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Les relais syndicaux de Jean-Luc Mélenchon

25 mars 2012, 19:30, par La Louve

Le Front de Gauche est là pour parachever la tentation syncrétique, en son temps incarnée par Mitterrand, François de son prénom.

Cet article spécifique sur le syndicalisme et le FdG le démontre clairement pour celles et ceux qui n’avaient pas encore compris quelles formidables machines bureaucratiques JLM et ses sbirres ont construit de petits bouts de ci et de ça, depuis 7 ou 8 ans, patiemment, sur les morceaux qui se détachent d’une gauche en pleine décomposition...

Elle est là la grande leçon mitterrandiste dont le FdG est issu : "Patience et longueur de temps (et bombes à retardement savamment placées) font plus que force ni que rage".

Qui mieux qu’un franc-maçon (le syncrétisme universaliste c’est la caractéristique philosophique de la FM) ex-lambertiste pouvait mettre cela en musique ? Qui mieux que le double politique de Marc Blondel (ex-FO) pouvait orchestrer cela ? Personne.

L’absence d’un parti communiste de classe et de masse le rendit possible. Bien aidé -il faut le dire - dans le PCF et le CGT par des ailes "oppositionnelles" qui se réfugièrent, blessées à mort dans l’effroi de leur hégémonie perdue dans "la classe ouvrière", dans le repli sur soi et le sectarisme, alors qu’il fallait, pour rester en vie, profondément se renouveler, et réinventer le communisme pour le 21ème siècle... Plus ces "ailes oppositionnelles" se raidirent dans leur quant-à-soi passéiste, plus elles se sclérosèrent et plus elles se sclérosèrent, plus elles perdirent en force et en crédibilité au sein du PC et de la CGT et plus , en contrepartie elles ouvrirent le champ à la tactique JLM. La politique c’est aussi de la physique, de la dynamique des fluides.

Finalement ce fut du billard (pardon pour le jeu de mots) de développer ensuite très rapidement les vilaines tendances au "syncrétisme de gauche" qui bouillonnaient déjà dans le PCF et aussi dans une partie du NPA.

La majorité des militants, éreintés par des années de déroutes , sinon de débâcles électorales, lassés de se compter par milliers et non plus par millions, dans tel ou tel rassemblement, n’attendaient plus que cela, ils en étaient avides.

Le succès (très relatif finalement, mais on y reviendra) du FdG vient comme une validation d’un raisonnement en réalité complètement faussé mais que l’on ne voit que par des chiffres jetés en pâture hors de tout contenu politique réel.

Alors que la réalité de ces tristes résultats "post-Programme Commun", c’est l’accrochage à la remorque d’un PS "blairisé" d’une part et d’autre part , que tout (ou presque) fut fait ces dix dernières années pour que surtout n’apparaisse pas , sur les ruines du PCF ,de la LCR et de la CGT, une nouvelle organisation pour le communisme en France au 21ème siècle, et que souvent, cela fut fait en partant de ces orgas elles-mêmes (avec le PS à la manœuvre).

Alors que dans ce pays (comme dans d’autres), il n’y eut jamais autant que ces dix dernières années un tel désir de renouveau communiste...

(La réalité c’est que depuis 2005 au moins , il n’était point besoin d’aller chercher un Mélenchon pour construire une force révolutionnaire nouvelle - et bien plus dure à l’égard du K sur le fond politique que ne le sera jamais ce FdG, qui n’est qu’un boute en train, comme on dit dans les haras- . Le "matériel" militant, idéologique, etc.. était là et bien là si "on" avait voulu. Mais voilà, "on" ne voulait pas. Bref.)

Alors cette tentation syncrétique de gauche, dont le Front de Gauche et le "système Mélenchon" sont les figures avancées, qu’est-ce ?

C’est lorsque la bourgeoisie, acculée par la crise, se sert , par le truchement de la petite-bourgeoisie moderne (de la classe moyenne pourrait on dire), de l’inclination naturelle des prolétaires que nous sommes à préférer la vie, le calme, la joie, la concorde et l’amour pour augmenter encore le nombre de chaînes qu’elle nous a déjà mis au cou, en nous faisant miroiter des choses impossibles mais auxquelles beaucoup d’entre nous n’ont pas encore cessé de rêver ou de croire.

C’est également jouer sur un des plus anciens traits dominants de l’humanité : l’instinct grégaire.

La tentation syncrétique, c’est celle qui consiste à feindre d’unir des éléments de classes et de couches sociales différentes, opposées même, des éléments purement idéologiques contradictoires (et qui remis dans leur contexte historique étaient absolument inconciliables), notamment par le biais de la désignation, voire la création, d’un vrai-faux ennemi prétendument "commun" à tous ces éléments.

En l’occurrence, Sarkozy (et parfois on rajoute, l’UMP) sont appelés à jouer ce rôle unifiant depuis le début du quinquennat. C’est bien ce qu’ont tenté ceux qui à gauche, ont CRÉÉ "le sarkozysme". Et c’est ce qui est en train de fonctionner.

La petite-bourgeoisie chargée de cornaquer le prolétariat en colère (quand même) sur des positions "gauchistes" se dotera en plus d’autres "épouvantails", comme "les agences de notation", ou "les financiers", par exemple. Le cri d’amour de JL Mélenchon aux cadres qui selon lui "conduiront le changement" pour le magazine Cadremploi est tout à fait éclairant en ce sens. (on le voit nettement, Mélenchon parle là à ceux dont il se sent réellement proche on le sens il ne triche pas , là il est à l’aise, à son affaire, il surjoue à peine...)

La PB désignera même, s’il le faut, telle "nation" à la vindicte de "telle autre" ("A bas la Chine" !).
Elle évitera évidemment soigneusement de mordre aux jarrets le capitalisme industriel, et même, elle dorlotera toute la fraction locale de cette bourgeoisie, contre la vilaine fraction "mondialisatrice".
Elle évitera d’employer les termes de "propriété privée des moyens de production", d’"expropriation sans indemnisation", elle ne dira pas non plus qu’il faut abolir le salariat.
Elle cachera son aversion pour l’émancipation réelle du prolétariat en proposant le pis-aller des "pôles publics" (en se gardant bien d’ouvrir toute réflexion sur ce qu’est l’Etat bourgeois aujourd’hui, Etat sans lequel il n’y a PAS de "nationalisation" possible...).

Et surtout, elle ne dira pas qu’il faut "détruire l’Etat", au contraire ! Elle dira qu’il faut s’en emparer par les élections, et puis que telle ou telle (dé)nomination changeront la nature de cet Etat. Elle dira que l’État c’est comme un gant, qu’il suffit de changer la main qui est dans ce gant pour que , de gant de fer, ce gant se fasse de velours...Elle dire "6ème république et tout ira mieux".

Elle dira que finalement le syndicalisme rassemblé, c’est possible, c’est bien, c’est valable. Et là c’est ce que l’on retrouve dans cet article, c’est ce qui fait surface là, c’est la mise en ordre sous la bannière de la CES (et donc du K). Pour Mélencho net le FdG tous les syndicats se valent. Ils sont tous beaux et biens. Je n’invente pas il suffit d’écouter ses discours "enflammants". On y dit qu’il n’ y a aucun empêchement à ce que CFDT CGT FO SUD... aillent main dans la main, au contraire, même, "l’essentiel c’est l’unité".

Mieux vaut faire masse que faire classe (elle sous entendra ainsi qu’on ne pourra pas faire masse en faisant classe et qu’il faudrait "choisir").

Cette tentation syncrétique, elle n’est possible en tant que telle qu’en période de crise systémique. C’est même LA réponse favorite, en première intention, de la bourgeoisie aux tensions et aux luttes de classe que ne manque jamais de déclencher une véritable crise systémique du Capitalisme comme celle que nous connaissons.

On peut l’appeler "collaboration de classe", ou "fordisme", ou "unité nationale".

Dans sa forme aiguë, et mise en œuvre par la bourgeoisie soi-même quand ça sent trop "le brûlé", ce syncrétisme s’appelle également "fascisme". Mussolini fut le premier à mettre en oeuvre ce syncrétisme contre révolutionnaire, à l’opposé de ce que réclame le communisme, qui prétend mettre en cohabitation "carne è pesce" la viande et le poisson. Il faut reprendre les discours de Mussolini au début des années 20 pour comprendre ce qu’est le syncrétisme. On peut fustiger les banques et en même temps les flatter. On peut bastonner l’église et en même temps l’amadouer.

Le syncrétisme , c’est ce que fait en permanence le système Mélenchon à qui je reconnais un immense talent : celui de concilier des choses inconciliables pour repousser l’affrontement de contradictions évidentes. Mélenchon c’est l’art du compromis sous maquillage radical. Personne ne fait cela comme lui, avec cet art consommé de la contorsion intellectuelle et de la torsion historique, en vieux roué du républicanisme (qui est à la gauche ce que le centrisme est à la droite).

Se défaire de cette glue idéologique suppose des qualités intellectuelles que peu de cadres ont désormais, dans ce maelström (et ceux qui en disposeraient ne s’en servent pas, par opportunisme)....

Des exemples ? Au FdG, on valorise du matin au soir le collectif, l’organisation... mais on fait tout pour qu’elle n’existe pas (le Front de gauche n’est ni un parti ni un mouvement et tout est fait pour qu’il n’ y ait aucune délégation au niveau local -i l n’y a pas de "réunions de sections du FdG" qui pourraient permettre une lutte idéologique interne - l’épicentre de l’appareil FdG est à la République au siège du PG).

On fait de la Commune de Paris une entreprise républicaine au sens gambettiste du terme, tout en mettant en avant Louise Michel (ça mange pas de pain) que l’on rhabille par Victor Hugo (ça tombe bien, la légende veut que Louise courait après Victor...) et on fait abstraction de l’existence dans La Commune, de différentes tendances qui ne cohabitèrent parfois que dans leur lutte contre Thiers Napoléon III et contre l’invasion Prussienne....en faisant croire que dans cette Commune glorieuse et héroïque mais sanglante, tout se valait, et tout était univoque...

On parle de l’émancipation de la classe ouvrière ici, mais là, on promeut que ce sont, bien sûr, les cadres doivent conduire le changement.

Etc...

La tentation syncrétique, c’est le renforcement, par l’amalgame dans une organisation unique (et prétendument UNITAIRE) type "social-démocrate", d’éléments du prolétariat, de la petite-bourgeoisie, voire, du petit capital, de la fausse-classe qu’agite la bourgeoisie depuis des siècles, qu’on l’appelle "peuple" ou "nation", (ou les deux).

C’est celle qui consiste à masquer un système plutôt qu’à le dévoiler, alors même que l’époque serait au dévoilement.

Fausse classe, faux ensemble, faussement homogène, au sein duquel cohabitent des classes et des intérêts antagonistes, qui n’ont que peu d’objectifs communs dès lors que tombent les blablas destinés à masquer la réalité de classeS de l’ensemble en question.

Pour l’instant, nous en sommes là.

Les "mine vagante" posées depuis plusieurs années via notamment les "recompositions syndicales" (notamment en IdF et dans les appareils au niveau national) dans les syndicats sont en train de faire effet et commencent à exploser.

Ne pas analyser le prétendu effet FdG en tenant compte de tout ceci est une erreur stratégique. De mon point de vue, l’absence de combat syndical contre cette tentation syncrétique au service de la social démocratie et donc, du Capital, est une catastrophe qui va se payer cher DANS les syndicats.

Et je crains que les "relais syndicaux " de Mélenchon décrits dans cet article se transforment en véritables boulets quand il faudra attaquer les luttes radicales (et de classe) contre le patronat après ces comédies électorales (tous les gens sérieux ont bien compris que nous sommes partis pour une glaciation générale jusqu’à septembre au moins si le PS ou le FDG -y’en a qui le croient donc j’émets l’hypothèse - gagnent les élections)...