Accueil > L’avenir du gouvernement en suspens au lendemain de la débâcle de la droite

L’avenir du gouvernement en suspens au lendemain de la débâcle de la droite

Publie le lundi 29 mars 2004 par Open-Publishing

Jean-Pierre Raffarin a rencontré, lundi 29 mars, le président Jacques Chirac et reçu plusieurs "ministrables", multipliant ainsi les signaux sur son possible maintien à Matignon, malgré la déroute de la droite aux élections régionales.

L’Elysée a paru accréditer cette hypothèse en milieu de journée par une déclaration laconique mais dont chaque mot était de toute évidence soigneusement pesé : "Le président de la République travaille avec le premier ministre aux décisions qu’il sera amené à prendre dans les tout prochains jours. "

Après le cinglant désaveu des régionales, le chef de l’Etat doit choisir s’il change ou non de premier ministre, et quelle ampleur donner à un remaniement ministériel et à une inflexion de la ligne politique et économique suivie depuis deux ans. Son entourage reste cependant muet sur ses intentions.

En milieu de matinée, Jean-Pierre Raffarin a pris soin d’éviter journalistes et photographes postés devant les portes de Matignon et de l’Elysée pour se rendre à son rendez-vous avec le chef de l’Etat, avec qui il est resté plus d’une heure. C’est aussi par une entrée secondaire - vraisemblablement par les jardins de Matignon - qu’il est revenu à son bureau vers 11 h 30 sans qu’aucun journaliste ne le voie.

Parallèlement, dans les cabinets ministériels, personne n’ose prédire la décision de Jacques Chirac. Des conseillers croient au maintien de Jean-Pierre Raffarin à Matignon. "Hier soir, Jacques Chirac et l’Elysée avaient l’air déterminés à le garder à Matignon", dit l’un des conseillers du premier ministre. "Je pense qu’on reste", estime un autre.

D’autres sont plus dubitatifs. "Tout le monde est suspendu à la décision présidentielle", confie l’un, pour qui "on voit mal comment le président pourrait se contenter de changer quelques ministres". "Je suis habitué à la politique. Et pourtant c’est une situation inédite, renchérit un familier des cabinets ministériels. Personne ne sait ce qui va se passer." Dans certains ministères, les conseillers "rangent leur bureau", au cas où, mais n’en savent pas plus.

A 13 h 30, la déclaration de l’Elysée semble faire pencher la balance vers le maintien de Jean-Pierre Raffarin à Matignon.

"SEREIN, GRAVE ET DÉTERMINÉ"

De fait, le secrétaire d’Etat aux transports, Dominique Bussereau, deux "ministrables" dont les noms circulent depuis quelques jours, Xavier Bertrand et Renaud Donnedieu de Vabres, ainsi que le porte-parole du gouvernement, Jean-François Copé, ont été reçus par le premier ministre à partir de 15 heures.

Dominique Bussereau est un proche de Jean-Pierre Raffarin. Xavier Bertrand est secrétaire général adjoint de l’UMP chargé des débats de société et député de l’Aisne. Il a mené le débat sur les retraites pour le parti chiraquien et il est pressenti pour mener celui sur la réforme de l’assurance-maladie. Quant à Renaud Donnedieu de Vabres, il est porte-parole de l’UMP et secrétaire général adjoint du parti chiraquien, chargé du débat interne et de l’animation. Il a fait partie quelques semaines du premier gouvernement Raffarin avec le portefeuille des affaires européennes, qu’il pourrait retrouver. Il a dû quitter le gouvernement en juin 2002 après sa mise en examen dans une affaire de financement politique, pour laquelle il a été condamné à une amende.

Dominique Bussereau, Xavier Bertrand et Renaud Donnedieu de Vabres sont repartis une heure plus tard l’air détendu mais muets. Pendant leur entretien avec Jean-Pierre Raffarin, les directeurs de cabinet du gouvernement ont tenu pour leur part leur réunion hebdomadaire, comme si de rien n’était. "Certains pensaient que la réunion serait annulée", confie un proche de Jean-Pierre Raffarin, pour qui le fait que cette réunion se soit tenue "est un signe".

Ils sont ressortis de cette réunion sans que leurs visages ou leur attitude trahissent la moindre tension. Un peu plus tard, à 17 heures, c’était au tour de l’ancien préfet de police de Paris, Philippe Massoni, conseiller de Jacques Chirac pour la sécurité et secrétaire général du Conseil de sécurité intérieure, d’être reçu à Matignon, tandis que des rumeurs non confirmées font également état de la présence du ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy.

Lors de son entretien, M. Bussereau a dit avoir trouvé le premier ministre "serein, grave et déterminé". "J’ai eu le sentiment qu’il travaillait pour préparer l’avenir mais seul le président de la République peut en décider", a-t-il déclaré lundi sur LCI. Le secrétaire d’Etat a affirmé que les "conséquences politiques" tirées des résultats des régionales aboutiraient notamment à la constitution d’une "équipe politique soudée". "Il y a eu un message politique dans les élections régionales et départementales, il y a maintenant trois ans pour la majorité pour poursuivre son travail", a-t-il conclu.

Personne ne se risque à prédire quand Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin lèveront le voile sur les conclusions qu’ils entendent tirer des résultats des régionales. "Il faut que l’attente soit la plus courte possible", se borne à espérer un proche du premier ministre. Jacques Chirac doit présider mercredi un conseil des ministres, avant de quitter jeudi Paris pour Moscou, où il restera jusqu’à vendredi.

Le chef de la diplomatie, Dominique de Villepin, dont le nom était cité parmi ceux des possibles premiers ministrables, doit quitter mercredi Paris pour Berlin, où se tient la conférence sur l’Afghanistan. Il est attendu ensuite jeudi à Haïti.

LEMONDE Avec Reuters