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ITER capitale de l’esclavage moderne ? - Manosque (04)

par samuel

Publie le lundi 9 décembre 2013 par samuel - Open-Publishing

Après une année passée à faire remonter des informations au sujet du scandale de l’exploitation de travailleurs « détachés » sur le chantier Iter, la presse locale a mis en UNE ce dossier à l’occasion de l’AG 2013 de la Commission Locale d’Information (CLI) d’Iter.

Dans le premier article (à lire plus bas), celui de La Marseillaise le journaliste dénonce les multiples dangers de l’exploitation de « travailleurs détachés » sur le chantier Iter rapporte les propos des syndicalistes et cite les intervenants à l’AG en pointant certaines contradictions ;

dans le second, celui de La Provence la journaliste présente un dossier « contradictoire » sur ce sujet, sont confrontés les propos des syndicalistes locaux, de Gilles Savary député PS (rédacteur d’un rapport et d’une proposition de loi contre cette pratique de « dumping social » qui met en danger le système de protection social français. Pour voir la vidéo cliquez ici) avec celle des exploitants et techniciens du projet Iter et de certains fonctionnaires de l’État (on peut noter par contre l’absence du point de vue des élus locaux et membres peu assidus de la CLI comme Claude Domeizel (PS), Christophe Castaner (PS) ou Martine Carriol (PCF)…). Rappelons que cette dernière a pourtant fait adopter en décembre 2012 avec le Front de gauche un vœu au Conseil régional s’inquiétant de ces pratiques au sein du chantier Iter...

Au milieu du florilège d’articles sur la question des travailleurs « détachés » faisant écho aux discussions engagées sur ce sujet au parlement, nous mettons en ligne ici deux articles du journal Le Monde. Le premier signale la lourde condamnation, pour la première fois, d’un promoteur pour « complicité de travail illégal » et le second offre un panorama en 5 questions sur le sujet.


Vous trouverez ici la liste des articles parus et qui nous ont semblé pertinents sur le sujet des travailleurs « détachés » ou « low cost » sur le chantier ITER et ailleurs...


Article de Morgan Termeulen paru dans La Marseillaise du 18 novembre 2013


L’assemblée générale de la Commision Locale d’information d’Iter s’est tenue jeudi dernier au château de Cadarache. La question du dumping social et des plus de 3 000 travailleurs détachés attendus sur le chantier en 2014 a de nouveau été posée sans réponse satisfaisante de la part des responsables du projet.

On marchait sur des œufs jeudi dernier lors de l’assemblée générale de la Commision Locale d’information d’Iter (CLI Iter) au château de Cadarache. Après que des syndicalistes ont alerté l’opinion publique sur les travailleurs détachés qui, au nombre de 3 500 viendront prochainement travailler sur le chantier du réacteur expérimental dans des conditions de rémunération et de travail qui posent question, faisant peser sur l’organisation Iter une suspicion de dumping social.

Dans la lettre mensuelle d’information de la CLI d’octobre dernier, qui rend compte de façon particulière de la réunion publique du 3 juillet dernier à Vinon-sur-Verdon : « Alain Maillat (…) a réussi à garder le contrôle d’une la réunion avec fermeté et courtoisie. Car plusieurs personnes étaient venues non pas pour obtenir des informations ou exprimer des inquiétudes mais pour proclamer leur opposition au projet et utiliser la réunion comme une tribune. » Il s’agissait en fait de syndicalistesCGT, de membres d’associations diverses et du comité mannequin contre le chômage, venus interroger la direction d’Iter sur les conditions de travail et d’hébergement des salariés détaché (voir notre édition du 9 juillet).

Quand l’inspection du travail inspecte

Pour Alain Fayol, directeur adjoint de la DIRECCTE PACA, venu faire une premier bilan du contrôle du chantier par l’Inspection du Travail, tout va pour le mieux : « Nos deux agents sur le terrain ne peuvent courir tout le chantier ; aussi privilégions-nous le travail en amont, » faisait-il observer. Un travail qui consiste essentiellement dans le contrôle des badges aux entrées et sorties du chantier. Pour le représentant de l’Inspection du Travail, les observations faites, surtout en matière d’hygiène et de sécurité, sont toujours respectées. Des propos qui font réagir le représentant de la CGT à la CLI Alain Champarnaud : Le CHS (Comité d’Hygiène et de Sécurité) sans CT, puisqu’il s’agit encore une fois d’un particularisme d’Iter, s’occupe des salariés sous-traitants aussi ? » Le représentant syndical s’interrogeait sur les conditions de contrôle lorsque le chantier recevra lies 3 000 travailleurs détachés alors que même à l’heure actuelle, la DIRECCTE semble incapable de procéder à tous les contrôles prévus. Pour Alain Fayol, le statut à part des travailleurs détachés fait que la DIRECCTE n’est pas compétente. Il cède la parole à un cadre d’Iter.
La question du CHS pas CT de l’organisation Iter posait aussi la question de la représentativité des travailleurs détachés. Ont-ils des instances représentatives ? Des élus du personnel ? Ont-ils le droit de s’affilier à un syndicat français ?. De revendiquer pour de meilleures conditions de travail et de rémunération ? De faire grève ? Autant de questions qui demeureront sans réponse, si ce n’est par l’utilisation de la langue de bois ou des silences.

Lutte contre le travail dissimulé ?

Le thème suivant était la lutte contre le travail dissimulé, avec Sylvain Huttin, représentant l’URSSAF PACA. Pour ce dernier, l’URSSAF est dans une autre approche. Celle-ci consiste à contrôler les effectifs en prélevant des dossiers au hasard dans les bureaux d’Iter afin de les comparer aux bases de données de l’URSSAF : « Vous comprenez, on est dans une autre approche, » osait-il. Tout va bien, alors. « J’ai comme l’impression d’un peu de langue de bois dans votre discours. Il n’y a sans doute pas beaucoup de travailleurs dissimulés à Iter mais des travailleurs exploités, oui », persiflait Jean Gonelle de Far Sud, association environnementale.
Alain Champarnaud interrogeait quant à lui sur la convention signée entre Iter et Urssaf : « quelle nécessité si Iter n’est pas un employeur ? » Le représentant de la CGT posait ensuite carrément la question du dumping social que posent les travailleurs détachés : « Comment procède l’URSSAF pour collecter les cotisations sociales des travailleurs détachés ? », interrogeait-il courtoisement. On ne connaîtra pas la réponse : « Le principe est que les entreprises européennes peuvent aller partout en Europe chercher des marchés. Pour nous, il s’agit de contrôler ces travailleurs afin de détecter de faux détachements », répondait Sylvain Huttin en esquivant la question de savoir si oui ou non ces travailleurs détachés paient des cotisations sociales au même titre et sur la même assiette qu’un travailleur français.


Commentaire
Prométhée enchaîné

La mythologie grecque nous narre que Prométhée déroba le feu aux dieux de l’Olympe pour le donner aux hommes. En plus de ce feu, il leur enseigna les mathématiques, l’agriculture, l’écriture et le dressage des animaux afin que l’homme puisse sortir de son animalité et marcher vers la civilisation. Pour cela, il fut condamné à être enchaîné à un rocher et à ce que son foie soit dévoré par un rapace pour l’éternité.
Le mythe grec, de même que la genèse dans l’Ancien Testament, enseigne que l’homme, pour faire évoluer sa technique et ses connaissances, doit lutter sans cesse contre les forces de l’obscurantisme.
En notre début de xxie siècle, grâce aux outils de la raison que nous ont légués ces mêmes Grecs anciens, l’humanité est sur le pont de « dérober aux dieux » la puissance qui se trouve au cœur même de l’atome, ce qui permettrait un gigantesque progrès de la civilisation humaine, délivrée à jamais des chaînes de la pénurie énergétique. Pour mener ce projet à bien, des milliards d’investissements sont nécessaires.
Mais voilà qu’au moment où ce projet ambitieux est sur le point de se concrétiser, la finance pointe encore le bout de son nez. Au lieu d’associer les travailleurs à la grandeur potentielle du projet, on tente par tous les moyens de faire des économies d’échelle en faisant venir des travailleurs d’autres pays, ce qui pose bon nombre d’interrogations. Au lieu d’associer les populations au projet Iter, on favorise une légitime défiance de l’opinion publique.

Morgan Termeulen


Lire l’article sur le site de La Marseillaise