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Apprenez la langue de l’adversaire
Publie le mardi 19 juillet 2016 par Open-Publishing3 commentaires
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Un cours d’Autodéfense intellectuelle pour l’été [VIDÉO 08’58 + entretien RADIO 59’30]
"Les mots peuvent être comme de minuscules doses d’arsenic, on les avale sans y prendre garde, ils semblent ne faire aucun effet et voila qu’après quelques temps l’effet toxique se fait sentir". Le philologue Victor KLEMPERER a montré comment le système nazi avait engendré un langage qui a contaminé insidieusement les esprits et a réussi à imposer l’idéologie totalitaire comme une évidence naturelle. Ce qu’il appelait "l’adoption mécanique de l’idéologie par les mots". Car le langage est l’outil de la pensée, celui qui contrôle le langage contrôle la pensée et donc l’opinion. Cette fausse monnaie langagière est produite et répandue par les communicants politiques et par les médias mais sans douleur et sans fracas. Aussi est-il important à tout âge d’apprendre à déjouer ces pièges quotidiens répandus et diffusés comme un invisible poison dans l’air que l’on respire.
Quelques exemples dans le langage néo-libéral qui s’est imposé depuis une trentaine d’années :
– Décideurs : classes dominantes
– Compétitivité : dumping social
– Courage de réformer : détruire le droit social
– Grogne sociale : grève
– Pression fiscale : impôts
etc.
JE PEUX DORMIR , MON JOURNAL PENSE POUR MOI
Jadis dans la bonne bourgeoisie de province, lors du sacro-saint déjeuner du dimanche, on commentait le sermon entendu à la messe de onze heures. Oh, ça ne faisait pas débat, on appréciait, on approuvait. Parfois d’ailleurs le curé était invité à déjeuner, savourant une onctueuse cuisse de poulet. Puis on passait à autre chose, chacun vaquait à ses affaires et à ses intrigues. "Tu es mon berger, ô Seigneur", disait un cantique. Par conséquent nous sommes les moutons ; notre curé nous conduit et nous le suivons. Longtemps les éditocrates ont remplacé le curé du dimanche. Je peux dormir tranquille, mon journal pense pour moi. Aujourd’hui, de plus en plus connectés, de plus en plus mis "au courant" par l’info en continue, nous suivons en "temps réel" les épisodes du feuilleton minute par minute. Mais quel sens ce chaos peut-il bien avoir ? Pourquoi ? Comment ? Que dois-je penser ? Qui sont les méchants et les gentils ? Des experts médiatiques me le disent, des savants spécialistes me fournissent la réponse. Je puis retourner à mes affaires et à mes intrigues, je peux dormir, les élites pensent pour moi. Contre cette soumission, il faut partout donner des cours "d’auto défense intellectuelle" selon l’idée de Noam Chomsky, développer l’esprit critique, le goût de la contestation, non pas remplacer une doctrine par une autre mais penser par soi-même, apprendre l’autonomie de penser. Pas facile quand la foule unanime et anonyme appelle au lynchage du suspect, pas commode quand le premier ministre français sans être contesté lance cette stupidité historique " Il ne peut y avoir aucune explication qui vaille, car expliquer c’est déjà vouloir excuser" Mais la résistance s’installe peu à peu, penser hors des clous, construire d’autres projets, dessiner un autre cadre. Le bouquin de Besancenot encourage cette auto-défense qui est la principale raison d’être de LÀ-BAS !
Messages
1. Apprenez la langue de l’adversaire, 20 juillet 2016, 16:31
Un des mieux : "Plan de Sauvegarde de l’Emploi = licenciements de masse".
2. Apprenez la langue de l’adversaire, 20 juillet 2016, 21:42
Et encore :
Etat de droit/ Démocratie = dictature des marchés
La démocratie est sauve = le dictateur liquide l’opposition (Erdogan par ex)
La police est intervenue après avoir essuyé des provocations et des jets de pierres =
la police a piégé, matraqué, tabassé des manifestants
3. Apprenez la langue de l’adversaire, 21 juillet 2016, 23:25, par albarot
je n’ai encore entendu cette émission qui traite du langage mais j’avais noté depuis quelque temps quelques citations marquantes.
S. Freud : on cède d’abord sur les mots et puis peu à peu sur les choses
en 1968 Marcus : On est en train de changer le vocabulaire.
clash de Gainsbourg au neuneu Guy Béart à Apostrophe : "on pense avec mots et pas le contraire"
Philip K. Dick : l’instrument de base de la manipulation de la réalité est la manipulation des mots
G. Orwell, dans son roman 1984, inventeur de la nov-langue= instrument de la domination de la pensée
un personnage : "pas besoin d’une dictature pour dominer un peuple, la langue et le vocabulaire suffisent".
un autre personnage évoque une future édition du dictionnaire officiel-le Smith- qui ne fera plus que 2 cm d’épaisseur, plein de mots inutiles, subtils ou suspects seront supprimés (un sketch de "made in groland"reprend une scène du film 1984 : le présentateur explique aussi que le dico grolandais sera allégé des mots petit déjeuner, déjeuner, diner, souper etc et seront remplacés par "manger":le manger du midi, du soir... )
A. Camus : mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde.
dans le monde du travail c’est particulièrement grave quand maintenant n’importe quel salarié fait l’usage du terme "collaborateur" au lieu de "collègue" ou plus simplement "personne" -terme auparavant utilisé par les patrons, les chefs, les journalistes, les communicants. j’ai connu un responsable RH qui n’utilisait plus de synonymes à "collaborateur" (appauvrissement du vocabulaire, voir plus haut).
j’ai même vu l’usage du mot collaborateur dans CFDT magazine pour présenter un groupe d’entreprises
En plus de l’émission vous avez les stages de désintoxication du langage par la scop du pavé, celle qui fait les conférences gesticulées !