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Equipe de campagne : Hamon joue définitivement le congrès

par Francois Cocq

Publie le mardi 14 février 2017 par Francois Cocq - Open-Publishing

Benoît Hamon vient d’annoncer la composition de son équipe de campagne. Et une fois encore il refuse de trancher et préfère rester dans cet entre-deux qui prétend faire du neuf avec de l’ancien. Aucune famille du PS n’est écartée : une touche de Hollande par ci, un zeste de Valls par là, et surtout Jean-Marc Germain nommé co-directeur de campagne comme pierre angulaire de la recomposition à venir du PS. Bref tout ce qu’il faut pour que sa campagne présidentielle soit avant tout une rampe de lancement pour conquérir le parti.

La nomination de Jean-Marc Germain comme co-directeur de campagne est un symbole fort envoyé en la matière. En fidèle de Martine Aubry, Jean-Marc Germain a traversé le quinquennat en étant là la pointe avancée de la politique hollandaise, plus loin le rempart contre la mise en minorité de la politique menée, toujours le pion placé pour privilégier la tambouille interne et préparer la guerre des chefs à venir. Jean-Marc Germain a ainsi été l’un des précurseurs de la politique de casse sociale durant le quinquennat Hollande. Qui ne se souvient pas qu’il fût dès 2013 rien moins que le rapporteur du texte sur le projet de loi pour l’Accord national interprofessionnel (ANI), texte qui détricote le droit du travail, facilite les licenciements économiques, impose la mobilité interne, installe les accords « compétitivité-emploi », réduit les protections des salariés… François Hollande inaugurait alors avec le texte défendu bec et ongles par Jean-Marc Germain sa longue série des passages en force malgré l’opposition des syndicats de lutte et au premier rang desquels la CGT, FO et la FSU, mais aussi malgré la mobilisation populaire contre cet accord.

Complaisamment ensuite classé parmi les frondeurs, c’est le même Jean-Marc Germain qui menaçait et tonnait en avril 2014 à la veille de la deuxième investiture de Manuel Valls à Matignon, non sans pour autant défendre la politique de François Hollande : « On a considéré que la politique qui était menée, la politique économique, chose qu’on a évidemment soutenue et dont on est très fiers… ». Comme de bien entendu, Jean-Marc Germain n’allait pas plus loin que le coup de menton et rentrait aussitôt dans le rang en votant au final la confiance. Plus près de nous, c’est lui qui a sauvé la loi El Khomri en refusant d’apporter au dernier moment son soutien au dépôt d’une motion de censure. Le 11 mai 2016, alors que Manuel Valls avait dégainé le 49-3 pour faire passer le texte, 56 signatures sur les 58 nécessaires avaient été rassemblées pour déposer une motion de censure qui aurait permis de faire tomber le texte. Jusqu’au bout, certains ont attendu les paraphes promis par les deux aubrystes Jean-Marc Germain et François Lamy. Mais point trop n’en faut : pour disputer demain l’appareil, une posture vaut mieux qu’une signature et la loi El-Khomri peut dormir sur ses deux oreilles tant que ceux-là seront aux manettes.

Quelques figures de la hollandie complètent le tout, comme Frédérique Espagnac, ancienne attachée de presse du chef de l’Etat devenue sénatrice (…) et qui a défendu jusqu’au bout la candidature de François Hollande pour un second mandat , confirmant le 2 décembre 2016 sur France Bleu : « Est-ce que j’ai défendu son bilan ? Complètement et j’assume ». Ancienne porte-parole du PS, rien ne changera vraiment pour elle puisqu’elle officiera désormais comme porte-parole de Benoît Hamon, comme un symbole de la superposition de l’ancien PS et de son nouveau candidat.

Manuel Valls a quant à lui pris soin de placer ses pions aux postes clés : Luc Carvounas, à qui il a d’abord été proposé d’être rien moins que le porte-parole du candidat, animera finalement le conseil parlementaire. Ce très proche de Manuel Valls, ardent défenseur de la politique gouvernementale au sénat, est également secrétaire national du PS aux relations extérieures, nouvel intitulé qu’il a lui-même inauguré en lieu et place de secrétaire national au relations unitaires. Il est surtout bien connu pour un jour ses admonestations vulgaires à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon, le lendemain pour ses comparaisons du PCF avec le FN, la veille pour ses coups de canifs méprisants à l’encontre d’EE-LV ou encore ses insultes à l’encontre de la CGT qualifiée en mai dernier sur LCI de « caste gauchisée des privilégiés ». Bref un gage de rassemblement au-delà du PS !

Mais la nomination de Luc Carvounas à la tête du conseil parlementaire prend un tout autre relief si l’on se souvient que le week-end dernier, lors des investitures PS pour les législatives, Benoît Hamon a renoncé à rompre avec les porteurs d’eau du quinquennat Hollande et a laissé réinvestir députés et ministres sortants (23 !) pourtant si prompts à soutenir la politique du chef de l’Etat et de son premier ministre. D’un week-end sur l’autre, Benoît Hamon abandonne donc à celles et ceux qui ont fait la politique de ces cinq dernières années le portage et donc la définition de la ligne politique durant le prochain quinquennat. Il se contente pour sa part de se garder les coudées relativement franches au sein de son équipe de campagne. Ce faisant, Benoît Hamon donne des gages sur un sujet qui n’intéresse personne sinon le PS lui-même : la main-mise sur l’appareil au lendemain de la présidentielle. Par contre, il baisse pavillon sur ce que sera la politique parlementaire à l’issue de la présidentielle. A lui le parti, à Valls le Parlement. Tel est l’enjeu finalement bien futile d’une campagne qui n’a de présidentielle que le nom.

https://cocq.wordpress.com/2017/02/11/equipe-de-campagne-hamon-joue-definitivement-le-congres/