Accueil > Chypre, un tsunami européen

Chypre, un tsunami européen

par Michel de Grandi et Anne Bauer

Publie le lundi 18 mars 2013 par Michel de Grandi et Anne Bauer - Open-Publishing

Stupéfaits, les épargnants chypriotes ne sont pas les seuls à être pris au dépourvu par l’accord. Les économistes s’interrogent.

L’accord conclu entre les ministres des Finances de la zone euro sur le plan d’aide de 10 milliards d’euros, assorti d’un prélèvement exceptionnel sur tous les dépôts bancaires, a fait l’effet d’une bombe à Chypre. Les épargnants se sont dits « consternés » par le schéma mis en place qui va taxer 5,8 milliards sur les quelque 70 milliards de dépôts, dont la moitié environ appartiennent à des non-résidents.

Beaucoup ont tenté, sitôt l’annonce, de retirer leurs liquidités dans les distributeurs de billets, car les banques sont fermées jusqu’à mardi, ce lundi étant un jour de congé traditionnel. Mais les sommes destinées à être prélevées sur leur épargne sont déjà mises de côté par les banques. Les déposants sont d’autant plus déstabilisés que le nouveau président Nicos Anastasadies s’était élevé publiquement contre la mise à contribution des dépôts auprès des Européens « ma première réaction a été un choc », a ainsi déclaré le président de la Commission des Finances au Parlement, Nicholas Papadopoulos, « cette décision est bien pire que ce à quoi nous nous attendions et contraire à ce que nous affirmait le gouvernement ».

Les économistes ne savent pas comment les investisseurs vont réagir ni ce qui va se passer mardi à la réouverture des banques. En tout cas, l’avenir de l’économie chypriote, en partie fondé sur ses services financiers généreux et sur une fiscalité plus qu’attractive, est remis en question. Néanmoins, peu d’experts redoutent un « bank run », un retrait massif de dépôts bancaires dans d’autres pays dit de la « périphérie ».

Parmi les plus concernés, le ministre des Finances de l’Irlande a assuré que cette mesure « à un coup » ne s’appliquerait pas aux déposants irlandais. Quant au ministre espagnol de l’économie, il s’est félicité de l’accord qu’il trouve « bon car il résout le problème de Chypre ». A l’étranger, l’émoi est aussi important. Alors que le gouvernement britannique a promis d’indemniser ses ressortissants à Chypre et notamment ses militaires, (3.500 hommes), nombre d’économistes dénoncent une décision désastreuse des Européens, qui remet en cause la confiance dans les banques. « Cette décision est très dangereuse, inappropriée, unilatérale et impromptue » déclare Marc Touati président du cabinet ACDEFI tout en précisant que l’impact pour les banques françaises devrait être faible.

D’autres parlent d’irresponsabilité, en soulignant qu’après avoir enclenché la restructuration de la dette grecque qui a provoqué le doute sur les obligations souveraines, l’Europe s’attaque à présent aux dépôts bancaires. « Avec une économie déjà endettée à 85 % du PIB, un secteur bancaire hypertrophié, une fiscalité de dumping, des pratiques bancaires peu transparentes, un prélèvement sur les dépôts de tous est la solution la plus juste », plaide un négociateur.

http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/0202647363750-chypre-un-tsunami-europeen-549816.php