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OSSETIE DU NORD : au moins 150 morts, des ravisseurs résistent

Publie le vendredi 3 septembre 2004 par Open-Publishing
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de Diane Heurtaut

Des centaines d’otages retenus depuis 48 heures dans l’école de Beslan, en Ossétie du Nord, ont été libérés par les forces russes, mais il en resterait aux mains de 3 ravisseurs qui résistent dans l’enceinte. Au moins 150 cadavres ont été découverts dans le gymnase. Des membres du commando, qui exige l’indépendance de la Tchétchénie et dont 10 seraient morts, se seraient échappés.

Dénouement sanglant

Scène impressionnante et tragique. Des enfants courant en sous-vêtements, parfois en sang, se jetant sur les bouteilles d’eau que les ravisseurs leur interdisaient de prendre dans le gymanse surchauffé. Les brancardiers et civils courant sous les balles au secours des blessés. Des centaines d’enfants et d’adultes de l’école de Beslan, en Ossétie du Nord, retenus depuis plus de 48 heures par un commando exigeant l’indépendance de la Tchétchénie, ont été évacués vendredi (3 septembre). Mais les 1.000 à 1.500 otages ne seraient en fait pas tous hors de cause. Les forces armées russes ont pris à midi le contrôle de l’établissement scolaire, après un assaut qu’elles n’avaient pas programmé, mais les combats ne sont pas terminés.

Déjà une centaine de cadavres, sûrement même plus de 150 selon un conseiller proche de Vladimir Poutine, gisent dans le gymnase, où une partie du toit s’est écroulée, dont 10 voire 20 preneurs d’otages. Un bilan encore très provisoire. La moitié des ravisseurs seraient arabes, selon le chef régional du FBS (ex-KGB). 79 corps ont déjà été identifiés. Et plus de 400 personnes ont été blessées, dont 180 enfants, selon le ministère de la Santé.

Mais l’assaut n’est pas terminé, certains -ils seraient trois, le chef et deux autres - rebelles seraient toujours retranchés dans l’école -dans la cave probablement- et ont continué dans l’après-midi de tirer depuis l’intérieur du complexe scolaire. Ils retiendraient encore des otages, dont des enfants, selon le FSB, Service fédéral de sécurité, quelque part dans l’enceinte de l’école. La lutte active continue, une forte explosion a même été entendue dans l’enceinte de l’école 7 heures après l’engagement des combats. On ignore encore si elle provient du déclenchement accidentel ou au contraire volontaire d’une bombe posée par les ravisseurs.

13 ravisseurs sont recherchés dont certains seraient parvenus à s’échapper. Benjamin Quénel, sur place pour RTL, raconte que ceux-ci auraient pour cela changé de vêtements et se seraient fondus dans la masse des otages libérés pour s’échapper, créant un climat de panique dans les rues de la petite ville caucasienne. Car des ex-otages croyant reconnaître un ravisseurs ont lynchés l’homme. Les forces de l’ordre ont alors dû tirer en l’air pour libérer la victime. D’autres sources disent que les preneurs d’otage, qui pourrait avoir un lien avec Al-Qaïda selon l’agence Itar-Tass, se sont retranchés dans une maison de Beslan, non loin de l’école, où des échanges de tirs auraient encore lieu. Selon l’agence Itar-Tass, 10 preneurs d’otages auraient été tués. Pour tenter de les arrêter, l’Ingouchie -située entre la Tchétchénie et l’Ossétie du Nord- ferme sa frontière avec l’Ossétie du Nord.

Déroulement de la libération

Le scénario est encore confus. De très fortes explosions et des échanges de tirs ont été entendus dès 11h, heure française (13h, heure locale). Le chef de la Sécurité russe a précisé en début d’après-midi que l’assaut n’était pas prévu. En fait, l’hypothèse privilégiée est que l’échange de tirs a eu lieu alors que des hommes étaient autorisés par le commando à rentrer dans le bâtiment pour récupérer les corps de certains otages. Les deux explosions se font alors entendre. Ils seraient en fait tombés dans un piège. Ou alors certains otages en auraient profité pour s’évader provoquant l’échange de tirs. Ce vendredi matin encore, les autorités russes affirmaient ne pas vouloir faire appel à la force et compter sur les négociations, faisant primer la survie des otages. Mais jusque là, elles ont toujours régler la situation par la forces dans les prises d’otages à vocation indépendantiste.

Quoi qu’il en soit, la réponse du commando fut immédiate : il a fait sauter une partie de l’établissement qu’il a investi mercredi 1er septembre, comme il menaçait de le faire, et un morceau du toit s’est effondré. Il aurait même tiré sur les otages qui tentaient de fuir. En face, les forces russes aidées de soldats d’élites et d’hélicoptères ont pris le dessus, investi l’établissement scolaire et évacué les otages en faisant un trou dans le mur du gymnase où ils étaient retranchés, tandis que les infirmiers apportaient des civières dans l’établissement. Un garçon a confié qu’il a en été réduit à boire son urine tant la privation d’eau était insupportable dans le gymnase surchauffé. Un autre a eu la jambe arraché.

Entre 500 et 1.500 otages

La situation était d’autant plus inquiétante que le nombre d’otages était plus important qu’on l’avait cru initialement : ils auraient été, non pas 350, mais au moins 500 selon le président ossète, voire 1.500, selon les otages libérés jeudi et cités par la presse russe. Il s’agirait donc de la plus importante prise d’otages de l’histoire contemporaine, la dernière remontant à octobre 2002. Elle était déjà à l’actif des Tchétchènes qui avaient retenu 800 personnes dans un théâtre de Moscou. 129 étaient morts dont tous les membres du commando.

Les ravisseurs -qui pourraient de leur côté avoir été 40 hommes et femmes et non 17 comme initialement estimés- étaient toujours plus déterminés. Imposant de rudes conditions de détention aux otages -pas d’eau, pas de nourriture- ils avaient, selon les otages libérés jeudi, miné les panneaux de basket du gymnase.

Jeudi, le président russe avait affirmé que la priorité était la survie des otages. Chose inhabituelle de la part des autorités russes dans ce genre de situation, les négociations ont été privilégiées. Les pourparlers avaient donc repris vendredi matin (3 septembre) au lendemain de la libération de 26 femmes et enfants. La nuit dernière, les ravisseurs ont lancé des grenades contre les forces de l’ordre, croyant à un assaut.

A la demande du commando lui-même, les pourparlers étaient menés notamment par un pédiatre russe de renom, Lev Rochal, qui avait participé aux contacts avec les preneurs d’otages du théâtre de la Doubrovka à Moscou en octobre 2002. Refusant la médiation musulmane proposée par le mufti local Rouslan Valgatov, les ravisseurs ne voulaient parler qu’avec le médecin ou les présidents d’Ossétie du Nord et d’Ingouchie, Alexandre Dzasokhov et Mourat Ziazikov. Le Comité international de la Croix rouge a, de son côté, proposé de fournir "toute assistance humanitaire qui pourrait s’avérer utile".

Prise d’otages en pleine rentrée scolaire

Le choix du mercredi 1er septembre pour mener cette action n’est pas anodin. C’était la rentrée scolaire, jour de fête et de cérémonies dans les écoles russes. Le commando tchétchène a investi l’école n°1 de Beslan en Ossétie du Nord, petite républiqua caucasienne proche de la Tchétchénie, et ouvert le feu alors que parents et enfants étaient réunis dans la cour. Une cinquantaine d’enfants a réussi à s’échapper après s’être cachés dans la chaufferie du complexe scolaire.

Au moins sept personnes sont mortes lorsque le commando a pris d’assaut l’école. Selon la Croix-Rouge internationale, qui cite ses collaborateurs russes, 16 personnes pourraient avoir péri dans la prise d’otage. Les preneurs d’otages ont même obligé des enfants à se mettre aux fenêtres pour servir de boucliers humains. Mercredi après-midi, 13 autres ont réussi à s’échapper, 12 enfants et un adulte.

Les menaces du "commando noir"

Le commando réclamait la libération des combattants arrêtés lors de l’attaque sanglante en Ingouchie -entre l’Ossétie du Nord et la Tchétchénie-, fin juin dernier, sur un assaut de Tchétchènes dans cette république limitrophe. Et vendredi 3 septembre, il a réclamé en plus l’indépendance de la Tchétchénie. Les ravisseurs menaçaient de faire sauter l’école si les forces qui l’encerclaient donnaient l’assaut et ne leur donnaient pas satisfaction. Les assaillants avaient d’ailleurs empêché les otages blessés d’être évacués en ouvrant le feu à chaque fois. Ils affirmait qu’ils tueraient 50 enfants pour chacun de leur combattant tué, et 20 enfants pour chaque combattant blessé. Les preneurs d’otages avaient même demandé à des parents et des élèves d’enregistrer une vidéo dans laquelle ils appellent le président Poutine à accéder à la demande des terroristes.

Le président russe Vladimir Poutine a immédiatement interrompu ses vacances pour revenir d’urgence à Moscou et réunir le chef des services spéciaux et le ministre de l’intérieur, tandis qu’une cellule de crise était mise en place. Il affirmait que la priorité allait à la survie des otages et que ces actes condamnés par la France et les USA notamment étaient dirigés "pas seulement contre les citoyens russes mais contre la Russie entière". La méthode des prises d’otages a jusqu’ici déjà été utilisée par les indépendantistes tchétchènes. Le dirigeant indépendantiste de la petite république, Aslan Maskhadov, a bien précisé n’avoir rien à voir avec les preneurs d’otages de Beslan.

A la recherche d’une islamiste

La prise d’otage intervient au lendemain d’un attentat-suicide à Moscou. Mardi soir (31 août) une kamikaze s’est fait exploser sur un marché de la capitale russe au abords d’une station de métro faisant 10 morts et 51 blessés. Un attentat qui a été revendiqué par le même groupe islamique qui affirme avoir fait exploser deux avions russes la semaine dernière tuant 90 personnes. Un groupe, les "Brigades Islambouli", affirmant agir en soutien à la cause séparatiste tchétchène. Les autorités sont à la recherche d’une quatrième femme qui habitait un appartement de Grozny avec les trois kamikazes et qui avait disparu en même temps qu’elles.

http://www.rtl.fr/rtlinfo/article.asp?dicid=215628

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