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Chávez et la Kalachnilkov du plébiscite

Publie le jeudi 6 décembre 2007 par Open-Publishing
7 commentaires

de Maxime Vivas

Hugo Chávez emportant avec un pourcentage croissant toutes les élections au Venezuela depuis 1998 dans un climat médiatique hostile, chacun avait prévu l’issue positive du référendum du 2 décembre 2007.

Patatras ! il le perd, ne conteste pas le résultat (serré), félicite aussitôt l’opposition, l’invite à jouer désormais le jeu de la démocratie qui peut lui profiter.

Imprimé trop tôt, Courrier International donne, sur sa couverture, le ton de ce qui allait être, si Chávez avait gagné, le bourrage de crâne musclé et planétaire contre le nouveau dictateur brandissant une Kalachnikov fournie par la Russie de Poutine (en arrière plan sur le croquis, car moins dangereux pour l’humanité).

En page intérieure, sous le titre musclé « Des coups d’Etat en forme de plébiscites », Philippe Thureau-Dangin (retenons le nom de ce visionnaire objectif, ce sagace observateur) écrit notamment :

« L’occasion était trop belle. Que deux dirigeants, Poutine et Chávez, peu connus pour leur goût de la démocratie, choisissent un 2 décembre pour organiser des scrutins en forme de plébiscites, cela relève bien de l’ironie de l’Histoire ».

Puis, vient l’amalgame, tiré par les cheveux, avec le coup d’Etat du 2 décembre 1851, qui porta au pouvoir Napoléon III. Après quoi, l’expert donne une petite leçon :

« Quant aux élites vénézuéliennes, elles n’ont guère pris au sérieux jusqu’à tout récemment ce militaire métis au verbe haut… ». Chávez étant « métis », il eut fallu ajouter, pour bien nous informer, l’origine des « élites » (blanches et verbe bas ?). Poursuivons :

« Chacun à sa manière, ils musellent la presse, en exilant (Napoléon III), en s’emparant des groupes de médias (Poutine) ou en ne renouvelant pas la concession accordée à une puissante chaîne d’opposition (Chávez)… » Il eut fallu dire : la concession « hertzienne », pour que le lecteur sache bien que RCTV existe toujours.

Pour finir, le prophète éclairé nous explique comment Chávez a réussi son « golpe » du 2 décembre 2007 : « Et comme nous sommes au XXIe siècle, on ne fait plus de coups d’Etat baïonnette au canon ; on se contente de les faire avaliser, tout à fait légalement, par des peuples subjugués ».

C’était notre rubrique : « Pourquoi tu n’achètes plus de journaux ? »

Pas assez « subjugué » par les éditorialistes ?

Messages

  • J’ai acheté spécialement ce numéro pour cette accroche en première page.

    Effectivement la tactique principale, au delà d’attaques non fondées dans l’article sur Chavez, est d’avoir mis en première page le révolutionnaire, lui avoir mis une kalachnikov dans la main pour montrer qu’il est violent (un terroriste ?) et avoir mis à son côté Poutine qui est un bourgeois liberticide et autoritaire...

    C’est un dessin manipulatoire par excellence et contribue à la longue bataille de fond de déstabilisation de la tentative de révolution bolivarienne. On crée une image subliminale permanente de Chavez, et peu importe qu’à chaque fois le raisonnement soit démonté les mensonges mis à plat, du moment qu’on a réussi son coup : Chavez = Violent, menaçant, liberticide, autoritaire, fou...

    La réponse à cela est bien évidemment de répondre sans cesse par l’argumentation, l’épreuve de la réalité, l’analyse, gagner la bataille de l’intelligence , mais il faut reconnaitre que l’attaque depuis quelques années se concentre sur d’autres ressorts, elle est construite sur le mensonge gros répété en boucle de plus en plus fort, de telle façon d’avoir une image subliminale qui s’interpose sans cesse pour bloquer le processus de réflexion.

    Il nous faut traiter également ces questions particulières de la propagande qui ne se contentent pas seulement d’une argumentation pro-bourgeoise et pro-bushiste, mais cherchent à conditionner et à obtenir un réflexe écervelé des gens quand ils entendent "Chavez".

    Copas

  • J’ai découvert Edward Bernays grâce à là-bas si j’y suis. Depuis je ne lis plus ce type d’article de la même manière, j’en ai une tout autre compréhension. J’ai cessé de douter quand au caractère fortuit de ce type de couvertures.

    Qui était Edward Bernays ?
    Bernays est considéré comme le père des relations publiques. Il a inventé cette technique moderne qui consiste à plier nos esprits aux projets de certains, technique que l’on nomme communément "propagande".
    Pour Bernays, la démocratie doit être pilotée par la minorité intelligente, c’est à dire, par l’élite...

    Un de ses livres est consultable gratuitement ici :

    http://notod.on-web.fr/

  • Il est trés symptomatique (et paradoxal) que la victoire du non au référendum ait fait l’objet d’un traitement somme toute discret dans les médias habitués au bourrage de crâne anti-chavez
    (à peu près tous). On peut en conclure que leurs habituels déchainements sur le "dictateur-populiste-putchiste-criminel et liberticide" relèvent purement et simplement d’une fantasmagorie qu’ils finissent par prendre pour une réalité.
    Sur un tout autre sujet, Sébastien Fontenelle a réalisé dans son bouquin "La position du penseur couché" une remarquable analyse des mécanismes de cette perversion de l’esprit.

  • Je suis abonné à cet hebdomadaire depuis bientôt 15 ans car c’est un bon moyen d’analyse de la dialectique fasciste (pour utiliser le vrai sens de cette mondialisation). Les éditoriaux à l’emporte pièce sont une habitude au Courrier, mais utile comme indicateur des courants que les maîtres désignent à leurs laquais journalistes. Souvenons-nous des éditos qu’Alexandre Adler (le prédécesseur de Thureau-Dangin) faisaient la veille du 11 septembre 2001. L’ennemi était alors Mugabe que le funeste moment à relégué dans l’inutilité médiatique.
    Pour en revenir à cet édito du N°891, il est fondamentalement créer comme artifice sans véracité.
    Peu importe que les faits soient vus par le petit bout de la lorgnette obturé, ce qui compte c’est bien de plaire. Car les éditorialistes du courrier ont besoin de l’assentiment de leur papa pour prouver qu’ils existent. Au fond, c’est surement des bons petits gars mais à fréquenter des fripouilles, les séquelles apparaissent. J’aime assez comment le Philippe retourne l’histoire pour en faire son papier. Je ne pense pas que Victor Hugo partirait en exil s’il habitait au Venezuela ou en Russie mais plutôt chez les amis à P.T-D, aux Etats-Unis. Nous pouvons même gager la question en ce qui concerne la France : Victor Hugo partirait’ il en exil sous le régime Sarkozy ?
    J.Michel