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Culture : LETTRE OUVERTE... ASSEZ D’HYPOCRISIE !

Publie le mercredi 25 juin 2003 par Open-Publishing

LETTRE OUVERTE DES REALISATEURS AUX PARTENAIRES
SOCIAUX ET AUX MINISTRES DE L’INDUSTRIE ET DE LA
CULTURE : ASSEZ D’HYPOCRISIE !

Réalisateurs, directeurs de production, comédiens, chefs opérateurs,
ingénieurs du son, machinos, électros, régisseurs, monteurs,
décorateurs, costumiers, maquilleurs, coiffeurs, musiciens, cascadeurs la liste des métiers indispensables à la création d’une oeuvre audiovisuelle ou cinématographique est longue, très longue.

Toutes ces professions sont actuellement menacées par une volonté de
restructuration de leur statut social.

La méconnaissance de la nature de nos métiers par les représentants du MEDEF les mène à vouloir aujourd’hui séparer en deux annexes
distinctes l’ensemble des personnes qui forment les équipes de cinéma.
Nous sommes tous, avant-tout, des techniciens. Nous devons donc être
soumis à la même règle et bénéficier des mêmes droits. Nous dissocier
et nous opposer ne peut se comprendre que par la volonté à terme
d’écarter ou d’écraser les plus fragiles d’entre nous.

De plus le MEDEF, en voulant restreindre les conditions ouvrant le
droit à une indemnisation au chômage entre deux films et en diminuant
brutalement les temps maximaux d’indemnisation (6 mois au lieu de 12
précédemment) contribue de façon irresponsable à scier la branche sur
laquelle repose toute la diversité de la création cinématographique
indépendante.

En effet, toute production cinématographique et audiovisuelle, comme
toute création artistique, a besoin d’une part importante de temps de
travail invisible : écriture, repérage, documentation, auditions,
lectures, répétitions, recherche des partenaires financiers,
négociations toujours plus longues et aléatoires avec les diffuseurs.
Si pendant ces périodes d’élaborations souterraines, intimes, peu
spectaculaires, nous ne pouvons plus compter sur un minimum
d’indemnité et de protection sociale, on verra disparaître bon nombre
d’oeuvres qui sont le vivier de cette fameuse diversité culturelle
pourtant défendue en principe avec acharnement par l’ensemble des
politiques et responsables économiques de ce pays.

A terme cette disparition ne pourra qu’entraîner dans sa chute et
dégrader durement la multitude des secteurs d’activité qui dépendent
directement ou indirectement de la création et dont les personnels
sont, eux, majoritairement employés à temps plein : critiques,
journalistes, distributeurs, programmateurs de cinémas ou de
télévisions, directeurs de salles, personnels des festivals, attachés
de presses, publicitaires, affichistes, industries techniques,
laboratoires, auditorium, éditions vidéo et DVD, bureaux d’accueil de
tournages, associations et institutions diverses et variées : CNC,
ministère de la Culture, DRAC, société d’auteurs, académie des
Césars... sans compter tout le commerce alentour que nous contribuons
à faire vivre.

Tous, nous avons conscience des dérapages existants et tous nous en
connaissons les causes : depuis vingt ans en effet l’ensemble de la
production des nouvelles chaînes privées, toute la "production de
flux", les productions de séries et de TV réalité, et même
d’importants secteurs du service public ont transformé par milliers
des emplois fixes en emplois intermittents alors que dans la réalité
ces personnels travaillent à l’année, à poste fixe.

C’est auprès de ces sociétés fautives qu’il faut porter le fer. Et non pas en menaçant un système original d’assurance chômage grâce auquel nous avons pu maintenir, une diversité artistique unique, à un rythme de production annuel sans équivalent.

Si une réforme est en effet à chercher, il faut tenir compte de la
nature même de ce métier : le cinéma est un art, le septième art, mais
aussi une industrie, une industrie de prototype, qui répond à une
alchimie très particulière où voisinent entreprises individuelles,
artisanales, micros et grosses PME, groupes à plusieurs milliers
d’employés. Sous prétexte d’épurer les comptes de l’assurance chômage
du spectacle, le MEDEF va briser ce délicat équilibre en le faisant
rentrer de force dans un cadre qui n’est pas adapté à sa riche
complexité.

Il est urgent que tous les acteurs concernés (des auteurs aux
producteurs en passant par les diffuseurs et pouvoirs publics) se
réunissent pour trouver des solutions enrayant ce sous-financement
chronique des oeuvres et pour sauver la production indépendante
sinistrée. Et non pas, une fois de plus, laisser le MEDEF, dans sa
logique comptable aveugle, s’attaquer aux seules forces d’initiative à la base de la diversité culturelle : celle des créateurs et des
professionnels qui les entourent.

Nous le savons tous : si la création devient uniforme c’est la
civilisation qui s’appauvrit. C’est la liberté du public de pouvoir
choisir parmi une diversité d’oeuvres qui est en cause !

Liste de premiers signataires :
Claude DUTY, Pascal THOMAS, Luc LECLERC DU SABLON, Laurence
PETIT-JOUVET, Jean-Pierre THORN, Dominique BOCCAROSSA, Marie VERMILLARD, Christian VINCENT, Jean-Henri ROGER, Christophe
RUGGIA, Jean-Paul SALOME, Mariana OTERO, Alain RAOUST,
Henri HERRE, Marie-Claude TREILHOU, Sarah BENILLOUCHE,
Anne THERON, PhilomËne ESPOSITO, Nicolas JOUVIN, Anna
KENDALL, Myriam AZIZA, Agnès BERT, etc...

URGENT : Faites signer largement autour de vous. Ce texte est destiné
à publication avant le 26. Renvoyez vos signatures par mail :
s.r.f@wanadoo.fr