Accueil > 1965-2015 : 50 années de silence sur un massacre …

1965-2015 : 50 années de silence sur un massacre …

par ROCML

Publie le mardi 22 septembre 2015 par ROCML - Open-Publishing
2 commentaires

1965-2015 : 50 années de silence sur un massacre …
Indonésie 1965
pour la mémoire, la Justice et les réparations
Il y a 50 ans, le 30 septembre 1965 un massacre politique débutait en Indonésie. Plus d’un million de membres ou sympathisants du Parti Communiste Indonésien étaient assassinés, jetés dans des fosses communes, torturés, violées et plusieurs dizaines de milliers emprisonnés sans jugement dans des camps de concentration. Les conséquences des massacres de 1965 et 1966 ont engendré des blessures pour plusieurs générations. Les disparitions, les enlèvements, la torture, l’ostracisme envers des familles entières, ont été les méthodes de gouvernement d’un régime qui a ensuite pillé les ressources nationales au profit de compagnies étrangères.
Ce massacre, qui se déroule au moment même où commence l’intervention américaine au Vietnam, a été commandité par la CIA et exécuté par les militaires indonésiens et des religieux dont les propriétés étaient menacées par la mise en œuvre d’une véritable réforme agraire impulsée par le PCI qui, fort de ses 3 millions de membres et des 16,6% aux dernières élections était entré dans le gouvernement de Soekarno initiateur du mouvement des « Non Alignés » lors de la conférence de Bandung en 1955.
Aujourd’hui, 50 ans après il est grand temps de demander justice et réparation. Car de même que l’on tua des gens parce qu’ils étaient arméniens, juifs ou tutsis, on tua en Indonésie pour la seule raison d’être membre ou sympathisant d’un parti politique ou d’une organisation qui lui est liée. Il est temps de faire la lumière sur un des pires massacres de l’histoire du XXème siècle passé sous silence par les médias et de rendre justice aux victimes de ce crime contre l’humanité.
Pour commémorer le souvenir de ce massacre et en hommage aux victimes de ce génocide, le Réseau Indonésie et le réseau Sortir du Colonialisme appellent à un grand rassemblement
le 30 septembre à 18 h 30 à la Fontaine des Innocents,
Métro Les Halles ou Châtelet

Premiers signataires : Réseau Indonésie, Réseau Sortir du colonialisme, MRAP, AFASPA, ACCA, Cedetim, collectif Fathi Koumba, Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP), La Maison du Tamil Eelam, CDISCOM (Comores)
NPA, Pôle de Renaissance communiste de France, Parti Révolutionnaire « Communistes », ROC ML,

Messages

  • Un film récent a jeté une lumière crue sur ces évènements.
    Dans The Act of Killing, le tueur Anwar Congo rejoue les massacres des communistes qu’il a lui-même dirigés en 1965 et en 1966 sur l’île de Sumatra. Ce film a bouleversé les spectateurs du Festival du cinéma de Toronto. Pourra-t-il changer la vision que les Indonésiens ont de ces années noires de leur histoire ?
    Six mois avant l’interdiction officielle du parti communiste indonésien (PKI) en 1965, des centaines de milliers d’Indonésiens avaient déjà été assassinés, accusés d’être des sympathisants du PKI. En moins d’un an, le nombre de victimes approchait le million.


    La souffrance des familles de ces victimes dure depuis lors. Ce qui reste obscur, c’est la manière dont ces massacres de 1965 et 1966 ont été perçus par ceux qui les ont commis. Et où et comment vivent aujourd’hui ces tueurs. Pour la première fois depuis ces événements, ceux-ci apparaissent sur grand écran en tant qu’acteurs principaux d’un long-métrage dans lequel ils se mettent en scène. The Act of Killing [L’acte de tuer] lève le voile sur les témoignages francs et détaillés d’un certain nombre de mafieux qui ont dirigé le massacre de plus de 10 000 personnes prétendument communistes à Sumatera Utara [province au nord de Sumatra]. Ces tueurs témoignent librement, en racontant des histoires, en mimant des scènes, en riant, chantant et dansant.



    The Act of Killing raconte notamment la vie d’Anwar Congo, un mafieux de Medan qui est devenu l’assassin principal des membres du Parti communiste de cette ville en 1965 et en 1966. Les spectateurs assistent, effarés, à la manière dont Anwar raconte sa cruauté sans fard ni état d’âme. La rencontre entre le réalisateur américain, Joshua Oppenheimer, et Anwar Congo résulte du travail précédent mené par le documentariste lors de son premier voyage à Sumatra en 2001. A cette époque, il tournait un documentaire sur les ouvriers des plantations de palmiers à huile dans la région de Matapao [dans le nord de l’île de Sumatra]. “Je voulais montrer les problèmes de ces ouvriers ainsi que leurs difficultés à former un syndicat d’ouvriers”, explique Oppenheimer.

    

Pendant le tournage, il apprend une chose étonnante : ces ouvriers vivent aux côtés des hommes qui ont assassiné de nombreux travailleurs du Parti communiste indonésien en 1965 et en 1966. “Leurs voisins étaient des bouchers qui avaient tué leur père, leur oncle”, précise Oppenheimer. Un jour, le réalisateur trouve l’occasion de discuter avec un de ces tueurs qui lui raconte, dans les moindres détails, comment il a liquidé un membre du syndicat ouvrier affilié au Parti communiste. “Imaginez un peu, il a raconté cet acte effroyable devant sa petite-fille âgée de neuf ans”, explique Oppenheimer sidéré par le franc-parler de ce tueur. 



    Le “bataillon des grenouilles”, un groupe de tueurs


    Après avoir terminé son documentaire, il rentre en Angleterre, mais décide de revenir à Sumatra pour tourner un film sur ces tueurs. En 2005, Oppenheimer fait la connaissance d’Anwar Congo. Anwar est connu comme le mafieux des cinémas, car autrefois il régnait sur le marché noir des tickets de tous les cinémas de Medan. Durant son enquête, le réalisateur découvre que les membres des bataillons de tueurs de Medan en 1965 étaient recrutés pour la plupart parmi les mafieux des cinémas, tout simplement parce qu’ils haïssaient les communistes, qui appelaient au boycott des films américains très en vogue à l’époque à Medan.



    Il y avait même un fan-club de James Dean, avec de nombreux membres qui s’habillaient comme l’acteur américain. Le boycott des films américains signifiait une chute des revenus pour les mafieux des salles obscures. Oppenheimer fait aussi la connaissance d’Adi Zulkadry, un compagnon de débauche d’Anwar depuis l’adolescence. Adi, Anwar et d’autres compères ont procédé aux arrestations, enlèvements, interrogatoires, tortures, assassinats des communistes de Medan, et ont été jusqu’à l’élimination des corps de leurs victimes. Ils formaient ensemble le “bataillon des grenouilles”, un célèbre groupe de tueurs qui semait la terreur.

    

Oppenheimer a choisi un procédé courageux de mise en scène. Les tueurs de 1965 ne sont pas juste une source narrative ni des objets devant la caméra comme dans la plupart des films sur cette thématique. Le réalisateur les invite à s’impliquer directement dans la réalisation même du film, à inventer eux-mêmes le scénario au jour le jour, mélange de réalité et de fiction, basé sur leurs souvenirs, leur imaginaire, leurs chimères et leurs commentaires d’aujourd’hui sur les atrocités dont ils ont été les auteurs dans le passé. Cette méthode n’est pas une simple lubie d’artiste, Oppenheimer l’a éprouvée avec son œuvre précédente, The Globalisation Tapes, son film sur les ouvriers agricoles dans les plantations de Sumatra. Il donne aux tueurs toute liberté dans l’écriture du scénario, dans le choix de leur rôle et des acteurs secondaires, dans la musique, le décor, les costumes et le cadrage. 


    “Les sadiques, c’était nous”


    The Act of Killing est un documentaire sur le tournage d’un film de fiction par les tueurs de 1965, sur leurs propres crimes qui, sont, eux, bien réels. On les voit s’affairer à chercher des acteurs, répéter les scènes et même discuter de l’impact qu’aura le film sur les Indonésiens et le reste du monde. On en voit un qui dit : “Les sadiques, ce n’était pas les communistes… Les sadiques, c’était nous, ha, ha, ha !…” Un fantasme absurde de l’un des tueurs met en scène le réveil des fantômes des victimes de 1965. Ils vont à sa rencontre dans un lieu charmant, non pas pour le maudire ni pour se venger, mais pour le remercier et lui remettre une médaille, parce que les massacres de 1965 ont emporté leur âme au paradis ! Aux dires du tueur, dans sa vraie vie, les fantômes des victimes lui apparaissent dans d’effroyables cauchemars. Toutes sortes de situations invraisemblables sont ainsi filmées. Ainsi, dans une des scènes, un des assassins de 1965 joue le rôle de la victime qu’il a lui-même torturée et tuée quarante-sept ans auparavant.


    Ce film n’est pas seulement le récit d’un massacre vieux de quarante-sept ans. Plusieurs scènes tournées montrent les relations intimes qu’entretiennent les tueurs de 1965 avec les fonctionnaires et les politiciens de l’après-Ordre nouveau [nom qui était donné à l’administration du président Suharto, renversé en 1998], au niveau aussi bien national [Parlement, président, ministre] que régional [gouverneur, presse, télévision d’Etat locale]. Ce film témoigne de la continuité propre et lisse de la pratique du crime dans le domaine de la politique, de la justice et de l’économie de nos jours, un demi-siècle après l’extermination des communistes. Cette maladie chronique dont souffre ce pays s’est tellement répandue qu’elle relève aujourd’hui de la responsabilité de toute notre nation.Les tueurs se réclamaient de leur foi en ’un dieu unique’ et en ’son prophète’,pour éliminer leurs voisins qui ne croyaient pas en ses balivernes.L’Histoire se déroule ainsi depuis tant de siècles que d’habiter en France où il y a un demi millénaire les guerres de religion firent tant de morts,nous fait réfléchir.C’est humain !

  • Après les massacres, les révolutionnaires indonésiens ont opposé une résistance armée dans le centre et l’est de Java, aux Kalimantan, aux Sulawesi. A la même époque, il y avait des luttes armées en Birmanie, Malaisie, Thaïlande. La lutte armée continue aux Philippines mais en Indonésie et dans les autres pays du Sud-Est Asiatique, on ne sait pas si les partis communistes existent toujours ou s’ils se sont organisés pour d’autres formes de lutte.