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LA CRISE, LE NPA ET L’ECOSOCIALISME par Raoul Marc Jennar

Publie le dimanche 19 octobre 2008 par Open-Publishing
7 commentaires

LA CRISE, LE NPA ET L’ECOSOCIALISME Raoul Marc Jennar

C’est la crise ! Mais, si on y réfléchit un instant, c’est tout le temps la crise ! Avons-nous connu depuis 30 ans des périodes où ce n’était pas la crise ?

Et même avant. Je suis né au début de ce qu’on a appelé « les Trente glorieuses ». Mais elles étaient glorieuses pour qui ? Pour les mineurs dont on fermait les charbonnages ? Pour les ouvriers de la sidérurgie dont on fermait les usines ? Pour tous les autres qui ont du attendre le plus grand mouvement social de l’après guerre, Mai 68, pour recevoir enfin quelques miettes des profits engrangés par le patronat ?

Et même quand, soi-disant, ce n’est pas la crise. Quand les taux de croissance montent. Quand les entreprises font des profits. C’est quand même la crise pour celles et ceux qui subissent les fusions-acquisitions, les restructurations, les délocalisations, les dérégulations, les suppressions d’emplois dans des boites qui font pourtant des bénéfices.

Et enfin, pour des millions de gens qui, quand ils ont payé leurs charges, n’ont que 50 euros par mois pour se nourrir, n’est-ce pas, et depuis longtemps, la crise tous les jours ?

La vérité, c’est que le capitalisme, c’est la crise. C’est un système qui génère les crises. Il y a des crises financières, des crises économiques, des crises sociales, des crises alimentaires, des crises sanitaires, des crises écologiques. Et chaque fois, au nom de ces crises, le capitalisme impose ses solutions, des solutions qui maintiennent les inégalités, des solutions qui entretiennent l’exploitation, des solutions qui protègent l’accumulation des profits par un petit nombre. Et quand la crise ne suffit pas, il fait la guerre. Rappelez-vous ce que disait Jaurès : « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». Là où le capitalisme ne peut exploiter en toute liberté, il provoque la guerre. Bien des guerres en Afrique qu’on nous présente comme des guerres civiles ou tribales sont en fait des guerres provoquées par le capitalisme. La guerre en Irak est une guerre du capitalisme.

En 1991, lors de l’effondrement de l’empire soviétique, le discours dominant a consacré l’échec du communisme. Nul ne peut nier que le capitalisme d’Etat, bureaucratique et policier, a échoué à réaliser l’idéal communiste. Mais cet échec nous condamne-t-il à nous résigner au capitalisme ?

N’est-ce pas le moment de dire haut et fort aux capitalistes : quel est votre bilan ? Quels sont, pour le plus grand nombre, les résultats du capitalisme ?

Quand près de trois milliards d’humains n’ont pas accès au savoir, aux nouvelles technologies et aux nouveaux savoir-faire qui pourraient améliorer leur niveau de vie, quand deux milliards de personnes n’ont pas accès aux médicaments essentiels, quand un milliard et demi de gens vivent avec quatre-vingt dix centimes d’euro par jour, quand un milliard de personnes souffrent de la famine, quand un milliard d’adultes dont deux tiers sont des femmes sont analphabètes, quand plus de 150 millions d’enfants n’ont pas accès à l’école primaire, dont la moitié sont des filles, quand 44% de la jeunesse du monde en âge de travailler sont au chômage, quand, dans une Europe si riche, il y a 50 millions de pauvres et 18 millions de chômeurs, n’est-on pas en droit de demander : capitalistes où est votre succès ?

Le capitalisme a bénéficié, avec les dérégulations massives décidées au niveau mondial comme au niveau européen, d’une liberté comme jamais il n’en avait connu depuis le 19e siècle. Et voilà son bilan. Certains vous diront. : « Vous vous trompez. Regardez en Chine, depuis qu’ils sont passés à l’économie de marché, 400 millions de Chinois sont sortis de la pauvreté ». Ils oublient de dire qu’un milliard de Chinois sont restés dans la pauvreté. Parce que, fondamentalement, c’est cela le capitalisme : c’est l’organisation de l’inégalité ; c’est l’exploitation de la majorité par un petit nombre.

Face à cette réalité, on observe deux comportements. Il y a ceux qui considèrent que le capitalisme fait partie de l’ordre naturel des choses et que la crise d’aujourd’hui n’est qu’un dérapage de mauvais capitalistes qu’il faut punir pour revenir au bon capitalisme, que la démocratie libérale et l’économie de marché, sont le moins mauvais de tous les systèmes, comme le disait avant hier soir sur France 2 le ministre des finances de Belgique.

Ceux-là, on les trouve à droite, bien entendu, au centre évidemment, mais également, à gauche. Ce sont en effet des sociaux-démocrates qui, à partir des années 80, en France comme dans le reste de l’Europe, ont accompagné et très souvent initié ce qu’on appelle la mondialisation, cette transformation du monde en un marché global où la puissance publique s’efface devant les acteurs économiques et financiers, où les humains sont traités comme des marchandises soumis aux lois d’une concurrence qui doit être libre et non faussée. La loi de déréglementation financière est une loi du PS. L’Acte unique européen et le traité de Maastricht, proposés par Jacques Delors, sont l’œuvre des sociaux-démocrates. La gauche plurielle partage avec onze autres gouvernements sociaux-démocrates la responsabilité de la stratégie de Lisbonne et des décisions de Barcelone sans lesquelles le démantèlement des services publics et du droit du travail n’aurait pas été possible. Et on a trouvé à la direction du PS les plus ardents défenseurs du traité constitutionnel européen préparé sous la direction de Giscard d’Estaing. Les mêmes souhaitent aujourd’hui ardemment qu’entre en vigueur ce copié collé du TCE qu’est le traité de Lisbonne pourtant rejeté par le seul peuple qui ait pu s’exprimer, les Irlandais.

Face à ces libéraux de droite et de gauche auxquels s’ajoutent ceux qui les suivent pour ne pas perdre les mandats que leur accorde l’alliance avec le PS, il y a ceux qui sont convaincus que le capitalisme n’est pas l’horizon indépassable de l’humanité. Ceux qui ne se résignent pas à voir le drapeau de la révolte tomber des mains de Rosa Luxemburg dans celles de Ségolène Royal.

On les trouve parmi celles et ceux qui ont fait campagne et ont soutenu le non de gauche au TCE. On en trouve parmi celles et ceux qui ont soutenu l’un ou l’autre des cinq candidats à la gauche du PS lors des présidentielles de l’an passé. Et on en trouve même, je tiens à le dire tout de suite, parmi les femmes et les hommes qui ont apporté leur voix au PS ou aux Verts. Faute de mieux à leurs yeux. Et au-delà de celles et ceux qui accompagnent ou soutiennent un parti politique, on en trouve parmi ces dizaines de milliers de gens qu’on appelle parfois des non encartés, altermondialistes, anti-nucléaires, écologistes, décroissants, faucheurs volontaires, militants des droits humains dont le grand rassemblement du Larzac, en août 2003, fut pour beaucoup, un moment fondateur.

C’est à ces femmes et ces hommes qui ne se résignent pas au capitalisme que la LCR offre une perspective. Moi qui ne suis pas membre de la LCR, qui n’appartient pas à la culture politique née de 1917, - ma culture politique, elle puise dans 1793 et 1871 et chez l’homme massacré en août 1914, au Café du Croissant à Paris - qui suis un de ces non encartés, je tiens à le souligner ici avec force : la décision de la LCR de se dissoudre pour se fondre dans un mouvement politique qui la dépasse, qui embrasse à la fois la question sociale et la question écologique et qui s’ouvre à toutes celles et ceux qui partagent ce projet écosocialiste, c’est une décision sans précédent dans l’histoire du mouvement ouvrier français.

Nous sommes, j’en suis convaincu, des millions à rêver d’une gauche qui ne se renierait pas chaque fois qu’elle arrive au pouvoir, d’une gauche qui affirmerait sans complexe : « oui, il y a eu et il y a encore des exploiteurs et des exploités », d’une gauche qui reconnaît la réalité de la lutte des classes même si la composition des classes et les formes de la lutte ont changé. Nous sommes des millions qui n’acceptons pas le capitalisme comme une fatalité. Nous sommes des millions à vouloir une alternative. Cette alternative, si nous le voulons tous ensemble, avec le NPA, elle est maintenant possible.

Nous sommes à la tâche. Et nous sommes nombreux. Nous sommes riches de nos diversités, de nos cultures politiques respectives, de nos expériences et aussi de la fraîcheur et de la créativité de celles et de ceux qui n’ont pas d’expérience, si ce n’est celle de leurs premiers pas dans la vie et de leurs premières confrontations avec le capitalisme.

J’ai qualifié le projet que nous portons d’une expression nouvelle dans le vocabulaire politique : écosocialisme. Qu’entendons-nous par là ?

On part d’un constat : le capitalisme exploite les humains et la terre. Il est à l’origine de la question sociale et de la question écologique. Comme l’a si bien observé François Chesnais, Marx déjà constatait que « la production capitaliste ne se développe qu’en épuisant les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur » (Le Capital, p.182). Et Chesnais a très justement déploré que « la pensée critique se réclamant du marxisme a été terriblement déficiente sur le plan des rapports à la nature ».

Une approche écosocialiste, cela signifie satisfaire les besoins sociaux de manière écologique. Et la satisfaction écologique des besoins sociaux ne peut se réaliser ni par des voies autoritaires, ni par des voies fiscales.

Seule la délibération démocratique peut présider à la définition des choix. Ce qui implique de revisiter la démocratie pour en faire ce que, déjà, Jaurès appelait de ses vœux : un outil révolutionnaire.

Mais le danger immédiat qui nous guette, c’est le traitement capitaliste des problèmes écologiques. Un capitalisme vert est en cours d’élaboration. On en a vu des prémisses avec le Grenelle de l’Environnement et les multiples taxes envisagées par le gouvernement. C’est faire payer par le plus grand nombre le coût des dégâts écologiques provoqués par les profits de quelques-uns. Ce sont les solutions avancées par la droite, mais aussi par les sociaux-libéraux, par les Verts et par tous ceux qui refusent d’accepter que la course au profit est à l’origine de la destruction de l’environnement avec ses conséquences pour la santé, pour la préservation de la biodiversité, pour le maintien des grands équilibres et pour la survie même de la planète dans l’état où les générations précédentes nous l’ont léguée.

C’est un immense chantier qui s’ouvre devant nous. C’est notre volonté de saisir à bras le corps le double impact social et écologique du capitalisme. Aucune solution n’est durable si elle se contente d’aménager le système. C’est bien là que se trouve la justification de notre démarche anticapitaliste. Au regard de ce que nous voulons entreprendre, nous pouvons faire beaucoup plus que de la politique. Nous pouvons écrire une page d’histoire.

(Intervention faite au meeting NPA 66, à Perpignan, le 18 octobre 2008)

Messages

  • Les capitalistes savent tout cela. Il est grand temps d’arrêter de faire semblant de croire que "les personnes qui se comportent comme les véritables maîtres du monde" l’ignorent. Il s’agit au contraire d’une stratégie délibérée, lire à ce sujet "la stratégie du choc" de Naomi Klein et voir la vidéo d’Aaron Russo relatant son entretien avec Nick Rockefeller. Le réformisme ça suffit.

  • Ouvrez les yeux ! Si seulement nos gouvernements voulaient régler la crise, ils agiraient concrètement : 1 Bloquer la vente a découvert sur toutes les valeurs, 2 Stopper le marché des options ou autres "warrant" devenu criminel ! 3 Ouvrir les comptes des banques véreuses et utiliser leurs actifs pour rembourser les épargnants de celles-ci 4 Redonner les droits régalien des Etats-Nations a émettre leur monnaie qu’elle s’appelle franc ou euro peut importe ! 5 arrêtons "l’étau " d’intérêts : les arbres ne montent pas jusqu’au ciel !!!

    Les gouvernements successifs après avoir vendu les pays-nations aux banques en transférant le droit d’émettre la monnaie uniquement aux banques*, viennent de nous mettre une hypothèque sur le dos de 1 700 milliards d’Euros !

    Nous avons été vendu, nous voilà esclave !

    Soyez-en sûr, il restera toujours une banque dans le monde qui voudra récupérer son dû et ce jour là les hommes n’auront plus beaucoup d’espoir.

    * Art 104 du traité de maastrich : « il est interdit à la BCE et aux banques centrales des états membres ci-après dénommées » banques centrales nationales » d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions ou organes de la Communauté, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publiques des Etats membres ; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la BCE, ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite"

    Pour la FED, la réserve féderal, qui est aussi fédéral que FEDEX, c’est depuis decembre 1913 que le dollar est devenu un "marchandise" privée et tres tres rentable : 1000$ fabriqués=27dollars pour le tresor americain de "droit d’exploitation" + 7 cents de cout de fabrication = le reste s’appelle un bénéfice d’exploitation !!! marge de 3594% !!!!!!

    Là vous comprenez que l’on ne joue pas dans la même cours de récré !

    LE SEUL BUT EST UNE MONNAIE UNIQUE QUI VIENNE "SAUVER" LE DOLLAR : LE CONTROLE TOTAL : c’est clair ou vous le faites exprès ?

  • Un capitalisme vert est en cours d’élaboration. On en a vu des prémisses avec le Grenelle de l’Environnement et les multiples taxes envisagées par le gouvernement. C’est faire payer par le plus grand nombre le coût des dégâts écologiques provoqués par les profits de quelques-uns. Ce sont les solutions avancées par la droite, mais aussi par les sociaux-libéraux, par les Verts et par tous ceux qui refusent d’accepter que la course au profit est à l’origine de la destruction de l’environnement avec ses conséquences pour la santé, pour la préservation de la biodiversité, pour le maintien des grands équilibres et pour la survie même de la planète dans l’état où les générations précédentes nous l’ont léguée.

    Le capitalisme vert en cours de gestation , au travers de la double crise économique et écologique, risque d’avoir des couleurs de plus en plus brunes.

    Je ne vise pas là les verts dont une partie penche de plus en plus vers des réponses bourgeoises à la crise écolo-économique, ce qui est déjà un beau scandale, mais clairement à des tendances qui se cristallisent comme une version écolo de la violence et la conception néo-con.

    Je parle de ceux qui, à mots couverts, parlent de descendre rapidement la population de la planète.

    De ceux qui ricanent de voir des travailleurs, avec des véhicules polluants et énergivores, éloignés de leur travail par le prix des loyers et qui n’arrivent plus à boucler les fins de mois.

    Le défi immense que nous impose les dégâts du capitalisme, dégâts humains et écologiques titanesques, est à relever.

  • "Ceux qui ne se résignent pas à voir le drapeau de la révolte tomber des mains de Rosa Luxemburg dans celles de Ségolène Royal."

    Diable merci, on n’a pas assisté à une telle horreur. Le drapeau, c’est Sarko qui l’a ramassé... C’était pire demain, selon la formule de la Cimade, ne vous en faites pas. :o(
    Contente, malgré cette digression inutile (à interpréter comme vous voudrez !), de lire de nouveau l’irremplaçable RM JENNAR à qui on peut conseiller de lire les projets des uns et des autres avant toute distribution d’anathème.

    • de lire de nouveau l’irremplaçable RM JENNAR à qui on peut conseiller de lire les projets des uns et des autres avant toute distribution d’anathème.

      Faute de cela il me semble quand même que ce sont les actes qui importent, et les actes sont mauvais pour le PS et le les Verts, sur les questions de fond.

      L’amnésie je n’y arrive pas........
      Surtout quand ça continue assidument dans la même ornière....

      Jennar est un homme consciencieux qui, justement, sait lire et analyser les actes des uns et des autres pour ce qu’ils sont et pas seulement dans la geste des encroyeurs.

      Sans lui, il nous aurait manqué bien des munitions dans le combat sur le TCE de 2005.

      Le fait que cette bataille, gagnée, ne fut pas suffisante, semble le pousser à aller plus loin et au delà. Prendre des positions plus courageuses, créer politiquement.

      A tord ou à raison,
      mais il essaye.

      Bravo Raoul Marc.