Accueil > La Poste va devenir une entreprise privée comme les autres dès le premier (...)

La Poste va devenir une entreprise privée comme les autres dès le premier trimestre 2009.

Publie le vendredi 4 juillet 2008 par Open-Publishing
6 commentaires

La Poste, la première entreprise française avec 300 000 salariés, pourrait bientôt changer de statut. Selon nos informations, le président de l’entreprise publique, Jean-Paul Bailly, a mis à l’étude la transformation du groupe, aujourd’hui doté du statut d’exploitant autonome de droit public – assimilable à celui, plus connu, d’Etablissement public industriel et commercial (Epic) – en une société anonyme (SA).

Ce projet, très délicat à mener sur les plans juridique et surtout, politique et social, est élaboré depuis plusieurs mois dans la plus grande discrétion. La Poste s’est entourée de conseils, parmi lesquels la banque d’affaires Rothschild et le cabinet de juristes Baker & Mc Kenzie. Le ministère des finances, Matignon et l’Elysée en ont été mis au courant. Plusieurs réunions de travail ont eu lieu avec des représentants du gouvernement, pour examiner l’opportunité d’un tel changement et le cas échéant, son calendrier.

Pour l’opérateur public postal, l’adoption du statut de SA – une société commerciale dont le capital est détenu par des actionnaires – serait devenue une nécessité, pour affronter la libéralisation totale du marché du courrier prévue en 2011.

Lestée par une dette de 5,8 milliards d’euros, qu’elle s’efforce d’alléger d’un exercice à l’autre, La Poste s’estime aujourd’hui pénalisée face à ses concurrents pour financer sa croissance. Elle est l’un des derniers opérateurs postaux européens à ne pas avoir été transformé en société par actions, dans le cadre d’un mouvement amorcé au milieu des années 1990 dans les pays nordiques qui a, depuis, gagné l’Allemagne et l’Italie.

Le règlement du dossier des retraites à la faveur d’un chèque de deux milliards d’euros payés à l’Etat en 2006, et contre la promesse du versement d’un dividende régulier, en outre, a pesé sur ses comptes.

L’idée de M. Bailly serait de profiter de la transposition en droit français de la troisième directive postale, qui va libéraliser le marché, pour prendre le statut de SA. Le passage du texte au Parlement pourrait intervenir dans le courant du premier trimestre 2009.

Le dossier, cependant, est loin d’être tranché car il renvoie aux choix de politique économique du gouvernement. La question de la transformation de La Poste en SA appelant celle de sa privatisation, fut-elle partielle, le gouvernement doit, en effet, décider s’il décide d’en garder 100 % du capital, ou d’en céder une partie à des investisseurs privés sur le marché.

Interrogé sur ces orientations, un conseiller de l’Elysée indiquait, jeudi 3 juillet, qu’ " il paraîtrait assez naturel que La Poste change de statut dans le contexte de mise en concurrence ", mais précisait " ne pas avoir été officiellement saisi de la question ". Rendant compte des premiers échanges entre La Poste et le gouvernement, une autre source précisait que " le changement de statut est perçu comme inéluctable, la seule interrogation portant sur le moment opportun pour le faire ".

Toujours selon nos informations, et alors que les discussions s’engagent à peine, un schéma jugé acceptable par toutes les parties serait d’annoncer la modification du statut de La Poste, en même temps qu’une ouverture du capital limitée, du groupe. Cette privatisation partielle pourrait être ouverte aux investisseurs institutionnels et aux particuliers sur le marché financier, avec une part significative d’actions réservées aux salariés, comme ce fut le cas lors de la mise en Bourse d’EDF, en novembre 2005 (2 % du capital environ pour les salariés).

L’adhésion des salariés de La Poste au projet constituerait, en effet, une garantie de bon déroulement de l’opération. Pour que celle-ci soit comprise du grand public et des parlementaires, très attachés à la défense des services publics de proximité, et tout particulièrement à La Poste, les dirigeants de l’entreprise publique verraient, en outre, d’un bon œil la constitution d’un actionnariat populaire important.

Quelle que soit l’option retenue, souligne un proche du dossier, " l’Etat restera majoritaire dans le capital. La Poste devenue société anonyme restera une entreprise à capital public ". La question d’une prise de participation de la Caisse des dépôts (CDC), dont l’Elysée veut accentuer la position d’investisseur de long terme dans les grandes entreprises françaises, devrait alors probablement se poser.

En 1996, France Télécom avait adopté le statut de SA puis avait ouvert son capital un an plus tard, à hauteur de 20 %, dont près de 3 % avaient été réservés au personnel. Autour de Lionel Jospin, alors premier ministre, et pour apaiser la controverse sur la privatisation de l’opérateur de télécommunications, la gauche avait employé le terme de " sociétisation ".

L’évolution du statut de La Poste et de son capital promet toutefois de faire grincer des dents auprès des syndicats du groupe, attentifs au devenir du service public postal sur tout le territoire, au maintien de l’emploi. Ils sont notamment préoccupés par la priorité donnée à la rentabilité des opérations sur la qualité des services. Ils n’ont de cesse de dénoncer la primauté d’une logique financière, induite par la libéralisation du marché.

 http://www.lemonde.fr/economie/arti...

Messages