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La crise est intello, en conséquence vive la crise ! (zaz)

Publie le vendredi 10 octobre 2008 par Open-Publishing
6 commentaires

Avertissement :

Comme le lecteur le sait déjà, la mention "zaz" accompagnant nos textes indique une manière d’écrire délibérément décalée, qui ambitionne par un éclairage oblique à plus de perspicacité dans l’analyse politique.

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1. La crise est d’abord principalement intello même si ce n’est pas cet aspect que l’on prend bien sûr le plus violemment dans les gencives au premier kick

La crise financière est maintenant partout présente, de ce côté-là on se plaint pas, la presse nous en donne pour notre content. Il est probable que cette crise sera aussi de façon prochaine très concrètement économique ; au poil ! on va pouvoir la considérer d’encore plus près à cette occase : Obama dit que ce sera 1929, mais en bien pire.

Donc si on se résume en très concis, vous êtes déjà incontestablement sensibilisés et même presque experts (blasés peut-être même, à force !). Notre but n’est pas en conséquence ici d’en remettre une couche sur la leçon "technique" à induire ou sur l’exacte réalité des choses, lesquelles vous maîtrisez assez parfaitement. On vous propose un regard plus-loin-porté, en même temps que porté-de-biais (tu devines au passage si c’est pas tellement fastoche de regarder comme ça de cette façon pas naturelle et strabe ! : Primo, la crise est intello ! secundo, la crise est salutaire et fait avancer le schmilblick, tels seront nos deux points principaux.

Que la crise soit intello, sur le plan "scientifique" évidemment ça ne se nie plus, le changement de paradigme est déjà tout vu : Fini l’économique néo-machin, le non interventionnisme, fini les critères de Maastricht. Bon, eh bien dans ce bordel général tout consacré à la crise qu’est-ce qu’ils te font les journaux, je te le demande ? : Tous te parlent de Picasso. Si !

Dans le Monde : "Les œuvres des grands maîtres passés au scalpel pictural de Picasso". Froidement qu’ils t’écrivent ! Même chose, à peu près, dans les autres petits torchons plus falots. Tu vas dire, ça c’est un dérivatif, ils veulent détourner notre attention, nous amuser.

Avec Picasso ?

Soyons clairs, vous vous trompez amis ! Il n’y a aucun machiavélisme là-dedans, la classe journalistique à un respect profond de l’art et de la culture. La culture dit-elle c’est l’art c’est le beau, c’est du tout cuit pour les journaux.

La classe journalistique avait d’ailleurs quinze jours plus tôt exactement le même respect ou à peu près pour l’économique... et aussi pour le politique

2. Passons par les concepts : Du tiers exclu et de l’ambiguïté

Cet atterrant regard confiant, imprévoyant, ne doit pas être considéré comme une tare exclusive dudit milieu journalistique, s’il s’agit d’une tare elle est commune à tous, nous l’avons reçue des mêmes sources, des mêmes écoles (c’est seulement un peu plus grave quand on est passé par Sciences po.)

C’est que, depuis le néolithique au moins, l’homme a l’esprit fortement pré-structuré de la façon suivante : une chose est ce qu’elle est et n’est pas ce qu’elle n’est pas (A=A et A n’est pas non-A, c’est le principe d’identité). Également depuis aussi longtemps, une proposition est vraie ou fausse dans nos esprits, en aucun cas normande (un petit peu de ci, un petit peu de ça, avec ou sans calva) ; Toute troisième solution, intermédiaire donc ou quelque peu merdique, est par principe exclue. (C’est le principe du tiers exclu). Pour le lait ça va : Chérie y a du lait dans le frigo ? : non je suis désolée, Paulo, j’ai pas fait les courses à Franprix. Pour le saucisson c’est déjà moins bon. C’est ça que t’appelles avoir du saucisson dans la maison ? mais y reste plus qu’un trognon ! Déjà on voit que le concept de saucisson qui était quelque chose en entier n’est plus grand chose en morceau survivant. Et c’est encore pire avec le Camembert.

On peut résumer encore l’idée de manière concrète et imagée en cette question-vérité ci-après : un fond de vin est-il encore proprement du vin ?

Donc à cause des principes d’identité et de non-contradiction on est bien structuré. Ça repose, on marche pas ce faisant sur des sables mouvants. L’homme adore le sol ferme, il n’aime pas tanguer. L’inconvénient est que les choses changent et même les paysages, l’inconvénient est qu’il y a en tout des contraires de destruction, d’évolution, etc. Une chose est ce qu’elle est. Oui, mais sur un peu de temps une chose n’est plus ce qu’elle est, elle est rapidement ce qu’elle n’est pas.

Tu comprends désormais pourquoi les sociétés sont d’abord conservatrices et n’aiment pas trop la nouveauté. Logique ! on préfère le connu à l’inconnu, personne n’irait danser sur un champ de mines, ou la nuit dans un champ de tourbe, on est complètement des dégonflés.

Donc on joue placé, y a plein de maximes reçues, très tons, qui meublent notre esprit, qui passent en nous pour sophistiquement intelligentes sans deuxième examen de rattrapage critique. Par exemple, les Suisses sont pas des démocrates, ils aiment pas les étrangers. Ou, les Athéniens n’étaient pas non plus des démocrates car ils avaient des esclaves, ou la proportionnelle intégrale c’est très grave ! allons bon !? oui car elle crée des minorités de blocage ! etc. etc. on peut comme ça t’en faire de pleines pages.

Donc avec l’esprit structuré on vit bien, mais mal. Encore là n’est-ce rien ! comme on va voir, dans la réalité, au départ il y a toujours fondamentalement si ce n’est un bobard du moins une ambiguïté constitutive fondamentale. L’homme est rarement conscient des ambiguïtés constitutives fondamentales, s’il savait, ça le rendrait malade.

On ne prendra ici qu’un exemple : tout le monde atteste, en particulier les journalistes, que le beau engendre, caractérise, adoube la chose d’art. le beau fait l’art. Eh bien on voudrait pas vous décevoir mais c’est pas du tout ça. Une chose n’est pas artistique parce qu’elle est belle, mais elle est belle parce qu’elle est artistique. Chais pas si vous comprenez ! ? On vous expliquera ça mieux mais on n’a pas le temps, l’essentiel est que vous soyez interrogé par le propos (interrogé, mot propre sur soi et sympa pour l’entourage !)

3. Trois champs de l’ambiguïté fondamentale : art-culture, économie, politique

Donc tu prends le cas d’un journaliste, d’un bon journaliste : le journaliste si bon soit-il, si grand reporter soit-il (si mouchard, si fayot, si pro-dominants gagnants, si versus petits perdants), le journaliste rend compte de son temps, il ne peut pas le dépasser et sauter allègrement par-dessus. Qui le peut ? Tu le peux toi ?

Le journaliste de qualité s’appuie en tout sur les meilleures références du moment, exactement comme au tennis, ce n’est pas lui qui les fabrique. Le journaliste n’est pas un savant (il n’est pas non plus un philosophe, il ne maîtrise pas les subtiles ambiguïtés supra évoquées constitutives de notre monde.) On dit : les journalistes sont d’infâmes salauds ! Oh là ! Mais non, voyons, c’est trop ! Aucun journaliste n’a jamais reçu le prix Nobel, or si le journaliste n’en est pas digne, le journaliste n’en est pas moralement indigne non plus, il est tout simplement hors champ. Faut là-dessus quand même être un peu juste !

Le journaliste est un expert un peu donc, un expert intermédiaire, un expert de second rang, de strapontin quasiment. En tant qu’être, il peut même avoir tout d’une supergonzesse, cul super et nibards idem ! sauf qu’on le sait, en fait il est mais il n’est pas, il est bel et bien mais il est apparence, le journaliste est un transexuel de la pensée !

Si l’on veut bien dépasser ce problème ordinaire, délicat de la transexualité probable de la presse, la presse a en tout cas dans le moment une approche d’humilité face au dépassement, la presse a compris que la crise était d’abord dans les idées. Le Nouvel observateur titre ainsi cette semaine : "Tout sur la crise. Le pouvoir intellectuel en France. Enquête sur les 50 maîtres à penser d’aujourd’hui".

Le Monde pour sa part interroge Francis Fukuyama, ce qu’il n’avait pas fait depuis longtemps. Et qu’est-ce qu’il dit en terme de critique Fukuyama sur la crise dans son concept majeur américain : "Deux idées fondamentales américaines ont dominé la pensée mondiale depuis les années 1980... La première est une certaine vision du capitalisme selon laquelle une faible imposition, une régulation minimale et un gouvernement réduit constitueraient les moteurs de la croissance économique, non seulement aux États-Unis mais dans le monde entier. La seconde était que faire de l’Amérique le champion de la démocratie libérale dans le monde tracerait le meilleur chemin vers un ordre international plus prospère et plus ouvert."

Évidemment lire comme ça Fukuyama te donne immédiatement le sentiment d’être plus intelligent, sans compter que tu l’avais pensé avant.

En conclusion

C’est la crise et Picasso en ce moment nous les super-gonfle énormément.

Ensuite, la crise est l’occasion ou jamais de la profonde réflexion. Penser profond tous les siècles ou tous les deux siècles serait une bonne chose, vive la crise si elle nous le permet !

Nous avons côtoyé des allusions sur l’art avec le chien Flocky qui est à nos côtés, sur l’économie avec Fukuyama et même sur la démocratie avec le même. Proudhon qui vient de tomber des rayons exprime à ce dernier propos que : "Il faut avoir vécu dans cet isoloir qu’on appelle l’Assemblée nationale, pour concevoir comment les hommes qui ignorent le plus complètement l’état d’un pays sont presque toujours ceux qui le représentent."

Faisons court : Amis, il y a opportunément là un peu de pain sur la planche.

Alain Serge Clary et les Inoxydables philosophes de l’Ocséna vous saluent bien !

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Les Pensées zaz de l’Ocséna

Ocsena, Organisation contre le système-ENA... et pour la démocratie avancée
 http://ocsena.ouvaton.org

Messages

  • REMETTRE LE MONDE SUR SES PIEDS : TOUT LE POUVOIR AUX TRAVAILLEURS !!!

  • Non, la crise n’est pas belle, les plus pauvres vont morfler, ça se termine parfois très mal mais pas du côté qu’on voudrait !
    Ou alors, il faut vachement réfléchir, mais avec qui, quelle organisation, les silences sont assourdissants, foutre tout en l’air et essayer autre chose...Mais je crains que les riches voleurs acculés ,ne prennent d’autres options plus funestes .

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      Le loto

      Tiens, on le constate encore une fois, tout est inapproprié et tout est vilénie en même temps. Ils ont passé le flah loto de base de 1,20 à 2 euros sans nous consulter démocratiquement, l’escroquerie est énorme !

      Encore, compte-tenu de la crise, auraient-ils divisé le gros lot de 7 MF en dix petits gros lots de 700 000 euros c’était pas con. T’avais 30 heureux du jeu chaque semaine au lieu de 3 seulement. T’en avais 120 chaque mois pour les 4 semaines. Sur l’année, ca te faisait en gros 1400 gagnants, 14 000 sur dix ans, 140 000 sur le siècle.

      Comme vous le voyez, la crise pousse ardemment à la réflexion. 1°/ L’avenir de la démocratie sociale est dans le loto 2°/ Le patron de la Francaise des jeux et ses lieutenants entrent dans le collimateur de l’Histoire en rouge.

    • Sur l’idée de la fin du capitalisme, on ne manquera pas de lire dans le Monde du 11.10 : l’article d’Immanuel Wallerstein
      "Le capitalisme touche à sa fin"

      -http://www.lemonde.fr/la-crise-fina...

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      Pour notre part, nous soulignons ceci dans l’interview de Wallerstein :
      "Pourquoi ne s’agirait-il pas plutôt d’une nouvelle mutation du capitalisme, qui a déjà connu, après tout, le passage du capitalisme marchand au capitalisme industriel, puis du capitalisme industriel au capitalisme financier ?

      ***

      Le capitalisme est omnivore, il capte le profit là où il est le plus important à un moment donné ; il ne se contente pas de petits profits marginaux ; au contraire, il les maximise en constituant des monopoles - il a encore essayé de le faire dernièrement dans les biotechnologies et les technologies de l’information. Mais je pense que les possibilités d’accumulation réelle du système ont atteint leurs limites. Le capitalisme, depuis sa naissance dans la seconde moitié du XVIe siècle, se nourrit du différentiel de richesse entre un centre, où convergent les profits, et des périphéries (pas forcément géographiques) de plus en plus appauvries.

      A cet égard, le rattrapage économique de l’Asie de l’Est, de l’Inde, de l’Amérique latine, constitue un défi insurmontable pour "l’économie-monde" créée par l’Occident, qui ne parvient plus à contrôler les coûts de l’accumulation. Les trois courbes mondiales des prix de la main-d’oeuvre, des matières premières et des impôts sont partout en forte hausse depuis des décennies. La courte période néolibérale qui est en train de s’achever n’a inversé que provisoirement la tendance."