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LES GUERRES DU XXIE SIÈCLE : Avènement d’un nouveau monde

Publie le dimanche 13 septembre 2009 par Open-Publishing

« Je ne sais pas avec quoi se battront les guerriers de la 3e guerre mondiale, mais ceux qui feront la 4e guerre mondiale se battront avec des pierres et des bâtons. »
Albert Einstein

Le XXIe siècle est caractérisé par deux paradigmes majeurs. Les pays occidentaux sont constamment en guerre à distance pour leurs intérêts. De plus, ils mettent en oeuvre la doctrine « zéro mort ». Pour cela, ils font appel soit à des mercenaires et/ou à la puissance de la technologie, ce que nous allons analyser dans cette contribution. Le marché des armes est de plusieurs centaines de milliards de dollars. Les dépenses en armement ont dépassé 1200 milliards de dollars dont près de la moitié pour le Pentagone. Pour éradiquer la faim, il faut 50 milliards de dollars d’après Jacques Diouf. Le G20 a difficilement rassemblé 25 milliards de dollars de « promesses » au dernier sommet de l’Aquila. Les pays vendeurs d’armes, malgré plusieurs résolutions de l’ONU sur l’interdiction de vente, prospèrent ; ils jouent aux pompiers-pyromanes. Tous les conflits actuels sont entretenus avec des armes des pays du Conseil de sécurité qui ont chacun leur sphère d’influence. Il faut y ajouter l’Allemagne et Israël.

Les pays développés se vendent mutuellement des armements de dernière génération. On apprend qu’Israël vend des armes aux Américains (Le Skylark 160 Drone israélien, une mine de devises, système radar...) Ce n’est évidemment pas les mêmes qu’elle vend en Afrique où elle place toujours ses mitraillettes Uzzi. Mieux : Israël a acquis d’Allemagne- autre grand vendeur- pratiquement gratuitement au nom de l’histoire, trois sous-marins et se permet même le luxe technologique de les faire construire selon ses propres paramètres. Le passage pour la première fois des sous-marins dans le canal de Suez avec l’assentiment des Egyptiens est un signe fort envers les potentats arabes du Golfe.

Entre 2001 et 2004, c’est la Russie qui s’est hissée au premier rang des exportateurs d’armes (26,9 milliards de dollars) suivie par les Etats-Unis (25,9 milliards de dollars), la France (6,3), l’Allemagne (4,8) et la Grande-Bretagne (4,4). Ces cinq pays assurent à eux seuls 81% du commerce mondial des armes. En 2005, les dépenses militaires ont atteint environ 1,81 trillion de dollars (en valeur actuelle). Dépenses militaires mondiales : Israël Mondialisation.ca, Le 1.08.006
Les Etats-Unis, premier pays en matière de dépenses militaires et jusqu’à récemment le premier pays exportateur d’armes, a besoin depuis la fin de la Guerre froide de se créer de nouveaux « ennemis » pour écouler ses productions d’armement.. Israël, qui talonne les USA en matière d’ingéniosité militaire mortifère, profite largement de ce boom de l’industrie de l’armement. (...)

Les dépenses militaires se concentrent de plus en plus dans certains pays. 15 pays sont actuellement responsables de 84% de la totalité de ces dépenses. Les Etats-Unis couvrent 48% de ces dépenses, suivis à distance par la Grande-Bretagne, la France, le Japon, la Chine avec 5 et 4% pour chacun. (...) La Chine et l’Inde, deux pays à l’économie émergente, ont également augmenté significativement leurs dépenses militaires. Toujours selon ce rapport, les USA, la Grande-Bretagne et la France sont engagés dans des opérations extérieures coûteuses tandis que les dépenses de la Chine s’expliquent par la modernisation de son « armée de libération du peuple ». Les dépenses militaires représentent 2,5% du GDP, soit 173 dollars par habitant. C’est aux Etats-Unis que les dépenses sont les plus élevées par tête d’habitant, soit 1604 dollars, suivis par Israël 1430 dollars par habitant (1)

Selon le Sipri (1997), la recherche et développement de la défense constituent la clé de voûte de la supériorité militaire. Aussi, les Etats industriels ont eu tendance à consacrer une part très importante de leurs financements publics de recherche à la défense. Les dépenses mondiales de recherche et développement militaires ont diminué de manière presque constante depuis bientôt sept années, de 60% en dollars réels depuis 1986. En 1995, elles représentent encore près de 50 milliards de dollars, dont les deux tiers financés par les seuls Etats. Les Etats-Unis consacrent 0,59% du PIB à la recherche contre 0,4% pour la France,0,65 pour la Russie.
Des marchands d’armes israéliens parcourent le monde à la recherche d’acheteurs. Il n’y a pratiquement pas un seul conflit militaire, une seule confrontation ethnique ou guerre civile, où on ne trouve pas de trafiquants d’armes israéliens, mais aussi de consultants en sécurité, d’instructeurs et d’unités de protection (...) Une coopération étroite s’est aussi développée entre l’industrie de l’armement américaine et israélienne, avec des coproductions et/ou sous-traitances. Ainsi depuis 1995, les Etats-Unis et Israël ont activement développé une arme à infrarouge avancée, dans le cadre d’un programme commun « antimissile » programme connu sous le nom de Tactical High - Energy Laser (Thel). Le Thel est une arme laser chimique mobile et déployant une grande quantité d’énergie.(2)

La demande croissante de drones et d’équipements d’électronique militaire contribue aux records de recettes. Les exportations militaires de la petite nation du Moyen-Orient ont augmenté de 20% l’année dernière, passant à 3,3 milliards d’euros, et les fournisseurs d’armes israéliens ont signé de nouveaux contrats en 2006 pour la somme record de 3,9 milliards d’euros. En Israël, l’industrie de défense profite de la demande pour ses drones (UAV) et d’équipements de guerre électronique sophistiqués utilisés dans le conflit palestinien en cours et durant la guerre de l’été dernier au Liban. Environ 90% de toutes les ventes à l’exportation sont effectuées par quatre géants : Elbit Systems, et trois entreprises d’État, Israel Aerospace Industries (IAI), Rafael Armament Development Authority et Israel Military Industries (IMI). (3)

Les armes du futur

Les drones ou UAV (Unmanned aerial vehicles, « engins volants sans humains ») sont l’armement-vedette de la coalition internationale réunie en Afghanistan sous les couleurs de l’Otan et des USA. Des drones américains opèrent également au Pakistan, où ils ont été engagés ces derniers mois dans une campagne controversée « d’assassinats ciblés »...Derniers faits connus : l’élimination, il y a presque deux semaines, par un tir de drone, de Baïtullah Mehsud, considéré par Washington comme le principal « intermédiaire » entre Al Qaîda et les taliban pakistanais. (4)

Les drones font désormais partie de la panoplie « normale » des forces américaines, qui disposent aujourd’hui de 5500 engins d’observation ou de combat de type UAV, de tous types et volumes, soit trente fois plus qu’en 2001. Les caractéristiques de ces matériels - absence d’équipage embarqué, discrétion, endurance, observation tous temps, et attaque de cibles - sont en passe de provoquer une mutation profonde dans les techniques de guerre, et dans la structure des armées de l’air. Une noria de drones Predator et Reaper, armés de missiles Hellfire, opèrent dans le ciel afghan, à partir notamment des bases de Bagram ou Kandahar. Au total, l’US Air force et l’US Army disposent en Afghanistan comme en Irak d’une panoplie de trente-cinq types d’appareils.
(...) En revanche, sur un plan plus « politique », l’usage de drones introduit des pratiques nouvelles et dangereuses. Ces engins sont manipulés à distance par des opérateurs plus assimilables désormais à des contrôleurs de vol, des spécialistes du renseignement, ou des informaticiens, qu’à de véritables pilotes. Ces opérateurs travaillent dans des locaux fermés, devant des écrans et consoles, dans une ambiance qui tient parfois du jeu vidéo, à des centaines, parfois des milliers de kilomètres : guerre à distance, par procuration, dans une quasi-clandestinité, sans faire face « humainement » à l’adversaire, avec un quasi-monopole de la décision sur la désignation de la cible, sur le niveau de « dommages collatéraux » acceptés unilatéralement (par la puissance actionnant les engins, bien sûr). « Il est incontestable, que la culture des jeux vidéo habitue les cadres et les futurs décideurs à une déshumanisation de la guerre. » Les victimes non plus ne sauront pas qui a frappé, pourquoi.(4)

« Apparemment c’est un job comme les autres, et vous survolez virtuellement l’Afghanistan en étant confortablement installé dans une base de l’armée de l’air climatisée du Nevada. Dans une interview accordée à CNN, le capitaine Matt Dean explique l’étrangeté de son travail : "Voir des méchants sur l’écran et peut-être les voir se faire descendre, et ensuite aller déjeuner au Taco Bell, c’est assez surréaliste." En fait, leur journée est très normale, avec des temps de repos pour éviter la fatigue. C’est un boulot très ordinaire. Du moins si le fait de voir des terroristes se faire tuer ne vous coupe pas l’appétit ».(5)

Une autre arme du futur la « plus prometteuse » concerne les robots ; Pascal Riché écrit à ce propos : Regardez déambuler cette étrange bête, qui n’est pas sans grâce. Ce n’est pas une oeuvre d’art, mais un auxiliaire militaire. Un robot, baptisé « BigDogs » (GrosChiens), que l’armée américaine a décidé de tester en Afghanistan. Il a été conçu par la société Boston Dynamics. Selon Boston Dynamics, cité par le site de FoxNews, il peut marcher à plus de 6 km/h, ou alors tout doucement, grimper des pentes à 35 degrés, coucher, inspecter les environs. Il peut transporter « 140 kilos d’équipements ». Y compris, j’imagine, des armes. Un soldat idéal : pas besoin de le nourrir ou de prévoir des temps de repos. Et s’il tue un jour, ce sera froidement.(6)

Dans une ville, les militaires ont besoin d’yeux pour détecter les dangers. J’ai assisté un jour à la présentation d’un de ces robots militaires, le « swords ». (...) « Au lieu d’avoir son arme à l’épaule, le soldat la manipule à 500 mètres en arrière, voilà tout. Il n’a pas le stress des balles qui sifflent autour de sa tête. » L’apparition de ces robots, selon de nombreux experts, est pourtant le prélude d’une inéluctable révolution dans « l’art » de la guerre, un tournant comparable à la découverte de la poudre. (...) (6)

Une autre invention : le laser. Les militaires rêvent de laser depuis son invention, en 1960. Cinquante ans plus tard, ce rêve devient réalité : le Pentagone a lancé des dizaines de programmes de recherche et développement d’armes au laser de tous calibres. Certains arrivent à maturité. (..) Démarré en 2002, le projet ATL (Advanced Tactical Laser) consiste à installer dans un Lockheed C-130 Hercules un laser chimique de 5,5 tonnes, d’une puissance estimée à une centaine de kW. L’avion pourrait ainsi zapper des cibles au sol jusqu’à 20 km de distance. En modulant la puissance du laser, l’ATL pourrait aussi bien crever un pneu d’une Jeep que la détruire. C’est à nouveau Boeing qui est derrière ce projet. Le premier test au sol de l’ATL a eu lieu en août 2008. Last but not least, il y a l’ABL (Airborne Laser). Du lourd. Ce projet lancé en 1994 a déjà coûté plus de 4 milliards de dollars. Il consiste à embarquer un laser chimique d’une puissance de l’ordre du mégawatt sur un Boeing 747. Sa mission : tuer des missiles, mais aussi des avions, voire des satellites en orbite basse. (...) (7)

A quoi ressembleront les guerres de 2018 ?

« Les USA prévoient une guerre contre la Chine à l’horizon 2018. » C’est notamment ce que révèle Giulietto Chiesa, député européen, dans un ouvrage paru en 2005. « Les prochains conflits viendront des USA lorsque les routes des matières premières, du pétrole, de l’uranium... ne pourront plus être sécurisées par leurs soins. La seule perspective de ne pas pouvoir assurer le leadership en matière de domination financière ou économique est insupportable pour une société qui veut répandre son mode de vie. »

Le laser au lieu des pétoires d’hier, un « progrès » pour qui ? Peut-être même que pour ceux qui seront du côté de la gâchette, le tir au laser sera plus rigolo. Même si elle n’est pas pour aujourd’hui, la question de l’autonomisation des robots finira par se poser. Et avec elle, celle de la programmation de « limites morales » à ses propres décisions. Au commencement, les robots auront une éthique rudimentaire : n’obéir qu’à des humains...Mais un jour, le robot pourra lui-même s’interroger sur ses propres décisions : « Si j’agis ainsi, est-ce mal ? » En face, est-ce que l’on saura « apprécier » à sa juste valeur le progrès accompli par l’humanité en remplaçant le plomb et la poudre par le rayon de la mort qui tue ?

« La vente d’arme est-elle éthique ? » Plus grave, la guerre moderne est-elle éthique ? Menée sur des écrans en appuyant sur des boutons. Le « théâtre des opérations » n’est qu’une infime partie du processus. Jamais l’être humain n’a été aussi éloigné des conséquences de ses actes. Que valent les lois de la guerre « classique » en face des guerres du XXIe siècle ? La possibilité d’une opération militaire « sans-douleur », soulève « une question d’ordre plus général ». « Est-ce que cela rend l’entrée en guerre trop facile, que ce soit ici ou partout ailleurs ? » L’armée américaine réfléchit, nous dit-on, à la façon dont les robots doivent être conçus et utilisés pour être conformes aux « lois de la guerre ».

Ce XXIe siècle sera caractérisé par des guerres de plus en plus asymétriques. D’un côté, la puissance technologique dévastatrice avec un postulat de zéro mort pour celui qui la possède, et de l’autre les damnés de la Terre qui tombent comme des mouches sans savoir d’où vient le tir et surtout sans voir son adversaire qui, lui, sirote son jus en manipulant son joysticks. « Périssent les faibles et les ratés » disait Nietzche. Nous sommes avertis, seul un enseignement supérieur de qualité et une recherche de qualité avec des priorités (autosuffisance, énergie, défense) permettra à l’Algérie d’exister dans ce XXIe siècle où l’incantation révolutionnaire et l’autosatisfaction appartiennent au passé.

(*) Ecole nationale polytechnique

1. Données du Sipri www.sipri.org

2.Source de certaines informations haaretz.com 17/05/06

3. Dans ces temps difficiles, le commerce d’armes israélien fleurit. Spyworld Actu. vendredi 25 mai 2007

4.Philippe Leymarie. Vol de drones sur l’Afpak mardi 18 août 2009,

5.Pilote de drone : la guerre à bonne distance [CNN]
http://www.gizmodo.fr/2008/07/13/

6.Pascal Riché : Des robots quadripèdes américains testés en Afghanistan Rue89 23/03/2009

7.Pierre Vandeginste | blog Aïe La guerre au laser, c’est pour bientôt 14/02/2009

Pr Chems Eddine CHITOUR