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Thien-Ah-Koon avec Vergès : Huguette Bello “bouleversée”

Publie le jeudi 18 mars 2010 par Open-Publishing
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Pour la première fois, elle s’exprime sur les régionales. L’annonce du ralliement d’André-Thien-Ah-Koon avec l’Alliance a été “un choc” pour Huguette Bello.

La députée-maire de Saint-Paul n’a pas oublié l’épisode du 23 mars 1994 : le jour où des manifestantes de l’UFR, dont elle faisait partie, ont été tabassées par des nervis de l’ancien maire du Tampon. “Bouleversée” par ce souvenir, Huguette Bello tâcle Paul Vergès en rappelant “qu’il faut une morale dans les choix politiques”. Elle n’appelle pas à voter pour l’Alliance, mais souhaite la victoire de la gauche dimanche.

Quelle a été votre réaction en apprenant qu’André Thien-Ah-Koon rejoignait la liste de l’Alliance ?

Ça été un petit choc.

A ce point ?

Personne ne peut oublier ce qui s’est passé le 23 mars 1994. J’y étais.

Pour ceux qui l’ignorent. Que s’est-il passé ce jour-là ?

Les faits sont crus, d’une grande cruauté. Des femmes ont été victimes d’une violence inouïe. Et ceux qui ont perpétré cette violence l’ont affichée avec un cynisme extraordinaire. Nous étions une délégation de cent femmes de l’UFR, de l’association femmes actuelles, venues manifester pacifiquement devant la mairie contre des dessins obscènes sur les affiches de campagne de Mme Rose-Marie Degearier. En face, 400 personnes en tenue de combat nous attendaient. La manifestation a dégénéré quand nous avons progressé vers l’Eglise. Il y a eu des blessés, treize dont cinq graves. Des femmes ont été frappées, humiliées dans leur tête, blessées dans leur chair. On était révolté. La Réunion en entier a protesté. Tous les syndicats. Mgr Aubry a parlé de “morale politique”. J’ajoute aujourd’hui qu’il y a une morale dans les choix politiques. (Elle marque une pause, gagnée par l’émotion) Je suis bouleversée par le choix et le souvenir qui en découle. Personne ne peut oublier ce qui s’est passé ce jour-là. Personne. Rien ne peut gommer de tels faits.

Vous en voulez à Paul Vergès d’avoir fait appel à André Thien-Ah-Koon ?

Je n’ai pas du tout été associée à la composition de cette liste. Chacun sait ce qui s’est passé. A chaque liste d’assumer le passé de ses candidats. Mais nous, on ne peut pas oublier. Je suis présidente de l’UFR. J’ai une éthique. J’ai toujours travaillé pour que les hommes et les femmes de ce pays soient respectés. Je reste armée de la même conviction. Il doit y avoir une morale à la politique. Je fais appel à la mémoire des Réunionnais. Des journalistes ont été frappés. Mon fils a été traumatisé. Ça ne me laisse pas insensible de me souvenir que des camarades ont été battus. (Elle ressort les archives qui relatent l’affrontement) Je suis bouleversée. Et il n’y a pas que moi à l’être devant ces images. On peut pardonner, mais doit-on oublier ?

Clairement, vous ne cautionnez pas ce choix de l’Alliance.

Permettez ! Quand on voit que cette liste comporte un autre protagoniste de ce guet-apens, de ce déferlement de violence...

Vous parlez de Jacquet Hoarau (Ndlr : premier adjoint de Tak à l’époque) ?

Oui.

Ce ralliement remet-il en cause vos consignes de vote pour le deuxième tour ?

Vous m’avez déjà entendue appeler à voter pour quelqu’un depuis le début de cette campagne ?

Non, effectivement. Pourquoi ?

Je fais confiance au choix des Réunionnais pour que ce pays ne sombre pas. Car on ne peut rien attendre d’un Didier Robert qui a voté tous les textes qui participent à l’appauvrissement des Réunionnais.

Pour quelle liste appelez-vous à voter dimanche ?

Je n’appelle à rien. Que chaque citoyen vote selon sa conscience. Je souhaite simplement que ce soit une force de progrès qui s’installe à la tête de la Région. Pas plus, ni moins.

Une préférence entre l’Alliance et le PS ?

Chacun votera selon sa conscience, pour ce qu’il estime être le progrès. C’est aussi une question de morale.

Vous appartenez à la famille PCR. Pourquoi vous ne soutenez pas la liste de l’Alliance ? A cause des antagonismes qui perdurent entre la direction du parti et vous-même ?

On ne va pas revenir sur le passé ! Mais je n’accepte pas l’humiliation au nom de tous les miens. Je dis bien au nom de tous les miens. Ceux qui sont visés comprendront que ce que je veux dire. La rupture ne vient pas de moi.

L’absence d’élus communistes saint-paulois sur la liste conduite par Paul Vergès vous reste également en travers de la gorge ?

Je repète, je n’ai pas été consultée sur les choix de cette liste. J’ai appris dans la presse que l’on a fait appel à deux conseillères municipales de ma majorité (Ndlr : Marie-Rose Gras et Rahiba Dubois).

Vous déplorez la méthode ?

Oui, je le déplore. C’est déplorable, convenez. On pense que j’ai un sang de tortue. Non. Je suis forte, oui, mais il y a des choses que je n’accepte pas. Depuis 40 ans, un combat a été mené pour que ce pays soit debout. J’y ai participé, je continue aujourd’hui avec d’autres... (Elle s’attarde à nouveau sur les archives du 23 mars) Quand je revois ça, ça ne peut faire plaisir à personne que Thien-Ah-Koon soit sur la liste de M. Vergès. Que chacun assume ses actes, prenne ses responsabilités. Moi je prends les miennes en appelant les Réunionnais à un vote responsable.

A croire que vous seriez plus encline aujourd’hui à soutenir le PS que l’Alliance ?

Ecoutez, le vote est secret. Je veux simplement faire triompher la gauche, qui a des valeurs.

Avez-vous fait campagne avant le premier tour ?

J’ai tout fait pour bien organiser ces élections et faire en sorte que le vote de chacun soit respecté.

Donc vous n’avez pas fait campagne ?

On a été loyal. On a fait campagne contre la droite, contre la politique désastreuse de Nicolas Sarkozy, représentée par Didier Robert.

La présence d’une femme, Nadia Ramassamy en l’occurrence, à la deuxième place sur la liste de Didier Robert, ça va dans le sens de votre combat pour la parité non ?

Pas de commentaire là-dessus.

Qu’avez-vous pensé de cette campagne des régionales ?

C’est une campagne surréaliste, où l’on a oublié de parler vrai aux Réunionnais, de parler des vrais problèmes : le logement, l’éducation, l’emploi. Comme dirait Chirac, la maison brûle, et l’on regarde ailleurs.

Cela suffit à expliquer la grande démobilisation des électeurs saint-paulois (63% d’abstentionnistes) ?

C’est insuffisant, c’est vrai. C’est pourquoi j’appelle tous les administrés à aller voter dimanche, voter contre la droite la plus dure, la plus réactionnaire de toute l’histoire.

Serez-vous heureuse si Paul Vergès est réélu président de la Région dimanche soir ?

On verra bien dimanche. (Sourire)

Et si c’est Michel Vergoz ?

On verra bien.

2014, l’Assemblée unique ? Ça vous tente ?

Demain est un autre jour. Je ne fais pas de plan sur la comète. J’ai déjà beaucoup de travail avec une commune de 100 000 habitants

Propos recueillis par Vincent Boyer
http://www.clicanoo.com/?page=article&id_article=239600

- 23 mars 1994, au Tampon L’affaire avait fait grand bruit. Venue manifester pacifiquement devant la mairie du Tampon contre des tags pornographiques visant les affiches de Céline Lucilly et Rose-Marie Degearier, candidates aux cantonales, une délégation de l’Union des femmes réunionnaises et de l’association Femmes actuelles de la Réunion avait été violemment repoussée par les hommes de main d’André Thien-Ah-Koon. “Guet-apens”, “la honte”, “André Thien-Ah-Koon fait tabasser” titraient les journaux de l’époque. Bilan : treize blessés dont cinq graves, dix plaintes et neuf interpellations. Qui aurait dit, il y a encore une semaine, que cet événement allait être exhumé avec fracas, à la veille du deuxième tour des régionales...

Messages

  • Encore une fois, Huguette Bello est la seule a avoir un langage démocratique.

    La Réunion n’est pas la France. Esclavage, colonialisme n’ont pas laissé la place à l’apprentissage de la démocratie. Le Pcr qui a été l’expression populaire, a vite été confisqué par P Vergès, contre l’abandon de la lutte pour l’autonomie au profit de la régionalisaton. Sous les auspices de l’OCDE.

    Et avec des Alliances de toutes couleurs et touttes odeurs.

    J’ai mis un carton rouge au premier tour.

    Je voterai pour éliminer l’ump avec le bulletin Vergès et des pincettes.