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La dictature de l’émotion par Serge RAFFY

Publie le vendredi 22 juin 2007 par Open-Publishing
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Entre guillemets
Mis en ligne le 16/06/2007

La dictature de l’émotion par Serge RAFFY

http://www.lalibre.be/article.phtml?id=11&subid=118&art_id=354627

C’est sans doute la seule vraie révolution de la campagne électorale présidentielle. Celle de l’adaptation du monde politique à l’univers de la télévision et d’Internet. Une déroute du sens au profit de la dictature de l’émotion. Le triomphe du discours en kit, morcelé, pulvérisé, pasteurisé par les impératifs du prime-time et de l’esprit génération "Star Ac."

Formidable bond en avant ? Ou dangereuse régression ?

A y regarder de près, les deux candidats du second tour, Royal et Sarkozy, chacun à leur manière, s’étaient parfaitement adaptés à cette nouvelle donne. Ils ont surfé sur la vague de l’affect et du pathos avec un toupet et une démesure confondants.

Au fil des jours, ils ont cessé d’être des candidats politiques pour devenir des héros de sitcom. Leurs apparitions télévisuelles étaient attendues comme la lecture de "Voici" ou de "Gala". Sans doute à cause de la singularité de leurs situations conjugales respectives. Ils sont apparus peu à peu comme des personnages sidérants, au sens étymologique du terme. En d’autres termes, ils provoquaient l’un et l’autre une forme de fascination hollywoodienne, état qui a peu de rapport avec la réflexion politique. [...]

Dans ce nouveau territoire, les anciens, éléphants du PS, les chiraquiens, les lepénistes, les communistes, les verts, ont été balayés. Dans ce cadre, Sarko et Ségo étaient hors concours. Ils font des phrases courtes, 25 mots maximum pour lui, 36 pour elle. Ils interpellent le public, semblent prendre à bras-le-corps les problèmes de chacun, au cas par cas. Ségolène Royal était alors dans un inframonde, à des années-lumière de la baisse tendancielle des taux de profit. La force de Nicolas Sarkozy, son incontestable avance sur tous les autres, est d’avoir su marier les deux mondes, celui de la politique et celui de la société du spectacle. Encore un effort, Hollywood n’est pas loin.

Serge Raffy, rédacteur en chef du "Nouvel Observateur", dans "Libération", mardi 12 juin 2007, ww.liberation.fr

Uatelelibre.fr, desourcesure.com

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