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Projet de Manifeste du Parti de la Gauche européenne

Publie le lundi 10 mai 2004 par Open-Publishing
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Un nouvel espoir naît et se répand en Europe. Une nouvelle vision inspire un nombre croissant d’Européens. Elle les unit et les encourage à prendre part à de grandes mobilisations pour résister à l’imposition d’un capitalisme "voie unique" qui constitue une tentative de piéger l’humanité dans une nouvelle régression sociale et culturelle. La condition des peuples, des organisations sociales et des individus est marquée par l’insécurité, l’incertitude et la précarité. Une nouvelle résistance contre l’exploitation capitaliste émerge avec force. Il existe une nouvelle option pour un changement interférant sur les vies des hommes et des femmes que les désastres produits par la politique de mondialisation capitaliste affectent de plus en plus.

Les nouvelles formes de pouvoir à l’échelle mondiale génèrent une crise des États-nations, des systèmes d’alliance et de l’ordre international issus de la Seconde Guerre mondiale. La théorie de la guerre permanente, dont "la doctrine Bush" en est actuellement l’illustration, et la spirale de violence terroriste nourrie par la guerre, font grandir les inégalités et se réduire les espaces de la démocratie.

Pour nous, l’Europe est, en matière de politique internationale, un espace de renaissance des luttes pour une autre société. La réalisation de la paix et la transformation de la société capitaliste actuelle seront à la portée de cette entreprise. Nous nous battons pour une société qui dépasse la logique capitaliste et patriarcale. Notre but est l’émancipation humaine, la libération des hommes et des femmes de toute forme d’oppression, d’exploitation et d’exclusion.

Nous concevons le rôle et la tâche de la gauche politique en Europe comme une contribution pour former une large alliance sociale et politique, pour un changement radical de politique, en développant des alternatives et des propositions concrètes pour la nécessaire transformation des sociétés capitalistes actuelles. En cela, nous considérons que nous avons la responsabilité et la capacité à nous adresser à tous ceux qui agissent pour une société plus équitable, comme condition de l’autodétermination de la vie de chacun. Nous voulons établir une politique de gauche avec un projet politique à long terme, indépendant et maîtrisé, contribuant à la réalisation de la solidarité et de la démocratie, d’alternatives sociales et écologiques.

Pour ces raisons, l’Union européenne tout comme l’ensemble du continent européen deviennent un espace de plus en plus important pour une politique alternative : en plus des niveaux politiques traditionnels : États-nations, régions et municipalités, et ce en relation avec les développements mondiaux.

Nous voyons par conséquent la portée mondiale du "mouvement altermondialiste", ses échanges grandissants, sa coopération mutuelle ainsi que son influence dans et sur les mouvements sociaux, qu’ils soient des travailleurs, féministe, écologiste et démocratique ; en termes d’une nouvelle participation au combat pour le changement. Tous ces mouvements opposent à "l’espace privé" des grandes puissances mondiales un "espace public" habité par différents "sujets politiques" qui veulent reconquérir des droits fondamentaux : la paix, la démocratie, la justice sociale, la liberté, l’égalité des sexes, le respect de la nature. Et la gauche politique est l’un d’entre eux. C’est un nouvel appui pour une politique de transformation.

Dans les différents pays d’Europe, des expériences culturelles et politiques et des luttes sociales extraordinaires ont marqué le modèle social européen d’un caractère original. Nous nous tournons vers ces racines politiques et culturelles et non vers les valeurs du marché qui aujourd’hui le définissent, en particulier à travers la politique du Traité de Maastricht et les décisions de la Banque centrale européenne.

En Europe, dans chacun de nos pays, les gens souffrent des politiques du capitalisme mondialisé mises en oeuvre par des gouvernements dans l’intérêt du grand capital et des lobbies, qui sapent les solidarités et des acquis sociaux conquis de haute lutte. C’est l’attaque générale contre les systèmes de retraite, le démantèlement et la privatisation de la protection sociale, la soumission des services publics et de secteurs aussi essentiels que la santé, l’éducation, l’agriculture, la culture et les biens communs comme l’eau et d’autres ressources naturelles aux règles du marché, la précarisation et la déréglementation du marché du travail.

C’est une accentuation de la répression antisyndicale et une politique de criminalisation de l’immigration.

Tout est marchandisé. Du travail jusqu’à la totalité du cycle de la vie. Dans l’Europe d’aujourd’hui augmentent le chômage, la précarité, la militarisation tournée vers l’extérieur, comme l’ont démontré les guerres des Balkans, en Afghanistan et en Irak et la "militarisation" des politiques nationales au moyen de lois répressives et liberticides contre ceux qui s’opposent à la politique néo-libérale. Ce processus aliène des secteurs croissants de la société de la politique et produit des guerres entre les pauvres, fait resurgir le populisme, le racisme et l’antisémitisme.

Le concept social-démocrate de la "troisième voie" en Europe a échoué, parce qu’il ne s’est pas opposé à cette évolution, et n’ayant pas d’alternative, l’a ainsi favorisée. Cela crée des possibilités et confère une plus grande responsabilité à la gauche qui veut changer le monde actuel. Mais nous ne pouvons pas suivre les mêmes chemins que ceux empruntés au XXe siècle, qui ont amené de grands accomplissements, mais aussi de grandes défaites et tragédies pour les forces d’inspiration révolutionnaire.

Pour changer la société, nous devons élargir notre action. En Europe, la construction d’une gauche alternative, radicale, écologiste et féministe est un défi pour le nouveau cycle qui s’ouvre à présent. La nature plurielle des mouvements peut se conjuguer avec cette nouvelle force politique parce que nous voulons construire un nouveau rapport entre la société et la politique.

Nous voulons construire un projet pour une autre Europe et donner un autre contenu à l’UE : indépendante de l’hégémonie étatsunienne, ouverte au sud du monde, alternative au capitalisme dans son modèle social et politique, active contre la militarisation croissante et la guerre, en faveur de la protection de l’environnement et du respect des droits de l’homme, incluant les droits sociaux et économiques. Nous nous prononçons en faveur du droit à la citoyenneté pour tous ceux qui vivent en Europe.

Nous voulons une Europe sans les politiques antidémocratique et néo-libérale de l’OMC et du FMI, refusant l’OTAN, les bases militaires étrangères et tout modèle d’armée européenne conduisant à l’augmentation de la compétition militaire et à la course aux armements dans le monde. Nous voulons une Europe de paix et de solidarité, sans armes nucléaires ni armes de destruction massive, une Europe qui rejette la guerre comme mode de résolution des conflits internationaux. Cela concerne particulièrement le conflit israélo-palestinien qui devrait être réglé en conformité avec les résolutions de l’ONU.

Nous - forces politiques de gauche de ce continent - voulons contribuer à l’essor d’une nouvelle force pour le changement.

Nous - partis et organisations politiques d’inspiration communiste, socialiste, démocratique, écologiste, féministe, opposés au néo-libéralisme et favorables à un changement social - voulons donner naissance à un nouveau sujet politique : le Parti de la gauche européenne (PGE).

Nous aspirons à incarner cet espoir qui nous permettra d’aborder en termes nouveaux la question de la globalisation, de la paix dans le monde, de la démocratie et de la justice sociale, de l’égalité des sexes, de l’autonomie de vie des personnes handicapées, du développement durable et équilibré, du respect pour les spécificités culturelles, religieuses, idéologiques ou des orientations sexuelles.

Nous voyons la nécessité d’une transformation en profondeur, sociale et démocratique, de l’Europe. Oui, le temps est venu d’intensifier les luttes qui mettent en cause les dogmes de la sacro-sainte "économie de marché où la concurrence est libre", le pouvoir des marchés financiers et des multinationales, et à la place, faire des citoyens des acteurs des politiques menées en leur nom.

Face à la récession et à la montée du chômage, il faut mettre en cause le "Pacte de stabilité" et les orientations de la Banque centrale européenne, pour mettre en œuvre une autre politique économique et sociale et des priorités sociales au profit du plein emploi et de la formation, en faveur des services publics et d’une politique audacieuse d’investissement pour l’environnement. Il faut imposer une taxation des mouvements de capitaux. Il faut changer les priorités : en faveur des êtres humains, pas de l’argent.

Nous nous chargeons d’œuvrer partout en Europe pour faire progresser les droits des salariés sur leurs lieux de travail. Nous considérons que les services publics sont des moyens indispensables pour garantir le droit d’accès égal de chacun à l’éducation, à l’eau, à l’alimentation, à la santé, à l’énergie et aux transports. Nous sommes favorables à des services publics modernisés, décentralisés et démocratisés, qui assurent à chacun des droits sociaux.

Aujourd’hui, dix pays sont en train de rejoindre l’Union européenne et d’autres ont exprimé le désir de le faire. Mais il existe des forces politiques et sociales considérables, tant dans ces pays que dans ceux qui sont déjà membres de l’UE, qui considèrent l’élargissement avec réserve ou y sont ouvertement hostiles. Ces tendances sont renforcées par les impasses auxquelles ont conduit les choix stratégiques actuels de l’UE.

Le PGE répond aussi aux difficultés des pays qui sont actuellement en dehors de l’UE - tels les pays des Balkans et d’autres pays de l’Est de l’Europe - difficultés principalement dues à leur transformation et par conséquent au dilemme qui se pose entre développement indépendant et intégration capitaliste européenne comme stratégie à moyen terme pour faire face à tous les conflits internes à ces sociétés bouleversées tant par le passé que par le présent. La gauche européenne est prête à soutenir toutes les forces démocratiques dans ces pays, en faveur de la démocratie, de la paix et de la justice sociale, du développement social et économique et du renforcement des institutions démocratiques.

Nous voulons agir pour que les institutions élues, le Parlement européen et les Parlements nationaux, ainsi que les comités représentatifs (Comité économique et social et Comité des régions) aient plus de pouvoir d’action et de contrôle. Aujourd’hui, quelle que soit notre opinion globale sur le projet de "Traité constitutionnel" en discussion, nous nous opposons à un directoire de "grandes puissances". Nous n’acceptons pas non plus leur volonté de nous imposer des critères économiques ultra-libéraux et une militarisation menant à une régression sociale considérable.

Nous nous efforcerons sans cesse d’élargir l’action, la participation et le contrôle des citoyens à tous les niveaux et à toutes les étapes de la construction de l’Europe.

Enfin, ce qui est au cœur de la crise de l’Union européenne, c’est la démocratie. Pendant des décennies, l’Europe s’est faite par en haut, au mépris total de la grande diversité de ses cultures et de ses langues, sans les peuples, et souvent contre eux.

Mais quelque chose est déjà en train de changer. Les grandes luttes sociales, syndicales et des citoyens contre la guerre ont commencé à modifier la situation. En à peine quelques années, elles ont grandement contribué à un large rassemblement de soutien à la paix, de l’égalité des droits de l’homme, du respect pour la planète. Comme forces politiques de transformation sociale, nous voulons contribuer à cette nouvelle dynamique qui combat résolument la politique néolibérale. Les forums sociaux ont été des moments de débat essentiels, de confrontation et de construction d’alternatives populaires et citoyennes à l’Europe néo-libérale actuelle. Les mouvements sociaux, les luttes sociales et citoyennes ont leurs propres dynamiques, leur indépendance d’analyse, de proposition et d’initiative. Nous sommes favorables non seulement à la défense des droits des travaileurs et des syndicats contre toutes sortes de discriminations, mais également favorables à l’extension des droits des travailleurs, y compris pour les sans emploi et les précaires, étendant la démocratie sur le lieu de travail et dans la vie économique, à tous les niveaux, incluant le niveau européen.

Nous représentons une voie alternative de développement social, écologique, durable et de restructuration de l’économie basée sur la protection de l’environnement et du climat, fondée sur le principe de précaution, par l’utilisation de technologies respectueuses de l’environnement, par la solidarité sociale durant toute la vie, par la création de nouveaux emplois et par l’aide aux régions défavorisées de la terre.

Nous donnerons un rôle accru au Comité des régions et au Comité économique et social en tant qu’organes institutionnels essentiels à la politique démocratique et régionale de l’UE. Elles doivent prendre part au processus de décision dans les institutions européennes.

Des intérêts divers sont en conflit dans l’UE. Pour nous, cela crée un nouvel espace politique pour la lutte des classes et pour la défense des intérêts des travailleurs et de la démocratie, y compris au sein de la société européenne avec ses organisations et institutions dont le Parlement européen.

Le PGE assume l’obligation de contribuer à assurer que les grands changements qu’il professe deviennent réalité, dans un contexte de recherche permanente de la paix, de la démocratie et de la justice sociale.

Luttons ensemble pour une nouvelle société, un monde de justice sans exploitation ni guerre.

Ensemble nous disons qu’une autre Europe est possible. L’avenir est ici : l’histoire n’a pas de fin.

Berlin, 10-11 janvier 2004

Messages

  • ce qui est surprenant dans l’ensemble des programmes de gauche, c’est :
    1) qu’aucun bilan n’est tiré des expériences de gauche, en particulier la notion d’eurocommunisme, particulièrement en France.
    2)Que n’est jamais étudier le travail d’assimiliation des "élites de gauche" par la bourgeoisie, l’association confrontations.fr est un exemple d’une coupole existante, à titre d’exemple, on y trouve côte à côte LE DUIGOU de la CGT et ROUSSELY ancien Président d’EDF, maintenant reconverti dans la banque, bien que réputé de gauche, sans parler de DELORS. Autre exemple, les discussions entre THIBAULT de la CGT ET ROUSSELY, pour faire passer, les mutuelles d’EDF et de gdf DANS LE Giron du groupe d’assurance "Allianz"
    3) Aucune mesures pratiques n’est envisagée pour constituer une force, exemple : comment se fait-il qu’il ne soit pas mis en place des sections syndicales dans les zones transfrontalières CATALOGNE, médit, régions transfrontalières des pays rhenan etc.
    4) en un mot la gauche participe à l’organisation de la passivité du salariat, à l’échelle européenne, se satisfaisant de grands machins bureaucratiques incapables d’organiser dans les détails une confrontation avc la bourgeoisie, toujours ailleurs toujours demain. Elle laisse ainsi l’initiative stratégique à la bourgeoisie ; elle seule à le droit de décider ce qui est possible ou pas.