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Descartes dans le Monde de la philo. Les allumés modernes du cogito

Publie le jeudi 7 février 2008 par Open-Publishing
3 commentaires

1. Intro : Poussons par provo le bouchon d’une étrange hypothèse, serions-nous malades du cogito ?

Rappel : Depuis 3 semaines et pour 20 semaines au moins le monde nous propose chaque jeudi-vendredi la lecture d’un grand philosophe. L’ambition déclarée de l’opération est de nous "fournir des clefs pour comprendre le présent". Voire ! Autant la démarche nous paraît "sympa", autant la finalité nous paraît aléatoire : les philosophes servent-ils encore à quelque chose quand leur temps est passé et que leur message a été intégré par leurs contemporains ?

Nous avons donc eu un Platon, penseur supposé de la mondialisation, ouaoh ! un Aristote, maître-initiateur de tant de sciences et selon nous de l’art précieux des confitures, nous avons aujourd’hui un Descartes : que va-t-on nous donner à penser de René ? Ben là, tout de go, c’est pas évident si on dit brutalement les choses comme on les comprend. L’éminence convoquée pour nous aider à avancer est Slavoj Zizek. Il répond pour commencer (c’est une impression) d’une drôle de façon, en traduction, à la question suivante : Où la pensée de Descartes trouve-t-elle, selon vous, son actualité la plus intense ?

D’une part Zizek nous dit que notre époque est post-cartésienne et que le cogito est mort (ce qui semble virer Descartes de nos préoccupations), d’autre part il nous affirme que "le cogito" continue de nous "hanter" (ce qui semble affirmer passablement le contraire). Zizek, disons-le, parle élégamment, ce qui ne facilite rien.

Par ailleurs, s’il s’agit de parler de Descartes pour en savoir plus sur Descartes, il nous avait semblé que le but n’était point là mais qu’on aurait attendu avec un grand penseur d’avant de comprendre mieux notre étrange maintenant. Zizek, nous propose peut-être toutefois quelque chose là-dessus.

Intermezzo ; Vous connaissez bien sûr au préalable deux-trois choses fondamentales de Descartes : le "Je pense donc je suis" (cogito ergo sum), et "le bon sens (la raison) est la chose du monde la mieux partagée".

Commençons par le cogito : dans le cogito il doit y avoir en gros trois éléments, la pensée-cogito, le moi qui cogite et le monde-objet qu’est cogité.

D’après Zizek (nous interprétons un peu bien sûr), si de nos jours, le péquin que nous sommes est en fait le prolo (le péquin, toi moi), il a de quoi être perturbé. Le travailleur prolétaire dépossédé complet du produit de son boulot est une "subjectivité sans substance", sans contenu, c’est l’histoire du pauv’ gars qui s’appelait Armand. T’es pas épanoui, t’es pas poussé dans ta pensée, ta pensée égale le ricard à l’eau (pas trop d’eau, hein !) sur le comptoir. C’est le point 1.

Le second point, c’est qu’on est tous dans une fichue société médiatisée où le réel a peut-être de plus en plus une réalité de presque totale virtualité, de fiction. Conclusion : notre monde est très vachement pipeau. Point 2.

Reste le moi quand même, bon sang ! dira-t-on : lui, il doit être bon ! Ah le moi, ah le moi, c’est vrai ! Prenant appui sur des exemples médicaux, Zizek se demande, si nos moi symboliques ne sont pas en réalité largement effacés, et si nous ne sommes pas semblables sans le savoir à des sujets carrément post-traumatiques graves.

Voilà avec ce petit résumé une manière possible de redonner de l’actualité à un Descartes qu’on croyait désactualisé : le monde moderne, où l’on est souvent bien sapé, avec ipod sur les oreilles et diverses autres commodités, ne laisse-t-il pas échapper le soupçon que nous sommes en même temps peut-être passablement cinglés ?

2. Alors ? Cinglés pour de bon, ou pas cinglés finalement ?

Vous ne pensez pas qu’on va répondre franco à une affaire aussi pourrie.

Se plaindre du monde comme il se présente supposément à l’intérieur des têtes, on en connaît l’antienne trans-séculaire : le monde se dégrade, il était tellement meilleur avant, blablabla !

 Ouais mais ! t’as vu les moi hypertrophiés dans notre société !? Le moi haissable, tu rigoles c’était pour le 17e siècle, le moi d’aujourd’hui c’est partout la grande mégalo.
 T’as vu les artistes ? t’as vu les chanteurs ? t’as vu les speakers et présentatrices de la télé ? t’as vu les auteurs et les auteures ? t’as vu les sportifs ? t’as vu les hommes et femmes politiques ? (Non, tu ne nous feras pas dire : t’as vu Sarko ? ce serait trop facile !)
 Même les petits, les plus minus, se dévissent le cou pour le glisser dans l’objectif.
 Ben, pourquoi pas ! faut-être juste ! chacun a le droit d’exister, donc de passer à la télé !
 Bon, poussons pas en embauchant Descartes contre son gré, sur le sujet t’as déjà Guy Debord qui est plus près.

-Bon Ok, laissons le moi personnel et la grosse tête de chacun, mais sur la raison -qu’est commune- c’est quand même encore le champ privilégié de René. Et René, il a bien dit que l’intelligence était dans toutes les têtes !
 Ben, tu te demandes, des jours, si René il voulait pas rigoler !

L’intelligence, la raison, est dans toutes les têtes la même, sauf que nous raisonnons sur des bases différentes, alors forcément on peut pas au bout du chemin un tant soit peu se rencontrer, tu vois si c’est compliqué et si au fond c’est vraiment mal barré. (Même avec Descartes en force d’appui !)

Et puis je vais te dire une chose très pessimiste sur notre société : est-ce que tu crois que le débat d’idées ça sert le moins du monde à quelque chose ? Crois-tu -dans notre temps- qu’on prend jamais une idée pour sa belle qualité ? Les idées se choisissent apparemment pour d’autres raisons, elles sont la résultante de rapports de force. Mais peut-être avance-t-on indument de quelques lectures de trop.

3. Pour conclure

Alors, à ce stade, Descartes pas rigolo ?
 Pas trop !

Bon déjà pour modifier l’image scolaire que vous en avez sans doute, vous devez impérativement savoir que ce petit homme (1,58 m) était un grand sportif. Bretteur redoutable, on lui doit un manuel d’escrime qui bien sûr n’est à présent jamais lu.

C’était aussi un grand baiseur, lire "Descartes le scandaleux" de Davidenko Dimitri

Bon d’accord, ce n’est pas pour ces dernières raisons que ce surdoué très jeune était déjà connu de toute l’Europe.

NB : le côté fesse en moins, et dans le pur sérieux de sa philo, on ne pourra omettre bien sûr pour des raisons qui nous sont chères, de citer à votre attentive lecture l’ensemble des travaux de madame Geneviève Rodis-Lewis qui fut la prof de plusieurs d’entre nous.

Alain Serge Clary et les "Inoxydables philosophes" de l’Ocséna vous saluent bien

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