Accueil > Uranium appauvri sur Bagdad ?

Uranium appauvri sur Bagdad ?

Publie le jeudi 10 avril 2003 par Open-Publishing

Posté par Dissident-media.org

- mardi 8 avril 2003, 7h23 - Les Américains attaquent le quartier des ministères à Bagdad. La correspondante de Reuters Samia Nakhoul a vu au moins un avion A-10 Warthog tourner en rond en larguant des bombes... Des avions d’attaque au sol A-10 Warthog ont survolé la ville à basse altitude, ouvrant le feu sur des combattants irakiens présumés... Les avions d’attaque au sol A10 Warthog sont désormais engagés dans le ciel de Bagdad. l’un d’eux a été vu en train d’attaquer au canon des positions irakiennes dans un immeuble... avec son canon rotatif de 30mm il peut tirer 3900 obus à la minute, contre les blindé, il utilise des munitions à l’uranium appauvri, contre les cibles moins dures il peut utiliser d’autres types de munitions...

Uranium appauvri sur Bagdad ?

La production des armes à l’uranium appauvri, des armes si peu "conventionnelles"

A - Blindages des chars de combat

Vers la fin des années 80, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils mettaient à exécution un programme de construction de 3000 chars lourds de combat M1 Abrams disposant d’un nouveau blindage à l’uranium appauvri qui les rendraient impénétrables à toute arme antichar connue. Les pièces de blindage des chars M1A1 ont été développées par la Manufacturing Science Corp (Oak Ridge, Tennessee), puis fabriquées par la société Nuclear Metal Inc. Le Pentagone affirmait que l’armée de terre américaine détiendrait ainsi une avance technologique d’une décennie sur ce que peut faire l’Armée Rouge. Seul, selon les Américains, un obus conçu à partir de ce même uranium appauvri pourrait avoir de l’effet.

Le Pentagone ajoutait même que cette " supériorité technologique " des Américains serait manifestée clairement en Europe face à la supériorité quantitative du Pacte de Varsovie en matière de chars : les chars M1 Abrams blindés à l’uranium appauvri seraient donc stationnés en Europe.

L’utilisation de cette technologie comporte cependant l’inconvénient d’augmenter le poids du véhicule, obligeant à en limiter sa vitesse. Il est donc probable que tous les modèles de chars de combat ne soient pas blindés avec de l’uranium appauvri.
Par contre, si les militaires américains affirmaient, en 1988, que les blindage à l’uranium appauvri ne pourraient être transpercés que par des obus conçus avec ce même uranium, c’est qu’ils avaient déjà une longue expérience de ce type de munitions dont l’existence allait être médiatisée à l’occasion de la guerre du Golfe, trois ans plus tard. C’est ainsi que les chars américains Abrams M1A1 et M1A2 blindés à l’uranium appauvri, engagés dans les combats de la guerre du Golfe, allaient de plus détruire les colonnes de chars irakiens avec des munitions à l’uranium appauvri.

B - Des munitions à l’uranium appauvri

1 - La dissémination des munitions à l’uranium appauvri

Les informations sur la production et les modèles de munitions à l’uranium appauvri sont difficiles à obtenir. Nous avons principalement utilisé des documents du ministère de la défense des Etats-Unis, la plus récente édition du Jane’s Defense Ammunition Handbook et les diverses éditions du catalogue " Matériels français de défense terrestre ".

Cette recherche a permis de constater que, pour l’instant, seuls quatre pays sont producteurs de telles munitions : les Etats-Unis, la Russie, le Royaume-Uni et la France. Nous n’avons pas trouvé d’information sur l’utilisation éventuelle par l’industrie chinoise d’uranium appauvri pour des munitions.

En 1998, un député français a avancé que de telles munitions auraient été également fabriquées par l’Allemagne et Israël. Le ministère de la défense n’a pas répondu sur ce point à la question du député. Nous n’ignorons pas que, notamment pour Israël, les informations restent secrètessur tout ce qui touche au nucléaire. Cependant, la recherche effectuée sur toutes les munitions antichars connues produites par les industries israéliennes n’a pas permis de trouver un modèle comportant de pénétrateur à l’uranium appauvri. Il peut paraître logique qu’Israël n’ait pas voulu se priver de telles munitions qui lui donneraient une supériorité technologique vis à vis de ses voisins, mais nous n’avons, à ce jour, pas de preuve. Quant à l’Allemagne, nous n’avons pas trouvé de modèle de munitions à l’uranium appauvri produit par son industrie d’armement. Par contre, il est possible qu’en tant que membre de l’OTAN, elle ait pu en acquérir pour les besoins de son armée.

Chaque type de munitions, principalement des munitions antichars, comportent à la fois des versions avec des pénétrateurs à l’uranium appauvri et plusieurs autres versions avec des pénétrateurs au tungstène ou constitués d’autres alliages métalliques. Nous avons constaté que les versions ne comportant pas d’uranium appauvri sont soit des modèles destinés à l’exportation, soit des modèles fabriqués en sous-traitance ou sous licence par les industriels d’autres pays.

Rien n’est fait pour faciliter la transparence en matière de production de munitions à l’uranium appauvri. Cette étude n’est probablement pas exhaustive, d’autant plus qu’aujourd’hui la médiatisation de ces armes a incité les producteurs à la discrétion. De plus, nous avons noté que les producteurs désignent parfois l’uranium appauvri sous une autre dénomination plus anodine et connue des seuls spécialistes : le " staballoy ", ce qui pourrait se traduire par " alliage tueur " (de char)...

La production des munitions à l’uranium appauvri serait-elle en perte de vitesse aujourd’hui ? La principale entreprise américaine produisant et commercialisant de l’uranium appauvri, Starmet, ex Nuclear Metals Inc., était en déroute financière, début 2000, en raison de " la réduction des commandes étrangères de pénétrateurs à l’uranium appauvri ". S’agit-il de la fin des fournitures d’uranium appauvri par cette entreprise à SICN (France) ou BNFL (Royaume-Uni), dont les licences d’exportation se teminent à la fin des années 90 ou d’exportations vers d’autres pays (voir plus loin) ?

2 - Les caractéristiques techniques des munitions à l’uranium appauvri

L’idée de faire des obus en uranium est ancienne puisqu’Albert Speer, ministre de l’armement du IIIème Reich, fit utiliser l’uranium dans les obus dès 1943, en remplacement du tungstène qu’il ne pouvait plus importer du Portugal.

Les recherches faites par la suite par les Américains ont conduit à concevoir des munitions perforantes en remplaçant le tungstène (très dur mais peu fusible) par de l’uranium appauvri en alliage avec une très faible quantité de titane qui en relève beaucoup la dureté.

De fait, ce sont principalement les propriétés physique de l’uranium appauvri qui ont suscité l’intérêt des militaires. Son importante densité permet d’obtenir des énergies cinétiques élevées et une onde de choc importante. De plus, son caractère pyrophorique fait qu’il s’enflamme spontanément dans l’air à la température provoquée par l’impact d’une munition (voir également l’annexe sur l’accident du Boeing d’El AL " Crash à Amsterdam "). Ainsi, un projectile en uranium appauvri comporte deux " avantages " militaires importants, c’est à dire d’être à la fois perforant et incendiaire. C’est l’arme antichar idéale puisqu’elle perfore les blindages de chars les plus résistants, provoque un violent incendie entraînant l’explosion des munitions contenues dans le char et ainsi, sa destruction complète.

L’autre intérêt de l’uranium appauvri réside dans son faible coût : en 1980, l’uranium appauvri coûtait 20 F le kg contre 155 F pour le tungstène habituellement utilisé dans les munitions perforantes.

3 - L’utilisation de béryllium dans les munitions à l’uranium appauvri

Quelques rares informations ont curieusement mentionné la présence de béryllium sur la pointe du pénétrateur des munitions à l’uranium appauvri. L’utilisation de béryllium dans les munitions à l’uranium appauvri est tout à fait vraisemblable. Après recherches sur ce métal (voir Annexe Béryllium), les militaires considèrent le béryllium comme un métal exceptionnel en raison de sa résistance mécanique à chaud et de sa grande rigidité, meilleure que celle du tungstène.
Il est probable que les pénétrateurs des munitions à l’uranium appauvri - ou tout au moins la pointe - soient gainées au béryllium. Ce gainage pourrait prévenir les risques d’inflammation prématurée du pénétrateur en uranium appauvri avant qu’il n’atteigne sa cible. On sait en effet que l’uranium est très pyrophorique s’il s’échauffe à l’air. Coïncidence ? Aux Etats-Unis, la principale entreprise qui fabrique et commercialise (y compris à l’exportation) de l’uranium appauvri pour les pénétrateurs des munitions antichars (Starmet, Concord Massachussetts, anciennement Nuclear Metals Inc.) produit également des alliages de " béryllium et d’aluminium pour des composants militaires ".

Ainsi, la présence de cet élément, vraisemblablement sous forme d’alliage avec de l’aluminium, peut expliquer une partie des effets toxiques des munitions à l’uranium appauvri. Cette utilisation du béryllium peut éclairer d’un jour nouveau les débats sur les conséquences nocives pour la santé des munitions à l’uranium appauvri.

4 - Utilisation d’uranium de retraitement dans les munitions à l’uranium appauvri

Une révélation du professeur Asaph Durakovic, spécialiste américain de médecine nucléaire et ancien expert auprès du Pentagone peut relancer le débat sur une cause supplémentaire des effets radiologiques des munitions à l’uranium appauvri.

Lors d’un congrès de médecine nucléaire qui s’est tenu à Paris, le professeur Durakovic a déclaré avoir trouvé une présence significative d’uranium 236 dans les urines et les tissus de seize anciens combattants de la guerre du Golfe et ceci neuf ans après le conflit.

S’il y a bien présence d’uranium 236, c’est que l’uranium appauvri utilisé dans la fabrication des munitions employées par les armées américaines provient d’un combustible nucléaire irradié dans un réacteur. En effet, l’isotope 236 de l’uranium n’entre pas dans la composition de l’uranium naturel ; il s’agit d’un isotope articficiel produit par l’irradiation du combustible dans un réacteur. Cette présence d’uranium 236 signifie donc qu’on a utilisé de l’uranium de retraitement, c’est à dire issu des usines qui, à partir du combustible irradié, extraient le plutonium et l’uranium non consommé qui est réinjecté dans le circuit de fabrication du combustible des centrales nucléaires.

Les Etats-Unis ne retraitent plus le combustible de leurs centrales nucléaires civiles depuis 1972, mais ils disposent de plusieurs installations de retraitement pour extraire le plutonium nécessaire à leurs bombes. Ces usines de retraitement militaires se trouvent principalement sur les sites de Hanford, Savannah River et d’Oak Ridge : elles produisent d’importantes quantités d’uranium de retraitement qui est réenrichi, produisant ainsi de l’uranium de retraitement appauvri.
Les risques pour la santé de l’utilisation de cet uranium appauvri de retraitement (contenant de l’uranium 236) sont sans commune mesure avec ceux que peuvent provoquer l’uranium appauvri naturel en raison du rayonnement émis. Le risque n’est plus seulement d’ordre chimique : il y aurait une réelle contamination radioactive.

C - Les munitions américaines à l’uranium appauvri

1 - Les munitions de l’U.S. Air Force

L’Armée de l’Air américaine a été la première à mettre en uvre des munitions à l’uranium appauvri. Vers la fin des années 60, un Français émigré aux Etats-Unis, Pierre Sprey, a été chargé de mettre au point un système d’armes pour la lutte antichar (l’avion A-10, une mitrailleuse et des munitions en uranium appauvri). L’A-10 est un avion conçu sur le modèle des Stukas du IIIème Reich : il est peu rapide, peu coûteux. En 1980, la firme Fairchild avait reçu un contrat de fabrication pour 733 A-10. La mitrailleuse retenue pour cet avion tueur de chars est à canons tournants fabriquée par General Electric, dite Gatling GAU-8A. La Gatling installée dans le nez de l’A-10 fait 6 m de long pour 1800 kg. Le tambour d’alimentation contient 1 350 cartouches PGU-14 de 30 mm en uranium appauvri, ce qui, à la cadence de 4 200 coups/mn correspond à 20 rafales d’une seconde.

Les munitions à l’uranium appauvri du canon GAU-8A ont été fabriquées par la société américaine Aerojet Manufacturing (Chino, Californie), puis par Olin Ordnance (Marion, Illinois) et aujourd’hui encore par l’usine d’Alliant Techsystems (New Brighton, Minnesota) et par Primex Technologies. En 2000, ces firmes avaient fabriqué 100 millions de cartouches à l’uranium appauvri pour le canon GAU-8A. En 1980, chacune des munitions revenait à 65 F pièce, dont le pénétrateur à l’uranium appauvri (en alliage avec du titane) coûtait 22 F. Plus de 99 % de la production américaine de munitions de petit calibre à l’uranium appauvri a été fournie à l’U.S. Air Force (30 mm pour le GAU-8A).

Au cours de la guerre du Golfe, 940 000 munitions de ce type auraient été tirées par les avions A-10 américains.

2 - Les munitions à l’uranium appauvri de l’armée de terre américaine

Dans un document mis à jour au 15 juin 2000, l’association des Vétérans de la guerre de Golfe fait l’inventaire des types de munitions à l’uranium appauvri qu’on peut trouver au Dépôt de l’Armée de terre à Seneca et dans d’autres lieux. L’Army Environmental Policy Institute précise même qu’aux Etats-Unis, plus de 50 sites sont ou ont été concernés dans la production, le développement, les essais et le stockage de munitions à l’uranium appauvri pour le Department of Defense (DoD).

Munitions de petit calibre

Les Vétérans de la guerre du Golfe ont recensé quelques modèles de munitions de petit calibre à l’uranium appauvri :

 munitions de 7,62 mm (calibre 50). Ces balles de petite dimension sont également appelées " fléchettes ". Elles ont été adoptées pour le fusil américain M14 de calibre 7,62 mm et pour le M16 de calibre 5,56 mm.
 munitions de 20 mm MK 149,
 munitions de 25 mm PGU-20 : anciennement utilisées par l’U.S. Navy
 munition PGU-20/U : en service dans l’armée de terre et fabriquée par Primex Technologies (St-Petersburg, Floride),
 munitions de 25 mm M 919 fabriquées par Olin Ordnance (Marion, Illinois) et antérieurement par Aerojet Manufacturing (Chino, Californie), et aujourd’hui par Primex Technologies (St Petersburg, Floride)
 munitions de 30 mm PGU-14 (pour l’avion tueur de chars A-10)
Selon Army Environmental Policy Institute, jusqu’à février 1994, les sociétés productrices avaient fabriqué plus de 55 millions de pénétrateurs à l’uranium appauvri pour les munitions de petit calibre (20, 25 et 30 mm).
Lorsque les munitions sont retirées du service, certaines parties sont réutilisées. Ainsi, des pénétrateurs (APE 2214) à l’uranium appauvri de la munition PGU-14 (de l’avion A-10) ont été récupérés au moment de la démilitarisation de ces munitions pour être adaptés dans des munitions M919 pour canons de 25 mm.

Pénétrateurs pour obus antichars

Les différents types de pénétrateurs à l’uranium appauvri sont adaptés aux munitions de 105 et 120 mm. Ils sont fabriqués par Aerojet Ordnance Tennessee (Jonesborough, Tennessee) et Nuclear Metals Inc (Concord, Massachussetts), aujourd’hui Starmet. Cette dernière société sous-traite une partie de sa production de pénétrateurs à l’uranium appauvri à Alliant Tech Systems (Edina, Minnesota) et à Olin Ordnance (St-Petersburg, Floride), aujourd’hui Primex Technologies. Fin 1999, la société Starmet travaillait sur un contrat avec Primex Technologies pour la fabrication de pénétrateurs à l’uranium appauvri pour les chars Abrams de l’armée de terre américaine. Les modèles de pénétrateurs connus sont les suivants :

 pour les obus de 105 mm : M735A1, M774, M833, M900. Tous ces modèles ont été fabriqués aux Etats-Unis par Primex Technologies (nouveau nom de Nuclear Metals Inc.).
 pour les obus de 120 mm :
 M829 : a été fabriqué par Chamberlain Manufacturing Corporation (Waterloo, Iowa), Alliant Techsystems Inc. et Primex Technologies pour le canon du char M1A1 Abrams. Ce pénétrateurs n’est plus en production actuellement.
 M829A1 a été fabriqué par Alliant Techsystems Inc.pour les canons des chars Abrams M1A1 et M2A2. C’est cette version de pénétrateur (sur les chars M1A1) qui a été utilisée lors de l’opération " Tempête du désert " sous le nom de " Silver Bullet ". Ce pénétrateur en uranium appauvri n’est plus actuellement en production.
 M829A2 est fabriqué par Primex Technologies. En 1995, le Department of Defense a commandé 23 278 exemplaires de ce pénétrateur pour un montant de 5,5 millions de dollars.
 M829E3 est un modèle en développement. Alliant Techsystems Inc. a remporté les contrats de développement et de production de ce nouveau pénétrateur à l’uranium appauvri pour un montant de 127 millions de dollars. Le futur pénétrateur remplacera tous les modèles M829 à partir de 2004. Alliant Techsystems Inc est associé à Aerojet GenCorp qui fabrique le pénétrateur.
Selon Army Environmental Policy Institute, jusqu’à février 1994, les sociétés productrices avaient fabriqué plus d’1,6 million de pénétrateurs à l’uranium appauvri pour les munitions des chars (105 et 120 mm). D’après les experts, près de 14 000 munitions de 105 et de 120 mm auraient été tiréespendant la guerre du Golfe, principalement par les chars américains. Après cette utilisation de quelque 300 tonnes de munitions à l’uranium appauvri pendant la guerre du Golfe, les Etats-Unis ont dû réapprovisionner leurs stocks. Un an après la guerre du Golfe, Aerojet informa la Nuclear Regulatory Commission (NRC) qu’elle fonctionnait 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Un autre fabricant transmis également une demande urgente à la NRC afin de tenir le même rythme de production qu’en temps de guerre. En octobre 1993, la cadence de production s’accéléra encore afin de satisfaire une commande de 158 tonnes d’uranium appauvri par Brisith Nuclear Fuels Ltd (voir plus loin).

Des mines antipersonnel contenant de l’uranium appauvri !

Certains modèles de mines antipersonnel américains contiennent de petites quantités d’uranium appauvri. Cette très petite quantité a permis d’exempter la société productrice des autorisations requises par la législation américaine pour l’emploi de l’uranium appauvri. Il n’en reste pas moins que, lors de l’explosion de ces mines, ces petites quantités d’uranium appauvri peuvent s’oxyder et se transformer en fines poussières, ajoutant un dommage supplémentaire à celui de la mine proprement dite.

La société Alliant Tech Systems Inc fabrique ces mines contenant de l’uranium appauvri. Il s’agit de la PDM M 86 et de la munition ADAM qui contient 36 mines antipersonnel M67 ou M72. Cette dernière est employée comme sous-munition dans un obus pour canon de 155 mm.

3 - Le système Phalanx de l’U.S. Navy

A partir de 1979, l’U.S. Navy a mis en service le système Phalanx de protection contre les agressions en mer, notamment des missiles de croisière. La société General Dynamics (Californie) a été le constructeur de cette arme redoutable. En mai 1983, 100 Phalanx étaient en service dans la marine américaine, mais pour chacune des deux années suivantes, le Department of Defense a commandé entre 40 et 49 systèmes. Le Phalanx utilise un système radar qui oriente un canon à 6 tubes de 20 mm tirant des balles à l’uranium appauvri à la cadence de 3000 par minute détruisant ainsi n’importe quel objet intrus et augmentant ainsi l’invulnérabilité du navire. Ce canon est un Gatling M61A1 Vulcan, fabriqué par Hughes Missile System Company. Le site internet de l’U.S. Navy signale qu’à partir de 1988, les pénétrateurs du Phalanx à l’uranium appauvri ont été changés par des pénétrateurs au tungstène.

Des systèmes Phalanx ont été vendus à plusieurs pays dont l’Arabie Saoudite, l’Australie, le Japon et le Royaume-Uni. Certains documents affirment que les Britanniques auraient disposé de munitions à l’uranium appauvri pour leurs systèmes Phalanx et qu’ils les auraient utilisé avec les Américains pendant la guerre du Golfe. Un auteur américain, spécialiste de la marine, a également signalé qu’au cours de la guerre du Golfe, des navires appartenant au Canada et à la Grèce disposaient également de systèmes Phalanx, sans préciser si ces canons avaient tiré des munitions à l’uranium appauvri.

4 - Les essais de munitions à l’uranium appauvri aux Etats-Unis

L’utilisation des munitions américaines à l’uranium appauvri en Irak et au Kosovo a été décrite et dénoncée. Mais l’armée américaine a également expérimenté ces armes sur des terrains militaires des Etats-Unis, notamment dans les Etats du Michigan, du Kansas, du Maryland et de l’Indiana.

Selon Earth Island Journal, des avions A-10 ont tiré plus de 100 000 munitions à l’uranium appauvri sur le terrain d’essais de Lake City proche de Kansas City : près de 3,5 tonnes de fragments de munitions sont restées sur le terrain et plus d’un million de m3 de terre ont été contaminés. Sur le terrain Aberdeen Proving Ground dans le Maryland, près de 90 tonnes d’éclats de munitions à l’uranium appauvri ont été disséminées sur un terrain de 8 sur 3 km. Selon l’organisation Atoms & Waste, l’assainissement des sites est extrêmement difficile en raison de la dispersion de l’uranium appauvri qui, lors des impacts s’est répandu en fines particules. Ce fut notamment le cas en Caroline du Sud lorsqu’un char de combat fut touché et a brûlé près d’un dépôt de munitions à l’uranium.

Des tirs d’essais à partir de l’avion de combat antichar A-10 ont eu lieu au Camp Grayling, dans le Michigan ansi que sur le site d’essais aériens de l’armée de l’air américaine de Nellis, dans le Nevada où vont s’entraîner de nombreuses aviations militaires américaine et de l’Otan (y compris française). En Caroline du Nord, les Marine ont reconnu avoir tiré plus de 300 000 munitions à l’uranium appauvri de 30 mm sur leur camp d’entraînement.

En février 1997, le gouvernement américain a présenté ses " excuses " au Japon pour avoir - plus d’un an auparavant - laissé tirer " par erreur " par des chasseurs de la marine américaine sur une île proche d’Okinawa (Japon) plus de 1500 balles à l’uranium appauvri.

Les conséquences sur l’environnement de la fabrication de ces armes commencent à être mises en lumière aux Etats-Unis. Ainsi, le 14 juillet 2000, le Gouvernement de l’Etat du Connecticut, Paul Cellucci, a publié une lettre à l’Agence de protection de l’environnement dans laquelle il demande de faire inscrire le site de l’entreprise Starmet (ex Nuclear Metals Inc) de West Concord sur la liste prioritaire des sites à dépolluer. Pendant plusieurs dizaines d’années, cette entreprise a fabriqué des pénétrateurs à l’uranium appauvri. En 1995, elle était autorisée à disposer d’un stock de 3 300 tonnes d’uranium appauvri. De 1958 à 1986, les déchets de l’usine ont été déversés dans un bassin de décantation qui n’était pas étanche. Les experts estiment que ces déchets auraient atteint la nappe phréatique et auraient pu se déverser dans la rivière Assabat voisine. Starmet, qui est actuellement proche de la faillite, annonce que le coût de la réhabilitation et de l’assainissement radioactif de ses installations (près de 20 millions de dollars) n’est plus dans ses possibilités financières et que le gouvernement américain devrait prendre à sa charge une part substantielle de ce coût.

D - Les munitions russes à l’uranium appauvri

Selon des informations publiques, l’industrie militaire russe a également fabriqué des munitions antichars à l’uranium appauvri. Nous n’avons aucune information sur l’éventuelle utilisation de ces armes par l’armée russe, ni sur des exportations. Nous ignorons également tout des essais de ces munitions en Russie.

La munition antichar de 115 mm APFSDS-T 3UBM-13 dispose d’un pénétrateur en alliage d’uranium appauvri 3BM28 d’un poids de 4,36 kg. Cette munition est utilisée pour le canon de 115 mm U-5TS du char de combat T-62.

La munition antichar de 125 mm APFSDS 3BM32 dispose également d’un pénétrateur à l’uranium appauvri 3VBM13 d’un poids de 7,05 kg. Cette munition est utilisée0pour les canons de 125 mm des chars T-64 et T-72.

Une autre munition antichar explosive de 125 mm HEAT-FS comporte un projectile 3BK21M chemisé à l’uranium appauvri, ce qui augmente sa capacité de pénétration. Cette munition est prévue pour être utilisée pour les canons de 120 mm des chars T-64 et T-72.

E - Les munitions britanniques à l’uranium appauvri

La fabrication de munitions à l’uranium appauvri par le Royaume-Uni a été révélée par le quotidien The Guardian qui a eu, en 1993, la copie d’une licence d’exportation d’uranium appauvri du gouvernement américain au bénéfice de British Nuclear Fuels (BNFL). La licence d’exportation, datée du 5 octobre 1993, autorise l’exportation de 158 758 kg d’uranium appauvri à BNFL, de quoi fabriquer des dizaines de milliers de munitions à l’uranium appauvri. En fait, dans un document américain antérieur que le Guardian ne possédait pas et daté du 25 septembre 1979, on apprend que deux licences d’exportation datées du 3 mai et du 20 juin 1979 avaient été accordées par l’armée de terre américaine au Royaume-Uni et concernaient l’exportation de 250 kg d’uranium appauvri pour la recherche et la mise au point de pénétrateurs de gros calibres à l’uranium appauvri.

Le quotidien britannique avait cependant, dévoilé le rôle peu connu jusqu’alors, de BNFL dans la fabrication d’armes pour les forces britanniques. En effet, cette société est plutôt connue pour ses activités dans le retraitement du combustible nucléaire, notamment à Sellafield.
BNFL fabrique des pénétrateurs à l’uranium appauvri à son usine Springfields Works à Preston (Lancashire). La licence l’exportation américaine qui devait expirer le 31 janvier 1995, autorisait BNFL à fabriquer des munitions avec cet uranium appauvri pour les besoins des forces britanniques, mais elle autorise également l’exportation vers des Etats membre de l’OTAN.
La société d’armement anglaise, Royal Ordnance, filiale de British Aerospace, fabrique les munitions de 120 mmm à l’uranium appauvri. En fait, BNFL fournit les pénétrateurs à l’uranium appauvri et Royal Ordnance effectue l’assemblage dans une cartouche de 120 mm dans ses usines de Wolverhampton et de Chorley, dans le Lancashire. Deux types de munitions antichars ont été réalisés conjointement par les deux sociétés :

 APFSDS-T L26 Charm 1 pour le canon L 26 des chars de combat britanniques Challenger 1 et 2.
 APFSDS L27 Charm 3 pour le canon L 27. Ce dernier modèle serait plus performant que le précédent. Il a été développé dans les années 90, mais sa mise en service a été retardée en 1997 par manque de terrain d’essais au Royaume-Uni. Une version de la munition APFSDS L27A1 est entrée en service en 1999 dans les régiments britanniques équipés du char Challenger 2.
L’une des usines de Royal Ordnance ne serait plus actuellement opérationnelle en raison d’un important incendie d’uranium appauvri en février 1999..

Les sites d’essais de munitions à l’uranium appauvri

Il ne semble pas que des munitions de ce type aient été utilisées par les chars de combat britanniques pendant la guerre du Golfe. Cependant, des munitions américaines à l’uranium appauvri auraient été utilisées en petit nombre par les chars anglais. Selon l’organisation britannique The Edge, le ministre de la défense britannique a reconnu que l’armée britannqiue avait tiré 80 cartouches à l’uranium appauvri au cours de la guerre du Golfe.

Par contre, des essais de ces munitions ont été effectués sur des sites d’Ecosse et de Cumbria (région des lacs au nord-ouest du Royaume-Uni). Ces essais ont commencé en 1980, à Eskmeals (Cumbria) et sur le camp militaire de Dundrennan, au sud-ouest de l’Ecosse, en 1981. En tout, près de 7 000 auraient été tirées depuis 1983.

En juin 1993, à la suite d’une question d’un parlementaire, le ministre de la défense britannique a répondu que ces tirs ne provoquaient que des taux très faibles de radioactivité. Mais, lorsqu’un rapport d’enquête a été rendu public en juillet 1993, on s’est rendu compte que la contamination était importante en dehors de la zone contrôlée de Eskmeals et que les échantillons d’herbe et de sol à Kirkcudbright (près de Dundrennan) étaient bien en dessus des limites acceptables.
Le 13 novembre 1989, un tir raté de munition à l’uranium appauvri, sur le site de Dundrennan, a atteint les falaises rocheuses. Il en a résulté une concentration locale de 1 692 mp/kg d’uranium appauvri dépassant nettement les limites fixées par le ministère de la défense. Les populations proches du site d’essais militaires de Dundrennan, connaissent actuellement le plus fort taux de leucémie infantile du Royaume-Uni.

Bruno Barrillot
(Observatoire des armes nucléaires françaises)

La suite de ces infos sur Infonucleaire.net