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Storytelling : de la théorie restreinte à la théorie générale (zaz)

Publie le vendredi 12 juin 2009 par Open-Publishing
10 commentaires

Avertissement :

L’Ocsena est un collectif critique qui, sur le plan théorique, considère l’humour comme l’arme heuristique et démocratique par excellence. Dans les faits, il peut se trouver que nous soyons très mauvais, mais tous les bons esprits reconnaissent par chance que c’est encore notre meilleur côté.

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1. Qu’est-ce que le storytelling ?

Dans un dico bilingue jaspinant classiquement l’anglais-français, le storyteller est côté langue de Molière soit le "conteur" soit le "menteur". Côté anglais aussi, sauf que chez les rosbifs ou les américano-rosbifs, il y a clairement deux concepts sur un seul identique mot. Les deux concepts certes ne se confondent pas, mais dans la réalité ils peuvent être parfois extrêmement proches comme on l’imagine tout de suite. Dés le départ, le storytelling est donc indubitablement marqué par une lourde équivoque possible.

Cette suspicion explicite ou latente demeure sans doute dans le storytelling moderne, d’origine bien entendu anglo-saxonne lui-même, qui s’entend spécifiquement comme technique(s) sophistiquée(s) de communication , de pub, de pub politique, de management, où il est question en gros de jouer sur une grosse histoire globale de positionnement séduisant, en même temps que sur des histoires plus petites d’enjolivo-accompagnement, pour autant qu’il est besoin de faire, ça et là, un petit brin de fanfare, de pétards ou de feux de bengale et de toro de fuego.

Wikipedia qui a réponse à tout nous explique que selon Steve Denning, théorisateur du storytelling, on est passé d’une méthode traditionnelle de "reconnaissance d’un problème / analyse / préconisation d’une solution". à une nouvelle formule trilogique : "capter l’attention / stimuler le désir de changement / et (dans un dernier temps seulement) emporter la conviction par l’utilisation d’arguments raisonnés".

On reconnaît tout de suite ci-dessus le pragmatisme méthodologique yankee ; comment se débrouillent les Français avec exactement la même théorie ? On sent bien que sans l’avoir voulu on va arriver probablement à parler de Sarkozy et de quelques autres.

2. Sarko d’abord dans l’hypothétique storytellisation positive du château de sa mère et de la gloire supposée de son père. Premières interrogations

Que le storytelling ait déjà été très bon chez nous dès Vercingé et Napolé, ne garantit pas que nous ayons gardé la main pour arriver à Sarkozy aujourd’hui. On ne peut pas mettre en effet le succès de Sarko à la dernière présidentielle sur le compte de l’entretien d’un mythe à propos d’un soleil sympa pris antérieurement au pont supposé d’Austerlitz.

Quand on y réfléchit, Sarko c’est objectivement très peu de choses au démarrage : c’est Neuilly, le Karcher, une femme belle et très pénible, piquée à quelqu’un d’autre, bref c’est somme toute à peu prés peanuts. Peut-être notera-t-on au passage qu’en ce vide Rachida faisait dans sa fébrilité utilement joker. L’exploit du "think-staff de caves bricoleux-cafouilleux sarkoziens", révélés essentiellement par la suite, est pourtant d’avoir tout misé sur un truc élémentaire : Sarko allait changer quelque chose à la France et votre vie, réformer quoi. Ce motto marche encore probablement à tous les coups, on l’avait déjà vu avec Henri the fourth et puis sa poule au pot, on l’a vu très simplement la semaine derniere, last but not the least, avec les galants verts, la terre et le "flim" très beau et très grandilocon de Pinault-YAB-Sarko de sauvement de la planète en trois épates.

Que les Français aient dans cette affaire sarko-globale parié nettement en mal concrètement n’a aucune espèce d’importance, les Français en vérité voulaient absolument changer sans doute. Changer pour changer ! c’est l’échec du PS de ne l’avoir pas compris complètement à temps. Pour résumer, c’était en deux mots ; "le pétrin plutôt que rien" ! Du mouvement ! et même simplement carrément du "bouvement" ! C’était en fait jogging sur place, comme dans les salles d’entrainement. Y entrer avec le sac de sport sur le dos fait illico sans plus d’effort déjà beaucoup de bien aux os.

Le jaillissement puissant du sarkozysme-UMPisme c’est de prouver par "a" plus "b" contre Parménide et toute l’Académie que du non-être peut jaillir l’être. D’un storytelling global néant, excepté que Sarko faisait des fois du vélo, ou alors c’était Rachida, les sarkozyens ont fait un storytelling en kaléidoscope agglutinant : Sarko et les infirmières bulgares, Sarko et Carla, Sarko-Carla et la reine d’Angleterre, Sarko et son ami Obama, etc. etc. on sent qu’il manque le chien Bo aux pattes blanches, mais ca ne va pas tarder évidemment.

Qu’est-ce qui n’a pas marché donc pour tous ses adversaires, c’est ici l’occasion d’examiner la question, c’est même franchement une dernière chance de le faire avant que Sarko repique du riz pour un second mandat triomphal.

On croit nous que le premier truc raté a été la critique de Sarko sur le fait assez stupide qu’il était petit. Si les Français d’aujourd’hui avaient été observateurs ils auraient noté que les chefs français sont petits et ce depuis Pépin le bref. A cet égard, Charles de Gaulle et François 1er ne sont que de passagères exceptions.

3. Sarko versus l’anti-storytellisation contre lui. Le coup fiasqué du négatif construit. Deuxièmes interrogations

Dans le storytelling, ce qu’on ne voit pas assez en creux c’est l’efficacité hypothétique, fréquemment aléatoire, du contrestorytelling, l’anti, le négatif. Y a des cas bien sûr qui ont marché, comme Néron, Arminius, Attila, Vlad Tepesh, Staline, le maréchal Pétain (Y a bien sûr Franco ou le moustachu de Berlin mais eux c’était trop facile.). Kim il Sung entre aussi dans l’antistorytelling de temps en temps réussi.

Pour Sarko, queuedalle ! le contrestorytelling n’a pas du tout performé. Sarko a été traité pourtant avec application et répétition de fasciste, nazi, scientologue, mooniste, bushiste, born-again, neo-cons, médéfiste ami-inconditionnel-suppôt-des-riches. N’ayant été traité décemment ni d’alcoolique, ni d’impuissant, ni de salace pédophile collectionneur de photos illicites, Nicolas Sarkozy a donc franchi tous les dangers. On peut même penser que beaucoup de ces malices-méchantes contre lui lui ont au fond a contrario plutôt grassement profité.

On va dire que toute la presse et la télé étaient certes scandaleusement en sa faveur mais ca ne nous suffit pas comme argument, on comprendra bientôt pourquoi.

Le contre-storytelling a été porté par des contestataires qu’avaient pas froid aux dents dans le talent. Niet ! Ils n’ont pas réussi tout simplement. Cet échec personnalisé interroge bien entendu.

On pense en premier forcément à Ségo, on ne va pas ici commencer un doctorat de 500 pages sur Ségo. Ca a raté dans le débat télévisé, ca a raté en définitive tout le temps.

On n’a pas le temps de vous dire pourquoi, mais on a certainement le temps de vous dire ce qui est le plus étonnant dans cette consternation à répétition : Ségo ressemble à Sarkozy comme deux gouttes d’eau dans son comportement. Mais holà ! n’y a pas que Ségo, dido qui vous voulez chez les socialos (Peillon, Valls, même l’admirable Hamon), dido au modulédémodulo Modem de chez Bayrou à l’exception de Sarnez que Sarkozy a voulu hier proprement débaucher.

Vous allez me dire à quoi ça sert d’énoncer ce truc si on ne l’analyse pas ? On va tout de suite vous donner plus avant notre truc et vous allez comprendre. Le complexe storytellé brownien de Sarko et des autres est un truc identitaire de toute notre société. En conclusion, vous pouvez pas pêcher Sarko, il est exactement comme un poisson trop malin dans l’eau.

Note que nous ne pensons pas aussi qu’il faille le pêcher à la grenade, faut quand même pas débloquer.

En fait et c’est cela notre thèse, ce n’est pas Sarko qui est storytellé c’est toute la société française qui l’est. Pendant trente ans et plus, des aèdes multiples nous ont homérisés.

4. La France dans son storytelling perso à elle, la guerre de Troie aura-t-elle lieu ? Troisièmes interrogations

 Formés pendant deux générations par nos excellents bons profs d’économie non politique, laquelle économie est comme on sait l’art scientifique de faire du fric du point de vue incontestable et rationnel de l’entreprise, nous nous sommes raisonnablement, avec l’aide de nos grands partis, réconciliés avec l’entreprise source incontestable de la richesse nationale, certes répartie inégalement mais équitablement (L’équité : inégalité juste, principe sacré).

Nous avons été beaucoup aidés par les journaux, nous pensons avec émotion aux Echos, à la Tribune, au Figaro, mais au Monde aussi et même à Libé...

Nous avons eu les radios également s’appliquant à leur sacerdoce, on pense en particulier à BFM.

Nous avons eu les télés, même si les gars y sont notoirement un peu nuls, c’est pas la bonne volonté qui leur a manqué. (la performance, la plus-value nourricière, la VA : deuxième principe sacré).

 Formés par nos azrutis de profs eux-mêmes très azrutis déjà, donc très excusés, nous avons découvert la salvatrice "excellence". Il faut devenir excellent en tout c’est extrêmement important. C’est une évidence, car on n’imagine pas une société qui veille faire des mauvais ou des médiocres, sauf bien sûr pour les sanisettes Decaux, la "technique de surface" ou dans les rames du métro (L’excellence, donc troisième principe sacro-sacré).

 On va à ce point abréger un peu. Y a eu la culture de haut niveau, tu sais celle pas trop fatigante où on s’écrit à tout bout de champ : Oh que c’est beau ! Oh que c’est merveilleux ! Oh que c’est sublime ! On notera que les carnets de Picasso servent peut-être pour une fois à quelque chose auprès de fanas probables de la peinture pas du tout mercantiles. (La grande culture, quatrième principe sacré.) 100 millons d’euros rien que que pour le tas de herde culturel inutile du 19e.

 Dernier mais pas le moindre, la conscientisation écologique, là c’est un gros travail en profondeur du sarkozysme. Tout le monde désormais veut, c’est si légitime, sauver notre malheureuse planète. Donc il n’est pas question ici de traiter indignement certains écolos de Mickeys politiques (Mickey Bendit, Mickey José, Mickey Joly, ça c’est proprement odieux !)

Nous avons vu incontestablement d’un très bon oeil le flim "Home" de Pinault, la création avant-hier de la très heureuse Fondation GoodPlanet d’utilité publique de YAB, nous verrions d’un très bon oeil aussi Nicolas Hulot appelé à un maroquin important s’il est biodégradable.

Bref notre conclusion est que les Français ont énormément de raison d’être très contents, que Nicolas Sarkozy épouse au mieux nos desiderata, que Darcos, Pécresse, etc. sont des gens pleins d’allant, très compétents qui préparent l’avenir comme on l’entend.

Bref, c’est tout le paradigme français d’aujourd’hui qui est du bon storytelling. Arrêtez donc de faire chier Sarkozy. Sarkozy serait pour l’autogestion libertaire si vous lui demandiez majoritairement de l’autogestion libertaire.

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Alain Serge Clary et les Inoxydables philosophes de l’Ocséna vous saluent bien !

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Ocséna, Organisation contre le système-ENA et pour la démocratie avancée
 http://ocsena.ouvaton.org

Messages

  • "Marielle de Sarnez ne compte pas entrer au gouvernement" (Dans toute la presse)

    "Le MoDem dans la ligne de mire du gouvernement" (LEMONDE.FR)

    Ce monde est sans pitié et l’UMP aussi. J’en connaîs un qui a de quoi se faire des cheveux. Ils veulent vraiment que Bayrou se pende par les douilles dans un placard.

    • "GoodPlanet, YAB"

      Vous n’avez pas, chers amis démocrates, manqué d’apercevoir la pleine page de pub de Yann Arthus-Bertrand parue dans le Monde d’hier.

      Donc vous savez par ladite pub et avec énormément de joie verte que l’association GoodPlanet créée par YAB vient d’obtenir le statut de Fondation reconnue d’utilité publique par décret daté du 3 juin et publié le 5 juin au Journal Officiel.

      Vous aurez aussi noté l’aimable chute ou conclusion qui va avec :

      Il est trop tard pour être pessimiste !

      Pour développer nos programmes,

      nous avons besoin de votre aide.

    • Voir aussi bien sûr sur le sujet :

      Salmon : Sarkozy ou l’illustration du « Storytelling » en politique

       http://www.betapolitique.fr/Salmon-...

    • "Pinault bienfaiteur des Verts. Pinault bienfaiteur de la culture."

      "Le pinaulisme est non seulement un verdisme, le pinaulisme est aussi un culturisme."

      1° Dinard. Exposition Pinault : les Chirac à l’inauguration Le Télégramme - ‎11 juin 2009‎

      C’est l’événement culturel de l’été en Bretagne : l’exposition d’art contemporain issue de la collection de François Pinault, à Dinard, sera inaugurée demain ...

      2° À Venise, François Pinault ouvre son second musée d’art contemporain dimanche 07.06.2009, 04:50 - La Voix du Nord

      Déjà propriétaire du Palazzo Grassi, le milliardaire français François Pinault a ouvert au public son second centre d’art contemporain à Venise, La Pointe de la douane. Ce centre culturel se trouve dans d’anciens entrepôts entièrement restructurés, à l’embouchure du Grand Canal.

      Ce musée de près de 5 000 m² accueille les visiteurs depuis hier, avant l’inauguration aujour- d’hui de la 53e Biennale d’art de Venise (jusqu’au 22 novembre).

    • "BAS-RHIN Plus de 150 armes à feu découvertes chez un particulier" (NOUVELOBS.COM | 13.06.2009)

      Agissant sur dénonciation, les gendarmes ont pénétré dans une maison où ils ont saisi 600 kilos de munitions, des armes de poing, des épées et des baïonnettes. L’homme, un quinquagénaire débonnaire et totalement désoeuvré, affirme être un collectionneur inutile passionné.

      Cet exploit militaire pandoresque est aujourd’hui relaté unanimement en grand par tous les journaux nationaux comme un super exploit très significatif, ce qu’il est indubitablement. Nous remercions donc vivement notre presse, nos gendarmes grâce à elle passent une fois de plus pour d’authentiques cons.

    • A propos des socialos :

      Que veux-tu qu’on fasse ? Du moment qu’on peut pas se payer Peillon ni faire valser Valls on est bien obligés de les prendre dans la Direction nationale.

      En tout cas les socialos se portent bien au Groenland

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      L’extrême gauche (?)venue du froid a de la glace en réserve.

      Elle peut prendre l’apéro. Le mouvement Ataqatigiit (autonomiste situé à l’extrème gauche, nous assure-t-on) vient de d’effectuer une remarquable percée au Groenland à l’occasion des dernières élections... Le Royaume de Danemark envisage toujours d’y déplacer ses "gauchistes, ses autonomes, ses anarchistes" qui n’ont de cesse de s’opposer à sa politique dont la dérive droitière masquée n’est un secret pour personne.(Cf :les évènements récents)... .

      Le parti Inuit Ataqatigiit qui veut faire du Groenland un État indépendant a lors des dernières élections législatives de l’île le 2 Juin 2009 obtenu 43,7% des voix au scrutin anticipé qui s’est déroulé mardi, soit près du double du score qu’il avait réalisé lors d’une consultation en 2005.Inuit Ataqatigiit, qui a pour dirigeant Kuupik Kleist, disposera de 14 sièges sur 31 au Parlement, contre sept précédemment.

      http://nosotros.incontrolados.over-blog.com/"les amis du négatif à l’oeuvre".

      http://les-batisseurs-d-abimes.over-blog.com

      http://taz-network.ning.com/T@Z : Territoires Autonomes Zymotechniques
      /LESAMISDUNEGATIFALOEUVRE

      mail@taz-network.ning.com

    • "L’énigme et/ou le paradoxe Sarkozy"

      Comme un être aussi exquis dans le mauvais peut-il tenir résolument le haut très relatif du panier ?

      Un seule explication : contre toute logique apparente, contre les syndicats et contre les plus forts récalcitrants, Nicolas Sarkozy distrait profondément les Français.

    • "La France supermodernisée, qui dans tous les casgagne."

      Il faut savoir concentrer conceptuellement l’image pour bien appréhender a priori les choses. Qu’est-ce que le sarkozysme ? :

      Le sarkozysme c’est, au point nommé présent de la saga, les schtroumpfs de l’UMP-Elysée, plus désormais les gentils mickeys de l’écologie Walt Disney.

      Concédons-le, c’est éminemment sympathique et très encourageant.

      On est donc passé techniquement, question storytelling, de l’ancien régime des rois et des princes façon contes de Perrault, au régime démocratique présidentiel avec notamment le graphisme de Peyo.

      Peyoworld, Disneyworld, Dreamworks, Sarkoworld, la France grâce à Sarko est un monde certes imaginaire et pas forcément idéal dans les faits mais en tout cas assurément presque à 100 % rêvé.

    • "Oui mais pourquoi pas alors Ségo ? Qu’est-ce qui a fouaré dans son numéro ?"

      C’est vrai ! Ségo n’a pas accédé au rêve qu’elle pouvait facilement pourtant elle-même incarner très magnifiquement.

      Elle a selon une théorie sophistiquée peut-être trop hésité entre le rôle de Cendrillon et celui de Peau d’âne lequel second rôle est quand même malgré son intérêt très compliqué et très psychanalytique.

      Les spécialistes pensent globalement que dans tous les cas le rôle de princesse ne doit pas un seul instant laisser passer l’agressivité même ultra-constructive d’une mégère même supposément apprivoisée.

      Rappelle-toi le débat télévisé. Ségo mal conseillée, gonflée, battante toute en uppercuts du gauche et en directs du droit, s’est épuisée malgré son superbe jeu de jambes.

      Qu’est-ce qu’ils ont dit les électeurs : Oh qu’il est gentil ! qu’il est adorable le joli chat de Shrek !

      Ségolène n’avait pas assez étudié à fond le cas éminemment subtil de la schtroumpfette.