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Cesare Battisti : lettre ouverte aux radoteurs des tribunes libres…

Publie le lundi 22 mars 2004 par Open-Publishing

Depuis quelques jours, en Italie et en France, les tribunes libres fleurissent dans certains canards avec le même leitmotiv : Cesare Battisti. A longueurs de colonnes, des donneurs de leçons nous gavent de leurs amalgames simplistes. En comparant Cesare aux terroristes actuels, non seulement, ils déforment le sens de nos actions mais surtout ils manipulent la vérité. Je me sens obligé de leur foutre mon point sur leurs I. Je voudrais rappeler à ces estropiés de la mémoire que l’Europe de la fin des années soixante n’avait vraiment rien à voir avec celle d’aujourd’hui. Le monde était manichéen, la télé en noir et blanc comme la vie de beaucoup d’entre nous. Les grèves ne ressemblaient pas à des garden-party, les poulets défouraillaient sur les prolos et la classe ouvrière enterrait ses morts sans cellule psychologique !

Ils l’ont peut être oublié mais à l’époque, l’Espagne de Franco garrottait encore ses anarchistes, ses communistes ou ses basques, au Portugal, les séides de Salazar flinguaient les opposants aux guerres coloniales, en Grèce les colonels muselaient la démocratie, en Turquie, l’armée leur emboîtait le pas de l’oie, en France, à peine sortie du bourbier algérien, le général amnistiait les comploteurs de l’O.A.S, en Italie leurs potes du M.S.I. s’armaient sous le regard bienveillant de la C.I.A. en R.F.A. les nostalgiques créaient le N.P.D. sans oublier l’Amérique Latine. Un peu partout, l’extrême droite relevait la tête et s’organisait en une internationale brune. Le temps n’était ni aux sit-in ni au consensus !

Mais comment ces amnésiques pourraient-ils s’en souvenir ? Pour cela, il fallait militer, être impliqué dans la lutte contre ces différentes organisations. Ici, ça exigeait de se friter régulièrement avec l’U.N.I, l’Ordre Nouveau et Occident, là bas d’affronter les fafs et leurs alliés. Et ces gugus n’avaient rien de baba cool ni de fans de Gandhi… Malatesta écrit que pour être pacifiste, il faut être deux !

Cesare a réagi à une situation donnée, à une époque bien précise. Analyser son choix hors de son contexte, relève de la malhonnêteté historique ! C’est fastoche de juger, bien planqué derrière son burlingue, trente piges après…

Si nous avons pu croire que nos ennemis d’hier avaient baissé leur garde, la virulence de leurs attaques contre Cesare dans une presse que plus jeune nous taxions de bourgeoise, nous montre qu’il n’en est rien.

Un vieil air me trotte dans la tronche : « Non, non, le fascisme n’est pas mort… » Parano vont dire certains. Pas sûr ! Cesare comme presque toute une génération a filé les foies à la bourgeoisie et aux gouvernements de la vieille Europe. Et pour les avoir, ils les ont eu et copieux encore… Ces gens là ont la rancune tenace. Pour preuve, la façon dont les membres d’Action directe sont traités…Et si l’acharnement envers Battisti n’était qu’une vengeance ? Si en s’en prenant à lui, une certaine droite réglait ainsi une bonne fois pour toutes ses comptes avec le gauchisme ? Certaines réactions tendraient à nous le démontrer. Telle celle de notre garde des sceaux qui n’a pas fait dans la dentelle, nous brodant un scénar de derrière les fagots. S’étonnant même que Cesare ne fasse pas confiance à la justice de son pays ! Il est beau, le garenne ! L’acquittement des fachos de la Piazza Fontana nous prouve que Cesare à raison de se méfier.

Un conseil, les trépanés du bulbe, au lieu d’écrire en rond sur Battisti, lisez plutôt ses bouquins ! Surtout n’ayez pas les flubes, contrairement à la vérole, le talent ça ne s’attrape pas ! Une seule de ses interrogations vaut toutes vos certitudes. Ce type est un écrivain. Un vrai. Pas l’un de ces guignols formaté pour la télé dont le style insipide et nombriliste nous fait trouver passionnante la lecture du bottin. Non, chez lui, parfois les mots schlinguent comme un claquos oublié sur un rebord de fenêtre et d’autres ils ronronnent tel un greffier repu. Car la substance de son écriture vient d’un vécu qu’il n’occulte pas. Il nous le livre avec pudeur mais sans concession ni complaisance. Démarche plutôt rare en ces temps de déballages médiatiques. Certes il a côtoyé la violence mais sans y perdre son âme. Et c’est tout à son honneur.

C’est pour toutes ces raison que je signerai et des deux pognes encore et si cela ne suffit pas avec mes pieds même pour que ce pays qui n’a pas toujours été aussi regardant sur le passé de ses hôtes, respecte la promesse faite par l’un de ses président à Cesare Battisti !