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Intégrisme catho, Europe, Pologne et Auschwitz

Publie le jeudi 20 novembre 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

Pologne - polémique (libre belgique)
Le bon sens pour la croix d’Auschwitz ?
christian laporte

La diplomatie tranquille et très belge de "Sauvegarde d’Auschwitz" pourrait payer. Un compromis pour éloigner la croix du camp est en germe. Une confirmation que seul le dialogue peut aboutir à des solutions, pas la crispation
éclairage

A la mi-septembre, le nouveau directeur du Musée d’Auschwitz, Piotr Cywinski était de passage à Bruxelles pour solliciter l’aide de l’Union européenne afin de pérenniser le site du camp d’extermination nazi afin que nul ne puisse jamais plus ignorer les exactions qui y furent commises. Les responsables du comité belge "Sauvegarde d’Auschwitz" qui ont piloté la remarquable restauration du pavillon belge en avaient profité pour remettre sur la table la délicate présence d’une grande croix à proximité de l’ancien Theatergebaude.

Lazard Perez, ancien président du Comité de coordination des organisations juives de Belgique et spécialiste de la construction - c’est son métier - connaît mieux que quiconque la problématique puisque dans le cadre de la restauration précitée, il s’est rendu plus de 30 fois sur place. L’occasion aussi de jauger l’état d’esprit local et de jeter les bases d’une solution de compromis avec d’autres "hommes de bonne volonté".

Un coup des communistes

Piotr Cywinski en est un ; cet intellectuel chrétien est aussi un zélateur des relations judéo-chrétiennes. L’alchimie de la rencontre d’il y a deux mois fut telle que Lazard Perez y a vu une possibilité de renouer des contacts positifs avec des représentants de l’Eglise catholique polonaise.

Brève remise en perspective : aux abois, le pouvoir communiste avait permis l’incroyable dans la seconde moitié des années 80 : l’installation d’un couvent sur le site d’Auschwitz avec un bail emphytéotique qui permettait de "plomber" l’avenir du site en ayant à l’esprit les pas toujours faciles relations entre Juifs et catholiques en Pologne Avec en ligne de mire des perspectives de division encore plus grandes : l’objectif au fond était de "christianiser" la Shoah dans le plus grand cimetière juif du monde. Sous l’impulsion du judaïsme belge (et notamment de Georges Schnek, ancien président du Consistoire central et de l’avocat Markus Pardes) alors que Théo Klein, figure emblématique du judaïsme français montait aussi au créneau, les bases d’un vrai dialogue avaient été jetées et avaient débouché sur un autre accord de Genève : côté chrétien, les cardinaux Decourtray, Lustiger, Danneels et Macharski avaient admis que les carmélites quittent le camp. Et une clause prévoyait que plus aucun emblème religieux ne pourrait être installé dans le camp

C’était compter sans un groupe intégriste catholique qui avait repris les bâtiments abandonnés par le Carmel et qui y installa en toute illégalité la croix une nuit de juillet1988. Vingt ans après, rien n’a changé mais l’arrivée d’une nouvelle équipe au Musée change la donne. Notamment parce qu’elle entend développer aussi ses activités éducatives dans l’ancien théâtre

Un nouvel espoir pour Lazard Perez qui veut une solution pacifique et interreligieuse. Certes, même Jean-Paul II n’avait obtenu le transfert de la croix. Mais la clé d’un compromis honorable réside sans doute chez l’évêque de Bielsko-Biala, Mgr Tadeusz Racoczy dont le diocèse englobe Auschwitz. L’homme est attentif de longue date à la question - il avait désacralisé le site du couvent - et il est prêt à s’investir pour que Auschwitz-Birkenau retrouve le silence absolu face à la mort. Un souci partagé par le cardinal Dziwicz de Cracovie qui fut le secrétaire du pape précédent. Concrètement, la croix pourrait être transférée solennellement lors d’une procession hors du camp en accord tant avec la hiérarchie ecclésiale locale qu’avec la base. Ce serait une victoire pour le dialogue interreligieux et le plus bel hommage aux victimes d’Auschwitz. Mais le sujet reste très sensible : naguère, la croix avait été enlevée afin d’être repeinte ; il ne fallut pas une heure pour mobiliser un noyau dur d’intégristes hostiles à son déplacement

Messages

  • Merci pour tout, les religieux...vous êtes bien urbains.

    On n’a pas besoin de "victoire pour le dialogue inter-religieux".

    On a besoin de s’émanciper de toute oppression religieuse.

    • Ma vision de l’Europe (ici brièvement)

      Elle n’est pas originale mais elle ne se comprends bien que si on a à l’esprit que je suis membre d’ATTAC et membre du MRAP et que les débats dans ces deux organisations sont très différents. Je fais souvent un écart entre l’un et l’autre.


      1- On ne peut évoquer l’Europe aujourd’hui sans faire état de la laïcité.

      C’est assez commun de remarquer que n’est pas tout de critiquer la finance mondiale et européenne et de penser dans la foulée l’Europe sociale, l’Europe écologique, l’Europe démocratique et donc les trois grands piliers de la transformation sociale profonde de l’Europe libérale. Cela est évidemment nécessaire et même très important . Mais on ne saurait oublier la laïcité tout comme d’ailleurs le droit des femmes. Face à la montée du religieux, pas spécialement progressiste voire franchement réactionnaire - et je ne pense pas là uniquement à l’islam même si nombre de débats auquel je participe ailleurs tourne sur ce point - la laïcité et le droit des femmes sont deux volets essentiels.

      2 - La laïcité, un élément fondamental dans la perspective de l’élargissement.
      Si l’élargissement de l’Europe à la Turquie est jugé comme un axe politique majeur alors la laïcité est un préalable nécessaire. Il ne s’agit pas de poser une laïcité visant subrepticement à l’exclure mais au contraire pour la recevoir dans un cadre laïc et dans la perspective plus lointaine de participer ainsi à une transformation des relations nord-sud de la région arabo-musulmane et au-delà du monde.

      3 - Le lien avec d’autres rapports nord-sud.
      Si la laïcité est fermement affirmée alors il ne faut alors pas négliger de vouloir d’autres rapports nord-sud. Quel rapport entre la laïcité et et d’autres rapports nord-sud ? Si l’on évoque la laïcité et les droits des femmes dans ce contexte, il faut en contrepartie de l’effort d’intégration demandé évoquer de nouveaux rapports nord-sud et pour l’Europe ainsi qu’un engagement fort face au peuple palestinien. Autrement dit si comme militant antiraciste engagé ces dernières années sur le terrain contre l’islamophobie comme racisme, je juge aussi qu’il est temps d’être ferme sur la laïcité et le droit des femmes . Mais dans la foulée je juge aussi - et tout se tient pour moi - qu’il faut fermement engager une sortie de l’Europe de son impérialisme viscéral (renouvelé depuis Cotonou).

      4 - Le contrat est le suivant :
      Il faut donner des gages clairs sur la question palestinienne, sur la liberté de circulation et d’installation des migrants, donc de très gros changements politiques internes et externes à l’Europe. Politiquement on voit que ce n’est ni la droite ni la gauche de droite qui va mener ce changement beaucoup trop important mais combien nécessaire . Imaginons ces conditions réunies, alors l’enclenchement d’une guerre ferme et sans concession contre la burka et autre "prison mobile" des femmes ainsi qu’aux mariages forcés e à l’excision comme aux tabassages des jeunes femmes qui fréquentent des non musulmans. Ce qui se nomme clairement "double discrimination" sexiste et raciste. Disant cela, je n’ignore pas que les violences contre les femmes sont universelles mais certaines sont légitimées ce qui les renforcent. Elles font partie d’une normalité sociale. Il faut renverser cette norme. Une fois la norme renversée la tâche ne sera pas finie pour autant. Je renvoie ici à ce que disent les féministes depuis longtemps.

      Christian Delarue