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De l’homoparentalité et autres monstres

5 avril 2007, 15:03

Cher Monsieur,

Votre réflexion soulève une réaction mitigée entre le désaccord total et l’impression désagréable que vous n’avez vraiment rien compris, ou alors que votre intolérance se cache derrière un refus clair et net de toute empathie pour des gens qui, au fond, vous restent incompréhensibles car trop différents de vous. Cela laisse donc penser que vous êtes sinon homophobe, en tout cas un tantinet réactionnaire. Les préjugés ont la vie dure, surtout quand il sont inconscients et de bonne foi.
Tout d’abord, il n’est pas innocent, ou alors c’est que vous êtes très maladroit, d’user du terme de « monstre » en parlant d’homosexualité. Cette approche des formes de sexualité « déviantes », « perverties » ou « non-naturelles » n’est pas nouvelle, et la tératogenèse soupçonnée de l’affectivité hors la norme hétérocentrée et patriarcale est une vieille sauce moraliste et judéo-chrétienne qu’on nous a suffisamment servie pour que nous la reconnaissions aussitôt entendue.
Mais s’il est en effet juste de dire que d’un point de vue épistémologique et sémantique le concept d’ « homoparentalité » est une sorte de « monstre » idéologique, ce n’est pas parce qu’il recouvre un rapport irréel (ou pourquoi pas « antinaturel » tant que vous y êtes ?) entre les parents et les enfants, mais parce qu’il incorpore dans l’esprit des lecteurs l’idée absurde qu’il existe une différence entre une parentalité « normale » et d’autres formes exotiques de parentalités diverses. Et ce alors qu’on peut tout à fait affirmer aujourd’hui qu’il n’existe qu’une seule forme de parentalité, et que les parents soient homo ou hétéro ne change rien aux relations étroites qui se lient entre un enfant et ses parents. Il convient donc de chasser ce néologisme stupide et pompeux de nos registres et de n’utiliser de fait que le terme qui recouvre cette réalité : LA parentalité. D’ailleurs, combien d’entre nous restent encore pantois de voir la différence de traitement dans la réaction d’un auditoire lambda (ami-es, famille, collègues, …) face à l’annonce d’un désir d’enfant en fonction de l’orientation sexuelle de celle ou celui qui l’exprime ? Alors qu’un parent hétérosexuel reçoit maintes félicitations, encouragements ou conseils, l’homosexuel doit s’adapter à l’incrédulité, voire au mépris, et se sent souvent forcé de se justifier. Et sans parler des trans qui subissent encore plus d’affects négatifs sur la question (et que des gens comme vous doivent de toute façon considérer comme des « monstres », pas vrai ?). Cela doit cesser, et pour cela l’égalité pleine et entière des droits en la matière n’est pas qu’une solution symbolique, elle possède bien une portée réelle de prévention contre la peur et contre la haine.
Enfin, et pour être moins plumitif que vous, nous irons droit au but : qu’est ce qui vous permet d’affirmer péremptoirement que « deux personnes de même sexe [ne peuvent se] donne[r] d’enfants » ? Puisque vous voulez parler de « réalité biologique », et que vous désirez à dessein rester au niveau des pâquerettes idéologiques, nous n’entrerons pas dans une polémique sur la différence entre le biologique et le social. Mais il est clair que cette affirmation cuistre est tout à fait attribuable à l’homophobie. Car s’il est bien une chose que ne supportent pas les homophobes, c’est que les homosexuel-les, hommes comme femmes, ne sont pas « biologiquement » stériles. Nous en voulons pour preuve les débats sur le PASC en 1997 à l’assemblée pendant lesquels des parlementaires bien pensant, dont M. Lelouch, ont cru de bon ton d’hurler « stérilisez-les » !
Nous savons bien qu’on vous dérange. Pendant des millénaires nous nous sommes tu et avons fait profil bas. Cette époque est révolue, pour l’instant, et nous comptons bien ne plus jamais la connaître. C’est pour cela que vous devez être bien sûr d’une chose : tant que des gens comme vous vociféreront contre nos droits légitimes à une égalité pleine et entière, et malgré les subterfuges que vous utiliserez, vous trouverez toujours un monstre ou deux sur votre route.

le Collectif LGBT du PCF