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" On veut secouer un peu les Irlandais. "

Publie le mercredi 17 septembre 2008 par Open-Publishing

Un diplomate français : "On veut secouer un peu les Irlandais."

"Je dirais que le traité entrera en vigueur plutôt vers le 1er janvier 2010", a déclaré à Bruxelles M. Jean-Claude Juncker, Premier ministre luxembourgeois, doyen des dirigeants de l’Union Européenne.
A l’origine, ce texte censé faire mieux fonctionner l’Union européenne élargie aurait dû être appliqué au tout début de l’année 2009. Le calendrier a été chamboulé par la victoire du "non" lors du référendum irlandais du 12 juin.

Pour les partenaires de Dublin, le seul moyen de sortir de l’impasse institutionnelle reste un nouveau vote, comme en 2002 lorsque les Irlandais étaient repassés devant les urnes à un an d’intervalle pour entériner le traité de Nice, toujours en vigueur aujourd’hui.

Après le séisme du 12 juin, les pays européens espéraient encore une deuxième consultation au premier semestre 2009. A temps pour deux échéances importantes : les élections européennes en juin et le renouvellement de la Commission européenne en novembre.

Ce scénario est désormais jugé hors de portée. "Je ne crois pas que le traité sera en place en juin 2009, lorsque se tiendront les prochaines élections européennes", a admis M. Juncker devant la presse.

"Pour le faire entrer en vigueur en juin 2009, le traité devrait avoir été ratifié par tous les pays avant la fin février 2009. Ce n’est pas réaliste", a ajouté M. Juncker. A part l’Irlande, seuls deux pays, la Suède et la République tchèque, doivent encore le ratifier, par voie parlementaire.

En étant le premier à clamer haut et fort ce que reconnaissent en privé depuis déjà plusieurs semaines de nombreux responsables européens, le chef du gouvernement luxembourgeois prend toutefois le risque de froisser la présidence française de l’UE.

Paris entend en effet maintenir sous pression Dublin pour qu’il formule le plus tôt possible des propositions de sortie de crise, et se refuse pour cette raison à faire publiquement une croix sur un nouveau référendum au premier semestre 2009.

"On ne parle pas de cette possibilité pour l’instant", souligne un diplomate français. "On veut secouer un peu les Irlandais", en vue du sommet européen du 15-16 octobre où la question sera débattue, ajoute-t-il.

Du coup, un conflit de calendrier se dessine en Europe. "Il y a deux écoles de pensée", souligne une source gouvernementale tchèque, qui succèdera en janvier à la France à la tête de l’UE.

"La première, avec la France et l’Allemagne notamment, pousse l’Irlande à voter de nouveau avant les élections européennes, dans l’espoir que cela soutienne le scrutin", chroniquement marqué par une très forte abstention, et aide à relancer l’Europe, explique cette source.

"La deuxième, avec la République tchèque mais aussi la Suède ou l’Autriche, fait valoir qu’en mettant Dublin dos au mur pour un vote en mars ou avril 2009, on risque d’aboutir à un rejet encore plus massif des Irlandais et des problèmes aggravés pour l’Europe", ajoute-t-elle.

Un report à 2010 ne sera pas sans conséquences : l’Union européenne attend de Lisbonne un rôle plus important sur la scène internationale. Et les problèmes pratiques immédiats sont multiples.
Si le traité actuel de Nice s’applique lors des européennes de juin, il faudra réduire drastiquement le nombre d’eurodéputés de 785 à 736 membres.

Et en novembre 2009, lors du renouvellement de l’exécutif européen, le nombre de commissaires devra être inférieur au nombre d’Etats de l’UE, alors qu’aujourd’hui chaque pays a "son" commissaire. Avec une question : qui des 27 pays acceptera de se sacrifier ?