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Donc, Bové ne nie pas. Il se renie seulement.

Publie le mardi 26 mai 2009 par Open-Publishing
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Nous sommes quelques-uns à avoir cité une transcription (erronée et plausible ) par Politis d’une phrase du livre de Bové : « José Bové, un paysan pour l’Europe », éditions Delachaux et Niestlé.

Le problème est que :

  Bové a déjà menti avec une assurance inouïe (je rappelle sa fausse expulsion de Cuba, claironnée sur deux chaînes de télévision). La survenance d’un autre mensonge, aussi gros que le premier, aussi méprisant du public en est devenue crédible. Qui ment le matin est soupçonné de mentir à midi et le soir.

  La phrase exacte de Bové est si ambiguë, que même en la citant sans bouger une virgule, deux interprétations sont possibles. Or, il ne s’agit pas d’une phrase dite, mais écrite (donc réfléchie) dans son livre. «  Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement… »

  Cette ambiguïté arrangeait son auteur. Il ne soutient pas devant ses anciens compagnons de combat, aujourd’hui adversaires, qu’il n’a pas fait campagne pour le non, mais les électeurs novices, les électeurs à la mémoire courte, les lecteurs insuffisamment concentrés, peuvent comprendre le contraire.

Citation (page 157, j’ai vérifié, un peu tard, je le confesse) : « Effectivement, j’ai voté non au traité constitutionnel, mais je n’ai pas fait campagne, une campagne très écoutée, au nom de vieux principes archéo-souverainistes qui nous ramèneraient au repli identitaire sur l’Etat-nation… »

Variante imaginaire : «  Effectivement, j’adore les hamburgers, mais je n’ai pas fait l’éloge du McDo de Millau, un fast-food très fréquenté, au nom de vieux principes archéo-gastronomiques qui nous ramèneraient au repli identitaire sur le tripou aveyronnais… ».

D’où l’on peut conclure que l’auteur n’a pas fait de pub pour le McDo de Millau, quitte à confesser crânement son repli archaïque. Et on le félicitera pour ce choix assumé, plus que pour la clarté de sa phrase.

Autre variante : « Effectivement, j’ai voté pour Chirac en 2002, mais je n’ai pas fait campagne, une campagne très écoutée, au nom de vieux principes archéo-gauchistes qui nous ramèneraient, etc. » Accrochons-nous pour comprendre ici que l’auteur fictif dit avoir fait campagne pour Chirac.

Dans la déclaration de Bové et dans les variantes ci-dessus, seul le temps du verbe « ramener » alertera les exégètes qui débusqueront, en s’y arrêtant, le sens que Bové dit avoir voulu donner à sa phrase.

Allez, il n’a pas écrit qu’il n’a pas fait campagne, Claude-Marie Vadrot a cru lire le contraire jusqu’à mal reproduire la phrase alambiquée. Ceux qui commencent à connaître José Bové et qui observent sa dérive politique se sont dits : « C’est tout lui, ça ! ».

Politiquement, l’événement n’est pas dans la reprise d’une erreur compréhensible de Politis, mais dans le fait que personne n’ait pu s’étonner du sens spontanément donné à la phrase incriminée.

Suggestion de réécriture pour le prochain tirage du livre de Bové : « Effectivement, j’ai voté non au traité constitutionnel et j’ai fait campagne, une campagne très écoutée. Mais je ne l’ai pas faite au nom de vieux principes archéo-souverainistes qui nous ramèneraient au repli identitaire sur l’Etat-nation… ».

Pas difficile d’être clair… quand on le veut.

Un Internaute m’a communiqué un mail circulaire de Jean-Marc Desfilhe, directeur de Campagne Europe Ecologie Sud-ouest, qui assure qu’il est faux de dire que « José Bové renierait son implication dans la campagne contre le Traité Constitutionnel Européen. »

D’accord, donc, si l’on s’en tient à le lecture attentive et décryptée (dans le sens le plus favorable) de la phrase qui lui est reprochée.

Mais le reniement n’est-il pas tout entier consommé quand l’ex-noniste Bové s’associe aujourd’hui à une figure emblématique du oui ?

Maxime Vivas

PS. Je suis allé à Millau soutenir José Bové lors de son procès après le démontage du McDo en 1999, puis, avec ATTAC-Toulouse devant sa prison de Villeneuve-Lés-Maguelonne. Je lui ai envoyé un livre en prison, j’ai pétitionné pour lui. Si je ne marche plus, c’est parce que je n’ai pas changé d’avis sur quelques idées fortes qui nous rapprochaient naguère.

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