Accueil > Caisses vides : Le Sénat fiscalise les indemnités journalières des (...)

Caisses vides : Le Sénat fiscalise les indemnités journalières des accidents du travail

Publie le mercredi 26 novembre 2008 par Open-Publishing
4 commentaires

Il est infiniment plus douloureux, donc non soumis à l’impôt, d’être victime d’un préjudice moral (Bernard TAPIE) que d’être victime d’un accident du travail qui lui sera soumis à l’impôt.

Brièvement résumé, c’est le constat qu’on peut tirer d’un amendement du Sénat dans la cadre du projet de budget 2009.

L’affaire :

Contre l’avis du gouvernement, les sénateurs ont adopté, vendredi, un amendement au budget 2009 soumettant à l’impôt sur le revenu les indemnités journalières versées aux victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles (comme c’est le cas aujourd’hui pour les arrêts maladie) ... / ... « Faudra-t-il être éternellement populaire pour redresser les finances de ce pays ? », a plaidé Jean-Jacques Jégou (UC), auteur de l’amendement. Les sénateurs ont par ailleurs supprimé l’amendement Tapie », voté par les députés, qui prévoyait de soumettre à l’impôt les indemnités pour préjudice moral de plus de 200.000 euros.

Nous vous donnons ci-dessous lecture du débat au Sénat - Source Sénat

I. – Dans l’article 80 quinquies du Code général des impôts, après les mots :« alloués aux victimes d’accidents du travail »,sont insérés les mots :« qui ne bénéficient pas du maintien de la totalité de leur salaire par l’employeur en vertu d’un contrat individuel ou collectif de travail, des usages ou de sa propre initiative ».

II. – Dans le 8°) de l’article 81 du Code général des impôts, avant les mots :« les indemnités temporaires »,sont insérés les mots :« sous réserve des dispositions de l’article 80 quinquies, ».

M. JÉGOU. – Les indemnités journalières versées aux victimes d’accidents du travail doivent être soumises à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires, comme le sont les autres indemnités journalières. Seules celles versées aux victimes d’accident du travail sont ici visées et non celles allouées aux personnes atteintes d’une affection comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse, qui resteront exonérées d’impôt sur le revenu en application de l’article 80 quinquies du Code général des impôts. Cet amendement ne concerne pas non plus les prestations et rentes viagères versées aux victimes d’accidents du travail, qui resteront également exonérées d’impôt sur le revenu, en application du 8°) de l’article 81 du Code général des impôts.

Ce dispositif permettrait d’accroître les recettes de l’État. D’après le bleu budgétaire « santé », la dépense fiscale au titre de ces exonérations d’impôt est estimée à 520 millions. La fiscalisation des indemnités journalières permettrait de réduire cette dépense fiscale de 100 millions. Ne seraient concernées que les personnes subrogées, c’est-à- dire celles qui bénéficieraient de l’intégralité de leur salaire. Enfin, cette disposition permettrait de mettre fin à une injustice puisque les personnels de la fonction publique territoriale qui sont dans ce cas sont déjà assujettis à l’impôt.

M. MARINI, rapporteur général. – La commission a pris connaissance avec beaucoup d’intérêt de cette proposition : lorsqu’il était député, M. Jégou avait proposé ce dispositif et il nous fait maintenant bénéficier de son expérience. C’est une initiative courageuse qui met l’accent sur une anomalie de notre dispositif fiscal. Il est bien entendu pas question de toucher aux pensions et aux rentes versées pour les accidents du travail mais simplement de fiscaliser les indemnités journalières lorsque le revenu des salariés est maintenu dans son intégralité ... / ...

M. COPÉ, ministre délégué. – Je n’ai eu la connaissance que très récemment de cette proposition, notamment en ce qui concerne la garantie. Personne ne comprendrait que l’on engage la fiscalisation des victimes d’accidents du travail. L’amendement, corrigé des suggestions de la commission, ne s’applique pas dans l’hypothèse où le niveau de salaire est maintenu : la fiscalisation semble alors cohérente. Comprenez toutefois mon hésitation : il s’agit d’accidents du travail.

Mme BRICQ – Il peut y avoir faute de l’employeur. M. COPÉ, ministre délégué. – Ne risque-t-on pas d’ouvrir une brèche, par exemple pour les longues maladies ? L’équité y trouvera-t-elle son compte ? Cet amendement n’a pas fait l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux. Sagesse, car il nous faut prendre le temps d’étudier cette mesure en détail, or je n’ai pas tous les éléments.

M. Marc MASSION. – C’est un sujet sensible. Certains accidents du travail sont dus à une faute de l’entreprise, par exemple un défaut de sécurité. Vous dites que le revenu est maintenu, mais que faites- vous de la perte de revenu liée aux heures supplémentaires ? Nous ne voterons pas cet amendement.

Mme BEAUFILS. – Les accidents du travail sont malheureusement souvent la conséquence d’un défaut de sécurité au travail. Les victimes sont souvent indemnisées dans l’attente de la rente. En outre, certains salariés, notamment dans le bâtiment, touchent des indemnités panier ou de déplacement. La baisse de revenu liée à leur perte pèse sur le budget du foyer. C’est instituer une sorte de double peine, accident plus taxation !

M. JÉGOU. – Les mêmes causes produisent les mêmes effets… Ne mélangeons pas les genres. Il s’agit des indemnités journalières : indépendamment des éventuelles conséquences de l’accident du travail, c’est un salaire, inchangé, fiscalisé avant l’accident, qui cesse de l’être après, pour des raisons historiques que j’ignore. La responsabilité de l’accidenté et de l’employeur n’est pas mise en cause. La pension Cotorep reste non fiscalisable. Les accidents du travail sont en baisse.

Mme BRICQ. – Ça dépend des secteurs !

M. JÉGOU. – … même dans le bâtiment. Il s’agit à 90 % de lombalgies d’effort ou d’entorses en courant après le bus, qui n’ont pas de conséquence. On voit bien la difficulté dès qu’il s’agit de prendre des décisions courageuses. Quant à la concertation, j’ai discuté avec la Fédération nationale des accidentés du travail (F.N.A.T.) en 1995, lorsque cette mesure avait été votée par l’Assemblée nationale, avant d’être écartée en C.M.P. Les indemnités journalières étant fiscalisées pour les employés des collectivités locales, c’est un amendement d’équité.

M. ARTHUIS, président de la commission. – M. Jégou ne peut être soupçonné de démagogie. C’est une démarche courageuse, conforme à ce que nous souhaitions lors de la discussion générale. Nous aurons l’expertise complémentaire d’ici la C.M.P. J’ai noté la prudence justifiée du ministre, mais il ne s’agit pas là d’une mauvaise manière envers les accidentés du travail. Dans la mesure où le revenu est maintenu et vu que les indemnités des employés des collectivités territoriales sont fiscalisées, c’est une mesure d’équité, que le Sénat peut adopter.

L’amendement n° I-208 rectifié est adopté.

Tout d’abord félicitations aux Sénateurs qui visiblement savent établir une hiérarchie dans les populations à fiscaliser. Et même au passage de montrer du doigt des "lombalgies ou entorses" fictives essentiellement dues au fait que les salariés en retard à leur travail sont obligés de courir après le bus et fatalement ...

La FNATH qui est l’association de défense des accidentés de la vie, des malades, invalides et handicapés et qui revendique près de près de 200.000 adhérents, vient de réagir à cet amendement. Extraits de leur site Web

Une poignée de sénateurs a adopté vendredi dernier, contre l’avis du gouvernement représenté par Christine Lagarde, un amendement du Sénateur Jégou prévoyant la fiscalisation des indemnités journalières d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP). Ce sénateur réitère le mauvais coup qu’il avait tenté en 1996 lorsqu’il était député (puis en 2005). La FNATH s’était alors mobilisée : 8000 de ses adhérents étaient venus conspuer dans sa ville du Plessis Trévise (94) celui qui prétendait à l’époque que les accidents du travail survenaient en jouant au foot ou en déménageant ses amis ! La mesure proposée par JJ Jégou avait alors été écartée.

La fiscalisation des indemnités journalières d’AT-MP constitue une atteinte au principe général de non-fiscalisation des indemnisations de réparation du préjudice corporel. Ce serait aussi une atteinte supplémentaire au droit à réparation des victimes du travail, lesquelles ne bénéficient toujours que d’une réparation forfaitaire de leurs préjudices contrairement aux autres victimes (accidents de la route, accidents médicaux, amiante,….). Cela est d’autant plus incompréhensible que les victimes du travail se voient d’ores et déjà appliquer les franchises médicales qui viennent diminuer la réparation de leurs préjudices.

Justifier cette mesure par des raisons d’équité fiscale est un abus de langage… C’est toute la fiscalité des prestations sociales et des indemnités de réparation d’un préjudice qui est en cause. Le maintien du revenu d’un accidenté du travail serait fiscalisé mais pas celui d’un malade de longue durée, ni les allocations servies aux personnes handicapées, nous assure M Jégou sans s’expliquer davantage sur une telle ineptie.

Cet amendement s’il était maintenu conduirait à fiscaliser les indemnités journalières d’une victime de l’amiante, d’un travailleur atteint d’un cancer professionnel, d’un paraplégique ou d’un tétraplégique en rééducation…

Quelle est la logique d’un dispositif qui fiscaliserait les indemnités journalières d’une victime d’une maladie professionnelle de l’amiante, d’une victime d’un cancer professionnel, d’un paraplégique où d’un tétraplégique en rééducation à la suite d’un accident du travail mais qui exonèrerait fiscalement celles versées à un malade d’hypertension artérielle, du diabète, du cancer, du cœur ou du Sida, en arrêt pour longue maladie ? On devrait se consoler en se disant que les malades de longue durée ne seront pas concernés ! Scandaleux…

Une phrase nous a fait sursauter. Elle concerne le choix et les propos de Michel CHARASSE ancien ministre de François Mitterrand et ancien membre du Parti Socialiste

Votant pour cet amendement, Michel Charasse développe une argumentation purement scandaleuse : certaines exonérations seraient dus à d’anciens « banquets trop arrosés avec les ministres du travail » ... / ... Source FNATH

La CGT et la CFTC ont demandé mardi le retrait d’un amendement du Sénat au projet de budget 2009 qui soumet à l’impôt sur le revenu les indemnités journalières versées par la sécurité sociale aux victimes d’accidents du travail, dans des communiqués. Force Ouvrière et la Fnath (association d’accidentés du travail et handicapés) étaient déjà montées au créneau contre cet amendement du groupe Union centriste, adopté dans le cadre de l’examen des articles du projet de budget 2009, malgré l’hostilité du gouvernement et de l’opposition.

"Cette mesure est dérisoire", a notamment souligné la CGT, pointant un rendement financier "ridicule" comparé "aux gigantesques cadeaux fiscaux dont ont bénéficié les plus riches depuis quelques années". La CGT l’a également qualifiée de "scandaleuse", estimant que l’exonération actuelle de ces indemnités découlait des "très nombreux cas de comportements irresponsables des employeurs (refusant) de reconnaître leur responsabilité dans la mise en danger de la vie et de la santé de leurs salariés". Pour la CFTC, les sénateurs "ont franchi une nouvelle ligne rouge". Avec cette fiscalisation, les accidentés du travail vont subir une "double peine" selon le syndicat, qui rappelle qu’ils ne "bénéficient déjà que d’une réparation forfaitaire de leur préjudices" - Source AFP et Les Echos

Bravo à nous vaillants parlementaires pour ce nouvel "exploit". D’ailleurs, les Sénateurs ont prouvé leur solidarité parlementaire en ne soufflant mot du récent audit de l’Assemblée Nationale par la Cour des Comptes qui a révélé que :

 Les dépenses totales ont augmenté de 47% en 10 ans. C’est 30 points de plus que l’inflation.

 Une multitude de comptes bancaires incompréhensible : l’Assemblée nationale utiliserait une dizaine de comptes bancaires différents, gérés de manière totalement cloisonnée.

 Les mauvais placements de la cagnotte ont fait perdre 1,8 million d’euros : l’ « insuffisance de méthode » dans la politique des placements de la fameuse cagnotte évaluée à 302 millions en 2007 aurait occasionné « un manque à gagner de 1,8 million d’euros », depuis 2001.

 Les chambres d’hôtel payées pour rien, faute d’annulation : la Cour des comptes remarque que les chambres d’hôtel réservées pour les députés et jamais annulées lors des désistements, et donc automatiquement débitées, ont coûté cher à l’Assemblée.

 6,5 millions dépensés en 2007 uniquement pour le matériel informatique : pourtant, le service des fiches de paie de l’Assemblée ne dispose toujours pas de logiciel informatique qui fonctionne pour traiter les salaires, malgré l’achat d’un logiciel dédié aux paies en 2003, pour un montant de 4,3 millions d’euros.

 Les frais de personnel les plus importants d’Europe : la part des frais de personnel représente 25% de l’ensemble du budget de l’Assemblée, contre 15% à la Chambre des communes de Londres et 12% au Bundestag à Berlin. 213 000 euros bruts de salaire annuel pour les hauts fonctionnaires : les 24 hauts fonctionnaires les mieux payés perçoivent 213 000 euros bruts de salaire annuel.

 125 millions d’euros pour rénover deux immeubles : la rénovation du 101 rue de l’Université (où les députés ont leurs bureaux et certains leurs logements) et du 32 rue Saint-Dominique depuis 2004 devrait dépasser les 125 millions d’euros, soit le double de la somme prévue au départ. (Sources JDD et RMC)

Comme nous l’écrivions dans un récent article " Assemblée nationale et Cour des comptes : L’équité et la bonne gestion expliquées aux Français " il est donc facile de trouver des sources d’économies importantes du moins à l’Assemblée Nationale (on attend d’ailleurs que le résultat de l’audit de la Cour des Comptes soit mis en oeuvre) car au Sénat , malgré que la Cour des comptes se soit déclarée "disponible" pour réaliser un audit du Sénat après celui de l’Assemblée nationale, le Sénat par l’intermédiaire de son président Gérard LARCHER a fait savoir qu’il refuserait tout audit.

Cette tradition de transparence existe d’ailleurs depuis longtemps puisque : Philippe Séguin précise en avoir fait la proposition à son ancien président Christian Poncelet, il dit que celui-ci "n’a pas estimé pouvoir donner suite".

Alors que les victimes des accidents du travail sont eux parfaitement identifiés et seront fiscalisé ... en toute transparence.

Chapeau bas !!!

Slovar les Nouvelles

http://slovar.blogspot.com

Crédit image

Conseil Coordination

Messages