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Goodyear et Maurice Taylor : où est la violence ?
Publie le mercredi 8 janvier 2014 par Open-Publishing4 commentaires

De trop nombreux commentaires s’indignent de la « violence » subie par les deux cadres retenus par des salariés de Goodyear Amiens. Des propos qui ne doivent pas occulter la souffrance sociale ni l’extrême violence des paroles de Maurice Taylor, PDG de Titan, un habitué des pires débordements verbaux.
A part cracher son venin, le PDG de Titan n’a plus rien à faire avec Goodyear. Il s’était déclaré intéressé un temps pour racheter le site d’Amiens Nord, mais avec zéro salarié. Pourtant, les RTL et Europe 1 lui tendent encore leur micro pour rajouter la provocation à la crise sociale que vivent les travailleurs de Goodyear. "C’est vraiment stupide", a-t-il ainsi déclaré. "Aux Etats-Unis, c’est du kidnapping. S’ils faisaient ça là-bas, ils iraient en prison. Pourquoi ne vont-ils pas faire un hold-up dans une série de banques françaises ? Ainsi, ils pourraient racheter Goodyear. Ils sont fous."
Une rengaine que le patron ressert à chaque fois. Alors que le projet de reprise du site par Titan était encore d’actualité, la CGT s’était proposé d’aller jusqu’aux Etats-Unis, pour discuter avec le patron. "Pourquoi je parlerais à ces fous ?" avait-il réagit, qualifiant le syndicat de "stupide" et traitant ses membres de "timbrés". En février dernier déjà, il insultait "ces soi-disant ouvriers" menés par des "barjots du syndicat communiste", qui en plus ne travaillent pas : "les salariés français touchent des salaires élevés mais ne travaillent que trois heures. Ils ont une heure pour leurs pauses et leur déjeuner, discutent pendant trois heures et travaillent trois heures." Résultat, Maurice Taylor avait annoncé à Arnaud Montebourg : "Titan va acheter un fabricant de pneus chinois ou indien, payer moins d’un euro l’heure de salaire et exporter tous les pneus dont la France a besoin. Vous pouvez garder les soi-disant ouvriers. Titan n’est pas intéressé par l’usine d’Amiens nord."
"Il n’y a plus rien à perdre et qu’on ne gagne plus rien"
Elle est là la violence, dans ces propos, le licenciement de près de 1200 salariés, dans le silence de la direction du site, du gouvernement, chez Moscovici qui ce matin n’avait que l’expression "baisse des charges salariales" à la bouche… C’est pourquoi la CGT a décidé de jouer le tout pour le tout, pour "que la direction revienne à la table des négociations", parce qu’"il n’y a plus rien à perdre et qu’on ne gagne plus rien" expliquait Franck Jurek. Bien seul, le secrétaire national du Parti communiste français, Pierre Laurent, trouve parfaitement "légitime" la colère des salariés de Goodyear. "Je les soutiens, je les ai soutenus depuis le premier jour. Moi, ça me tord les tripes quand j’entends ça. Il faut bien voir que c’est des gens dont la vie s’arrête (...) et personne ne les écoute. Ils sont au bout du rouleau, ils sont acculés (...) Je comprends leur colère."
http://www.humanite.fr/social-eco/goodyear-et-maurice-taylor-ou-est-la-violence-556448
Messages
1. Goodyear et Maurice Taylor : où est la violence ?, 8 janvier 2014, 10:05, par momo11
De trop nombreux commentaires s’indignent de la « violence » subie par les deux cadres retenus par des salariés de Goodyear Amiens.
La violence est capitaliste,et my taylor is riche.Pour parler poliment qu’il se mele de son cul avant que l’on s’en occupe...............
2. Goodyear et Maurice Taylor : où est la violence ?, 8 janvier 2014, 11:50, par pilhaouer
C’est surtout ça qui mérite attention.
Le journal du soir de France2 commençait par les interrogations de Pujadas sur les sanctions qu’encourent ces ouvriers qui osent demander des comptes aux responsables qu’ils ont sous la main.
3. Goodyear et Maurice Taylor : où est la violence ?, 8 janvier 2014, 15:11, par ALTERUN
Taylor il doit pas craindre les lendemains avec tout ce qu’il a dû ramasser sur le dos des salariés (payés au minimum mais c’est déjà beaucoup trop pour les patrons) qu’il a exploité avant de les virer ou qu’il exploite encore (en les mettant en concurrence) avant de les lourder...
Il est pas obligé de s’occuper de la France ! On le connait même pas !
Tiens ils sont fort ces patrons... certains ne payent même pas les heures supplémentaires que font leur salariés... mais ils se plaignent toujours du coût du travail... alors qu’ils n’en supportent pas la totalité !
Sinon il faut être compétitif... comme le gouvernement avec le MEDEF !
1. Goodyear et Maurice Taylor : où est la violence ?, 8 janvier 2014, 22:33, par CD/PF
Séquestration syndicale et éthique de situation. P Franchet & C Delarue
Les salariés de Goodyear Amiens Nord ont retenus 2 cadres de leur entreprise pendant un jour et une nuit pour obtenir l’ouverture de négociations pour connaître une éventuelle reprise de l’entreprise ou à défaut des indemnités substantielles de départ.
A de très rares expressions près, ce fut l’occasion d’un déferlement de haine médiatique dirigée contre ces salariés« irresponsables » qui entravent « la liberté de circulation ».
Nous avons participé déjà à une séquestration collective dans le privé (en 1996 à l’usine Panpharma à Fougères-Ille et vilaine) à la demande des salariés de l’entreprise. Les bâtiments avaient brulé. Le patron voulait licencier les salariés sans indemnité ni préavis en invoquant un « cas de force majeure ». En fait, l’entreprise, spécialisée dans les médicaments génériques, avait omis de payer l’assurance, malgré des bénéfices très conséquents. Les salariés risquaient de perdre leur emploi et de se retrouver sans rien du jour au lendemain.
Ce type de situation extraordinaire (retenir des employeurs) détonne avec les pratiques syndicales habituelles que nous connaissons dans la fonction publique et ne peut se comparer aux envahissements massifs de comité paritaire dans le public afin de faire pression sur un directeur public et encore moins à des blocages d’unités de services. Le sentiment de crise exceptionnelle est très intense dans le premier cas, moins dans les autres.
La décision syndicale d’une séquestration illégale d’un directeur, d’un patron, d’un responsable d’une unité de travail privée ou publique ne se prend pas à la légère. Qu’il y ait ou non « derrière » la « finance ». Ce n’est pas un jeu, ni l’initiative isolée d’une personne en détresse soudainement incapable d’assurer une ordinaire maîtrise de soi ; c’est nécessairement une décision collective, mûrement réfléchie quant à ses implications. Elle intervient toujours alors que tous les autres moyens de sortir de l’ornière ont été pris en vain. Le sentiment d’exception est vif ! Les travailleurs concernés (avec parfois leur famille) ont un vif sentiment d’injustice doublé de celui d’être les victimes de la situation.
Décision grave mais aussi décision prise très souvent dans un contexte tendu, d’affrontements et d’exaspérations. Dans les collectifs de résistance qui continuent la lutte il y a souvent de l’agressivité, de la colère qui se mêle à d’autres sentiments. Mais pour autant, il est bien rare, que ces séquestrations aux formes diverses, débouchent sur des humiliations ou des violences directes à la personne. Ici tout dépend de la « culture d’entreprise ». Ici ce qu’il importe de souligner c’est que, bien souvent, malgré l’énervement et la fatigue, une certaine dignité humaine continue d’être appliquée. Le patron a droit au café comme nous, il mange comme on mange, il dort comme on dort. Il n’est pas humilié, insulté, injurié. Pas de racisme, pas de sexisme ! Si une plaisanterie douteuse surgit (souvenir : « alors, guignol, tu fais moins le malin ») elle est immédiatement critiquée par ceux ou celles qui gèrent au plus près le conflit. En somme il y a bien une déontologie de la lutte illégale. Le philosophe Badiou dirait : une éthique de situation.
C’est qu’une séquestration a des phases tendues et d’autres plus relâchées. Il faut savoir si le patron est près à lâcher sur certaine revendications. Quand un syndicaliste mène le questionnement l’autre regarde comment le patron réagit. Est-ce qu’il s’énerve un peu avec ses jambes ou avec son stylo ou sa petite cuillère. Est-ce qu’il lâche une nouvelle interprétation de l’accord ? Il y a un côté interrogatoire de police ! Pour une fois, c’est un col blanc qui est du mauvais coté. Mais ce n’est pas un film !
Aujourd’hui, les salariés sont soumis à des licenciements de la part d’entreprises qui sont viables mais dont la stratégie financière conduit à la liquidation d’unités de travail, laissant sur le carreau des familles.
A la violence patronale du licenciement (dont il n’est jamais parlé) et quand le jeu démocratique et les démarches juridiques ne donnent rien, il est parfaitement légitime que la réponse sociale sorte des « clous » de la légalité ! Le « partenariat social » (être d’accord sur les règles du jeu) a des limites que le patronat transgresse sans état d’âme.
Il n’a en retour que la réponse à sa propre violence !
Pascal Franchet et Christian Delarue, syndicalistes CGT aux finances publiques