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Dé-Fête des Mères ou victoire du sexisme ?

Publie le jeudi 22 mai 2003 par Open-Publishing
1 commentaire

En cette période de remise en cause de la retraite, mais aussi des notions
de travail et de temps de loisir, personne ne songe à s’interroger sur la
situation des femmes qui travaillent gratuitement, du matin au soir (et
parfois la nuit) à s’occuper des enfants, de la maison et du mari, et ce
bien souvent parallèlement à leur emploi ; à quelle retraite auront droit
ces mères qu’à grand renfort de publicités on célèbre aujourd’hui ? Et à
quelles réalités sociales, politiques et économiques renvoie la maternité
dans le système patriarcal actuel ?

Il s’agit ici de dénoncer ce qui se cache derrière la Fête des Mères. Bien
sûr, on s’attendrit devant un enfant qui offre, sans arrière pensée, un
collier de nouilles fait de ses mains à sa maman ; cependant, n’oublions pas
la dimension commerciale de cet événement qui participe de la frénésie
consommatrice à laquelle on pousse, de plus en plus tôt, les individu-e-s.
Via une publicité toujours plus normative et envahissante, les enfants sont
exhorté-e-s à acheter un robot ménager ou un aspirateur à leur mère qui,
bien sûr, se doit d’être ravie et d’essayer le cadeau au plus vite…

Nous ne pouvons pas non plus ignorer l’officialisation de cette fête par
Pétain, avec tout ce que peut comporter cette référence d’idéologie
fascisante ; le régime nazi favorisait par dessus tout la femme-mère, au
détriment de l’individue, à l’instar de l’extrême droite de Le Pen, Mégret
et autres Boutin.

Mais c’est aussi et surtout une vision étriquée de la parentalité qui nous
est proposée à travers l’image de la bonne mère, celle qui se voue
entièrement à ses enfants et qui privilégie son foyer à sa propre existence.
La maternité dans son acceptation la plus aliénante serait ainsi le seul
mode d’existence accordée aux femmes, celles qui, par choix ou par
incapacité, n’ont pas d’enfants étant stigmatisées et culpabilisées. De
même, les autres formes de parentalités sont exclues du schéma imposé,
faisant de l’hétérosexualité et du couple - si possible marié - l’unique
modèle possible. Ces représentations réactionnaires et réductrices se
retrouvent dans les discours politiques actuels ; ainsi, le projet de
supprimer les écoles maternelles fait écho d’une part à la survalorisation
du modèle de la femme au foyer, et d’autre part au mythe selon lequel ce
serait aux femmes d’arrêter de travailler car leur salaire ne serait qu’un
salaire d’appoint comparé à celui du mari. Or, et bien que les inégalités de
salaire subsistent et qu’à travail égal, les femmes gagnent toujours en 2003
25% de moins que les hommes, il est démontré que dans bien des couples, le
salaire de la femme est égal, voire supérieur à celui du mari. Cela arrange
cependant tout le monde de légitimer ainsi l’exploitation économique des
femmes, quand ce n’est pas par un partage « naturel et biologique » des
tâches (le fameux « gène du ménage » féminin). De même, ne minimisons pas la
remise en cause de plus en plus forte du droit à l’IVG et à la contraception
non seulement par les extrêmes-droites et les intégrismes religieux, mais
aussi par les politiques qui, par le biais de mesures insidieuses, menacent
cette avancée qui avait marqué le début d’une réappropriation de leur corps
par les femmes.

Ne légitimons pas l’oppression dont sont victimes les femmes, et refusons de
perpétuer cette fête : non à la fête des mères humiliées, fatiguées,
opprimées. Oui au libre choix de nos modes de vie, en dehors de tout modèle
imposé.

CCP et Mix-Cité
(cette version du texte n’est pas définitive)

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Messages

  • J’aime bien ton article, mais...
    Il te faudra peut-être remonter plus loin que Pétain pour répondre aux questions que suggèrent la situation des femmes, aujourd’hui comme hier, ici comme ailleurs.

    Et là où nous sommes rendus aujourd’hui, il te faudra même certainement dépasser toute justification politique, économique, religieuse ou sociale.

    Peut-être ces réponses, doit-on, hommes et femmes, les chercher chacun avec soi-même d’abord. Pour convaincre, il faut soi-même être convaincu. Pour l’instant, j’ai surtout constaté beaucoup d’hypocrisie.

    J’aimerai être une femme libérée mais malgré moi, j’aime les colliers de nouilles.
    Tu vois ??

    Lina