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La décentralisation, un chantier qui reste "à venir"
Publie le mercredi 31 mars 2004 par Open-PublishingJean-jacques aillagon est souvent accusé de vouloir abandonner aux 
collectivités locales, par manque d’argent, des pans de son ministère. 
Car le monde culturel dans son ensemble préfère traiter avec un 
fonctionnaire de la Rue de Valois plutôt qu’avec un élu local, 
volontiers taxé de despotisme, de népotisme, d’inculture, ou 
d’électoralisme.
"Faux procès", répondent la plupart de nos interlocuteurs, pour qui 
"parler de décentralisation à outrance relève plus du fantasme que de 
la réalité". "Tous les ministres de la culture, souligne Hubert Astier, 
ancien directeur de cabinet de Jacques Toubon, rechignent à 
décentraliser. Comme c’était une priorité du gouvernement Raffarin, 
Aillagon a dû lâcher deux petits morceaux : les services de 
l’inventaire et quelques monuments historiques. C’est modeste." Nos 
observateurs notent plutôt que les grands financements culturels en 
région sont déjà partagés et que les collectivités locales dépensent 
trois fois plus d’argent que l’Etat dans le domaine de la culture.
"ASSUMER LES RISQUES"
Mais les différents partenaires s’accordent aussi pour dire que si le 
ministère paie moins, il doit continuer d’exercer son rôle d’expertise 
et d’arbitrage. Hubert Astier voit néanmoins un mouvement se dessiner : 
"Sans le dire, pour se donner de l’air, les ministres de la culture 
seront à l’avenir amenés à se délester de quelques missions au profit 
des villes et régions." Déjà, le député UMP Laurent Hénard, adjoint au 
maire de Nancy, se réjouit du "grand chantier régional à venir, engagé 
non sans mal par Jean-Jacques Aillagon. Il est grand temps que l’Etat 
dépense moins son argent à Paris et plus en région. La rénovation du 
Louvre a été payée à 100 % par l’Etat, celle du Musée des beaux-arts de 
Nancy à 90 % par les collectivités locales. Il faudra inverser cette 
tendance".
Beaucoup, à gauche, souhaitent également une "accélération du 
mouvement. Parce qu’il est juste que la collectivité décide au prorata 
de ce qu’elle paie, comme il n’est pas anormal qu’un artiste dialogue 
avec un élu plutôt que de se cantonner dans un tête-à-tête avec un 
technocrate parisien".
François Hers, de la Fondation de France, souligne qu’il faut " assumer 
les risques de la décentralisation : il y aura sans doute des abus et 
des dérapages, mais une régulation finira par s’imposer". Sans doute M. 
Aillagon fait-il les frais d’un consensus tacite qui inquiète les 
milieux culturels. On en a déjà un exemple avec "un enseignement 
artistique à deux vitesses" qui se dessinerait entre les cinq écoles 
nationales et la cinquantaine d’écoles territoriales.
Michel Guerrin et Emmanuel de Roux
LE MONDE




