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Réforme des institutions : Touche pas à mon .. Sénat

Publie le mercredi 16 juillet 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

de Slovar

La réforme institutionnelle de Nicolas Sarkozy si elle se pare de tous les atours d’une amélioration des droits parlementaires fait surtout l’impasse sur une anachronie démocratique : Le Sénat.

Un certain nombre de citoyens s’interrogent régulièrement sur cette institution dont il est patent qu’elle est trop souvent un refuge pour les candidats malchanceux à la députation et les anciens ministres. Il semblerait qu’à gauche comme à droite qu’on apprécie de pouvoir s’y installer lorsque le suffrage universel direct devient dangereux.

Ainsi, notre Premier Ministre après avoir perdu la région qu’il dirigeait s’est-il immédiatement replié sur un poste de sénateur. Jean-Pierre RAFFARIN qui brigue la Présidence du Sénat ne s’est jamais en ce qui le concerne, jamais confronté au suffrage universel direct.

Or, est-il pensable dans un pays qui veut moderniser ses institutions et les rapprocher des citoyens de penser que l’homme qui remplace le Président de la République en cas d’intérim du pouvoir (La Constitution de 1958 confie au Président du Sénat la charge d’assurer l’intérim de la Présidence de la République dans le cas où le Conseil constitutionnel en aurait constaté la vacance temporaire ou définitive : décès, maladie, démission, ou autres cas.) puisse ne s’être jamais soumis au suffrage universel direct ?

Est-il normal qu’il doive être consulté par le Président de la République lorsque ce dernier souhaite dissoudre l’Assemblée nationale, composée elle, d’élus issus du suffrage universel direct ?

Si certains souhaitent la suppression pure et simple de la deuxième chambre au nom de la République, une réforme du mode d’élection du Sénat constituerait déjà une avancée considérable

La polémique, si l’on peut dire, repose sur le mode de scrutin des sénateurs. En fait comment sont-ils élus ?

Les sénateurs sont élus par les grands électeurs, réunis dans chaque département au sein d’un collège électoral qui est composé comme suit :

Des représentants des conseils municipaux. Ils représentent 95 % du collège électoral.
Des conseillers généraux, les conseillers régionaux et les députés. Ils représentent 5 % du collège électoral.

Les sénateurs sont ainsi les élus des élus, puisque désignés par le suffrage universel indirect, à savoir par les grands électeurs, qui ont eux-mêmes été élus au suffrage direct. Le collège électoral comprend environ 150 000 personnes :

577 députés ;
1 870 conseillers régionaux ;
4 000 conseillers généraux ;
142 000 délégués des conseils municipaux. Ils constituent donc 95% de l’ensemble des grands électeurs du Sénat.

Au-delà de cet aspect purement théorique et institutionnel, la pratique politique a montré un tout autre visage du Sénat. La meilleure illustration que l’on puisse en trouver réside dans une phrase de l’un des pères spirituels de la Constitution de 1958, le Général De Gaulle, qui après avoir vainement tenté de réformer le Sénat en 1969, disait de celui-ci : « Le Sénat a un privilège exorbitant et imparable, celui de tout bloquer. S’il y a une erreur dans la Constitution de 1958, c’est bien celle-là : de créer un corps contre lequel on ne peut rien alors que l’on peut quelque chose contre tous les autres » La pratique politique a fait conclure au politiste Bastien FRANÇOIS : « le Sénat ne sera pas une simple chambre d’enregistrement. Il sera le haut lieu du conservatisme le plus archaïque ». Qu’est-ce donc qui rend cette institution si "contestable" ? Sources et extraits : Comité étudiant de la C6R

Mais quelle est la situation aux vues des dernières élections locales ?

Depuis le 16 mars 2008, la gauche est majoritaire dans toutes les catégories de collectivités locales. La gauche gère 20 des 22 régions métropolitaines et depuis mars 2008, 58 des 102 départements. Par ailleurs, 60 % des Français vivent dans des communes gérées par la gauche qui gère :

184 villes de 10 à 30 000 habitants contre 153 à droite,
82 villes de 30 à 50 000 habitants contre 61 à la droite,
52 villes de 50 à 100 000 habitants contre 31 à droite
et 32 villes de plus de 100 000 habitants contre 17 à droite.

La gauche gère désormais 350 villes de plus de 10 000 habitants contre 262 pour la droite, qui en détenait 342 auparavant. Elle est majoritaire dans les communes de 3 500 à 10 000 habitants.

Alors, la gauche devrait en ce cas pouvoir devenir majoritaire au Sénat. et bien non , puisque le collège électoral du Sénat sur-représente en effet les communes les moins peuplées.

Les 21 704 communes de moins de 500 habitants qui abritent 8,39 % de la population (en 1990) désignent 16,17 % des grands électeurs
Pour les villes de plus de 100 000 habitants (dont Paris, Lyon, Marseille) qui représentent 16 % de la population (en 1990), elles ne disposent que de 8 % des délégués.
La France des communes de moins de 10 000 habitants, où vivait en 1990 51 % de la population comptait 69 % des délégués sénatoriaux tandis que les communes de plus de 10 000 habitants, où vivait 49 % de la population n’étaient représentées que par 31 % des électeurs sénatoriaux.

Par ailleurs dans ce collège, les communes (les représentants des communes représentent à eux seuls 96% de son collège) sont sur-représentées par rapport aux départements et régions. Or, l’article 24 de la Constitution précise que le Sénat est le représentant « des » collectivités territoriales de la République. Pourtant, les représentants des communes représentent à eux seuls 96 % de son collège électoral, conformément à l’esprit du « grand conseil des communes de France » qu’il était à sa création en 1875. Source le Blog du Sénateur REPENTIN

Le Sénat, la chambre du blocage institutionnel ?

Cette chambre ouvertement conservatrice a toujours été un bastion de la droite, ce qui fait dire au constitutionnaliste Guy CARCASSONNE (membre de la commission Balladur) : « Quand la gauche perd tout, elle perd tout ; quand la droite perd tout, elle conserve le Sénat » C’est parce que l’alternance fait partie des garanties de la santé démocratique d’un régime que l’on est en droit de s’inquiéter de ce que depuis un demi-siècle le Sénat n’a jamais changé de bord politique. C’est pourquoi le Sénat tel qu’il est aujourd’hui s’intègre mal dans le cadre républicain de notre régime.

Un mode d’élection problématique ?

Si le mode d’élection des sénateurs est la cause du déficit de légitimité démocratique de cette institution, il est également responsable de l’avènement d’une chambre structurellement à droite. En effet la quasi-totalité des grands électeurs (95% d’entre eux) sont des délégués des conseils municipaux. Cela signifie que les citoyens de la France d’en bas élisent leurs conseils municipaux, qui élisent des délégués, qui élisent des sénateurs. Le Sénat est donc une chambre issue du troisième degré, alors même que l’Assemblée nationale est élue directement par l’ensemble des citoyens.

De plus les 150 000 grands électeurs qui constituent le collège électoral du Sénat, qui élisent donc la seconde chambre de la République, ne représentent en fait que 0,25% de la population. Il est inutile de rappeler que l’Assemblée nationale est élue par tous les électeurs. Le poids écrasant des délégués des conseils municipaux, accentué par le fait que 98% des communes françaises comptent moins de 9000 habitants, contribue à faire du Sénat une chambre vouée à la défense des intérêts ruraux au détriment de l’intérêt général.

La surreprésentation des campagnes conservatrices qui en résulte explique sans aucun doute l’autisme politique de cette assemblée face aux nouveaux enjeux de la société contemporaine. Par ailleurs, le mode d’élection du Sénat contribue à laminer les petits partis, qui ne disposent d’aucune représentation dans cette "chambre haute", et sont donc condamnés à rester à l’écart du débat ; ce qui offre au plus extrémistes des arguments imparables pour faire croire que le système les opprime.

Le Sénat : une caricature des dysfonctionnements de la vie politique française ?

La chambre sénatoriale concentre en son sein toutes les dérives de la cinquième république. La moyenne d’âge des Sénateurs atteint 61 ans, et rares sont les jeunes élus qui parviennent à franchir les portes du Palais du Luxembourg, ce qui fait bien souvent dire que le Sénat est la "maison de retraite de la Vème République". L’élection au Sénat couronne généralement une longue carrière politique souvent caractérisée par l’accumulation et le renouvellement de mandats locaux.

La seconde chambre du système politique français, en plus d’être hermétique au renouvellement de ses membres, reste l’assemblée la plus masculine de notre République : elle n’accueille que 10,9 % de femmes sur ces bancs.

La place de sénateur s’achète aujourd’hui au prix de promesses et de contrats tacites avec les élus locaux. Cumul des mandats, renouvellement infini et appropriation des postes politiques, clientélisme local, absence de parité ... tous les maux de la vie politique française s’épanouissent dans la douceur des jardins du Luxembourg. Ce n’est peut-être pas un hasard si les Sénateurs ont manifesté leur opposition aux lois sur la parité femme/homme en politique et sur la réglementation du cumul des mandats !

Réformer le Sénat : une exigence démocratique ?

Une élection au scrutin proportionnel rendrait possible une meilleure représentation des français dans la diversité de leurs opinions politiques via la prise en compte de partis absents de l’Assemblée nationale. « Remplaçons le Sénat par une chambre élue au scrutin proportionnel par l’ensemble de la population, où toutes les sensibilités politiques, même les plus extrêmes, seront représentées, au plus grand profit du débat parlementaire et, donc, du contrôle démocratique du gouvernement. La diversité des points de vue s’exprimerait ainsi librement sans que la stabilité gouvernementale puisse en être affectée puisque la majorité à l’Assemblée nationale pourrait toujours avoir le dernier mot » (Bastien FRANCOIS). Comme le suggère Olivier DUHAMEL (membre également de la commission Balladur)

Il s’agirait alors d’une chambre de type fédéral sur le modèle du Bundesrat allemand ou du Sénat états-unien qui s’inscrirait dans le mouvement de décentralisation engagé en France depuis 1982. Dans une autre perspective, la proposition faite par le Général De Gaulle en 1969, qui consistait à faire du Sénat une sorte de super Conseil Economique et Social, composé de représentants de tous les intérêts de la société et destiné à éclairer les choix de l’Assemblée nationale, mériterait d’être réexaminée à la lumière du contexte politique actuel.

Sources et extraits : Comité étudiant de la C6R

La genèse de cette réforme des institutions revient à la commission BALLADUR. Que dit-elle au sujet du Sénat ?

Pour le rapport Balladur : «  il n’est pas douteux que le régime électoral applicable au fonctionnement [du collège sénatorial] favorise à l’excès la représentation des zones faiblement peuplées, au détriment des zones urbaines ».

Le rapport préconise en conséquence « que soit affecté à chacune des collectivités territoriales dont les représentants concourent à la désignation un nombre de délégués déterminé de telle manière que soit garantie une représentation équilibrée de chacune d’elles en fonction de sa population. Ainsi serait assuré un meilleur équilibre dans la représentation des populations. Quelle que soit la mission de représentation des collectivités territoriales assignée au Sénat par la Constitution, les zones peu peuplées ne peuvent pas être représentées au détriment de celles qui le sont davantage ». Il proposait explicitement que l’article 24 de la Constitution soit modifiée « de telle sorte qu’y apparaisse clairement le critère de proportionnalité de la population ». C’est pourquoi il a proposé que le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales « en fonction de leur population ».

Lorsqu’on pense qu’Edouard BALLADUR qui officiait déjà auprès du Général De GAULLE et à toujours appartenu à la majorité de droite parlementaire valide ces propos, on se dit que les arguments contre la modification de la cartographie électorale du Sénat sont plus que minces.

Car, aujourd’hui, départements et régions participent au collège électoral sénatorial uniquement par le vote des 3 857 conseillers généraux et des 1 722 conseillers régionaux et conseillers à l’Assemblée de Corse. Ils représentent ainsi, respectivement, seulement 2,66 % et 1,19 % du collège électoral sénatorial, constitué à 96 % de représentants des communes.

Et enfin la bonne question : "Combien cela coûte t-ils au français priés de se serrer la ceinture ?"

Pour se faire, il suffit de se rendre à la page : Les comptes du Sénat de l’exercice 2007 disponibles sur le site Web du Sénat

Nous indiquerons simplement à ceux qui ne souhaitent pas lire la totalité des chiffres inscrits dans le tableau officiel que

Budget exécuté 2007

Les immobilisations corporelles :

Locaux, agencements, collections et oeuvres d’arts, .. 4 353 730 €

Les charges de fonctionnement 310 291 153 €

Soit un total (après diminution des produits de fonctionnement) de 308 799 450 €

Vous avouerez qu’un telle somme autoriserait les citoyens à demander un peu plus de clarté dans la désignation des élus du Sénat. Et pourtant, la réponse de Nicolas Sarkozy à François Hollande reçu hier est sans appel : Pas de modification prévue .

Cela n’empêche pas en lisant La Tribune de ce matin de constater que Eric WOERTH annonce :

30 627 suppressions de postes de fonctionnaires en 2009 dont 13 500 à l’Education Nationale et un tour de vis sur les dépenses jusqu’à 2011.

Le tout sur fond de croissance ne devant pas être inférieure selon Madame LAGARDE à 1,7 % bien qu’elle déclare : "La situation sera plus difficile à gérer cette année qu’elle ne l’a été l’année dernière" et n’entrevoit une embellie qu’au cours du ... deuxième semestre 2009.

Tout ceci est à mettre en parallèle des promesses (toujours disponibles sur le site http://www.sarkozy.fr) du candidat de 2007 :

Mon projet : ensemble tout devient possible (les 15 points de mon projet en 16 pages)

1. Mettre fin à l’impuissance publique
2. Une démocratie irréprochable
3. Vaincre le chômage
4. Réhabiliter le travail
5. Augmenter le pouvoir d’achat
6. L’Europe doit protéger dans la mondialisation
7. Répondre à l’urgence du développement durable
8. Permettre à tous les Français d’être propriétaires de leur logement
9. Transmettre les repères de l’autorité, du respect et du mérite
10. Une école qui garantit la réussite de tous les élèves
11. Mettre l’enseignement supérieur et la recherche au niveau des meilleurs mondiaux
12. Sortir les quartiers difficiles de l’engrenage de la violence et de la relégation
13. Maîtriser l’immigration
14. De grandes politiques de solidarité, fraternelles et responsables
15. Fiers d’être français

On ne s’en lasse pas !!!

Slovar les Nouvelles

http://slovar.blogspot.com

Crédit photo

Le site du Premier Ministre

Messages

  • La seule manière de réformer le sénat est de le faire par référendum puisque de fait le Sénat jouit d’un droit de véto constitutionnel ; ( il faut le vote des deux assemblées sur un texte identique pour que le congrès soit convoqué).

    De gaulle avait essayé en 1969, de revenir sur les prérogatives du sénat et avait proposé une réforme assez radicale, mais il avait perdu ce référendum.

    Tout réforme d’envergure de la Véme République ne peut passer que par référendum.

    Aujourd’hui les députés et sénateurs s’amusent avec leurs mesures de "gribouilles" qui sont autant d’écrans de fumée. d’ailleurs, ils n’assistent même pas aux séances. Hier au Sénat, c’était la Bérezina.

    • Monocamérisme : les débats de 1946, la questions des libertés et perspectives.

      Que des élus locaux, ceux de Chevaigné en Ille-et-vilaine, veuillent en finir avec le Sénat (1) voilà chose pas banale ! Le fait mérite un petit retour en arrière, histoire de repérer quelques enjeux (pas tous) . La période des années 1946 est là encore fertile de débats politiques riches . Déjà à l’époque les libéraux luttaient becs et ongles pour restreindre la représentation populaire en lui ajoutant une seconde chambre. Les communistes ne proposaient pourtant pas les soviets partout. Mais la puissante dynamique démocratique de l’époque effrayait la bourgeoisie et ses représentants qui s’arc-boutaient pour résister au pouvoir populaire montant . En l’espèce l’Etat démocratique représentatif montre au passage sa nature de classe puisqu’il lui faut en même temps reconnaître le pouvoir populaire et l’empêcher dans sa réalisation concrète au profit de la classe dominante mieux représentée au Sénat.

      I - LES DEBATS DE 1946

      J’emprunte les analyses qui suivent à Philippe Dujardin auteur de "1946, le droit mis en scène" (PUG 1979)

       Contre le conservatisme de la seconde chambre, la gauche défend le monocamérisme .

      En 1946, ni la proposition de loi constitutionnelle du PCF, ni celle de la SFIO ne font référence à une deuxième chambre. Les représentants communistes entendaient faire fonds sur le suffrage universel et dénonçaient, citant habilement les premiers radicaux, la deuxième chambre, "refuge du conservatisme social" (Hervé Pierre). La SFIO, instruite par l’échec du Front populaire ne pouvait que demeurer fidèle aux positions exprimées par Léon Blum en 1935, qui stigmatisait les privilèges exorbitant du Sénat, l’iniquité de la répartition de ses sièges et de ses électeurs et se déclarait partisan de l’Assemblée.

       La droite dénonce un projet dictatorial.

      La minorité libérale défendait l’incompatibilité de la démocratie constitutionnelle et du monocamérisme. René Capitant, dénonçant la "monarchie absolue de l’Assemblée" recomande qu’on en limite la souveraineté par la séparation des pouvoirs et l’institution sénatoriale : "/Dans la constitution de 1875, il n’y avait rien non plus au dessus du Parlement. Mais il y avait à côté de la chambre un Sénat et la séparation des pouvoirs. Il y avait par conséquent un système de frein, de contrepoids qui un moyen extrêmement efficace de limiter la souveraineté de l’Assemblée et même le seul moyen efficace." . /Paul Coste-Floret use d’une argumentation similaire : "/La nécessité des deux chambres est fondée sur la croyance que la tendance innée de toute assemblée à devenir tyrannique, active et corrompue doit être réprimée par l’existence d’une autre chambre égale en autorité"

      II - LEUR LIBERTE EST-ELLE UN PEU LA NOTRE ?

       Que défend la droite ? Sa liberté .

      Elle fait appel dans un même mouvement à diverses expériences historiques et au droit . L’histoire sommairement évoquée vient donc conforter la technique juridique de la séparation des pouvoirs lorsque cette technique masque de trop son contenu de classe et sa vocation anti-démocratique. Le tout est recouvert de l’idéologie libérale la plus crue puisque pour René Capitant le Sénat est la "Chambre de la liberté" ! La liberté contre la démocratie tel est un des enjeux repérable dans ce débat. La liberté contre la dictature : est-ce de l’idéologie ou de la vérité ? René COTY érige lui le Sénat en "conservateur des institutions républicaines". Quand ce n’est pas la liberté, c’est la République ! La démocratie véritable ne serait donc pas compatible avec la liberté et avec des institutions républicaines ? Voilà qui est grave ! Voilà qui mérite débat. On remarquera que les libéraux procèdent par argumentation sommaire et non rigoureuse, ce qui tend à montrer qu’ils ont plus peur de la démocratie qu’ils ne disent la vérité sur la dictature en puissance. En vérité, les possédants ont peur, ils ont peur du peuple ! On comprends fort bien qu’une assemblée communiste-socialiste veuille s’en prendre aux privilèges des possédants pour une redistribution vers ceux d’en-bas. Mais le peuple doit-il avoir la même peur que les possédants ?

       La liberté des possédants est-elle aussi la liberté du peuple ?

      Toute poussée de démocratie radicale vers la démocratie populaire, vers le socialisme doit au regard des dictatures à parti unique ayant existées pendant le XX ème siècle répondre à cette question. Pour la droite la liberté de tous contient nécessairement la liberté des propriétaires du capital. Par contre accroître la liberté réelle des travailleurs comme le veulent les communistes est évidement problématique pour la droite mais pas pour le peuple . Vouloir conforter par des droits et des garanties le pouvoir des travailleurs et du peuple c’est porter atteinte à la liberté et aux droits des patrons, des possédants . Cela est impensable pour les libéraux qui ne cherchent pas à étendre les libertés de la majorité au détriment des privilèges d’une minorité . La réponse mérite sans dout plus que ces propos. On épuise pas un tel sujet si rapidement. Je recentre donc la question sur le sujet initial.

      En refusant le monocamérisme et la démocratie au profit d’un bicamérisme qui redonne la main aux grands possédants la droite défends la liberté du capital et l’Etat capitaliste. Elle ne peut le faire aussi crûment d’ou son recours hypocrite à la liberté en général, à la liberté de tous, à l’abstraction juridique . Les libéraux sont hypocrite par nature puisqu’ils défendent en même temps la démocratie des sujets-citoyens et l’oligarchie des possdants. Mais évoquer leur hypocrisie ne suffit pas à répondre à la question posée. Avant de se poser la question de la possibilité de la pleine démocratie il importe de savoir si réellement la liberté des possédants est bien la même que celle du peuple. Le peuple doit-il avoir la même peur que les possédants ? L’expérience historique y compris celle des pays de l’Est tend à montrer que le peuple ne doit pas avoir peur de lui-même mais de ces membres qui se détachent de lui au point de former un corps séparé eu égard aux avantages offert par la fonction de membre séparés. Cela concerne bien les élus . De cela il doit se méfier s’il aspire à la démocratie ouvrière, à l’autogestion socialiste. Mais ce n’est pas une tare rédhibitoire . Un statut de l’élu et notamment du mandat peut remédier à une dérive censitaire ou oligarchique malgré la voie électorale . De même la volonté de maintenir le pluripartisme est un gage contre la dictature du parti unique .

       SOCIALISME DU XXI siècle : UNE ASSEMBLEE, DES CONSEILS ET DES GARANTIES

      Aller vers la démocratie d’en-bas, du peuple suppose dans la situation post-révolutionnairele maintien d’une assemblée d’élus avec des conseils (ou soviets) dans les quartiers et les lieux de production. Elle suppose aussi des garanties nouvelles.

      Philippe DUJARDIN in « 1946, le droit mis en scène » distingue (p114) l’Etat total ou totalitaire de l’Etat tutélaire et de l’Etat totalitariste. Son propos concerne les Etats capitalistes.

      Tutélaire est l’Etat qui s’érige en négation des corps intermédiaires traditionnels tout autant que des classes sociales et de leurs organisations. Cet Etat instaure entre le sujet individuel et lui une vacuité qui se donnera pour la garantie de la sûreté personnelle, qui sera, en fait, le lieu où s’abîmeront sûreté, liberté individuelle et collective « sitôt que le souverain le demande » (JJ Rousseau)

      Totalitariste : se dit d’une forme caractéristique de l’Etat capitaliste, ou l’on prétend faire pièce à la « frammentarieta » de l’Etat libéral et du syndicalisme libre (Gentile) ou faire retour à l’unité supposé des temps « prépluralistes » (C Schmitt) en abolissant la distinction société civile/ Etat.

       Le gage de la reconnaissance de la diversité de la société civile : sans sexisme ni racisme *

      Dans les dictatures réactionnaires les femmes et les étrangers voient leurs droits réduits. Le sexisme et le racisme se répandent aisément. La laïcité ne sera pas confondue avec la guerre aux religions qui pourront toujours se pratiquer mais en respectant le cadre laïc. On ne peut guère se lancer en conjecture sur le point de savoir si les croyants vont on non s’inscrire dans la dynamique d’émancipation en créant une théologie de la libération. Reste que les éléments réactionnaires faisant le jeu du capital déchu seront contestés comme tous les autres.

      Revenons à la société civile : Voici la définition de K MARX : « La société civile embrasse l’ensemble des rapports matériels des individus à l’intérieur d’un stade de développement déterminé des forces productives. Elle embrasse l’ensemble de la vie commerciale et industrielle, d’une étape et déborde par là même l’Etat et la nation, bien qu’elle doive par ailleurs s’affirmer à l’extérieur comme nationalité et s’organiser à l’intérieur comme Etat » in L’idéologie allemande (p 104)

      La société civile est clivée par de multiples rapports sociaux dont le plus central est le rapport capital / travail. Les dictatures ont pour point commun de détruire ou « couper les ongles » des organisations de défenses et promotion du salariat. Ecraser la société civile revient en fait à interdire les syndicats et les partis de gauche pour laisser place aux grands patrons influents, aux religions et à leur « dignitaires » à la famille. L’Espagne de Franco, le Portugal de Salazar, la Grèce des colonels, l’Italie mussolinienne, la France de Pétain ont procédé ainsi avec des variations qui tiennent à leurs histoires spécifiques.

       Contre le totalitarisme

      L’Etat tendant vers l’éco-socialisme ne reproduira pas le modèle stalinien au sens de l’Etat parti totalitaire.

      Il ne s’agira pas de l’Etat d’un parti ni d’un homme. Des mesures seront prises pour contrecarrer la concentration des pouvoirs au sommet de l’Etat. La durée des mandats et leur renouvellement limité après élection (ex : 3 x 3 ans maxi) ne sont qu’une des garanties. Même la Haute Noblesse d’Etat (cf Bourdieu) perdra ses privilèges bureaucratiques.

      Il n’y aura pas d’idélologie d’Etat officielle même si une idéologie dominante aura probablement supplanté la « pensée unique » néolibérale. Il n’y aura pas de presse d’Etat unique.

      Il s’agira d’un Etat politique qui laissera place au droit, un Etat politique expression de la démocratie et instrument de celle-ci ne recouvrira pas la société civile d’une volonté disciplinaire notamment à l’encontre des paysans et artisans à l’exception du capital dont les rapports sociaux qui lui sont coextensif seront progressivement abolis . Il y aura certes des enjeux de pouvoir autour des médias, autour des polices privées du capital « finissant » comme de la police d’Etat. En fait l’Etat allant vers la démocratie socialiste se construira sur une voie à la fois pacifique (solidarité accrue, plus d’égalité, beaucoup moins d’oppression, répartition des richesses) et conflictuelle. Mais il s’agira d’une conflictualité qui bridera les couches dominantes victimes du partage des richesses. Ce faisant il ira vers sa propre disparition.**

      Christian DELARUE

      1) Les élus de Chevaigné veulent supprimer le Sénat

      http://bellaciao.org/fr/spip.php?article68436

      ELEMENTS SUR L’ALTER-REPUBLIQUE
      lire la parie I sur LA SEPARATION DES POUVOIRS : EN PRENDRE ET EN LAISSER !

      http://www.prs12.com/article.php3?id_article=3774