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vive la rumeur !

Publie le dimanche 11 avril 2010 par Open-Publishing
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S’il y a une chose que même le capitalisme ne peut réussir à vaincre, c’est bien la rumeur. A partir du moment où les êtres humains sont doués de parole, et qu’ils se rencontrent, il y aura toujours des rumeurs… Petites ou grandes, les informations contenues dans ces rumeurs apprennent toujours quelque chose à ceux qui les entendent, mais ce n’est peut-être pas là le plus important. Le plus important, c’est justement ce que la rumeur nous apprend non pas sur les autres, mais sur nous-mêmes, nous qui les colportons.

Tout d’abord, elle rend bien compte de l’appétit de communication du genre humain : que ce soit durant la guerre ou sous la censure, les hommes conservent leur pouvoir d’imagination, ainsi que l’illusion de l’importance de leur personne. Que la rumeur soit inventée, infondée, partiellement ou totalement vraie, les mots avec lesquels elle est diffusée sont capables de la rendre à la fois plus crédible et plus complexe, ou plus belle ou plus vendeuse. Tous les textes fondateurs des mythes ne seraient-ils pas d’ailleurs l’aboutissement de l’amplification de la rumeur ?

Car le nombre de fois qu’elle est reprise et répétée compte aussi, ainsi que la légitimité de celui qui la colporte. Une rumeur qui s’installe dans le temps se transforme, et ce n’est pas toujours celle qui s’est rapprochée le plus près de la réalité qui aura raison pour l’Histoire. Une chose est sûre cependant, c’est que le « transmetteur » de la rumeur possède un pouvoir de mystification auprès de celui à qui il la fait découvrir : il est , au moins l’espace d’un instant, « celui qui sait », et cela flatte son ego.

Ensuite il faut constater la force de la rumeur : capable de faire tomber un gouvernement, de créer des mouvements de masses considérables et bien d’autres choses encore, elle est source de l’Histoire en même temps qu’elle participe à l’Histoire. Qu’elle soit vraie ou pas, la rumeur qui est crue vaut plus que la réalité qui ne semble pas vraie. Elle devrait nous rendre conscient de sa dangerosité potentielle, ainsi de ce qu’elle nous montre de notre crédulité. Mais nous en sommes friands, et il n’est pas envisageable de ne plus ni les produire, ni les colporter.

La raison de cette force réside dans la faculté de persistance que possède la rumeur, qui si elle grossit se gonfle jusqu’à former une sorte de vérité dans l’opinion publique, et qui par ce biais se doit d’être ou bien démontée par des faits, ou bien risque d’être validée même par le simple silence face à son expansion. Ce phénomène devrait nous interroger sur la puissance de ce qu’on appelle « l’opinion publique », ou « force du nombre » : en effet, c’est bien le rapport entre la capacité de l’émetteur et le nombre qui détermine la valeur de la rumeur, et fonde sa validité. Cela signifie que la rumeur, dans certaines conditions, dépasse la force des chiffres, du comportement rationnel, et donc que les mots peuvent avoir plus de pouvoir sur le comportement des hommes que l’appât du gain.

Quoique nous fassions, nous restons des êtres sensibles, et les relations que nous entretenons entre nous troublent sans cesse la volonté de perfection capitaliste qui ne cherche qu’une optimisation mathématique. Comme s’il était besoin de preuves, les échecs du capitalisme montrent bien le gouffre qui séparent les comportements désirés de ce système face à la réalité de ces derniers.

Et oui, « il n’y a pas de fumée sans feu ». Voilà une « sagesse populaire » qui résume bien l’imperfection humaine, capable de se fier à cette citation plutôt qu’aux résultats d’une entreprise, ou au démenti de la victime.
La bourse par exemple, qui représente pourtant la quintessence du chiffre, ne fonctionne en réalité que sur la confiance en les rumeurs qui proviennent d’informations plus ou moins certaines, ou par rapport aux résultats chiffrés d’indices de confiance assez subjectifs, même pour des mathématiciens.
Une rumeur de faillite peut la provoquer, comme la rumeur d’une trahison peut rompre un couple peu solide. Et les paroles censées inspirer la confiance peuvent aussi être l’origine de la rumeur du sauvetage de la Grèce, ce qui pourrait avoir un véritable effet si elle est assez crédible, ou l’effet inverse si elle ne l’est pas assez.

Mais cette absence « de fumée sans feu », qui évoque la force de la rumeur, lui donne un caractère communément accepté d’origine sérieuse, alors qu’il ne devrait pas en être ainsi. Il existe des rumeurs complètement infondées, inventées de toutes pièces, mais qui peuvent quand même avoir des conséquences réelles sur les comportements humains. En réalité on se fiche de savoir si l’origine de la rumeur est véritable ou non : le véritable enjeu est de savoir si elle est assez crédible ou pas. Ensuite, les conséquences de cette rumeur sont, elles, bien réels, et c’est bien cela qui compte. “La fumée”, cela peut être l’origine du feu, en ce sens que cela peut être la rumeur qui engendre des réactions, réactions qui auront elles-aussi des répercussions véritables. Qu’il s’agisse de rumeurs concernant des hommes importants, ou des institutions financières, elles ont un poids réel et conséquent, et peuvent sinon détruire le système dans son ensemble, au moins le mettre à mal à peu de frais…

Face à ce constat, je ne peux donc que me réjouir de la persistance des rumeurs, et attendre de leur incroyable potentiel effectif les relais médiatiques suffisants pour faire tomber les murs qui nous oppressent… car quand on y pense, la rumeur n’est pas un acte délictueux, mais seulement une sorte d’interprétation de faits (réels ou pas) capable d’influer sur le cours des évènements ; tout le monde peut se tromper ! Et le jour où la rumeur qu’un autre monde est réellement possible prendra dans l’opinion publique, qu’elle sera assez puissante pour entraîner sa réalisation par la confiance qu’elle a engendré, alors il se pourrait que de rumeur elle devienne réalité. C’est tout ce que je nous souhaite

Caleb Irri

http://www.calebirri.unblog.fr

Messages

  • la realité :

    Quand le FMI emprunte à la Suède ...

    Après l’arroseur arrosé, voici le prêteur qui emprunte ...

    Alors que le monde entier a les yeux rivés vers la Grèce et que le Fonds Monétaire International pourrait avoir une large place dans le plan de financement des prêts dont Athènes pourrait disposer, le FMI a annoncé vendredi avoir signé un accord lui permettant .... d’emprunter 2,5 milliards d’euros auprès de la banque centrale de Suède.

    Cet accord intervient dans le cadre de l’engagement de l’Union européenne à contribuer à l’augmentation des ressources que le FMI est susceptible de prêter.
    L’UE avait initialement promis 75 milliards d’euros, mais en septembre 2009, ce montant a été porté à 125 milliards.

    Rappelons par ailleurs qu’en avril 2009, les pays membres du G20 s’étaient engagé à tripler les ressources du Fonds pour lui permettre de venir en aide plus efficacement aux Etats membres en difficulté.

    A l’heure actuelle, 18 états membres du FMI, dont 12 pays de l’UE, ont signé des accords soit pour prêter directement à l’institution, soit pour lui acheter des obligations.

    D’après les dernières données disponibles, le FMI avait au 1er avril 465 milliards de dollars de ressources disponibles pour prêter aux États dits "à revenus moyens et élevés", dont plus de la moitié prêtées par les États membres.
    En ce qui concerne la Suède, précisons que le Produit intérieur brut (PIB) à prix courants devrait croître cette année de 1,8% avant de progresser de 2,0% en 2011, si l’on en croit la Danske Bank, le gouvernement suédois tablant quant à lui sur un taux de 2,4% cette année et de 3,8% l’an prochain.

    Après avoir été durement frappée par la crise fin 2008 et en 2009, la Suède devrait rebondir assez rapidement en 2010 et 2011, les analystes estimant que des finances publiques saines et le secteur des services permettront de relever le défi.

    http://www.leblogfinance.com/2010/04/quand-le-fmi-emprunte-a-la-suede.html