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Cesare Battisti. Dix-neuvième jour d’incarcération

Publie le mercredi 3 mars 2004 par Open-Publishing

L’écrivain, arrêté le 10 février en dépit de la position de la France de ne pas extrader les anciens activistes italiens, est toujours en prison.

Le 20 mai 2003, le garde des Sceaux écrit au procureur général de la cour d’appel de Paris en vue de demander l’extradition présentée par le gouvernement italien de Cesare Battisti et d’Enrico Villimburgo. La demande italienne concerne aussi Roberta Cappelli. Le 4 décembre 2003, le procureur général répond au ministre de la Justice en ces termes : " J’ai l’honneur de vous faire retour non exécutées des trois demandes d’extradition visées en objet. "

Malgré cette fin de non-recevoir opposée par le Parquet, Cesare Battisti est interpellé le 10 février 2004 et immédiatement placé sous écrou extraditionnel au mépris de " deux avis défavorables à son extradition rendus par la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris, le 29 mai 1991, au mépris de quinze années passées en France sous la double protection juridique de l’asile et des décisions de justice et, enfin, au mépris d’une vie publique, dans son cas, celle d’un écrivain connu ", indiquent les avocats de Cesare Battisti. C’est dire combien les conditions de son arrestation - soi-disant due à une plainte de voisinage - prétextées par le ministre sont peu crédibles. Sa lettre du 20 mai 2003 en atteste. D’autant qu’une " fiche blanche " de police aurait continué de circuler dans les commissariats indiquant que Cesare Battisti est " recherché en vertu d’un ordre d’exécution de peine délivré le 29 avril 1997 par le parquet général de la cour d’appel de Milan ", alors que Lionel Jospin, le 4 mars 1998, en qualité de premier ministre, indiquait, dans une lettre adressée aux avocats de Battisti : " Des dispositions vont être recherchées afin que les signalements introduits dans le système d’information de Schengen et automatiquement diffusés n’emportent plus de conséquences à l’égard de ces personnes. " Le premier ministre précisait que son " gouvernement n’a pas l’intention de modifier l’attitude qui a été celle de la France jusqu’à présent ". Il est alors demandé aux avocats de Battisti de fournir au ministère de l’Intérieur la liste exhaustive des personnes concernées, afin que leurs noms soient retirés du fichier des personnes recherchées et que leur soient délivrés les titres de séjour nécessaires. " Il résulte des conditions d’arrestation de Cesare Battisti, précisent ses avocats, que des instructions contraires à cet engagement ont été récemment données afin que les noms de ces réfugiés, ou de certains d’entre eux, soient rétablis dans le fichier des personnes recherchées. " Les défenseurs de Battisti s’estiment aujourd’hui " trahis en qualité même puisque les informations qui nous ont été demandées à l’époque serviraient aujourd’hui à interpeller nos propres clients. Nous deviendrions alors en quelque sorte les délateurs ".

Cela confirme que l’arrestation de Battisti n’est en rien fortuite, que des tractations en coulisses entre la France et l’Italie sur le sort des anciens activistes réfugiés en France vont bon train. L’Italie d’aujourd’hui, comme celle d’hier, refuse d’accorder l’amnistie à ces anciens activistes, et c’est une des questions clés de ce dossier : jusqu’à quand va-t-elle vouloir faire payer ces hommes et ces femmes qui, depuis vingt-cinq ans, ont rompu avec ce passé ?

Zoé Lin

http://www.humanite.presse.fr/journal/2004-02-28/2004-02-28-389032