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Le mégaphone comme idéal platonicien, par Michel Onfray

Publie le vendredi 5 juin 2009 par Open-Publishing
15 commentaires

J’ai d’abord vu d’un bon oeil la création du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) jusqu’à ce que je constate, comme beaucoup d’électeurs de la gauche antilibérale déçus par la chose, que ce nouveau parti n’avait de nouveau que le nom, car il prorogeait la vieille technique des partis classiques qui parlent, pensent et agissent d’abord en boutiquiers défenseurs de leur petite entreprise, sans véritable souci de s’attaquer à la misère réelle de ceux qui, nombreux, font les frais de la politique libérale de Nicolas Sarkozy.

Le drapeau et le sigle qui figure sur la profession de foi du NPA pour les prochaines élections européennes dit tout : un mégaphone ! Voilà le programme : le slogan plus l’électricité... Avec pareil projet, c’est sûr que la gauche antilibérale ira loin et que Nicolas Sarkozy tremblera lors de sa course au second mandat !

Il y a plus grave. En l’occurrence dans l’erreur de raisonnement, un paralogisme pour le dire clairement, qui consiste pour le NPA à refuser l’union aujourd’hui avec les gauches qui ne sont pas lui, sous prétexte que demain l’union ne durerait pas, tout en faisant ce qu’il faut pour qu’elle n’ait jamais lieu !

En effet, le NPA envoie la gauche antilibérale dans les bras du PS et lui reproche cette union contre nature. Mais c’est faute d’union du NPA avec le restant de la gauche antilibérale que cette dernière se trouvera dans l’obligation d’alliances avec le Parti socialiste. Car la politique est affaire de rapports de forces et non d’idéaux flottant dans un ciel platonicien...

Par l’espoir qu’il a créé d’un large rassemblement de la gauche antilibérale, par l’indéniable qualité de son leader, le NPA a réellement le pouvoir d’inverser le rapport de forces, puis d’en créer un autre sur la base d’une large et réelle union des gauches antilibérales. Il pourrait ainsi donner naissance à un véritable foyer majoritaire qui contraindrait le PS, devenu minoritaire à gauche, à chercher ses alliances ailleurs qu’avec le MoDem.

PERVERS, INFANTILE OU SUICIDAIRE

C’est en gauchisant sa position, pure, certes, mais totalement inefficace pour les pauvres qui "trinquent" tous les jours, que le NPA contribue au jeu politique comme il est. Ce refus de faire de la politique concrètement et ce refuge dans la politique politicienne du parti, qui mène sa barque tout seul, fait malheureusement du NPA un allié objectif de l’UMP, du PS libéral et des alliances de ce PS avec le MoDem.

On ne peut contraindre les autres à s’allier avec des adversaires parce qu’on refuse l’union avec eux et leur reprocher ensuite cette union contre nature. C’est soit pervers, soit infantile, soit suicidaire, soit inconséquent, en tout cas irresponsable à l’endroit du peuple qui souffre de la violence libérale et qui attend autre chose qu’un combat de chefs méprisant la populace qui, consciente de ces petits jeux pitoyables et désespérants, tourne massivement le dos à la consultation électorale.

Or cette élection est importante. Si l’on veut l’Europe, qu’on ne peut plus ne plus vouloir, mais qu’on refuse sa formule libérale, alors il faut dire le moindre mal. Non pas l’idéal, l’absolu, le parfait, qui fascinent tant le NPA, mais une autre formule, concrète, réelle, pragmatique, une Europe sociale, antilibérale, dans laquelle le marché ne ferait pas la loi, mais la solidarité et la fraternité, valeurs bien oubliées de la République laminée sous le rouleau compresseur libéral.

Dans cette configuration, le Front de gauche donne la bonne direction. Il réunit le PC, Jean-Luc Mélenchon et les siens, Christian Picquet et, avec lui, les anciens de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) minoritaires dans le NPA et conduits pour ce faire vers la sortie par les anciens trotskistes...

Cette première cristallisation importe : elle dit que la parole est désormais aux électeurs qui peuvent signifier qu’ils en ont assez de la politique politicienne des boutiquiers et qu’ils veulent autre chose : à savoir une large union des gauches initiée par le haut avec le Front de gauche et possiblement confirmée par le bas avec les électeurs.

On ne peut vouloir faire de la politique uniquement avec un mégaphone, ni appeler à la révolution planétaire sans même être capable de présider aux destinées d’un village de campagne. Le mégaphone n’est pas une fin en soi, mais un moyen pour plus et mieux que lui.

 Le Monde, 6 juin 2009

Messages

  • Et hop !
    Encore un petit virage à 180°, comme nous a si souvent habitué Michel Onfray
    (le BHL de gauche...), jusqu’au prochain, c’est à dire les régionales lorsqu’au moins la direction du PCF fera le choix de l’alliance, inévitablement, avec le PS, le Modem et autres. Probablement que là, Michel Onfray se fendra d’une nouvelle diatribe la veille des élections pour appeler à voter NPA car il aura été mené dans une impasse par le front de gauche, etc, etc...
    Franchement, quel crédit peut on accorder à ce parangon du vide politique et de l’esbrouffe ?

  • bonjour,

    Michel Onfray n’appelle pas à voter pour le NPA. Bonne nouvelle pour le NPA.

    Daniel Dauphiné

  • Viva la voix des luttes et des droits, tous ensemble pour la gauche anticapitaliste. Le vieux réformisme de la gauche avant est porteur de défaites. Viva le mègaphone rouge et internationaliste.

  • Toujours la même rengaine dégueulasse sur le NPA qui aurait fait le jeu de l’UMP.

    J’en ai ras le bol de ces connards de moralisateurs. Y’a des bourre-pifs qui se perdent !

  • Michel "Onfray mieux de la fermer" a parlé braves gens. Ecoutez le ce porte voix qui sait tout sur tout. Et même quand on lui demande rien il la ramène.
    Tiens une bonne façon de lui dire m... c’est de voter pour le NPA.
    Les chiens aboient, la carave anticapitaliste passera.

    • Michel Onfray, tu a bien tord de plaisanter bêtement sur le mégaphone du NPA.

      Étant malheureusement pour moi d’une vieille génération de militants, je me souviens avec beaucoup d’émotion et de regret, de l’époque ou les élections se gagnait par le débat populaire sous le préau des écoles républicaines.

      Cette conception de la politique était certainement beaucoup plus saine que le matraquage scandaleux des médias, de l’escroquerie des sondages qui, sans aucun contrôle, vendent au plus offrant les voix des électeurs inconscient, qui votent tout naturellement, pour les candidats présentés, par eux, comme ayant le plus de chance d’être élus.

      Je suis surpris et désolé qu’un "philosophe soit disant de gauche" puisse tenir un discourt aussi crétin.

      Militant du NPA, j’ai distribué sur les marchés, j’ai coller des affiches et même comme nous le prédisent les sondages, nous faisons un mauvais résultat, je serais très fier de notre campagne et je suis certain que dans l’avenir, c’est nous qui aurons le dernier mot.

      Le spectacle désolent de l’émission de Chabot hier soir ne peut que me conforter dans mon choix de faire, avec le NPA, de la politique autrement, et je n’envie pas le succès, éventuel, des ces politiciens professionnels qui me font vomir de dégoût.

      Raymond (83 ans)

    • Chers camerade Raymond, j’ai lu votre message et je dois compliment votre politique de clarté. Dans un monde où le capitalisme est d’étouffer les espoirs et les luttes pour le socialisme, votre beau témoignage est une solution de rechange valable à la route à gauche. Vous envoyer mes salutations et l’espoir cher à se réjouir avec vous pour la prochaine des résultats positifs des élections et de lutte. Tous ensemble pour une gauche anticapitaliste. Avec respect et sympathie. Enrico Biso

  • Rien dans ce texte ne ressort de l’analyse, tout ressort des conneries colportées.

    1) le NPA n’a pas été contre l’unité, mais il n’a pas rejoint le Front de gauche sur les positions du front de gauche et n’a pas été pour une union sans lendemains comme exigée par le PCF.

    La question n’était pas de faire une alliance jusqu’à la Saint glin-glin mais de vérifier un engagement à minima du front de gauche. s’allier avec des gens qui, l’encre à peine sèche, partent ailleurs est du foutage de gueule.

    2) Le NPA n’est pas responsable des politiques d’alliance pourrie du PCF et du courant de mélenchon du passé dans le gouvernement de gauche, depuis dans les collectivités et demain à nouveau aux régionales, aux partielles et dans une éventuelle majorité.

    Onfray essaye de nous faire croire que c’est la faute du NPA si le Front de gauche est construit sur l’enlisement de la première vague de résistance à la grande crise capitaliste et que c’est de sa faute si ce front va sucer après le libéral-nomenclatursime.

    La logique du raisonnement est blindée : Si nous nous allions avec les factions bourgeoises ("nous" qui avons choisi le front de gauche) c’est de la faute du NPA, méchant NPA, qui ne nous a pas empêché de devenir des gens qui vont vendre les travailleurs pour un plat de lentilles .

    Externalisation des erreurs et des malfaçons, pas mal comme raisonnement.

    3) Le raisonnement électoraliste tournant sur le sujet que SI le front de gauche s’était uni avec le NPA, "on" serait passé devant le PS et qu’alors, etc, fait toujours partie des miroirs aux alouettes (auquel j’avais cédé au lendemain court terme de 2005 avant de me rendre compte que ce n’était pas possible dans un cadre politicien et bureaucratique).

    Ce type d’alliance fait en général moins unie qu’en plusieurs listes. Donc dans le cas actuel 10% maxi (je ne parle pas des sondages....), ensuite, fondamentalement , refaire de l’union de la gauche, se trouver plus fort que le PS c’est ce qui était dans la séquence de sortie de 68 et le programme commun. Sans résultats autre que des politiques bourgeoises.

    L’union politique se fait d’abord sur des contenus en formes de pratiques, avec pour centre autre chose que les batailles institutionnelles où les factions nomenclaturistes sont sur leur terrain, puissantes et s’allient toujours avec la bourgeoisie.

    Cette première cristallisation importe : elle dit que la parole est désormais aux électeurs qui peuvent signifier qu’ils en ont assez de la politique politicienne des boutiquiers et qu’ils veulent autre chose : à savoir une large union des gauches initiée par le haut avec le Front de gauche et Cette première cristallisation importe : elle dit que la parole est désormais aux électeurs qui peuvent signifier qu’ils en ont assez de la politique politicienne des boutiquiers et qu’ils veulent autre chose : à savoir une large union des gauches initiée par le haut avec le Front de gauche et possiblement confirmée par le bas avec les électeurs.

    Et bien, il fallait commencer par là ...

    On tremble devant la vision fromidable de l’alliance par le haut du formidable " et possiblement confirmée par le bas avec les électeurs"... Quelle audace ! Un vote comme peut-être possible élan vers l’unité historique des 6 à 7% des 30 à 40% d’électeurs qui iront voter.

    Parisot en a des bouffées moites et des tremblements de peur, elle qui hurlait contre le LKP et les sequestrations (et accessoirement faisait tonner le canon contre l’extreme gauche qui ravitaillait en bière les travailleurs déchainés).

    Mais rien de notre ami sur les luttes sociales nécessaires,leurs centralisations, comment les mener et les aider, comment reconstruire le mouvement ouvrier au sens large, que les trucs qui tournent en rond et n’ont jamais servi à rien mais avec la boursoufflure de gens qui jouent aux grands responsables, chefs du par en haut....

    Rien de Onfray sur le mouvement réel d’une classe, ses avancées et ses reculs... Que du social-démocratisme moins avancé que celle qui sortit de 68 pour propulser Mitterand. Meme raisonnement à l’oeuvre...

    L’unité ne s’est jamais construite par en haut avec des bureaucraties . Bien pire, ce type d’union c’est toujours tournée finalement contre les travailleurs.

    Ce qu’on peut reprocher au NPA ressort plus de deux choses :

     Une analyse trop bisounours du Front de gauche qui s’est construit sur la démobilisation sociale (en se prétendant débouché des luttes sociales en appelant à élire 3 députés européens), allié pour la circonstance avec les directions syndicales.

    Là on ne parle pas de grandes déclamations politiciennes boursoufflées mais du concret des luttes désespérées d’usines qui se sont trouvées seules et isolées dans leurs résistances alors que d’énormes possibilités de riposte existaient, ayant l’assentiment et le soutien de 75% de la population (ce qui est autre chose que de d’avoir des sondages à 6% sur les 30 à 40% qui vont voter)... Sondages quand tu nous tient.

    L’unité politicienne pour l’enkistage institutionnel contre l’unité des travailleurs et du peuple dans la résistance réelle.

    Le fond de la participation active du front de gauche à la démobilisation est la critique centrale de ce front (ce qu’a été et qu’est son raisonnement pour son appel à voter pour eux, présentant comme une solution aux bataille d’avoir des députés européens).

     Trop de participation aux illusions électoralistes de la part du NPA , même si il a fait le service essentiel qu’on attendait d’un parti , soutenir les luttes sociales et surtout appeler à leur extension, leur centralisation, leur unité, leur combattivité, améliorer leur organisation.
    Ce qui fait un gouffre par rapport aux lyrisme républicain et superficiel du front de gauche.

    L’unité, ça se fait sur les tâches concrètes dans les batailles sociales et politiques des travailleurs et de la jeunesse.

    Là Onfray fait un nouveau virage à 180° , les mouches ayant changé d’âne.... qui, va , vers la méga-immense victoire de faire passer une alliance nomenclaturiste de deux partis avec de très gros moyens jsue devant le NPA.

    Immense victoire et ambition....

    Onfray en soutien d’une nomenclatura qui rêve la nuit et le jour de continuer l’alliance avec la bourgeoisie en se couchant devant la bourgeoisie (voir l’interview de la tête de liste en Ile de France ).

    Si au moins ce qui était soutenu c’était une alliance pour le combat de la classe déshéritée, pour l’aider à s’oganiser ... Même pas.

  • Finalement, après lecture de ce texte, je vais voter NPA.

  • Onfray,
    tu as presque autant de courage politique quand tu nous livre tes recettes en ce domaine électoral que quand tu rédiges tes oeuvres philosophiques et nous dispenses tes cours si importants pour nous.

    Mais j’ai bien dis PRESQUE.

    Et, comme tu n’es pas platonicien, tu sais bien que les petites erreurs des intellectuels (individus ou groupes) n’ont pas , en politique justement, que des conséquences intellectuelles.

    Tu as droit à l’erreur individuellement , comme Picquet. Pas plus NI MOINS, que le collectif NPA.

    CA FAIT 40 ANS QUE J’ENTENDS LES REFORMISTES DIRE QUE C’EST DE LA FAUTES DES REVOLUTIONNAIRES QU’ILS PEUVENT PAS FAIRE LA REVOLUTION ;

    Je croyais que tu pouvais tenir un autre discours.

    Je me suis trompé.

    J’espère que tu ne seras pas candidat aux régionales sur les listes de gôche ... à cause du NPA.

  • Une réponse d’un camarade ex-LCR non NPA à un camarade PCF qui lui avait adressé ce texte :

    Cher Christian,
    Je lis toujours avec intérêt les textes que tu m’envoies et qui complètent la lecture quotidienne de l’Huma. Je revendique, pour moi comme pour tout le monde, toute liberté de jugement sur la tactique (électorale entre autres) des uns et des autres, et ne fais pas mystère de mon désaccord avec celle qui a été adoptée par le congrès du NPA.
    Mais pour débattre, encore faut-il laisser au vestiaire les expressions injurieuses et les insultes, et reconnaître a priori aux partenaires le bénéfice de la bonne foi. C’est pourquoi je regrette que tu aies cru bon de diffuser ce pamphlet insultant commis par Michel Onfray, et qui ne fait hélas que s’inscrire dans une suite d’insinuations malveillantes que l’Huma distille complaisamment depuis quelque temps en s’affranchissant des limites et du respect mutuel nécessaires pour que les débats entre orientations et tactiques divergentes se mènent fructueusement.
    Rappelons, dans le prolongement de quelques autres, l’écho venimeux de l’Huma du 27 mai concernant la présence d’Alain Mosconi sur la liste du NPA Sud-Est, du reste piteusement désavoué dans le n° du 29 mai. Cela est en soi déjà fort déplaisant et peu fécond pour les relations entre anticapitalistes, j’ajoute que c’est encore plus intolérable pour ceux de ma génération qui ont connu l’époque des « gauchistes-Marcellin », des amalgames injurieux proférés en public dans les réunions et congrès, et des SO musclés faisant valoir leur vigueur « prolétarienne » essentiellement sur le dos des militants qui ne s’alignaient pas sur les choix et directives du « parti de la classe ouvrière », en bonne compagnie alors de certains apparatchiks du PS qui ont quelquefois prétendu nous arracher nos tracts des mains à l’entrée de réunions publiques.

    Michel Onfray jouit d’une audience indéniable auprès de ceux d’entre nous qu’intéressent les questions philosophiques, et il vaut mieux laisser à d’autres, dotés des compétences nécessaires, le soin d’examiner sérieusement ses assertions. La verve qu’il sait déployer lui conquiert assurément bien des suffrages, mais ce ne serait pas le premier à abuser d’une position légitimement acquise sur le terrain littéraire pour se croire autorisé à étendre l’autorité de son jugement à des domaines qui n’en relèvent qu’en passant par un nombre élevé de médiations.

    Qu’il accorde son suffrage au Front de Gauche et le fasse savoir n’est évidemment pas un problème, mais le profil de son argumentation le range malheureusement dans une filiation qui ne lui fait pas honneur.

    Que dit-il en effet ?
    1. le NPA n’a aucun « véritable souci de s’attaquer à la misère réelle », sa position est « pure, certes, mais totalement inefficace pour les pauvres qui "trinquent" tous les jours ». C’est le grand jeu, apparemment inépuisable, des « réalistes » proches des « gens » contre les « utopistes » coupés du peuple. On peut évidemment débattre sereinement, ce qui ne veut pas dire sans passion, de l’efficacité comparée de différentes orientations. On pourrait à ce sujet faire l’inventaire des mesures qui ont été adoptées du temps où « nous étions ministres », nous, Marie-Georges et Jean-Luc, sans vouloir remonter plus loin encore. Mais passons. Cela supposerait de toute façon que l’on accorde a priori à tout le monde le bénéfice de la « bonne volonté », ce que précisément M. Onfray refuse au NPA en le traitant à plusieurs reprises de « boutiquier ». Et en lui supposant des « chefs méprisant la populace ». Nous ne sommes plus loin, nous sommes même peut-être au-delà de la figure de sinistre mémoire des « petits-bourgeois étrangers à la classe ouvrière ». Il est possible que Michel Onfray fraie de nouveaux chemins dans l’enseignement de la philosophie, mais en matière de polémique politique, non seulement, il ne crée rien, mais il copie, voire surpasse d’anciens modèles qu’on aurait voulu croire oubliés, quand ce ne serait que pour sauver leur honneur. Comme quoi on ne gagne rien à effacer le passé sans en faire l’inventaire.

    2. Le NPA n’est même pas « capable de présider aux destinées d’un village de campagne ». Outre que M. Onfray manifeste ainsi son ignorance de l’implantation réelle du NPA , il expédie ainsi dans une figure purement rhétorique la question ô combien réaliste de la gestion des communautés locales et régionales. En exécutant une pirouette, il en esquive le bilan. Que dire de la dernière mesure connue du Conseil Régional de Lorraine confiant au privé l’entretien de quatre lycées technologiques, mesure contre laquelle se sont prononcés à notre connaissance seulement trois conseillers (dont un qui soutient par ailleurs le Front de Gauche, une qui est chez les Verts, mais aucun du PCF – le PG n’y étant, je crois, pas représenté) ?

    3. « le NPA a réellement le pouvoir d’inverser le rapport de forces, puis d’en créer un autre sur la base d’une large et réelle union des gauches antilibérales. » Pour mieux accréditer la thèse de la responsabilité exclusive du NPA, il est habile de le créditer, au prix d’une contradiction avec ce qui est dit par ailleurs (loin des réalités, indifférent aux souffrances du peuple, inefficace) d’une capacité qu’il refuserait de mettre en œuvre pour gagner une majorité décisive dans les rapports de force internes à la gauche. Cela reprend bien sûr l’illusion complaisamment assénée avant les présidentielles sur la « gagne »et qui s’est révélée n’être en fin de compte qu’une sorte de gri-gri agité pour faire avaliser des choix qu’on savait autrement impossibles à faire entériner. Bien entendu, il n’est pas fait référence à l’époque où, dans la gauche, le PC pesait 20% ou plus et aux fruits qui ont poussé sur ce rapport de forces.

    4. Mais il ne s’agit pas en fait de cela, il s’agit par précaution de rendre à l’avance le NPA, l’âne dont vient tout le mal, responsable de ce que « faute d’union du NPA avec le restant de la gauche antilibérale (...) cette dernière se trouvera dans l’obligation d’alliances avec le Parti socialiste. » « le NPA envoie la gauche antilibérale dans les bras du PS ». Quod erat demonstrandum. Ce faisant, le NPA devient « un allié objectif de l’UMP, du PS libéral et des alliances de ce PS avec le MoDem. » Bigre ! Ne nous appesantissons pas sur l’éventuel distinguo entre le « Parti Socialiste » auquel il faudra, par la faute du NPA, s’allier, et le « PS libéral » qui incarne l’adversaire absolu. Un philosophe a peut-être droit à son quota d’indulgence dans les choses politiques. Mais quand même, on prêtait au PCF et au PG une réelle liberté dans la détermination de leurs alliances, et on ne les savait pas aussi étroitement vassalisés par le NPA, qui, apparemment, en dépit de son inefficacité, détiendrait toutes les clés de la situation dans le coffre-fort de la rue Richard-Lenoir à Montreuil. On ne savait pas que Strauss-Kahn, Ségolène Royal et Martine Aubry scrutaient chaque matin le baromètre du NPA pour décider de leurs alliances. On appréciera sans doute à son poids historique le terme choisi « d’allié objectif » - Michel Onfray est un orfèvre du langage, et sait toujours d’où il puise les expressions significatives et de quoi elles sont lestées. On aura bien du mal à croire qu’il ignore de quel arsenal – qu’on s’imaginait désaffecté - il a tiré ce concept qui a autrefois littéralement tué et assassiné dans le mouvement ouvrier. Triste épisode pour un virtuose de l’analyse et de l’histoire des idées.

    5. Les camarades Picquet, Faradji, Malaisé, auraient été « conduits (...) vers la sortie par les anciens trotskistes... ». Je ne suis pas vraiment sûr que ces camarades apprécient beaucoup la formule. Que l’on sache, ils ne renient pas leur « trotskisme », au contraire. Mais Michel Onfray sait-il qu’avec ses grands airs innocents et érudits, il fait vibrer une vieille corde un peu distendue et rongée par les ans ? A lui de nous dire quel oxymore il préfère : les « aubry-trotskistes », les « modémo-trotskistes », les « sarko-trotskistes » ?

    Bref, peu de politique là-dedans, mais beaucoup de fléchettes qu’il aurait mieux valu laisser rouiller dans les poubelles. Quitte à en garder quelques exemplaires dans un mémorial pour servir à l’instruction et à la mise en garde des jeunes générations.

    Tu voudras bien excuser, cher Christian, la vivacité de certaines formulations. Je n’ai pu y échapper à la lecture de ce texte malencontreux. Bien entendu, cela ne change rien aux coopérations en cours, ni, je l’espère, à celles à venir.
    Cordialement
    Gérard

  • Onfray tiens ici un langage de politicien, ami de Mélenchon, et non de philosophe visionnaire.

    Il aurait été plus intéressant comme son confrère Alain Badiou de nous dire en quoi le NPA et Besancenot ne sont pas révolutionnaires ni communistes mais strictement réformistes dans un cadre bourgeois.

    Il y a une vérité que le philosophe Onfray évite d’ébruiter à propos du 7 juin 2009 : aller aux élections, pour un prolétaire, c’est participer à un immense mensonge où il sera toujours le dindon de la farce.

    Dans une perspective strictement politicienne, le professeur Onfray n’a toutefois pas tort, le parti d’OB en refusant une alliance tactique avec le Front de gauche creuse sa "tombe électorale" ; et se coupe définitivement de ses militants réformistes les moins sectaires lesquels ne pardonneront jamais à la direction son manque d’intelligence et de clairvoyance.

    Peut-être par ce refus, le NPA cherche-t-il maladroitement à signifier comme LO que le Parti reste indéfectiblement du côté des travailleurs en lutte, c’est-à-dire des martyrs de la grande bourgeoisie dont le sort de sacrifiés fait pleurer parfois les petits-bourgeois à l’heure du Vingt-heure télévisé...

    Cette quête d’apparence prolétarienne ne convient pas cependant à un parti qui cherche à faire asseoir ses représentants dans les fauteuils très confortables des assemblées bourgeoises ; les électeurs de la classe ouvrière sont, peut-être, crédules mais ne croient pas, un instant, qu’un Raoul-Marc Jennar, par exemple, dans le Sud-est de la France, puisse être un des leurs...

    Le théâtre politique est parfois plus cruelle que la lutte des classes, le NPA risque d’en faire l’amère expérience le 7 juin au soir ; les électeurs risquent d’être plus sévères que le ministère de l’Intérieur.

    Si certains militants du NPA ne comprennent pas pourquoi le Parti n’a pas fait une alliance opportune avec le Front de gauche, il est tout aussi incompréhensible pour un révolutionnaire de comprendre pourquoi le NPA n’a pas appelé à l’abstention massive aux européennes ?

    Car, dans ce cas de figure, le NPA aurait pu continuer à entretenir l’illusion d’une force révolutionnaire crainte par les pouvoirs en place et gagner la confiance de ceux et celles qui ont rompu, en Europe, avec le système.

    Hélas ! Les militants que j’ai eu l’heur de rencontrer, dans la Drôme, sont, par leur mode de vie et rélexion, très proches des gens du Font de gauche qu’ils critiquent par ailleurs...

    Le NPA va mourir non pas par des coups portés par le pouvoir mais de ses propres contradictions. Mais comme Guignol, il renaîtra des bastonnades...

    Le NPA restera encore quelque temps, dans le champs politique, le sparing partner rêvé du nain de l’Elysée et le chouchou de la presse people.