28 octobre 2004, il remporte un point décisif en prenant la présidence de l’UMP. « On prend du Sarko pour dix ans, commente le chiraquien François Baroin. Et encore dans l’hypothèse la plus basse... » Chirac justement est de plus en plus retranché à l’Elysée, sans moyens de faire face à une ascension irrésistible... qui amène Sarkozy à prendre sa place ! Sarkozy président !

Durant sa campagne, le président de l’UMP aura beaucoup convoqué ses prédécesseurs. De Gaulle évidemment, que son grand-père maternel, le docteur Mallah, dont il a été si proche, lui a appris à admirer. Pompidou, à qui il s’est comparé il y a huit jours lors de son meeting de Clermont-Ferrand, dressant un parallèle entre l’affaire Markovic et toutes les rumeurs qui ont touché son couple avec Cécilia (« On a voulu le salir, le détruire en attaquant sa famille, son honneur, mais il a finalement été élu parce que les Français ne sont jamais dupes de ces coups bas »). Mitterrand aussi murmuré à l’oreille des journalistes au lendemain du discours fleuve de Ségolène Royal à Villepinte pour souligner à quel point son art oratoire était loin de celui de l’ancien chef d’Etat socialiste... Mais Sarkozy compte bien être un président d’un genre inédit, qu’il a déjà - lui qui est tellement organisé - largement en tête : moderne, direct, plongé dans l’action.

Retour dans la piscine de cet hôtel chic de la Réunion. Le candidat confie même qu’il « ne pourrait faire qu’un seul mandat ». « Mon travail, c’est plus de décider que de faire campagne. Je crois qu’il y a des choses à faire et que ce n’est pas si difficile. En 2012, j’aurai 57 ans. Je peux encore faire plein de choses. Martin (NDLR : Bouygues) n’a qu’une envie : que je vienne et que je gère pendant que lui s’occupera de ses actions. Vous savez, avec Martin, on s’appelle tous les jours depuis trente ans... »

http://www.leparisien.com/home/info...

Messages