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Valentine Battisti : "Ça a été un tel soulagement d’apprendre que mon père s’était enfui !"

Publie le lundi 13 septembre 2004 par Open-Publishing

de Sylvia Zappi

"J’espère avoir de ses nouvelles le plus tard possible." Le seul lien avoué par Valentine Battisti avec son père est le chat que l’ex-activiste italien en fuite a laissé dans son petit appartement. Depuis le 21 août, jour où Cesare Battisti ne s’est pas présenté à son contrôle judiciaire, sa fille assure n’avoir eu aucun contact. "Je préfère le savoir loin.

Ça a été un tel soulagement d’apprendre qu’il s’était enfui !", affirme l’étudiante en biologie. Son visage se tord encore sous les tics d’angoisse à l’évocation des derniers mois. C’est par un coup de fil de sa "tante d’Italie" qu’elle a appris, le 10 février, que son père avait été probablement arrêté. "En courant jusqu’à chez lui, j’étais affolée. Il avait fait son deuil de l’Italie.

Il répétait qu’il finirait sa vie ici", raconte-t-elle, en allumant une énième cigarette, qu’elle a roulée entre ses doigts agités. La jeune fille, jusqu’alors préservée de ce lourd passé, a réalisé le danger : "C’est bizarre. Je passais d’un papa normal, écrivain de polars sans problème avec qui je pouvais construire mon avenir, au néant." Elle a pourtant fait face, s’activant avec le comité de soutien et les avocats. Distribuant des tracts au Salon du livre ou auprès des commerçants du quartier. "C’est ma petite sœur qui a le plus souffert.

Elle pleurait souvent seule dans sa chambre." Valentine a alors fait "semblant". Elle a rassuré Charlène, 9 ans, et sa mère, très inquiètes après l’affichage dans leur cage d’escalier de menaces du Bloc identitaire, un groupe d’extrême droite.

Le 2 mars, M. Battisti a été remis en liberté par la cour d’appel de Paris. "Je me suis dit alors que c’était gagné." L’étudiante est retournée à ses cours et a pris de la distance avec le groupe des Italiens : "Je n’en pouvais plus", souffle-t-elle. La décision de la cour d’appel de donner suite à l’extradition a sonné comme un glas. "J’ai cru que j’avais mal compris", se remémore-t-elle.

Elle a vu son père se dégrader lentement. "C’était devenu difficile de communiquer avec lui. Plus le temps passait, plus son visage se décomposait avec des cheveux de plus en plus ébouriffés."Son départ ne l’a pas surprise, tant ses amis le lui conseillaient avec insistance. "J’ai eu très peur qu’il ne s’en aille pas. J’en venais à me demander si un accident n’était pas mieux que la prison à perpète", dit-elle en concluant dans un timide sourire : "On sait qu’il est libre maintenant."

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