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Ratification du traité de Lisbonne : la démocratie bafouée

Publie le vendredi 15 février 2008 par Open-Publishing
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La France a officiellement ratifié le traité européen de Lisbonne, avec la publication, jeudi au Journal officiel, de la ratification portant la signature de Nicolas Sarkozy. Ce texte porte la
signature du président de la République car l’article 52 de la Constitution disposant maintenant que "le président de la République négocie et ratifie les traités", ce qui permet ainsi de passer
outre l’avis des français sur ce sujet.


La France est ainsi le premier pays fondateur de l’Union européenne à donner son accord au traité, près de trois ans après le non des Français qui avaient rejeté le projet de Constitution de l’UE.
Celui-ci doit entrer en vigueur le 1er janvier 2009.

Le sort du Traité de Lisbonne sur les institutions européennes dépend maintenant du choix des quelque trois millions d’électeurs irlandais. La République d’Irlande est en effet le seul pays
européen dont la constitution l’oblige à passer par un référendum avant de pouvoir ratifier le fameux mini traité.

Pour l’ancien Président de la République, Valéry Giscard D’Estaing, le Traité de Lisbonne est "exactement le même texte" que le défunt Traité Constitutionnel Européen rejeté le 29 mai 2006
par 55 % des Français.


Avec Nicolas Sarkozy comme Président, la France est devenue le pays du déni démocratique et républicain. Maintenant, ce n’est pas au peuple de choisir son avenir.
L’avenir du peuple réside uniquement dans la volonté d’une poignée de députés et de sénateurs.
Non content de servir en priorité leurs intérêts financiers, Sarkozy leur donne la possibilité de décider de l’avenir de millions d’Européens. Comment peut-on appeler cela une République, une
démocratie ?

De quel droit un nouveau président de la République peut-il faire ratifier un traité européen déjà rejeté par le peuple souverain ? Il s’agit bien du même texte*(1) rebaptisé, saucissonné et éparpillé dans d’anciens traités européens.

Le Parlement seul peut-il, au nom du peuple français, imposer à ce même peuple souverain la remise en cause de son droit inaliénable et imprescriptible à disposer de lui même ?

En 2005 : 85% des parlementaires étaient pour le oui contre 55% des électeurs pour le non.

Seul le peuple devrait, par référendum, pouvoir valider ou invalider ce qu’il a lui même décidé par cette même voie.


*(1)

- La « concurrence libre et non faussée » reste la pierre angulaire de la construction européenne, à
laquelle tout est subordonné. Elle bénéficie d’un protocole spécifique du Traité.
- Les services publics restent soumis aux règles de la concurrence, base juridique de leur libéralisation et de
leur privatisation.
- La Charte des Droits fondamentaux de l’UE sera, soi-disant, « juridiquement contraignante ». Mais,
pour l’essentiel, les droits contenus dans cette charte sont de très faible portée : pas de droit AU travail, mais droit DE travailler ; pas de droit à la protection et la sécurité
sociales, mais droit d’ ACCES aux services sociaux ; mise en question du droit d’action collective et de grève au niveau européen ; non reconnaissance du droit à l’avortement et à la
contraception, etc. Les droits fondamentaux contenus dans la Charte restent subordonnés aux autres dispositions du traité, caractérisées par « la concurrence libre et non faussée ». De
plus, l’application de ces droits est renvoyée aux « pratiques et législations nationales ». Bref, pour l’UE, le social est en option et la concurrence obligatoire !

- Le « libre-échange » généralisé reste l’horizon indépassable des politiques européennes : pas
question pour les Etats de l’UE de prendre des mesures restrictives à la liberté de circulation des capitaux entre Etats membres et avec les pays tiers, de mettre le holà à la spéculation
financière (adieu taxe Tobin !), de pénaliser la délocalisation d’entreprises !
- La Banque Centrale Européenne reste indépendante de tout contrôle du politique et se donne comme priorité la
lutte contre l’inflation au détriment de l’emploi.
- La militarisation de l’Europe est confortée, dans le cadre de l’OTAN donc sous l’égide des Etats-Unis. Les
Etats membres s’engagent à améliorer progressivement leurs capacités militaires (seul domaine pour lequel l’augmentation des dépenses publiques est encouragée !) et à intervenir à l’étranger
au nom de la lutte contre le terrorisme.
- L’UE reconnaît les Eglises mais ignore toujours la laïcité.

- Le Traité réaffirme l’option d’une Europe forteresse, ouvrant la porte au harcèlement administratif et policier
pour tous ceux et celles qui ne possèdent pas la nationalité d’un Etat membre.
- Le rôle du Parlement européen reste limité : il est toujours exclu de la codécision dans des domaines
essentiels (fiscalité, marché intérieur, politique monétaire, politique étrangère et de sécurité, etc.). Le monopole de l’initiative législative reste dans les mains de la Commission (équipe de
techniciens soumis à la pression constante des lobbies industriels et financiers) et du Conseil européen. Or, les Directives européennes, marquées du sceau du néolibéralisme, représentent désormais
70% de nos législations nationales.

 

Arnaud Mouillard - http://hern.over-blog.com

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