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Tribunal Européen des Droits Humains, Amnesty International...dénoncent l’Etat espagnol !

16 mars 2018, 23:54, par Antoine (Montpellier)

Oui, cette position d’Achcar tient compte d’une donnée essentielle qui fait rupture, mais seulement partiellement, avec ce qui s’est passé avec l’aide internationale à la République espagnole : présence sur le terrain de Brigades Internationales mais politique de non-intervention des "démocraties" européennes et donc acceptation, par elles, du déséquilibre militaire au détriment de la République espagnole ! Je pose au passage la question : est-ce que l’appel des républicains espagnols à ce que ces démocraties (capitalistes) et pas seulement le Front Populaire français apportent une aide militaire à la République était une erreur monumentale ?

Retour sur Achcar et les révolutions démocratiques de 2011 : la différence avec l’Espagne, c’est l’incapacité du mouvement ouvrier et démocratique international à venir aider directement ces révolutions. Mais il y a identité avec la situation espagnole dans l’appel à l’aide militaire internationale : le fait qu’en Espagne elle ait été refusée alors qu’en Syrie, pour ne prendre que ce qui a cours actuellement, elle ait été acceptée par une partie de "l’international", les Etats Unis, ne change rien au fait que si une démarche d’appel était juste en 36-39 en Europe, elle n’est pas fausse en 2018. Ou alors, il faut expliquer pourquoi.

Je note, au demeurant, que l’appui US, inexistant aujourd’hui sur la Ghouta, n’a jamais permis aux révolutionnaires d’obtenir la seule arme qui aurait fait plier Assad, l’arme antiaérienne ! Pourquoi ? Parce que, contrairement à la légende entretenue par certains, les Etats-Unis sont d’accord sur un point essentiel avec la Russie : ne pas faire tomber le régime baassiste. La divergence, secondaire, c’est que les uns voulaient (aujourd’hui ce n’est même plus le cas) faire tomber Assad pour sauver le régime (Etats-Unis) alors que les autres (les Russes) voulaient sauver le régime en gardant Assad ! Cela veut dire que les oppositions entre Russie et Etats-Unis devraient commencer par voir où elles portent. Achcar évoque tout cela, citations à l’appui, dans tous ces écrits.

Et donc l’appel à aider les insurgés, y compris du côté des US : eh oui, les Kurdes montrent que cela est possible, en jouant des contradictions de la géopolitique desdits US. L’appui militaire aux Kurdes se fait sur la base d’une hégémonie politique des Kurdes sur le terrain des combats. Plus clairement dit : se faire aider par les Etats-Unis n’implique pas mécaniquement devenir le suppôt des US. Je ne crois pas, mais peut-être je me trompe, que tu penses que les Kurdes sont les agents des Américains par le seul fait de recevoir leurs aides, c’est probablement plus compliqué que ça, non ? Quant à savoir si accepter l’aide des Russes (et des intégristes iraniens !) d’un dictateur comme Poutine à un personnage comme Assad c’est moins pire qu’accepter l’aide US aux Kurdes, la question pourrait être posée. Car il n’y a pas les purs anti-impérialistes, acceptant ou soutenant les Ruses-Iraniens-Assadiens d’un côté et les sales collabos (les Kurdes ?) des impérialistes US de l’autre...

Enfin la position de ceux qui, négligeant ces subtilités sur la géopolitique US, prétendent que ce qui se joue en Syrie est une offensive américaine pour faire tomber Assad, devraient lire ceci : "Revenons sur l’idée avancée selon laquelle l’Occident chercherait à renouer avec un récit acculant Bachar el Assad dans le but de préparer une intervention militaire. Monsieur el Khal peut-il nous donner son avis d’expert sur cette question : si la diffusion de ces images sert à préparer les esprits en vue d’une attaque, pourquoi l’Occident n’est-il pas intervenu militairement quand il en a eu l’occasion, à l’été 2013, lorsque le régime syrien a bombardé la population de la Ghouta au gaz sarin ? Pourquoi les USA, les Anglais et les Français n’ont-ils pas saisi l’opportunité en or de cette intervention offerte par le régime ayant dépassé la ligne rouge fixée par Barack Obama — intervention qui se serait faite avec l’approbation de toute l’opinion internationale à ce moment ? Pourquoi encore, alors qu’il y a un an les médias français tenaient le même discours sur Bachar el Assad qui dévastait Alep, la France n’est-elle donc pas intervenue ? Cela fait-il 7 longues années que « les puissances occidentales » nous préparent psychologiquement à une intervention en Syrie qui ne vient toujours pas ? Car pour l’instant les puissances occidentales brillent surtout par leur abandon total de la cause du peuple syrien. Un silence tacite, complice et du coup coupable de la communauté internationale." (lire ici)

Pour finir : ne pas aider quelqu’un dans un tel conflit, c’est aider quelqu’un d’autre. En l’occurrence à dénoncer la menace US pour rejeter que des résistants à la dictature puissent demander l’aide US, cela revient à laisser que la Russie aide le dictateur syrien alors que celui-ci est tout sauf un progressiste (un dictateur progressiste est un oxymore obscène) mais, en quelque sorte, pire, il est un agent de l’économie libérale, en somme capitaliste, imposée à son pays qui plus est dans une logique clanique qu’il serait fort dommageable de soutenir au nom de l’intérêt des peuples. Quant aux djihadistes, aujourd’hui en déroute, il y aurait beaucoup à dire sur ce à quoi ils ont servi en Syrie pour sauver la mise à Assad avant que, très vite, comme cela s’est fait ailleurs avec d’autres, ils se retournent contre lui !