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"Non à la flexibilité totale" : la révolte des travailleurs du commerce éclate en Italie

Publie le mardi 29 juin 2004 par Open-Publishing


de Roberto Farneti

Premières protestations après la rupture des
négociations sur le contrat national, grèves à Milan et à Brescia


Ils ont des emplois du temps absurdes, ils sont la
plupart du temps embauchés avec des contrats
précaires, la grande majorité d’entre eux , environ les deux tiers, travaille
dans des entreprises de
moins de 15 employés où le Statut des travailleurs
n’est pas appliqué. Avec ces prémices, la prétention
de la part des représentants de la grande distribution
d’introduire dans le contrat la flexibilité totale
prévue par la loi Biaggi, demande qui a fait sauter, in extremis, le renouvellement
attendu depuis plus de
18 mois, s’est révélée la goutte qui a fait déborder un vase déjà plein. Et,
pour un million 500 000
salariés de magasins, supermarchés et centres
commerciaux, l’heure de la révolte a sonné.

Après les grèves spontanées de vendredi dernier,
l’épicentre de la protestation a été à Milan et à
Brescia. Dans la capitale lombarde, les quatre
filiales Coin se sont arrêtées pendant deux heures,
avec un piquet de grève devant le point de vente le
plus important, celui de la place des Cinque giornate.
Les supermarchés Sma ont très bien répondu avec 90%
d’adhésion aux deux heures de grève programmées par
les Rsu (Représentations syndicales unitaires, ndt).
Même version à Oviesse, dans certains Upim, aux deux
Ikea, aux cinq filiales de Esselunga, au Carrefour de
via Assago et aux deux Rinascenti. La mobilisation se
poursuivra demain et mardi. A Brescia, par contre, il
y a eu huit heures de grève dans la grande
distribution. La protestation a été très bien suivie à
Auchan, bien à Ikea, et même assez bien dans de plus
petites entreprises.

Une rébellion qui remonte loin. En effet, le commerce
est un secteur où la flexibilité et la précarité
commencent bien avant la loi 30 (sur le travail
intérimaire), dans un secteur où l’établissement de
contrats est historiquement limité par la présence de
nombreuses petites entreprises. C’est la raison pour
laquelle, en effet, la grande distribution (il s’agit
désormais de 500 000 salariés de moyennes entreprises)
se trouve aujourd’hui à pouvoir jouir des bénéfices
d’un contrat qui est encore à la mesure de plus
petites entreprises , une situation comparable à celle
de l’industrie dans l’artisanat. Autrement dit, la
grande entreprise jouit de flexibilités qui seraient
inimaginables dans une industrie du secteur productif
aux dimensions analogues.

Par exemple, à propos des horaires, conçus totalement
en fonction de l’entreprise : il suffit de dire que
90% des caissières sont employées à temps partiel. Les
centres commerciaux et les supermarchés ont un nombre
de travailleurs précaires qui, dans de nombreux cas,
dépasse 50% des salariés. Désormais, grâce aussi aux
politiques des municipalités, il y a eu une dilatation
des horaires qui a amené aussi à l’ouverture
indiscriminée les jours fériés, avec une aggravation
des roulements de travail et de la précarité (une
partie du personnel est embauchée seulement pour le
samedi et le dimanche).

« Là où il y a le moins de syndiqués – explique
Maurizio Scarpa de la Filcams Cgil (syndicat Cgil du
commerce) – les entreprises font la pluie et le beau
temps. Il arrive ainsi que le roulement soit
communiqué aux travailleurs au jour le jour. Les
patrons obtiennent ainsi une réduction du coût du
travail car le travail est adapté aux exigences de
l’entreprise sans les coûts ultérieurs dérivant du
paiement des heures supplémentaires. De plus –
rappelle le syndicaliste – il faut tenir compte du
fait que les contrats d’apprentissage et les ex
contrats de formation en cours d’emploi, aujourd’hui
d’insertion, prévoient de forts abattements en matière
de salaires et de charges sociales ».

Non contentes de cela, les entreprises demandent
aujourd’hui encore plus de flexibilité. Comme les six
ans d’apprentissage ou l’utilisation de l’horaire sur
plusieurs semaines pour les temps partiels. Et dans ce
cas, la compétitivité n’a rien à voir là-dedans mais
plutôt l’avidité : « Dans le commerce, à la différence
de l’industrie – explique encore Scarpa –
l’augmentation du coût du travail due au
renouvellement du contrat au niveau national
n’entraîne pas d’avantage pour une entreprise par
rapport à une autre, comme c’est le cas pour ceux qui
exportent des produits à l’étranger puisque le contrat
est appliqué dans tous les points de vente du pays.

Traduit de l’italien par Karl et Rosa

28.06.2004
Collectif Bellaciao